Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 13 janvier 2017 par laquelle le directeur général du CROUS de l'académie de Versailles l'a licencié sans préavis ni indemnité pour motif disciplinaire.
Par un jugement n° 1701760 du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2017, M.A..., représenté par Me Taurand, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement ;
2° d'annuler la décision du 13 janvier 2017 ;
3° d'enjoindre au CROUS de Versailles de le réintégrer dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4° de mettre à la charge du CROUS de Versailles une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le licenciement ne pouvait pas être prononcé sans préavis ni indemnité, cette sanction plus sévère que le licenciement n'étant pas prévue par l'article 40 de la décision du 20 août 1987 modifiée prise, par dérogation à l'article 51 du décret n° 86-23 du 17 janvier 1986, par le directeur du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires, en application de l'article 21 du décret n° 87-155 du 5 mars 1987 ;
- les faits reprochés ne sont pas établis et sont matériellement inexacts ; il ne s'est absenté qu'une seule fois et pendant douze minutes de la résidence universitaire ; il n'a nullement mis en danger les étudiants, preuve en est qu'aucun gardien de nuit n'a été recruté après son licenciement ;
- en tout état de cause, les faits ne peuvent être qualifiés de faute disciplinaire justifiant la sanction la plus grave ;
- cette sanction est disproportionnée ; ses évaluations sur trente ans de carrière ont toujours été positives ; le CROUS n'a pas pris en considération les séquelles de son agression par un étudiant le 31 mai 2016, ni ne lui est venu en aide ; le CROUS l'a obligé à venir travailler pendant son congé maladie ;
- la décision est entachée de détournement de pouvoir.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;
- la décision du 20 août 1987 modifiée du directeur national des oeuvres universitaires et scolaires fixant les dispositions applicables aux personnels ouvriers ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Geffroy,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Taurand pour M. A...et de Me C...pour le CROUS de Versailles.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., recruté en qualité d'agent d'accueil et de veille la nuit par le CROUS de Versailles en décembre 1986 par contrat à durée déterminée puis indéterminée, relève régulièrement appel du jugement du 9 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 janvier 2017 par laquelle le directeur du CROUS l'a licencié à titre disciplinaire.
2. Le deuxième alinéa de l'article R. 822-14 du code de l'éducation, qui a repris à compter du 14 juin 2015 les dispositions de l'article 21 du décret n° 87-155 du 5 mars 1987, énonce : " Les personnels ouvriers, lesquels participent directement à la mission de service public de l'établissement, sont des agents contractuels de droit public. Ils sont recrutés, gérés et rémunérés par les centres régionaux. Les dispositions qui leur sont applicables sont fixées par le directeur du Centre national et approuvées par le ministre chargé de la fonction publique, le ministre chargé de l'enseignement supérieur et le ministre chargé du budget.". Aux termes de l'article 40 de la décision du 20 août 1987 modifiée du directeur du centre national des oeuvres universitaires et scolaires fixant les dispositions applicables aux personnels ouvriers des oeuvres universitaires et scolaires : " Les sanctions disciplinaires, réparties en quatre groupes, sont les suivantes : Premier groupe : - l'avertissement - le blâme. / Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement - l'abaissement d'échelon -l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours - le déplacement d'office au sein du centre régional. / Troisième groupe : - la rétrogradation - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un mois. /Quatrième groupe : - le licenciement. / (...) / La radiation du tableau d'avancement peut également être prononcée à titre de sanction complémentaire d'une sanction des deuxième et troisième groupes. (...) ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une telle mesure et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité des fautes.
4. Pour décider de licencier sans préavis ni indemnité M.A..., veilleur de nuit relevant du statut de personnel ouvrier affecté à la résidence universitaire " Le Bosquet " aux Ulis sur la plage horaire de 20 h 30 à 3 h 00, le directeur du CROUS de Versailles s'est fondé sur les constats d'absences répétées de son poste de travail sans avoir averti préalablement son supérieur hiérarchique, de ce que l'intéressé a " organisé de manière délibérée ses absences du service dans la mesure où il prenait son poste de travail, levait les rideaux de la loge, allumait les lumières (...), en rédigeant des comptes rendus d'activité basés sur des éléments mensongers et inventés, souhaitant rendre son travail et sa présence crédibles ", de ce qu'il n'a pas respecté son obligation de consacrer son temps de travail à ses missions, et enfin de ce qu'il a laissé les locaux sans surveillance, mettant ainsi potentiellement en danger les étudiants de la résidence universitaire dont il se devait d'assurer la sécurité.
