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23/05/2019 | FRANCE | N°17VE01175

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 23 mai 2019, 17VE01175


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Drancy la Douce a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2015 par lequel le maire de Drancy a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif pour un immeuble collectif de 87 logements situé au 14/22, rue du Bon Houdart, ensemble la décision implicite de refus née du silence gardé par le maire sur sa demande de retrait de cet arrêté, réceptionnée en mairie le 4 décembre 2015.

Par un jugement n° 1602240 du 2 février 2017, le Tribunal

administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Drancy la Douce a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2015 par lequel le maire de Drancy a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif pour un immeuble collectif de 87 logements situé au 14/22, rue du Bon Houdart, ensemble la décision implicite de refus née du silence gardé par le maire sur sa demande de retrait de cet arrêté, réceptionnée en mairie le 4 décembre 2015.

Par un jugement n° 1602240 du 2 février 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2017 et le 16 octobre 2017, la SCI Drancy la Douce, représentée par Me Ledoux, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement ;

2° d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux ;

3° d'enjoindre à la commune de Drancy de lui délivrer le permis de construire modificatif sollicité dans le délai de deux mois à compter de la plus tardive des dates suivantes, soit la notification de l'arrêt à intervenir, soit la confirmation auprès des services instructeurs de sa demande de permis, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de la commune de Drancy le versement d'une somme de 5 000 euros pour la première instance et l'appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de délivrance du permis de construire modificatif est entaché d'un défaut de motivation, notamment le risque allégué qui n'est ni spécifié, ni identifié ; le permis de construire modificatif n'emporte aucun changement à l'apport de population prévu par le permis de construire initial ; il a reçu l'avis favorable du 17 août 2015 des services de sécurité de la préfecture de police ;

- le refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, les risques purement théoriques et minimes, voire inexistants au-delà de 300 mètres de la gare de triage d'après une nouvelle étude de risque, étant maitrisés par la SNCF et RFF ; aucun périmètre de sécurité autour de la gare n'est opposable dès lors que l'arrêté préfectoral du 6 mars 2013 a été annulé et que le plan local d'urbanisme est muet sur ce point ;

- le refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'apport de population dû au permis de construire modificatif qui ne sera au maximum que de trois habitants au coeur de la commune ; la commune n'a pas opposé ce risque au permis de construire initial ni à un permis voisin pour un total de 162 logements réalisés ;

- la commune a méconnu le principe d'égalité ;

- le refus porte atteinte au droit acquis au titre du permis de construire initial devenu définitif lequel n'aurait pas été refusé s'il avait intégré les modifications mineures et a déjà intégré l'appréciation du risque pour la sécurité publique ; la régularisation en cours de contentieux est possible alors même que la construction est achevée ;

- aucune substitution de motifs ne pourra être demandée par l'administration.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Geffroy,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Ledoux pour la SCI Drancy la Douce, et de MeA..., substituant MeB..., pour la commune de Drancy.

Considérant ce qui suit :

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

1. En vertu de l'article 1849 du code civil, le gérant d'une société civile immobilière tient normalement de ses fonctions le droit d'agir en justice, sans avoir à justifier de sa qualité pour agir. La commune de Drancy a cependant opposé en défense devant le tribunal administratif une fin de non-recevoir tirée de ce que la SCI Drancy la Douce ne justifiait pas être représentée par une personne ayant qualité pour agir en son nom, dès lors qu'il n'était pas précisé qui représentait son gérant, la SAS Tethis. Il ressort des pièces du dossier que la SCI Drancy la Douce est représentée par la SAS Tethis elle-même représentée par son président en exercice, la SAS Gaia, cette dernière étant représentée par Mme C...D.... Par suite, le tribunal a été saisi, au nom de la SCI Drancy la Douce, par une personne ayant qualité pour agir au nom de cette société et la fin de non-recevoir de la commune de Drancy doit être écartée.

