Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 29 mars 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel elle pourrait être reconduite.
Par un jugement n° 1705916 en date du 14 novembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 14 mai 2018 et le 25 mai 2018, Mme B...A..., représentée par Me Boamah, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Boamah de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de renonciation de la perception de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le refus d'admission au séjour n'est pas motivé en fait au regard des critères de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en méconnaissance de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pas examiné successivement la délivrance de la carte portant la mention " vie privée et familiale " et d'une carte " salarié " ; elle remplit toutes les conditions de cet article ;
- l'arrêté litigieux, au regard de ses nombreuses attaches familiales stables et intenses en France, méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle réside en France depuis septembre 2010 ; elle justifie de conditions d'existence pérennes ; elle est intégrée en France par, notamment, sa maitrise de la langue française et sa profession d'aide à domicile ;
- l'arrêté qui aurait pour effet de séparer l'enfant de sa mère alors que le père est de nationalité portugaise méconnait l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Geffroy a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...A..., ressortissante du Cap-Vert née le 9 avril 1992 et entrée en France en septembre 2010 sous couvert d'un visa de court séjour, a sollicité le 7 avril 2016 son admission exceptionnelle au séjour. Mme B...A...relève régulièrement appel du jugement du 14 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mars 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.(...) ".
3. Le préfet de la Seine-Saint-Denis, pour refuser à Mme B...A...l'admission exceptionnelle au séjour, s'est fondé sur ce que, d'une part, l'intéressée, célibataire, mère d'un enfant mineur, conserve des attaches familiales dans son pays d'origine où résident toujours un frère et une soeur, d'autre part, sur l'absence de revenus pérennes et d'insertion dans la société française. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme B...A..., est employée en qualité d'assistante de vie sous contrat de travail à durée indéterminée avec une entreprise d'aide à la personne depuis mars 2015, pour des revenus nets moyens mensuels d'environ mille euros. Le père de la requérante de nationalité portugaise résidant en France, a hébergé sa fille jusqu'en 2016, et est désigné coresponsable de son petit-fils né en France le 23 octobre 2011 pour l'école dans lequel ce dernier est scolarisé en cours préparatoire. Par ailleurs, ainsi que le précise l'arrêté attaqué, Mme B...A..., qui est entrée régulièrement en France sous couvert d'un visa de court séjour en septembre 2010 à l'âge de dix-huit ans, réside habituellement en France depuis près de sept années, loue son propre logement depuis mai 2016 et établit déclarer ses revenus depuis 2015. Dans ces conditions, en opposant à la demande de la requérante, notamment l'absence de toute insertion et perspective professionnelles, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché la décision contestée d'une erreur manifeste dans l'appréciation portée sur sa demande présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme B...A...est donc fondée à demander l'annulation de la décision portant refus de séjour ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B...A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 3 et en l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait intervenues depuis l'édiction de l'arrêté contesté du 29 mars 2017, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance, au profit de Mme B...A..., du titre de séjour qu'elle sollicitait. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à la requérante, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, dans cette attente, de mettre l'intéressée en possession d'une autorisation provisoire de séjour. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. Mme B...A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Boamah, avocat de Mme B...A..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1705916 du 14 novembre 2017 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 29 mars 2017 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme B...A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, dans cette attente, de mettre l'intéressée en possession d'une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à Me Boamah, avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle, une somme de 1 500 euros, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...A...est rejeté.
N° 18VE01662 4