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29/05/2019 | FRANCE | N°17VE00417

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 29 mai 2019, 17VE00417


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2014 par lequel le président du conseil départemental du Val-d'Oise a prononcé son exclusion définitive du service et de mettre à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503173 du 13 décembre 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande

Procédure devant la Cour

:

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 février 2017 et le 4...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2014 par lequel le président du conseil départemental du Val-d'Oise a prononcé son exclusion définitive du service et de mettre à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503173 du 13 décembre 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 février 2017 et le 4 octobre 2018, Mme D...A..., représentée par Me Ivaldi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cet arrêté ;

3° de mettre à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les faits d'achats frauduleux de carburants qui lui sont reprochés ne sont pas établis, ainsi que l'a estimé la Cour d'appel de Versailles dans son arrêt du 21 janvier 2016 ;

- cet arrêt, pourtant revêtu de l'autorité absolue de la chose jugée, n'a pas été pris en compte par le tribunal administratif ;

- le grief tiré de déclarations mensongères relatives à ses horaires de travail doit être relativisé et ne justifie pas une sanction d'exclusion définitive du service.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 janvier 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ablard,

- les conclusions de Mme Bonfils, rapporteur public,

- les observations de MeC..., substituant Me Ivaldi, pour MmeA..., et celles de MeB..., pour le département du Val-d'Oise.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...a été recrutée en 2008 par le département du Val-d'Oise, en qualité de technicien supérieur territorial non titulaire. Elle a été affectée au pôle infrastructures systèmes, sécurité et réseaux de la direction des services informatiques à compter du 1er novembre 2012. A la suite de sa réussite à la sélection professionnelle organisée dans le cadre de la loi du 12 mars 2012 pour accéder au grade de technicien principal de 2ème classe, elle a été informée, par un courrier du 14 novembre 2013, de sa nomination en qualité de stagiaire à compter du 1er décembre 2013. Après un avis favorable du conseil de discipline du 19 juin 2014, le président du conseil général du Val-d'Oise a, par un arrêté du 2 juillet 2014, prononcé l'exclusion définitive de fonctions de Mme A...à compter du 7 juillet suivant, au motif qu'au cours de l'année 2013, elle avait, d'une part, utilisé frauduleusement à des fins personnelles la " carte essence " qui lui avait été délivrée par le département et, d'autre part, déposé de fausses déclarations d'heures de travail ayant donné lieu à une rémunération indue. Le conseil de discipline de recours d'Ile-de-France, saisi par Mme A...le 24 juillet 2014, a proposé, le 19 décembre 2014, de maintenir la sanction d'exclusion définitive du service. Mme A...relève appel du jugement du 13 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2014.

Sur la légalité de l'arrêté du 2 juillet 2014 :

En ce qui concerne la matérialité des faits reprochés à MmeA... :

S'agissant des achats frauduleux de carburants :

2. En premier lieu, si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée, s'imposent à l'administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tiré de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité. Il appartient, dans ce cas, à l'autorité administrative d'apprécier si les mêmes faits sont suffisamment établis et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application d'une sanction ou entraînent l'extinction d'un droit, sous réserve du contrôle qu'exerce le juge de l'excès de pouvoir, en l'état des éléments qui lui sont soumis et qui peuvent, d'ailleurs, être différents de ceux qu'avait connus le juge pénal, tant sur l'exactitude matérielle des faits retenus que sur leur qualification juridique.

