Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise :
1° d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2013 du ministre de la justice en tant que son reclassement indiciaire ne prend en compte que dix ans de services antérieurs au sein du ministère de la défense et ne tient pas compte de la date de son entrée à l'ENAP ;
2° d'annuler la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le ministre de la justice a rapporté l'arrêté du 9 mars 2015 l'élevant au 8ème échelon du grade de surveillant pénitentiaire et a fixé ses rémunérations pour la période du 9 août 2013 au 8 août 2026 ;
3° d'annuler la décision du 15 juillet 2015 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris décide du " remboursement d'indus de paie du fait de la reprise d'ancienneté de services militaires illégale " pour la période du 9 août 2013 au 30 juillet 2015 ;
4° de condamner l'Etat à lui verser les sommes indûment retenues sur son traitement depuis le 8 juillet 2015 sous astreinte de 75 euros par jour de retard, avec intérêts au taux légal majoré de dix points ;
5° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence.
Par un jugement n° 1405650 et 1507870 du 29 juin 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 août 2017, et un mémoire, enregistré le 14 septembre 2018, M.A..., représenté par Me Taoufik, avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler la décision du ministre de la justice du 8 juillet 2015 ;
3° d'annuler la décision du 15 juillet 2015 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris ;
4° d'enjoindre à l'Etat de reconstituer sa carrière à compter du 9 janvier 2012 ou à défaut à compter de sa titularisation le 8 novembre 2013, notamment avec reprise de l'ancienneté totale en application du décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 portant statut particulier des corps du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire ; ou à défaut, avec reprise de l'ancienneté totale en application du décret n° 2005-1228 du 29 septembre 2005 relatif à l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie C, et ce sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
5° de condamner l'Etat à lui verser les sommes indûment retenues sur son traitement depuis le 8 juillet 2015, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, avec intérêt au taux légal ;
6° de condamner l'Etat à lui verser au titre de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, la somme de 10 000 euros ;
7° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la rupture d'égalité par rapport à des collègues placés dans une situation similaire à la sienne ;
- l'arrêté du 8 novembre 2013 n'est pas entaché d'erreur en reprenant une ancienneté à hauteur de dix ans, dès lors qu'il a été recruté sur la liste d'aptitude des emplois réservés nécessitant de retenir la reprise de ses services effectifs en qualité de militaire lors de sa titularisation en application de l'article 8 du décret n° 2006-441 ; le principe de confiance légitime a été méconnu par l'Etat employeur ; faute d'avoir été retirée dans un délai de quatre mois, une telle décision est créatrice de droit ; cet arrêté ne pouvait plus être retiré sans commettre une erreur manifeste d'appréciation ; l'arrêté du 8 juillet 2015 est donc entaché d'une erreur de droit en le privant de tout avancement d'échelon jusqu'en 2024 ce qui revient à rapporter illégalement l'arrêté du 8 novembre 2013 ; l'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre le plaçait automatiquement en position de détachement durant sa formation ; les sommes versées ne pouvaient donc pas être répétées ; cette décision est contraire au principe de sécurité juridique attaché au retrait des actes administratifs individuels créateur de droit dégagé par le Conseil d'État ;
- la décision du 15 juillet 2015 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris qui lui fait grief en lui soustrayant près de la moitié de son traitement mensuel n'est pas qu'une simple lettre ; les voies et délais de recours y sont mentionnées ; les versements en cause n'ont pas été effectués sur la base d'une erreur matérielle ; le retrait illégal d'un acte créateur de droits exclut que l'administration puisse récupérer les sommes perçues au titre de cet acte comme il exclut que sa carrière puisse être bloquée au 2ème échelon jusqu'à une date théorique d'atteinte du 7ème échelon.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la défense ;
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- l'ordonnance n° 58-696 du 6 août 1958 relative au statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 portant statut particulier des corps du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Geffroy,
- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,
- et les observations de M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été nommé en qualité d'élève surveillant d'administration pénitentiaire à compter du 9 janvier 2012, puis nommé en qualité de surveillant stagiaire à compter du 9 août 2012. Par un arrêté du 8 novembre 2013, M. A...a été titularisé à compter du 9 août 2013 dans le grade de surveillant et surveillant principal du corps des personnels d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'administration pénitentiaire au 7ème échelon avec une ancienneté conservée de 2 mois et 29 jours. Il a formé un recours gracieux, le 23 janvier 2014, auquel l'administration pénitentiaire n'a pas répondu, afin, d'une part, que les trois quarts de la durée d'ancienneté de ses services en qualité de militaire au lieu des dix ans retenus soient pris en compte, d'autre part, que la prise en compte de cette ancienneté prenne effet au jour de sa nomination en qualité d'élève-surveillant.
