Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté, en date du 17 mai 2019, par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE a prononcé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 1906813 du 21 juin 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et a enjoint au
PREFET DU VAL-D'OISE de réexaminer la situation de M. B... dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2019, le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° de rejeter la requête présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Cargy-Pontoise.
Il soutient que :
- le jugement méconnait les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- les moyens de la demande de première instance ne sont pas fondés.
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
le rapport de M. Beaujard, président-rapporteur a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le PREFET DU VAL-D'OISE relève appel du jugement du 21 juin 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 17 mai 2019 prescrivant le transfert de M. B... vers l'Italie, Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile.
Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président (...) ".
3. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
4. M. B... fait en outre valoir que, n'ayant demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle que le 7 octobre 2019, il n'a pas eu le temps de préparer utilement sa défense en vue de l'audience du 15 octobre. Toutefois, la déclaration d'appel du ministre est en date du 4 juillet 2019, et lui a été notifiée dans les jours suivants. L'avis d'audience, émis le 24 septembre, lui a été notifié dans les mêmes conditions. Alors que la décision administrative en litige est caduque aux termes d'un délai de six mois à compter de la notification du jugement dont appel, M. B..., ne peut se prévaloir de sa propre incurie à demander, dans un délai raisonnable, le bénéfice de l'aide juridictionnelle. En tout état de cause, M. B..., qui a, en définitive, produit un mémoire en défense, conservait le droit de le compléter en produisant une note en délibéré.
Sur le moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif :
5. Aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. L'entretien individuel peut ne pas avoir lieu lorsque: / a) le demandeur a pris la fuite; ou / b) après avoir reçu les informations visées à l'article 4, le demandeur a déjà fourni par d'autres moyens les informations pertinentes pour déterminer l'État membre responsable. L'État membre qui se dispense de mener cet entretien donne au demandeur la possibilité de fournir toutes les autres informations pertinentes pour déterminer correctement l'État membre responsable avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".
6. Il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu de l'entretien individuel, produit par le préfet en première instance et en appel, que celui-ci a été mené dans les locaux de la préfecture du Val-d'Oise par un agent présenté comme " qualifié ", ce qu'aucun élément du dossier ne permet de mettre en doute, en langue française, langue que l'intéressé a déclaré comprendre et dans des conditions dont rien ne permet non plus de penser qu'elles n'auraient pas permis de garantir la confidentialité des échanges. M. B... n'établit pas avoir fait part d'une difficulté à comprendre le français lors de son entretien. Il n'avait d'ailleurs pas soutenu, dans ses écritures de première instance, qu'il ne comprenait pas le français, langue officielle de la Côte d'Ivoire, son pays d'origine. Le résumé de cet entretien reprend les principales informations fournies par M. B... lors de celui-ci, relatives à sa famille, à ses demandes d'asile antérieures, à ses documents personnels, à son itinéraire, à un éventuel retour dans son pays d'origine et comporte sa signature avec la mention " dans une langue que je comprends ". Il est signé par l'agent qui a conduit l'entretien et comporte ses initiales ainsi que le tampon de la préfecture. Dès lors qu'aucun texte communautaire ou national n'implique que cet agent mentionne ses prénom et nom ou encore sa qualité sur le résumé de l'entretien, la circonstance que ce dernier ait signé le résumé avec ses seules initiales est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie. Dès lors, il n'établit pas avoir été privé des garanties prévues par les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
7. Il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 17 mai 2019 portant transfert de M. B... vers l'Italie, Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile.
8. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soutenus par M. B... devant Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la Cour.
Sur les moyens de la demande de M. B..., dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :
9. En vertu du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, lorsqu'une telle demande est présentée, un seul Etat, parmi ceux auxquels s'applique ce règlement, est responsable de son examen. Cet Etat, dit Etat membre responsable, est déterminé en faisant application des critères énoncés aux articles 7 à 15 du chapitre III du règlement ou, lorsqu'aucun Etat membre ne peut être désigné sur la base de ces critères, du premier alinéa du paragraphe 2 de l'article 3 de son chapitre II. Si l'Etat membre responsable est différent de l'Etat membre dans lequel se trouve le demandeur, ce dernier peut être transféré vers cet Etat, qui a vocation à le prendre en charge. Lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI de ce même règlement.
10. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
11. Pour l'application de ces dispositions, doit notamment être regardée comme suffisamment motivée, s'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre Etat membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet Etat, la décision de transfert à fin de reprise en charge qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'Etat en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.
12. D'une part, l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes mentionne notamment les dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, de la convention de Genève du 28 juillet 1951, des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et de l'asile. Il indique que M. B... est entré irrégulièrement sur le territoire français et s'y est maintenu sans être muni des documents et visas exigés par les textes en vigueur, expose les conditions de saisie et d'accord des autorités italiennes et précise que l'intéressé ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3-2 ou 17 du règlement (UE) n° 604/2013. L'arrêté énonce ainsi les considérations de fait et de droit sur lesquelles son auteur a entendu se fonder. D'autre part, il mentionne la circonstance que les autorités italiennes ont été saisies d'une demande de reprise en charge de M. B... sur le fondement des dispositions du b. du 1 de l'article 18 de ce règlement, indiquant ainsi le critère retenu pour la désignation de l'Etat membre responsable. Dès lors, le moyen tiré d'une motivation insuffisante de l'arrêté contesté doit être écarté.
13. Aux termes des dispositions de l'article 4 du règlement précité : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...)/. 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend (...). ". Et l'article 29 du même règlement, relatif aux droits des personnes concernées, édicte une obligation d'information des personnes relevant du règlement au moment où les empreintes digitales de la personne concernée sont prélevées.
14. D'une part, il ressort des pièces du dossier lors de son entretien en préfecture le 21 janvier 2019, que M. B... s'est vu remettre le guide d'accueil du demandeur d'asile, ainsi que les deux brochures d'information A " j'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et B " je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". Ces documents lui ont été remis en langue française, langue que l'intéressé a déclaré comprendre. Ces brochures, établies conformément aux modèles figurant à 1'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, comprennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées. Le compte rendu de l'entretien, également signé par le requérant avec la mention " dans une langue que je comprends " fait état de la remise du guide du demandeur d'asile.
15. D'autre part, à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun. Le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection. Il s'en suit que la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles l'Etat français refuse l'admission provisoire au séjour à un demandeur d'asile et remet celui-ci aux autorités compétentes pour examiner sa demande. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles 4 et 29 du règlement (UE) n° 604/2013 ne peuvent qu'être écartés.
16. Il résulte de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, d'une part que, lorsque l'autorité administrative saisie d'une demande de protection internationale estime, au vu de la consultation du fichier Eurodac prévue par le règlement (UE) n° 603/2013 relatif à la création d'Eurodac, que l'examen de cette demande ne relève pas de la France, il lui appartient de saisir le ou les Etats qu'elle estime responsable de cet examen dans un délai maximum de deux mois à compter de la réception du résultat de cette consultation. A défaut de saisine dans ce délai, la France devient responsable de cette demande. Selon l'article 25 du même règlement, l'Etat requis dispose, dans cette hypothèse, d'un délai de deux semaines au-delà duquel, à défaut de réponse explicite à la saisine, il est réputé avoir accepté la reprise en charge du demandeur.
17. Il résulte de ces dispositions du règlement (CE) n° 1560/2003 du
2 septembre 2003 que la production de l'accusé de réception émis, dans le cadre du réseau Dublinet, par le point d'accès national de l'Etat requis lorsqu'il reçoit une demande présentée par les autorités françaises établit l'existence et la date de cette demande et permet, en conséquence, de déterminer le point de départ du délai de deux semaines au terme duquel la demande de reprise est tenue pour implicitement acceptée. Pour autant, la production de cet accusé de réception ne constitue pas le seul moyen d'établir que les conditions mises à la reprise en charge du demandeur étaient effectivement remplies. Il appartient au juge administratif, lorsque l'accusé de réception n'est pas produit, de se prononcer au vu de l'ensemble des éléments qui ont été versés au débat contradictoire devant lui, par exemple du rapprochement des dates de consultation du fichier Eurodac et de saisine du point d'accès national français ou des éléments figurant dans une confirmation explicite par l'Etat requis de son acceptation implicite de reprise en charge.
