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28/05/2019 | FRANCE | N°17VE02178

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 28 mai 2019, 17VE02178


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS SENTRY SOFTWARE a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006, 2007, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1411372 en date du 11 mai 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SAS SENTRY SOFTWARE a été ass

ujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, à raison de la réintégration dans...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS SENTRY SOFTWARE a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006, 2007, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1411372 en date du 11 mai 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SAS SENTRY SOFTWARE a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, à raison de la réintégration dans le crédit d'impôt recherche dont elle a bénéficié pour ces exercices des versements effectués à l'association pour la gestion d'un régime de garantie des salariés pour les personnels éligibles à ce crédit d'impôt, et rejeté le surplus des conclusions de la SAS SENTRY SOFTWARE.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2017, ainsi qu'un mémoire en réplique enregistré le 24 juillet 2018, la SAS SENTRY SOFTWARE, représentée par Me Soulé, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler l'article 2 de ce jugement, en ce qu'il rejette ses conclusions tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2009, à raison de la remise en cause de l'exonération dont elle a bénéficié en tant que jeune entreprise innovante ;

2° de prononcer la décharge de ces impositions litigieuses ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause le statut de jeune entreprise innovante dont elle a bénéficié au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2009, en méconnaissance des dispositions de l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, en ce que la SAS SENTRY SOFTWARE répond aux critères d'une jeune entreprise innovante au sens de ces dispositions, et des instructions administratives référencées 4A-9-04 du 21 octobre 2004 et 4A-6-01 du 20 novembre 2001, ainsi que de la réponse ministérielle à M. A... du 4 août 1994, dont elle est fondée à se prévaloir par application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- les impositions litigieuses méconnaissent les dispositions du 4° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscale, l'administration ayant gardé le silence, puis formulé une réponse explicite positive, sur la demande qu'elle a formulée afin de savoir si elle constituait une jeune entreprise innovante.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard,

- les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public,

- et les observations de Me Soulé, pour la SAS SENTRY SOFTWARE.

Considérant ce qui suit :

1. À l'issue de deux vérifications de comptabilité réalisées au cours des années 2009 et 2012, l'administration fiscale a notifié à la SAS SENTRY SOFTWARE, selon la procédure contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés à raison notamment de la remise en cause de l'exonération dont elle a bénéficié en tant que jeune entreprise innovante pour les exercices clos en 2006, 2007 et 2009. La SAS SENTRY SOFTWARE relève appel du jugement du 11 mai 2017 en tant que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions précitées.

Sur l'exonération d'impôt sur les sociétés en tant que jeune entreprise innovante :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts : " Une entreprise est qualifiée de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement lorsque, à la clôture de l'exercice, elle remplit simultanément les conditions suivantes (...) 5° elle n'est pas créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou d'une reprise de telles activités au sens du III de l'article 44 sexies. ". Aux termes du III de l'article 44 sexies du même code : " (...) Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I. / L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance (...) ".

3. Le caractère d'entreprise nouvelle s'apprécie à la date de la création de la société. Ne constitue pas une entreprise nouvelle une entreprise présentant une identité d'activité avec une entreprise préexistante, ou présentant une communauté d'intérêts entre les deux entreprises révélée par un faisceau d'indices tels que la reprise de contrats et de clients, la reprise des moyens matériels et du personnel et l'existence de relations financières anormales.

4. Il résulte de l'instruction que, par un contrat conclu en 2004 avec la société requérante, la société Morse a pris la décision de ne pas réinvestir dans une activité d'intégration en solution de gestion informatique, dénommée " pôle produit ". Afin d'honorer les engagements pris envers ses clients et partenaires, notamment sur la maintenance, le support, et la pérennité globale de l'offre, Morse a décidé d'avaliser la création, souhaitée par son équipe chargée du développement de ces produits, d'une nouvelle société qui prendra en charge la maintenance et le support des clients actuels, l'évolution de ces produits et leur vente, contre versement à Morse de royalties pendant une durée limitée. Il y a ainsi identité au moins partielle entre l'activité de la société Morse et celle de la société SENTRY SOFTWARE.

5. Par ailleurs, la communauté d'intérêt est caractérisée par le fait que la société Morse conserve la totalité des droits de propriété intellectuelle afférents aux produits du secteur dont elle se désengage, par la concession à SENTRY SOFTWARE du droit de commercialiser, en son nom et pour son compte, à titre onéreux et à destination des utilisateurs finaux de Morse les nouvelles versions et les nouveaux produits, par la concession à la société Morse de prix préférentiels sur les nouveaux produits ou les nouvelles versions, par l'engagement de la société SENTRY SOFTWARE d'assurer le support, la maintenance et l'évolution fonctionnelle des

ex-produits Morse, des nouveaux produits et des nouvelles versions aussi bien auprès des utilisateurs finaux de SENTRY qu'auprès de ceux de Morse, par la fourniture par Morse à SENTRY, d'une prestation de prise d'appels téléphoniques et de gestion des appels grâce à un centre de support, par l'engagement de SENTRY SOFTWARE de ne pas traiter les nouveaux logiciels qu'elle serait amenée à développer, et dont les fonctionnalités viendraient à concurrencer un ou plusieurs produits Morse comme un nouveau produit, mais comme une nouvelle version, devant être traitée comme telle dans les conditions financières, enfin, par diverses conditions portant sur les prix, les licences, les reprises de matériels et la communication d'information.

6. Il résulte de ce qui précède que la société SENTRY SOFTWARE ne peut être regardée comme une jeune entreprise innovante au regard de la loi fiscale.

En ce qui concerne la doctrine administrative :

7. En premier lieu, la société SENTRY SOFTWARE se prévaut, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, du Bulletin officiel des impôts 4 A-09-04 en date du 21 octobre 2004 relative à la condition à laquelle est subordonné le bénéfice de l'exonération. Toutefois, cette instruction de l' administration ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application ci-dessus. Notamment, le point 45 de cette instruction, qui reprend la réponse faite par le ministre à M. A...sénateur du 4 août 1994, se borne à indiquer que la création par un ancien salarié de sa propre entreprise ne constitue pas la reprise d'une activité préexistante au sens de l'article 44 sexies du code général des impôts en l'absence de reprise de clientèle ou de transfert de l'activité propre de l'entreprise, et ne comporte ainsi aucune interprétation formelle de la loi fiscale.

8. En second lieu, la société SENTRY SOFTWARE ne saurait pas plus se prévaloir des dispositions de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales, aux termes desquelles : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi ", dès lors qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que la société requérante a transmis à l'administration une présentation écrite précise et complète de sa situation de fait. Notamment, elle a répondu par la négative à la question posée par l'administration de savoir si sa création résultait de la reprise d'une activité préexistante.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS SENTRY SOFTWARE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeter sa décharge des impositions supplémentaires résultant de la remise en cause par l'administration fiscale de l'exonération dont elle a bénéficié en tant que jeune entreprise innovante au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes. Il y a lieu, par suite, de rejeter sa requête, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS SENTRY SOFTWARE est rejetée.

4

N°17VE02178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02178
Date de la décision : 28/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-01-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Personnes et activités imposables. Exonération de certaines entreprises nouvelles (art. 44 bis et suivants du CGI).


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : ASPIN AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-28;17ve02178 ?
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