2. Par un arrêté du 8 juillet 2015, la direction de l'administration pénitentiaire a rapporté un arrêté du 9 mars 2015 portant élévation de M. A...au 8ème échelon du grade de surveillant pénitentiaire, a décidé le maintien de M. A...au 7ème échelon de son grade jusqu'au 8 août 2024, et la répétition, sur le fondement notamment de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, des sommes versées " au titre de la rémunération afférente à l'échelon 7 du grade de surveillant (...) sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits du 9 août 2013 qui en constitue le fondement ne puisse plus être retirée " et, enfin, a décidé que la rémunération à percevoir par l'intéressé pour la période du 9 août 2014 au 8 août 2016 serait celle de l'échelon 2 et que pour les années suivantes la progression serait d'un échelon par deux années jusqu'à atteindre la rémunération afférente à l'échelon 7 à partir du 9 août 2024 jusqu'au 8 août 2026.
3. Par un courrier du 15 juillet 2015, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris a informé l'intéressé de ce qu'il était " apparu que la reprise d'ancienneté dont vous avez bénéficié est illégale ". Ce courrier précisait que l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 autorisait, y compris pour une décision créatrice de droits, la réalisation d'une saisie sur sa paie du mois d'août 2015 des sommes indument versées entre le 9 août 2013 et le 30 juillet 2015. Enfin M. A...était informé de ce que dès la paie du mois de septembre 2015, les sommes correspondant " à la différence de rémunération entre l'échelon 1 et les sommes réellement perçues " seraient recouvrées par titre de perception.
4. M. A...qui ne conteste plus en appel la décision implicite de rejet mentionnée au point 1, relève appel du jugement du 29 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, après les avoir jointes, rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions mentionnées aux points 2 et 3.
Sur la régularité du jugement :
5. En premier lieu, le courrier du 15 juillet 2015 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris constitue une simple mesure d'information complémentaire à l'arrêté du 8 juillet 2015 et non une décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir. Ainsi c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté pour irrecevabilité les conclusions de M. A...tendant à l'annulation de ce courrier. L'appel formé contre le jugement sur ce point doit donc être rejeté.
6. En second lieu, il ressort des écritures de première instance que si le requérant a soutenu, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2015, que " les effets excessifs " de l'arrêté attaqué étaient " contraires au but et à l'intérêt de la loi ", il n'a pas invoqué le moyen tiré de la rupture d'égalité par rapport à des collègues placés dans une situation similaire à la sienne. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient omis de répondre à ce moyen.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2015 :
7. Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. En principe, l'administration ne peut procéder à la répétition de sommes indûment versées en application d'une décision créatrice de droits illégale si elle ne procède pas à son retrait et ne peut plus le faire si le délai de retrait applicable est expiré.
8. Toutefois l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, dans sa rédaction issue de l'article 94 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 portant loi de finances rectificative pour 2011, dispose que : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. (...) ".
9. Il résulte de ces dispositions qu'une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Ces dispositions sont applicables aux différents éléments de la rémunération d'un agent de l'administration. L'administration n'est pas tenue de verser les sommes dues en application d'une décision illégale attribuant un avantage financier qu'elle ne peut plus retirer dès lors qu'elle pourrait les répéter dès leur versement en application des dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000.
