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07/11/2019 | FRANCE | N°18VE00588

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 07 novembre 2019, 18VE00588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Panasonic France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 17 octobre 2014 par laquelle l'inspectrice de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine a prononcé à son encontre une injonction de mise aux normes du produit dénommé " chargeur de batterie Panasonic Lumix

DMW-BTC10E ".

Par un jugement n° 1412074 du 18 décembre 2017, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.>
Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistré les 19 février et 17 octo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Panasonic France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 17 octobre 2014 par laquelle l'inspectrice de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine a prononcé à son encontre une injonction de mise aux normes du produit dénommé " chargeur de batterie Panasonic Lumix

DMW-BTC10E ".

Par un jugement n° 1412074 du 18 décembre 2017, le tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistré les 19 février et 17 octobre 2018, le ministre de l'économie et des finances demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Panasonic France devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Il soutient que :

- la norme EN 60950-1 de septembre 2006 intitulée " matériel de traitement de l'information " n'était pas applicable au chargeur de batterie fabriqué par la société Panasonic France ;

- seule la norme EN 60335-2-29 de décembre 2004 précisant les règles particulières applicables aux chargeurs de batteries des appareils électrodomestiques et analogues lui était, dès lors, applicable ;

- c'est, par suite, à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de l'erreur de droit dans la détermination de la norme applicable à ce produit pour annuler la décision du 17 octobre 2014 ;

- les autres moyens soulevés par la société Panasonic France devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'étaient pas fondés.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la consommation ;

- le décret n° 95-1081 du 3 octobre 1995 ;

- l'avis du 22 décembre 2013 relatif à l'application du décret du 3 octobre 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Illouz, conseiller,

- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,

- et les observations de Mme A... et de M. B..., représentant le ministre de l'économie et des finances, et de Me C..., représentant la société Panasonic France.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 218-5 du code de la consommation, alors en vigueur : " Lorsqu'il est constaté que tout ou partie des produits n'est pas conforme à la réglementation en vigueur, les agents mentionnés au I de l'article L. 215-1 peuvent en ordonner la mise en conformité, aux frais de l'opérateur, dans un délai qu'ils fixent. Si la mise en conformité n'est pas possible, le préfet ou, à Paris, le préfet de police peut ordonner l'utilisation à d'autres fins, la réexportation ou la destruction des marchandises dans un délai qu'il fixe. (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier que les services de la direction départementale de la protection des populations de Seine-Saint-Denis ont effectué le 20 juin 2014 un prélèvement en trois exemplaires d'un chargeur d'appareil photo de type Lumix DMW-BTC10E fabriqué par la société Panasonic France. A l'issue des analyses réalisées par les laboratoires de Lyon-Oullins, les services de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine ont adressé à cette société un premier courrier daté du 22 septembre 2014 l'informant du résultat de ces analyses, concluant à la non-conformité de son produit sur deux points, et l'invitant à lui indiquer dans les plus brefs délais les mesures envisagées pour y remédier, puis un deuxième courrier daté du 24 septembre suivant l'avertissant qu'il était envisagé de lui enjoindre de mettre le chargeur de batterie litigieux en conformité en application des dispositions précitées de l'article L. 218-5 du code de la consommation, l'invitant à présenter ses observations, et auquel un rapport de contrôle était joint. Par un courrier du 2 octobre 2014, la société a présenté ses observations en faisant connaitre que le chargeur qu'elle fabrique avait satisfait aux essais réalisés sur la base de la norme de sécurité applicable, selon elle, à ce produit, et distincte de celle mentionnée dans les courriers émanant de l'administration. Par une décision du 17 octobre 2014, l'inspectrice du service " sécurité et loyauté des produits industriels " de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine a notifié à la société Panasonic France, sur le fondement des dispositions précitées, une injonction de mise en conformité du chargeur d'appareil photo de type Lumix DMW-BTC10E. Le ministre de l'économie et des finances relève régulièrement appel du jugement du 18 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à la demande de cette société, a annulé cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 2 du décret du 3 octobre 1995 relatif à la sécurité des personnes, des animaux et des biens lors de l'emploi des matériels électriques destinés à être employés dans certaines limites de tension, alors en vigueur : " Ne peuvent être fabriqués, importés, détenus en vue de la vente, mis en vente, vendus, mis en location ou distribués à titre gratuit que les matériels visés à l'article 1er qui satisfont à la double condition: - d'être fabriqués conformément aux règles de l'art prévalant en matière de sécurité et ne pas compromettre, s'ils sont installés et entretenus correctement et utilisés conformément à leur destination, la sécurité des personnes et des animaux domestiques ainsi que des biens (...) ". L'article 4 de ce décret précisait : " Sont réputés satisfaire aux dispositions du premier tiret de l'article 2 et de l'article 3 ci-dessus les matériels électriques conformes soit aux normes les concernant dont les références sont publiées au Journal officiel de la République française, et qui transposent les normes harmonisées, soit, en l'absence de normes harmonisées, aux dispositions en matière de sécurité promulguées par la commission internationale des réglementations en vue de l'approbation de l'équipement électrique (C.E.E. - él.) ou par la commission électrotechnique internationale (C.E.I.), soit, en l'absence de ces dispositions, aux normes françaises homologuées se rapportant à ces matériels. ".