Sur la légalité du refus de permis de construire :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 462-2 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " L'autorité compétente mentionnée aux articles L. 422-1 à L. 422-3 peut, dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, procéder ou faire procéder à un récolement des travaux et, lorsque ceux-ci ne sont pas conformes au permis délivré ou à la déclaration préalable, mettre en demeure le maître de l'ouvrage de déposer un dossier modificatif ou de mettre les travaux en conformité. Un décret en Conseil d'Etat fixe les cas où le récolement est obligatoire. / Passé ce délai, l'autorité compétente ne peut plus contester la conformité des travaux. ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

4. La commune de Drancy a mis en demeure le 11 juin 2015 la SCI Drancy la Douce, bénéficiaire d'un permis de construire délivré le 14 mars 2012 pour une construction d'un bâtiment de surface hors oeuvre nette de 5018 m2 et de 82 logements ayant fait l'objet d'une déclaration du 21 avril 2015 attestant l'achèvement et la conformité des travaux réalisés en vertu de cette autorisation, de se mettre en conformité avec le permis délivré aux motifs de ce que " les façades du bâtiment n'ont pas été réalisées conformément aux plans annexés au permis de construire / les deux arbres de haute tige n'ont pas été plantés / un garde-corps a été posé en toiture / au 1er sous-sol, la chaufferie n'a pas été réalisée / 5 logements supplémentaires ont été réalisés (87 au lieu de 82) ". La SCI Drancy la Douce a alors présenté le 7 juillet 2015 une demande de permis modificatif portant sur la construction existante afin de régulariser notamment la réalisation de 87 logements au lieu de 82 sans modification de la surface de plancher par création de 14 studios et 7 trois pièces supplémentaires remplaçant 12 logements de deux pièces et 4 logements de quatre pièces prévus par le permis de construire initial que le maire de Drancy a refusé sur l'unique motif de l'atteinte à la sécurité publique d'un projet situé " à proximité de l'infrastructure majeure de transports de matières dangereuses de la gare de Drancy-Le Bourget ".

5. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le permis de construire initial du 14 mars 2012 a été délivré alors que le terrain d'assiette se situe à 300 m de la gare. Si par un porter à connaissance du 22 avril 2013, le préfet de la Seine-Saint-Denis a informé les maires concernés que, dans le périmètre autour de la gare, le niveau des risques résiduels nécessitait la mise en oeuvre de mesures de maitrise de l'urbanisation, la régularisation en vue de laquelle la demande de permis a été déposée ne portait en l'espèce que sur une modification minime au regard du projet initial du nombre et de la répartition des logements sans augmentation de la surface de plancher et donc sans aucun apport nouveau substantiel de population à proximité de la gare. Par suite, compte tenu de sa faible importance et de ses caractéristiques, le projet ne pouvait être refusé sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens présentés en première instance n'étaient pas de nature, en l'état de l'instruction, à entrainer l'annulation du refus de permis de construire.

7. La commune de Drancy demande de substituer un nouveau motif de refus, tiré de ce que l'achèvement de la construction faisait obstacle à la délivrance d'un permis de construire " modificatif ". Toutefois la demande en cause devant être regardée comme tendant en réalité à régulariser des éléments de la construction existante édifiés sans respecter le permis de construire précédemment obtenu, la légalité de ce " dossier modificatif " prévu par les dispositions précitées de l'article L. 462-2 du code de l'urbanisme devait être examinée en elle-même. Il n'y a, dès lors, pas lieu de procéder à la substitution de motifs demandée.

8. Il résulte de ce qui précède que la SCI Drancy la Douce est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Drancy du 25 septembre 2015 et de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur sa demande de retrait de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

9. Aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme dans sa version issue de l'article 108 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / (...) ". Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition.

10. Dans les circonstances de l'espèce et alors que la commune ne fait état d'aucun autre motif susceptible de justifier le refus du permis de construire litigieux, l'exécution du présent arrêt implique que le maire de Drancy délivre à la SCI Drancy la Douce le permis de construire demandé. Il y a lieu de lui enjoindre de délivrer ce permis de construire dans un délai de deux mois, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI Drancy la Douce qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Drancy au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la commune de Drancy le versement à la SCI Drancy la Douce de la somme de 3 000 euros au titre des frais de première instance et d'appel.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1602240 du 2 février 2017 du Tribunal administratif de Montreuil, l'arrêté du maire de Drancy du 25 septembre 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Drancy de délivrer à la SCI Drancy la Douce le permis de construire demandé, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Drancy versera à la SCI Drancy la Douce la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en appel et en première instance.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

N° 17VE01175 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01175
Date de la décision : 23/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : CABINET LEDOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-23;17ve01175 ?
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