10. L'arrêté du 15 juillet 2015 litigieux a pour effet par application de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 de répéter pour le passé et de soustraire de la rémunération jusqu'en 2026 le différentiel entre les sommes dues en application d'un précédent arrêté du 8 novembre 2013 par lequel l'administration pénitentiaire a, en application de l'article L. 4139-3 du code de la défense, titularisé M. A... à compter du 9 août 2013 au 7ème échelon du grade de surveillant avec une ancienneté conservée de 2 mois et 29 jours et les sommes que l'administration estime devoir lui verser jusqu'en 2026 s'il avait été régulièrement titularisé au premier échelon de son grade. Cette répétition de paiement indu a pour fondement le constat que la reprise de l'ancienneté en qualité de militaire était réservée aux seuls militaires lauréats d'un concours de l'administration pénitentiaire ou bien détachés pendant leur scolarité et conservant cette qualité jusqu'à leur titularisation alors que M. A... recruté le 9 janvier 2012 en qualité d'élève surveillant suivant la procédure des emplois réservés prévue à l'article L. 4139-3 du code de la défense avait été, sur sa demande, radié des cadres de l'armée depuis le 1er octobre 2011.
11. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu en appel, les dispositions précitées de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 ne se limitent pas aux erreurs matérielles commises par l'administration lorsqu'elle prend des décisions créatrices de droit.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. / En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. (...) ". Ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le droit de bénéficier d'une reprise d'ancienneté au militaire qui, au moment où il a été nommé dans la fonction publique civile, a été placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation et a ainsi conservé la qualité de militaire jusqu'à la date à laquelle celle-ci a été prononcée. Elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir cette possibilité de reprise d'ancienneté à l'agent qui, ayant demandé sa radiation des cadres de l'armée, n'a pas été placé en position de détachement durant la période précédant son intégration ou sa titularisation et n'avait donc plus, à la date de celle-ci, la qualité de militaire.
13. M. A...qui n'était plus militaire à la date de son entrée à l'école nationale de l'administration pénitentiaire n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait entaché son arrêté du 8 juillet 2015 d'une erreur de droit en estimant que l'article L. 4139-3 du code de la défense précité n'était pas applicable au calcul de son ancienneté retenu par l'arrêté du 8 novembre 2013. Le requérant, ancien militaire, ne peut davantage utilement invoquer le bénéfice d'un détachement et d'une prorogation de droit de son contrat militaire prévus par l'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre relatif à la procédure d'accès aux emplois réservés aux termes duquel : " Le militaire suit ce stage en position de détachement dans les conditions prévues par l'article L. 4139-4 du code de la défense. Le militaire sous contrat bénéficie d'une prorogation de droit de son contrat jusqu'à la fin du stage ou de la scolarité obligatoire et de leur renouvellement éventuel, y compris au-delà de la limite de durée des services fixée au II de l'article L. 4139-16 du même code. ". Par suite, l'administration n'a commis ni erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation en estimant que M. A...avait bénéficié par l'arrêté du 8 novembre 2013 d'une reprise d'ancienneté illégale.
14. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique attaché au retrait des actes administratifs individuels créateur de droit est inopérant sur la légalité de l'arrêté du 8 juillet 2015 qui ne procède pas au retrait de l'arrêté du 8 novembre 2013.
15. En quatrième lieu, si M. A...a entendu soutenir que les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 seraient contraires au principe de confiance légitime, au principe de sécurité juridique et au principe d'égalité en ce que des collègues titularisés dans les mêmes conditions d'illégalité n'auraient pas fait l'objet d'une répétition de l'indu, il n'appartient pas, en tout état de cause, au juge administratif, hormis le cas où il est saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, de se prononcer sur la conformité d'une loi à des principes ou à des objectifs de valeur constitutionnelle.
16. Enfin, si M. A...déclare devant la cour administrative d'appel reprendre l'ensemble de ses moyens déjà invoqués en première instance, il ne les énonce pas ni ne joint à sa requête une copie du mémoire de première instance en cause. Par suite, la Cour n'est pas tenue de répondre à ces moyens.
17. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 8 et 15 juillet 2015. Par voie de conséquence, ses conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de l'illégalité fautive desdites décisions, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
N° 17VE02808 6