3. En relaxant, par un arrêt du 21 janvier 2016 infirmant le jugement du tribunal correctionnel de Pontoise du 11 février 2015, Mme A...des poursuites pour abus de confiance dont elle faisait l'objet, au motif que " les auditions des salariés, effectuées dans le cadre de l'enquête administrative interne, ne permettent pas de réfuter les explications de la prévenue " et que " la preuve des détournements frauduleux n'est pas suffisamment rapportée ", la cour d'appel de Versailles n'a procédé à aucune constatation de fait à laquelle s'attacherait l'autorité absolue de la chose jugée. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée au pénal doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le responsable du parc automobile du département du Val-d'Oise a constaté en novembre 2013 des anomalies dans les consommations de carburant du véhicule à essence immatriculé 849CVX95, de marque Renault Twingo, affecté au pôle infrastructures systèmes, sécurité et réseaux de la direction des services informatiques. En particulier, il a été relevé qu'entre avril 2013 et novembre 2013, trente-trois achats de gasoil et de quantités d'essence supérieures aux capacités du véhicule avaient été effectués sur présentation de la " carte-véhicule " n° 78246031213803245 attribuée à Mme A...et de la " carte-essence " n° 1740 dont elle était également titulaire, laquelle nécessitait l'utilisation d'un code secret à quatre chiffres, connu en principe d'elle seule. MmeA..., qui conteste les faits qui lui sont reprochés, fait valoir qu'elle avait pour habitude de laisser la " carte-véhicule " et sa " carte-essence " sur son bureau, ainsi que son code secret, inscrit sur un post-it. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'aucun des agents du service entendus au cours de l'enquête administrative n'a confirmé les allégations de la requérante ou n'a admis avoir utilisé la " carte-essence " exclusivement attribuée à MmeA.... A cet égard, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 du présent arrêt que l'intéressée ne peut utilement faire valoir que la Cour d'appel de Versailles, dans son arrêt du 21 janvier 2016, a estimé que les auditions de ces salariés ne permettaient pas de rapporter la preuve des détournements frauduleux allégués par l'administration. En outre, si la requérante fait valoir que c'est à tort que l'administration lui reproche huit des trente-trois achats de carburant litigieux, dès lors qu'elle était à son poste de travail ou en congé aux dates et heures correspondantes, elle ne conteste pas, en tout état de cause, être l'auteur des vingt-cinq autres achats en cause. Par suite, la matérialité des faits reprochés à la requérante d'utilisation frauduleuse à des fins personnelles de la " carte essence " qui lui avait été délivrée par le département est établie.

S'agissant des déclarations mensongères relatives aux horaires de travail :

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...a présenté, au cours des mois d'avril, juin, septembre et novembre 2013, des " déclarations " de ses horaires de travail, lesquelles ne sont en principe requises qu'en cas de dysfonctionnement du système automatisé de contrôle du temps de travail ou dans l'hypothèse d'une intervention de l'agent à l'extérieur des locaux de travail. Il est à cet égard apparu qu'aucune de ces déclarations n'était justifiée par l'une ou l'autre de ces deux situations. En outre, l'administration a constaté que l'intéressée avait déclaré, à ces occasions, des journées de travail d'une durée de 9 h 30 ou 10 h 30, nettement supérieure à la durée moyenne de ses journées de travail enregistrées par le système automatisé de contrôle. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la requérante a déclaré des heures de travail au titre de journées pendant lesquelles elle n'était pas en fonction. Par suite, la matérialité des faits de fausses déclarations d'heures de travail, qui n'est au demeurant pas contestée par MmeA..., est établie.

En ce qui concerne la proportionnalité de la sanction :

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. Les faits mentionnés aux points 4 et 5 du présent arrêt constituent des manquements aux devoirs de probité et de loyauté et à l'obligation de servir et sont, dès lors, constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire. Compte tenu de la réitération de ces faits et de leur gravité, la sanction prononcée le 2 juillet 2014 portant exclusion définitive du service n'apparaît pas disproportionnée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département du Val-d'Oise, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A...d'une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...une somme de 1 500 euros, à verser au département du Val-d'Oise au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Mme A...versera au département du Val-d'Oise la somme de 1 500 (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 17VE00417 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00417
Date de la décision : 29/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: Mme BONFILS
Avocat(s) : BAZIN et CAZELLES AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-29;17ve00417 ?
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