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15/10/2019 | FRANCE | N°18VE00031

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 15 octobre 2019, 18VE00031


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DII INDUSTRIES LLC a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 90 636,23 euros dont elle disposait au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1605674 du 2 novembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier 2018 et 12

juillet 2018, la société DII INDUSTRIES LLC, représentée par Me B..., demande à la Cour, dans ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DII INDUSTRIES LLC a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 90 636,23 euros dont elle disposait au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014.

Par un jugement n° 1605674 du 2 novembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier 2018 et 12 juillet 2018, la société DII INDUSTRIES LLC, représentée par Me B..., demande à la Cour, dans le dernier de ses écritures :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° à titre principal, de prononcer le remboursement demandé ; à titre subsidiaire, de prononcer ce remboursement à hauteur de 85 410,64 euros, et à titre très subsidiaire, de prononcer ce remboursement à hauteur de 31 897,63 euros ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont ni communiqué ni visé le dernier mémoire et les pièces complémentaires enregistrés le 13 octobre 2017 avant la clôture de l'instruction ni n'en ont tenu compte ;

- les factures produites au soutien de sa demande de remboursement, libellées en devises étrangères remplissent les conditions prévues à l'article 289 du code général des impôts ;

- le ministre ne peut opposer pour la première fois en appel que la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée correspondant aux factures dont le paiement est intervenu en 2015 au titre de la période courant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, dès lors qu'elle se trouve privée de la garantie du contribuable contre un changement de motifs tel que prévu par l'article 23 de la directive 2008/9/CE et la doctrine administrative (BOI-TVA-DED-50-20-30-40 §290).

Vu le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la 13ème directive 86/560/CEE du Conseil du 17 novembre 1986 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté ;

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société DII INDUSTRIES LLC, dont le siège se situe au Texas (Etats-Unis), a déposé, le 24 juin 2015, une demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2014, pour un montant total de 85 410,64 euros. Les services fiscaux ont rejeté la demande par une décision du 25 mars 2016 au motif que les factures produites sont exclusivement libellées en dollars américains. Par la présente requête, la société DII INDUSTRIES LLC relève appel du jugement en date du 2 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant porté devant lui à 90 636,23 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'article R. 611-1 du code de justice administrative dispose en son dernier alinéa que : " Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. "

3. La société DII INDUSTRIES LLC soutient que les premiers juges n'ont ni communiqué ni visé le mémoire et pièces complémentaires qui ont été enregistrées le 13 octobre 2017 avant clôture de l'instruction ni n'en ont tenu compte. Toutefois, d'une part, il résulte de l'instruction que les premiers juges ont visé ce mémoire dans leur jugement, et d'autre part, la circonstance que ce mémoire ainsi que les pièces l'accompagnant n'ont pas été communiqués n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard de la requérante et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par elle. S'il résulte également de l'instruction que les premiers juges n'ont pas tenu compte de la production de ce dossier qui comportait les factures pourtant réclamées par mesure d'instruction du Tribunal, cette circonstance est sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de l'instruction doit être écarté.

Sur la demande de remboursement :

4. Aux termes des dispositions du II de l'article 271 du code général des impôts : " 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". Aux termes des dispositions du V de l'article 289 du même code : " Les montants figurant sur la facture peuvent être exprimés dans toute monnaie, pour autant que le montant de taxe à payer soit déterminé en euros en utilisant le mécanisme de conversion prévu au 1 bis de l'article 266 (...) ". Aux termes des dispositions du 1 bis de l'article 266 du même code : " Lorsque les éléments servant à déterminer la base d'imposition sont exprimés dans une monnaie autre que l'euro, le taux de change à appliquer est celui du dernier taux déterminé par référence au cours publié par la Banque de France à partir du cours fixé par la Banque centrale européenne, connu au jour de l'exigibilité de la taxe prévue au 2 de l'article 269 ". Le 2 de l'article 269 précise que : " La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de service autres que celles visées au b bis [les prestations de services pour lesquelles la taxe est due par le preneur en application du 2 de l'article 283], lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevables, d'après les débits ".