18. Il ressort des pièces du dossier que la demande de prise en charge de M. B... par les autorités italiennes, produite par le PREFET DU VAL-D'OISE, a été formée le 20 février 2019 par le réseau de communication " DubliNet " après que la consultation des données de l'unité centrale Eurodac lors de l'instruction de cette demande le 21 janvier 2019 a révélé que ses empreintes avaient préalablement été relevées par les autorités italiennes le 1er octobre 2015 et par les autorités allemandes le 25 mars 2018 dans la catégorie des demandeurs d'asile. Le PREFET DU VAL-D'OISE produit, pour en justifier, la copie d'un courrier électronique du 20 février 2019 constituant l'envoi de la demande de reprise en charge par la préfecture du Val-d'Oise au point d'accès national français ainsi que la copie de la réponse automatique du point d'accès national français, document comportant la référence FRDUB29930226058-950 qui correspond au numéro attribué à M. B... par la préfecture. En outre, le préfet produit la copie d'un autre courrier électronique du 8 mars 2019 constituant l'envoi du constat d'accord implicite par la préfecture au point d'accès national français et la réponse automatique du point d'accès national français du même jour et comportant les mêmes numéros de référence. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de procédure découlant de l'absence de preuve de l'envoi d'une requête de prise en charge aux autorités italiennes et de preuve d'un accord des autorités italiennes à cette prise en charge doit être écarté.
19. Aux termes de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". L'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose : " 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable " et aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ".
20. L'Italie étant membre de l'Union Européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet Etat membre est conforme aux exigences de la convention de Genève, ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette présomption est toutefois réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'Etat membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant.
21. Si le requérant se prévaut d'un décret-loi adopté en novembre 2018 par le parlement italien et cite sans les produire des rapports d'organisations non gouvernementales relatifs à la situation générale des migrants en Italie, ces circonstances ne suffisent pas à établir que la situation de l'intéressé ne pourrait y être examinée dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et à caractériser des " défaillances systémiques " dans les conditions d'accueil et d'examen des demandes d'asile en Italie entrainant un risque sérieux de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. M. B... ne verse au dossier aucun élément précis permettant de considérer avec un degré suffisant de certitude qu'il serait exposé à des risques actuels et personnels en cas de transfert vers l'Italie ni qu'il s'y trouverait dans une situation de dénuement matériel extrême. En outre, la circonstance que les autorités italiennes n'ont pas répondu de manière expresse à la requête du PREFET DU VAL-D'OISE le concernant ne suffit pas à démontrer l'existence en Italie de défaillances systémiques au sens des dispositions précitées de l'article 3 du règlement (UE) n°604/2013, ni la saturation du dispositif d'accueil italien justifiant l'exercice de la clause de souveraineté prévues par les dispositions précitées de l'article 17 du même règlement, dès lors que les dispositions de l'article 22 de ce règlement prévoient, d'une part, la possibilité pour un Etat membre de répondre à une requête aux fins de prise en charge sous la forme d'une décision implicite d'acceptation et, d'autre part, que cette acceptation entraîne l'obligation de prendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. Dès lors, en saisissant les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge et en décidant le transfert du requérant vers l'Italie, le PREFET DU VAL-D'OISE n'a pas méconnu les stipulations de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ni les dispositions des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ni commis d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
22. Enfin, les dispositions du second alinéa de cet article 53-1 de la Constitution, selon lesquelles " même si la demande n'entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ", ne sauraient par elles-mêmes s'opposer à l'application les dispositions précitées du droit de l'Union.
23. Il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 17 mai 2019. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions d'appel accessoires de M. B....
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 21 juin 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par M. B... et les conclusions accessoires de son mémoire d'appel sont rejetées.
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N° 19VE02430