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14/03/2019 | FRANCE | N°14VE02750

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 14 mars 2019, 14VE02750


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sicra Île-de-France a demandé au Tribunal administratif de Versailles, dans le dernier état de ses écritures :

- de condamner le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE à lui verser la somme de 42 467,66 euros HT au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général du lot n° 2, dont elle était titulaire, du marché d'extension et de réhabilitation de la piscine intercommunale de Chevreuse, la somme de 156 000 euros TTC en paiement de travaux supplémentaires réalisés par el

le sur le bassin sportif et la somme de 634 007,85 euros TTC en réparation du préjudice...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sicra Île-de-France a demandé au Tribunal administratif de Versailles, dans le dernier état de ses écritures :

- de condamner le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE à lui verser la somme de 42 467,66 euros HT au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général du lot n° 2, dont elle était titulaire, du marché d'extension et de réhabilitation de la piscine intercommunale de Chevreuse, la somme de 156 000 euros TTC en paiement de travaux supplémentaires réalisés par elle sur le bassin sportif et la somme de 634 007,85 euros TTC en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine réalisée par la société Forage et Fondations, titulaire du lot n° 1 du marché, et du retard dans l'exécution de ce lot, sommes assorties des intérêts au taux conventionnel et de la capitalisation des intérêts ;

- à titre subsidiaire, de condamner in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC Fondations spéciales, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, la société BET Sicre et la société BTP Consultants à lui verser la somme de 634 007,85 euros TTC, assortie des intérêts au taux conventionnel et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine et du retard dans l'exécution du lot n° 1 ;

- à titre infiniment subsidiaire et sous réserve d'ordonner une mesure d'expertise complémentaire sur les causes et l'étendue de son préjudice, de condamner le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE ou, à défaut, in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, la société Octant Architecture, la société BET Sicre et la société BTP Consultants à lui verser, à titre de provision, la somme de 178 817,14 euros TTC, assortie des intérêts au taux conventionnel et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation de son préjudice ;

- de mettre à la charge du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE ou, à défaut, in solidum de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, de la société Octant Architecture, de la société BET Sicre et de la société BTP Consultants le versement d'une somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 0905647 du 26 juin 2014, le Tribunal administratif de Versailles a :

- condamné le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 42 467,66 euros HT, assortie de la taxe à valeur ajoutée applicable à la date du jugement et des intérêts au taux conventionnel à compter du 26 septembre 2008, au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général ;

- condamné la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, venant aux droits de la société Forage et Fondations, à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 17 812,66 euros HT, assortie de la taxe à la valeur ajoutée applicable à la date du jugement, au titre de frais de géomètre et de travaux de reprise des pieux résultant des non-conformités de l'implantation des pieux réalisée par la société Forage et Fondations ;

- condamné in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, et la société BTP Consultants à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 131 700 euros HT, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à la date du jugement, au titre des autres frais exposés à raison des non-conformités de l'implantation des pieux réalisée par la société Forage et Fondations ;

- condamné la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, la société Octant Architecture et la société BTP Consultants à se garantir à hauteur, respectivement, de 60%, 30% et 10% du montant de cette indemnité allouée à la société Sicra Île-de-France ;

- mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 17 903,52 euros TTC, à la charge définitive in solidum du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, de la société Octant Architecture et de la société BTP Consultants ;

- mis à la charge in solidum du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, de la société Octant Architecture et de la société BTP Consultants le versement à la société Sicra Île-de-France d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 15 septembre 2014, le 5 février 2016 et le 20 février 2017, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, représenté par Me Mauvenu, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 42 467,66 euros HT, assortie de la taxe à la valeur ajoutée applicable à la date du jugement et des intérêts au taux conventionnel à compter du 26 septembre 2008, et a mis à sa charge les frais d'expertise in solidum avec la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, la société Octant Architecture et la société BTP Consultants et de rejeter les conclusions de la demande présentée par la société Sicra Île-de-France devant le tribunal administratif dirigées contre lui ;

2° de condamner in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, la société Octant Architecture, la société BET Sicre et la société BTP Consultants à le garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ;