5. Si l'administration a initialement refusé le remboursement des sommes en litige au motif que le montant de taxe sur la valeur ajoutée refusé au remboursement était mentionné en dollars sur les factures, le ministre de l'action et des comptes publics fait notamment valoir pour faire obstacle à la demande la société requérante, devant le juge de l'impôt, qu'elle n'est pas en mesure de vérifier le taux de change utilisé conformément aux dispositions de l'article 266 du code général des impôts. Une telle substitution de motifs est admise, l'administration étant en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de faire valoir, dans les limites des rectifications régulièrement notifiées, tout moyen nouveau de nature à démontrer le bien-fondé de l'imposition, dès lors qu'une telle substitution ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi. En l'espèce, la société requérante n'est privée d'aucune garantie, la commission départementale des impôts n'étant pas compétente en matière de taxe sur la valeur ajoutée déductible et la société requérante ne pouvant, en tout état de cause, se prévaloir utilement des dispositions de la huitième directive relative aux assujettis établis dans un autre Etat membre de l'Union européenne.

6. L'obligation de libeller le montant de taxe sur la valeur ajoutée à payer dans la monnaie nationale de l'Etat membre où se situe la livraison de biens est instituée tant par l'article 230 de la directive 2006/112/CE que par les dispositions précitées de l'article 289 du code général des impôts qui en sont l'exacte transposition. Si la seule circonstance que l'assujetti serait en possession d'une facture mentionnant la taxe dans une autre monnaie n'entraîne pas nécessairement la remise en cause de la validité de cette facture pour l'exercice des droits à déduction de la taxe, il appartient à la société qui procède à la demande de remboursement, seule à même de détenir cette information, de justifier par tous moyens auprès de l'administration du taux de change utilisé, conformément aux dispositions du 1 bis de l'article 266 du code général des impôts, en justifiant de la date d'exigibilité de la taxe.

7. En l'espèce, la société requérante a joint aux factures produites un tableau de conversion des montants de taxe sur la valeur ajoutée dont le remboursement est demandé de dollars en euros. Une telle production est, dans son principe, de nature à justifier les remboursements demandés. Cependant, pour l'une des factures, portant le n° 4, la société requérante a renoncé à demander le remboursement de taxe sur la valeur ajoutée, le ministre opposant à bon droit l'absence de mention de la taxe à payer sur ladite facture. La taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures n° 1, n° 5, n° 6 et n° 7 n'était pas exigible au cours de l'année 2014, période sur laquelle portait la demande de remboursement. Enfin, les éléments produits par la société requérante pour justifier la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée sur les factures n° 2 et n° 3, à savoir des justificatifs de paiement, un tableau précisant la date de paiement, le taux de conversion à cette date ainsi qu'un montant de taxe acquitté en euros, comportent des inexactitudes ou des imprécisions qui ne permettent pas déterminer la date d'exigibilité de la taxe. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à demander le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures relatives au litige.

8. Par ailleurs, la société DII INDUSTRIES LLC ne peut utilement invoquer la directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008, qui a fait l'objet d'une transposition en droit interne par la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009. Elle ne peut davantage invoquer le bénéfice, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction BOI-TVA-DED-50-20-30-40 §290 dès lors que la demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée ne constitue pas un rehaussement d'une imposition antérieure et que la société requérante n'a pas fait application de l'instruction qu'elle invoque lors de la déclaration ou du paiement de l'imposition en cause.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société DII INDUSTRIES LLC n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société DII INDUSTRIES LLC est rejetée.

2

N° 18VE00031


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00031
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Remboursements de TVA.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : CABINET EVERSHEDS SUTHERLAND (FRANCE) LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-10-15;18ve00031 ?
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