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment des deux rapports rédigés le 17 juin 2016 et du rapport rédigé le 23 juin 2016 par les supérieurs hiérarchiques de l'agent, que les absences sans autorisation de M. A...de son poste de veilleur de nuit à la résidence universitaire " Le Bosquet " ont été constatées lors de trois contrôles inopinés et un contrôle par appel téléphonique de la loge de veille auquel l'intéressé n'a pas répondu, réalisés les 15, 16, 20 et 22 juin 2016. La réalité de ces quatre absences que l'intéressé n'a pas mentionnées dans ses comptes rendus d'activité quotidiens, est établie, notamment au regard de la circonstance que l'intéressé devant la commission administrative paritaire siégeant en formation disciplinaire a reconnu s'être rendu à son domicile proche pendant son service. Néanmoins, M. A...n'a pas tenté de rendre sa " présence crédible " le 16 juin 2016 dès lors que sa loge était fermée sans lumière lors du contrôle. Par ailleurs, le CROUS ne peut être considéré comme ayant retenu à l'encontre de M. A... des faits survenus en 2015 et correspondant à des récriminations d'étudiants sur le temps de présence de l'intéressé et à une absence sans autorisation constatée en février 2015, qui ne fondent pas la sanction litigieuse et au demeurant ne sont pas établis.
6. Les quatre absences sans autorisation de M.A..., la volonté de laisser accroire qu'il était présent les 15 et 22 juin 2016 et la rédaction de comptes rendus d'activité masquant ces absences sont constitutives d'un manquement fautif à ses obligations professionnelles, alors que cet agent n'établit pas qu'il aurait en vain sollicité de l'aide de sa hiérarchie et obtenu un arrêt de travail dans un contexte de souffrance au travail tenant à un sentiment d'isolement et à une agression subie dans la nuit du 31 mai au 1er juin 2016 dans le cadre de son service et commise par un étudiant à l'encontre duquel le CROUS a engagé une procédure d'exclusion, M. A... ayant été entendu par ses supérieurs " pour avoir sa version des faits " le 20 juin.
7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport disciplinaire, que les évaluations annuelles de l'intéressé étaient positives soulignant à la fois un travail sérieux, efficace et de bonnes relations avec les résidents et qu'avant la nuit du 23 juin 2016, aucun reproche ne lui avait été fait en trente années de service pour le même CROUS. Si celui-ci fait valoir que, du fait de ses quatre absences sur une période de huit jours, l'agent a mis en danger la sécurité des étudiants de la résidence, il est constant que le centre n'a pris aucune mesure particulière pour avertir ou suspendre M. A...dès le premier constat d'absence de l'intéressé dans la nuit du 12 au 13 juin 2016, tandis que ce dernier affirme sans être contredit que, depuis son licenciement intervenu en janvier 2017, le poste qu'il occupait n'a pas été pourvu. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, alors notamment que devant la commission paritaire siégeant en formation disciplinaire, la proposition d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée d'un mois avait recueilli le même nombre de voix que celle du licenciement, la mesure de licenciement sans préavis ni indemnité prise le 13 janvier 2017 par le directeur général du CROUS de Versailles à l'encontre de M.A..., qui constitue la sanction la plus grave dans l'échelle des sanctions applicables, est disproportionnée et doit donc être annulée.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Il résulte de ce qui précède que l'annulation par le présent arrêt de la décision du 13 janvier 2017 par laquelle le directeur général du CROUS de l'académie de Versailles a licencié M. A...implique nécessairement la réintégration de l'intéressé à la date de son licenciement. Par suite, il y a lieu pour la Cour d'ordonner la réintégration de l'intéressé à la date de la mesure de licenciement illégale, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le CROUS demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A...au titre de ces dispositions en mettant à la charge du CROUS de l'académie de Versailles le versement de la somme demandée de 2 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701760 du 9 octobre 2017 du Tribunal administratif de Versailles et la décision du 13 janvier 2017 du directeur général du CROUS de l'académie de Versailles sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au CROUS de l'académie de Versailles de réintégrer M. A...à compter de la date de son licenciement, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le CROUS de l'académie de Versailles versera à M. A...une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du CROUS de l'académie de Versailles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
N° 17VE03764 2