4. Par ailleurs, aux termes de l'avis du 22 décembre 2013 relatif à l'application du décret du 3 octobre 1995 : " Les matériels électriques conformes aux normes les concernant listées en annexe, parties 1 et 2, sont réputés satisfaire aux dispositions du premier tiret de l'article 2 et de l'article 3 du décret n° 95-1081 du 3 octobre 1995 modifié, en application de l'article 4 de ce même décret. ".

5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions, d'une part, qu'un matériel électrique doit être conforme à la norme ou aux normes qui lui sont spécifiques, et d'autre part, qu'en cas de pluralité de normes applicables à un même matériel et ayant le même objet, celui-ci est réputé satisfaire à l'obligation de conformité aux règles de l'art prévalant en matière de sécurité prévue à l'article 2 du décret précité dès lors qu'il respecte les prescriptions de l'une quelconque de ces normes et que celle-ci figure au sein de la liste annexée à l'avis précité, publié au Journal Officiel de la République Française le 22 décembre 2013.

6. Pour enjoindre à la société Panasonic France de mettre aux normes le chargeur de batterie DMW-BTC 10E vendu avec l'appareil Panasonic Lumix, l'inspectrice de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine a estimé, dans les motifs de sa décision, d'une part, que la norme EN 60950-1 de septembre 2006 intitulée " matériel de traitement de l'information " au regard de laquelle la société avait fait procéder à des tests de conformité n'était pas applicable à ce produit, et d'autre part, que celui-ci n'avait pas satisfait aux tests diligentés à la demande de l'administration au regard de la norme distincte

EN 60335-2-29 relative aux règles particulières applicables aux chargeurs de batteries des appareils électrodomestiques et analogues.

7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la norme

EN 60950-1, mentionnée au sein de la liste annexée à l'avis du 22 décembre 2013 relatif à l'application du décret du 3 octobre 1995, est applicable, en vertu de ses propres énonciations, aux " matériels de traitement de l'information alimentés (...) par batteries " au nombre desquels figurent notamment les " matériels multimédias ". Il n'est pas contesté qu'eu égard à leurs fonctionnalités, les appareils photos numériques de marque Lumix constituent des matériels multimédias au sens de cette norme et entrent par conséquent dans son champ d'application.

8. En deuxième lieu, il ressort également des pièces du dossier que le point 1.1.1. de cette norme, dans sa version datée du 18 janvier 2014, énonce que son champ d'application s'étend aux " composants (...) destinés à être intégrés dans ces matériels " ainsi qu'aux " accessoires destinés à être utilisés avec des matériels entrant dans le domaine d'application de la présente partie ". Son point 1.1.3 énonce que la " présente norme ne s'applique pas : aux systèmes d'alimentation en énergie qui ne font pas partie intégrante du matériel, tels que les groupes convertisseurs, batteries de secours et transformateurs de distributions. (...) ". D'une part, il est constant que le chargeur de batterie DMW-BTC 10E vendu avec l'appareil Panasonic Lumix, conçu pour recharger les batteries adaptées aux appareils photos numériques Panasonic, procède au chargement d'une batterie amovible lors de son raccordement à un réseau électrique et une fois que la batterie a été retirée de l'appareil photo à l'intérieur duquel elle est normalement positionnée pour être insérée au sein du chargeur. Il en résulte que cette norme est applicable, non seulement à la batterie des appareils photos numériques Panasonic Lumix, mais également aux chargeurs de ces batteries, lesquels, s'ils ne procèdent pas à la charge directe de l'appareil photo, ont néanmoins le caractère d'un accessoire destiné à être utilisé avec la batterie de l'appareil, qui constitue elle-même un matériel entrant dans le domaine d'application de la norme EN 60950-1 au sens de son point 1.1.1. précité. D'autre part, les chargeurs de batterie ne figurent pas parmi la liste limitative des systèmes d'alimentation en énergie exclus du champ d'application de la norme par son point 1.1.3.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le chargeur de batterie DMW-BTC 10E vendu avec l'appareil Panasonic Lumix pouvait valablement voir sa conformité contrôlée au regard de la norme EN 60950-1 de septembre 2006 intitulée " matériel de traitement de l'information ". La décision en litige, qui enjoint à la société Panasonic France de mettre ce matériel en conformité au motif que celle-ci ne pouvait pas être contrôlée à l'aune de cette norme mais uniquement de la norme EN 60335-2-29 relative aux règles particulières applicables aux chargeurs de batteries des appareils électrodomestiques et analogues est, dès lors, entachée d'une erreur de droit dans la détermination de la norme applicable à ce produit. Le ministre de l'économie et des finances n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur ce moyen pour annuler la décision du 17 octobre 2014 par laquelle l'inspectrice de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine a prononcé à l'encontre de la société Panasonic France une injonction de mise aux normes du produit dénommé " chargeur de batterie Panasonic Lumix DMW-BTC10E ".

Sur les frais liés au litige :

10. D'une part, si l'intimée fait valoir qu'elle a exposé des frais à l'occasion des procédures de contrôle et de certification du produit qu'elle commercialise, ces frais, qui se rattachent à l'exercice normal de son activité, n'entrent pas dans les prévisions des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Ses conclusions tendant à ce que l'État soit condamné aux dépens en application de ces dispositions doivent dès lors être rejetées.

11. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Panasonic France et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'économie et des finances est rejetée.

Article 2 : L'État versera à la société Panasonic France une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société Panasonic France est rejeté.

2

N° 18VE00588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00588
Date de la décision : 07/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. TRONEL
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : SELARL REDLINK

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-11-07;18ve00588 ?
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