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28/01/2020 | FRANCE | N°18VE02610

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 28 janvier 2020, 18VE02610


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, d'un montant global de 421 205 euros.

Par un jugement n° 1601651 du 29 mai 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregist

rés le 20 juillet 2018 et 17 avril 2019, M. C... B..., représenté par Me D..., demande à la Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, d'un montant global de 421 205 euros.

Par un jugement n° 1601651 du 29 mai 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 20 juillet 2018 et 17 avril 2019, M. C... B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure d'évaluation d'office n'était pas applicable à sa situation ; en cas de défaut de dépôt de la déclaration n° 2074 dans le délai légal, les dispositions de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales rendent obligatoire la notification au contribuable d'une mise en demeure de déposer cette déclaration ; à défaut d'une telle mise en demeure, seule la procédure de rectification contradictoire était applicable ;

- en application de la doctrine exprimée sous la référence BOI-CF-IOR-50-30-20150701, n° 70, la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation prévue au 4° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales suppose qu'une déclaration n° 2074 ait été déposée ;

- le service ne pouvait régulièrement lui adresser une demande d'éclaircissements et de justifications puisqu'il n'avait pas souscrit de déclaration n° 2074 et n'avait pas été mis en demeure de le faire ; pour les mêmes motifs, le service ne pouvait régulièrement le mettre en demeure de répondre à sa demande d'éclaircissements et de justifications ;

- le service ne pouvait régulièrement faire application de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73 4° du livre des procédures fiscales, n'ayant pas régulièrement été mis en demeure de répondre à sa demande d'éclaircissements et de justifications ;

- il n'a pas bénéficié de l'ensemble des garanties liées à la procédure de rectification contradictoire ;

- le service ne lui a pas permis de solliciter la prorogation du délai de réponse prévu au deuxième alinéa de l'article 57 du livre des procédures fiscales ; faute de prorogation de ce délai, il a transmis ses observations au service le 24 septembre 2014, dans le délai légal de 30 jours ;

- les irrégularités de procédure commises par le service doivent entraîner la décharge totale des impositions litigieuses, conformément aux dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée.

Vu le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société civile C. B..., intervenue en 2014, dont M. B... était gérant et associé majoritaire, portant sur les exercices clos en 2011 et en 2012, l'administration a, selon la procédure de rectification contradictoire, notifié à celle-ci des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés. Parallèlement, à l'issue de l'examen de la situation fiscale personnelle de M. B..., qui s'est également déroulé en 2014, l'administration a notifié à ce dernier, selon la procédure d'évaluation d'office prévue au 4° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, des suppléments d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre des années 2011 et 2012, portant sur des minorations de plus-values de cession de valeurs mobilières. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement en date du 29 mai 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a ainsi été assujetti, en droits, majorations et intérêts de retard.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " L'administration peut demander au contribuable des justifications sur tous les éléments servant de base à la détermination (...) des gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux (...) ". Aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes de (...) justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours (...) ". Aux termes de l'article L. 73 de ce livre : " Peuvent être évalués d'office : (...) 4° Les gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux des contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 16 ".

3. Il est constant, en premier lieu, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que M. B... n'a pas transmis, au titre des années 2011 et 2012, de déclaration spéciale relative aux gains nets de cession de valeurs mobilières. Il est également constant que M. B... a inscrit les plus-values sur cessions de valeurs mobilières qu'il a réalisées dans sa déclaration d'ensemble de ses revenus pour l'année 2011 et dans sa déclaration complémentaire de revenus pour l'année 2012. Dans le cadre de l'examen de sa situation fiscale personnelle, l'administration a constaté, s'agissant de la vente à la société Informa Group Holdings Ltd des parts que M. B... détenait à titre personnel dans le capital social de la SARL Euromedicom, d'importantes discordances entre les sommes déclarées par l'intéressé et celles ayant été portées au crédit de son compte ouvert auprès de la banque Barclays. L'administration a alors demandé à M. B..., par lettre du 17 avril 2014, des justifications concernant le montant des plus-values réalisées à cette occasion. Il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté, que M. B... a répondu à cette demande le 28 mai 2014, mais sans toutefois apporter les justifications suffisantes sur ce point. L'administration lui a alors adressé le 16 juillet 2014 une mise en demeure, notifiée le 21 juillet 2014, de lui fournir les justifications demandées. Il est constant que M. B... n'a pas répondu à cette mise en demeure dans les trente jours qui ont suivi la réception de ce courrier. Il en résulte que l'administration était ainsi en droit de procéder à l'évaluation d'office, sur le fondement du 4° de l'article L. 73 du même livre, des plus-values sur cessions de valeurs mobilières réalisées par le requérant en 2011 et 2012.

4. Le requérant soutient que l'administration ne pouvait mettre en oeuvre la procédure susmentionnée avant de l'avoir mis en demeure de transmettre la déclaration spéciale relative aux gains nets de cession de valeurs mobilières au titre des années d'imposition en litige. Toutefois, ni les dispositions précitées des articles L. 16, L. 16 A et L. 73 du livre des procédures fiscales, ni les dispositions des articles L. 66 et L. 67 du même livre invoquées par le requérant, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'administration d'effectuer une telle mise en demeure, pas plus d'ailleurs que de recourir à la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 plutôt qu'à la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73.

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B... ne peut se prévaloir des garanties attachées à la procédure de redressement contradictoire.

6. Enfin, le requérant ne peut utilement invoquer la doctrine administrative, au soutien d'un moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition.

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

8. Il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, que M. B... a perçu les sommes de 574 000 euros et de 1 232 000 euros, respectivement en 2011 et 2012, en contrepartie de la cession, à la société Informa Group Holdings Ltd, des parts qu'il détenait à titre personnel dans le capital social de la SARL Euromedicom. Il résulte également de l'instruction, et n'est pas davantage contesté, que M. B... a seulement déclaré au titre de ses revenus des années 2011 et 2012 avoir reçu respectivement 434 000 euros et 700 000 euros au titre de cette même cession. Le ministre de l'action et des comptes publics, à qui incombe la charge de la preuve du caractère délibéré des manquements, fait valoir que M. B... ne pouvait ignorer le montant des sommes reçues ni le montant dissimulé qui représentait pour les deux années en cause 840 000 euros, et qu'il était conscient des omissions déclaratives constatées dès lors qu'il n'a jamais discuté le montant des rectifications opérées. Pour justifier cette insuffisance de déclaration, le requérant, allègue, ainsi qu'il l'avait déjà fait devant les premiers juges, qu'il aurait commis des erreurs de calcul en appliquant en 2011 une déduction de frais dont il était personnellement redevable envers la société Informa Group Holdings Ltd, et en 2012 des abattements fiscaux pour durée de détention des titres suite à une mauvaise interprétation de sa part des textes fiscaux et de leur date d'entrée en vigueur. Toutefois, compte tenu de l'importance des minorations de plus-values constatées sur deux années et de l'absence de logique interne, notamment d'une année à l'autre, dans le raisonnement ayant conduit aux montants déclarés, l'administration doit ainsi être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que l'omission de déclarer ces sommes au titre de ses revenus des années 2011 et 2012 résulte de la volonté délibérée du requérant d'éluder l'impôt. Par suite, c'est à bon droit que le service a assorti les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à la charge de M. B... de la majoration pour manquement délibéré prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

2

N° 18VE02610


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02610
Date de la décision : 28/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Plus-values de cession de droits sociaux, boni de liquidation.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : SELARL JTBB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-01-28;18ve02610 ?
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