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07/11/2019 | FRANCE | N°18VE01217

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 07 novembre 2019, 18VE01217


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 4 mai 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier des quatre villes a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie.

Par un jugement n° 1506043 du 13 février 2018, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 avril et 6 décembre 2018, M. B..., représenté par

Me E..., puis par Me A..., avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 4 mai 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier des quatre villes a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie.

Par un jugement n° 1506043 du 13 février 2018, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 avril et 6 décembre 2018, M. B..., représenté par Me E..., puis par Me A..., avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier des quatre villes de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier des quatre villes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'erreur d'appréciation de l'existence d'un lien entre sa pathologie et son activité professionnelle ;

- la décision du 4 mai 2015 est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dès lors que le régime de présomption d'imputabilité au service de la maladie professionnelle mentionnée au tableau 98 annexé à ces dispositions lui est applicable et qu'il remplit les conditions pour bénéficier de cette présomption ;

- le directeur du centre hospitalier, en rejetant sa demande à l'aune des seuls critères de mise en oeuvre de cette présomption sans rechercher s'il existait, en dehors de ces critères, un lien entre sa pathologie et son activité professionnelle, a commis une erreur de droit ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation de l'existence d'un lien entre sa pathologie et son activité professionnelle ;

- elle est également entachée d'un détournement de pouvoir.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Illouz, conseiller,

- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me F..., pour le centre hospitalier des quatre villes.

Une note en délibéré, enregistrée le 22 octobre 2019, a été présentée pour le centre hospitalier des quatre villes.

Une note en délibéré, enregistrée le 23 octobre 2019, a été présentée pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté le 4 juillet 2005 par le centre hospitalier des quatre villes pour occuper un poste de manipulateur en électroradiologie en qualité d'agent contractuel, avant d'être titularisé à compter du 1er octobre 2006 et maintenu dans ses fonctions. L'intéressé a été placé en position de congé de maladie ordinaire à compter du 15 avril 2013. Il a sollicité le 17 mars 2014 la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie à l'origine de ce placement en congé de maladie. M. B... relève appel du jugement du 13 février 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 mai 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier des quatre villes a rejeté cette demande.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ". Un mémoire d'appel qui ne constitue pas la reproduction littérale d'un mémoire de première instance et énonce de nouveau de manière précise les critiques adressées à la décision dont l'annulation a été demandée au tribunal administratif répond aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par ces dispositions.

3. Il ressort des pièces du dossier que la requête d'appel de M. B... ne constitue pas la reproduction littérale de ses écritures de première instance, mais critique tant la régularité que le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 13 février 2018. Cette requête répond, dès lors, aux exigences de motivation des requêtes d'appel résultant des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative. La fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier des quatre villes doit, par suite, être écartée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que M. B... avait notamment soutenu devant eux qu'indépendamment des conditions d'application du mécanisme de présomption d'imputabilité au service de sa pathologie, celle-ci présentait, en tout état de cause, un lien direct avec ses fonctions, et, partant, que la décision du 4 mai 2015 était entachée d'une erreur dans l'appréciation de l'existence de ce lien. Les premiers juges, bien qu'ayant visé le moyen tiré de l'erreur d'appréciation et énoncé aux points 6 et 7 les différents éléments pris en compte par l'autorité administrative pour prendre sa décision, ont seulement estimé que le centre hospitalier n'avait pas entaché sa décision ni d'une erreur de droit, ni d'une " erreur d'application des conditions du tableau " n° 98 des maladies pour lesquelles il est institué, en application de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale une présomption d'origine professionnelle. Ce faisant, ils n'ont pas répondu au moyen, qui n'est pas inopérant, tiré de l'erreur d'appréciation commise par l'administration en refusant de reconnaître la pathologie de l'intéressé imputable au service. Dès lors, M. B... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité. Ce jugement doit, par suite, être annulé.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la légalité de la décision du 4 mai 2015 :

6. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. ".

7. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

8. Il est constant que M. B... a été mis à disposition du département de Paris pour y accomplir des fonctions de manipulateur en électroradiologie ne nécessitant pas le port de charges lourdes au sein d'un dispensaire entre le 1er avril 2009 et le 31 mars 2013, avant de réintégrer les services du centre hospitalier des quatre villes à compter du 1er avril 2013 pour y accomplir des fonctions analogues. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du certificat médical du docteur de la Bouillerie du 28 février 2014, que M. B..., qui avait déjà été confronté au port de charges lourdes lors de son premier passage au sein du centre hospitalier au cours duquel sa pathologie s'était révélée, s'est à nouveau trouvé confronté à un tel port, inhérent à l'exercice de nuit de fonctions de manipulateur en radiologie, à compter de son retour au sein du centre hospitalier. Il ressort également des pièces du dossier que son état de santé, qui s'était amélioré durant sa période d'activité exempte de tout port de charges lourdes auprès du département de Paris, s'est à nouveau dégradé peu après son retour au sein des services du centre hospitalier des quatre villes, sans que la brièveté du délai écoulé entre ce retour et son placement en congé maladie ne soit de nature à remettre en cause la matérialité de ce constat. Il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que l'expert médical commis par la commission de réforme a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie de M. B... aux motifs de l'existence d'un lien direct entre cette pathologie et l'activité professionnelle de l'intéressé et de l'absence d'un état antérieur distinct de cette activité, avis dont la commission de réforme s'est appropriée le sens pour émettre à son tour un avis favorable à cette reconnaissance au cours de sa séance du 10 mars 2015. Dès lors, il doit, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme établi que la pathologie contractée par M. B... présente un lien direct avec l'exercice de ses fonctions de manipulateur en électroradiologie au sein du centre hospitalier des quatre villes et que ses conditions de travail ont été de nature à susciter le développement de cette maladie. Par suite, le directeur du centre hospitalier ne pouvait refuser de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation de l'existence de ce lien.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 mai 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier des quatre villes a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (...) ". L'article L. 911-3 de ce code énonce : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ".

11. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le directeur du centre hospitalier des quatre villes reconnaisse l'imputabilité au service de la pathologie de M. B.... Par suite, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui enjoindre de prendre une décision reconnaissant cette imputabilité dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt, sous une astreinte de cinquante euros par jour de retard.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le centre hospitalier des quatre villes demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce centre une somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1506043 du 13 février 2018 et la décision du directeur du centre hospitalier des quatre villes du 4 mai 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au directeur du centre hospitalier des quatre villes de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service de la pathologie de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Une astreinte de cinquante euros par jour est prononcée à l'encontre du centre hospitalier des quatre villes s'il n'est pas justifié de l'exécution du présent arrêt dans le délai mentionné à l'article 2. Le centre hospitalier des quatre villes communiquera à la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier des quatre villes versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions du centre hospitalier des quatre villes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 18VE01217 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01217
Date de la décision : 07/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. TRONEL
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : COSTA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-11-07;18ve01217 ?
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