3° de mettre à la charge de la société Sicra Île-de-France le versement de la somme de 25 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en se bornant à relever que le mandat de paiement du 13 octobre 2008, au profit de la société Sicra Île-de-France, ne saurait constituer une décision notifiée à l'entrepreneur rejetant son mémoire de réclamation au sens des stipulations de l'article 50.31 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux), le tribunal administratif a insuffisamment motivé le jugement attaqué sur ce point ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé recevable la demande de la société Sicra Île-de-France en estimant que le litige était un différend entre l'entrepreneur et la personne responsable du marché relevant des stipulations de l'article 50.22 du CCAG Travaux ; en effet, par sa demande introductive d'instance, la société n'a aucunement contesté le décompte général ou son solde et s'est bornée à présenter une demande indemnitaire sur les surcoûts engendrés par l'allongement des délais d'exécution des travaux ; s'agissant d'un tel différend et alors que les griefs de la société, qui sont relatifs notamment au manque de coordination des intervenants, à un décalage du chantier dans le temps et, plus généralement, au déphasage des travaux et à la désorganisation du chantier, concernent spécifiquement le maître d'oeuvre et que son courrier du 25 septembre 2008 a été adressé à ce dernier, les stipulations de l'article 50.11 du CCAG Travaux trouvaient à s'appliquer ; faute pour la société Sicra Île-de-France d'avoir fait parvenir à la personne responsable du marché le mémoire complémentaire prévu à l'article 50.21 du CCAG Travaux, sa demande était irrecevable ; à cet égard, son mémoire de réclamation du 26 septembre 2008, qui porte sur la procédure d'établissement et de contestation du décompte général et qui ne développe pas les motifs de son refus conformément aux prescriptions de l'article 50.21, ne peut être considéré comme le mémoire complémentaire prévu par cet article ; en outre, faute pour la société Sicra Île-de-France d'apporter la preuve de la date de réception par le maître d'oeuvre de son mémoire de réclamation du 24 avril 2008, il n'est pas établi que son mémoire de réclamation du 26 septembre 2008 soit parvenu à la personne responsable du marché dans le délai de trois mois à compter de l'expiration du délai de deux mois courant à compter de cette réception ; par ailleurs, à supposer que la cour considère que le litige concerne un différend entre l'entrepreneur et la personne responsable du marché relevant des stipulations de l'article 50.22 du CCAG Travaux, l'exposant a pris la décision, dans le délai de trois mois prévu par les stipulations de l'article 50.31 du CCAG Travaux, de régler par mandat de paiement du 13 octobre 2008 la somme de 71 651,81 euros au titre du solde du marché et a ainsi explicitement refusé de faire droit au mémoire de réclamation adressé le 26 septembre 2008 par la société Sicra Île-de-France ; faute pour cette dernière d'avoir saisi le tribunal administratif avant le 14 avril 2009, sa demande était irrecevable ;

- à titre subsidiaire, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les retenues opérées par le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE n'étaient pas justifiées ; alors que la réception est sans effet sur ces retenues, dont l'exposant justifie du bien-fondé par l'ensemble des pièces produites, elles s'élèvent à la somme totale de 41 675,82 euros HT, soit 42 467,66 euros HT après actualisation ; elles comprennent des retenues au titre de la reprise par l'exposant des désordres affectant les travaux du bassin sportif effectués par la société Sicra Île-de-France pour un montant total de 22 072,50 euros HT et concernent la reprise de la planéité des parois Est et Ouest du bassin sportif, pour un montant de 9 925 euros HT, la reprise des parois Nord et Sud du bassin sportif, pour un montant de 2 435 euros HT, et la recharge en mortier du fond du bassin, pour un montant de 9 712,50 euros HT ; elles comprennent également des retenues au titre de travaux prévus par le marché, mais non exécutés par la société Sicra Île-de-France pour un montant total de 18 628 euros HT et concernent le mur en doublage avec isolation (30 m2), pour un montant de 6 870 euros HT, la reprise des réservations en pavés de verre, pour un montant de 8 138 euros HT, et la maçonnerie en parpaing enduit, pour un montant de 3 620 euros HT ; enfin, doivent être ajoutées une retenue au titre des travaux de réfaction de la porte du local " MNS ", pour un montant de 800 euros HT, et une retenue provisoire opérée par le maître d'oeuvre sur le certificat de paiement n° 19, pour un montant de 175,32 euros HT ;

- c'est également à tort que le tribunal administratif a mis à sa charge les frais d'expertise in solidum avec la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, la société Octant Architecture et la société BTP Consultants, les opérations d'expertise ayant porté exclusivement sur les désordres concernant l'implantation des pieux, et non sur le décompte général du marché de la société Sicra Île-de-France, et aucune condamnation n'ayant été prononcée à son encontre en raison de ces désordres ; seules les parties perdantes sur cette partie du litige relative à la mauvaise implantation des pieux et à ses conséquences doivent supporter ces frais d'expertise ;

- en sa qualité de maître d'ouvrage, l'exposant, qui a parfaitement rempli les missions qui lui incombaient en vertu de la loi et de ses engagements contractuels, n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la société Sicra Île-de-France, l'expert judiciaire ayant estimé que les désordres concernant l'implantation des pieux étaient imputables aux fautes commises par la société Forage et Fondations, la société Japac et la société BTP Consultants ;

- la société Sicra Île-de-France ne justifie ni de la réalité ou du quantum des préjudices qu'elle invoque, résultant, selon elle, du non-respect de la date de début des travaux et de la mauvaise implantation des pieux, ni de l'existence d'un lien de causalité entre ces préjudices et une éventuelle faute du maître de l'ouvrage ou cette mauvaise implantation ; à cet égard, les prétentions indemnitaires de la société, qui ont varié, revêtent un caractère excessif ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a évalué, à l'instar de l'expert judiciaire, le préjudice de la société Sicra Île-de-France au titre des frais générés par la désorganisation du chantier, à la somme de 131 700 euros HT ;

- la demande de la société Sicra Île-de-France tendant à la désignation d'un expert afin de déterminer les causes du retard dans l'exécution du lot n° 1 et l'étendue du préjudice qui en est résulté pour elle, est dépourvue de toute utilité, l'expert s'étant déjà prononcé sur ces points ;

- l'exposant ne saurait être condamné à payer à la société Sicra Île-de-France les frais de géomètre et de reprise des pieux, la société Forage et Fondations ayant reconnu sa responsabilité et accepté de prendre en charge les frais d'adaptation des structures au cours des opérations d'expertise et le jugement du tribunal administratif ayant reconnu que la responsabilité du maître d'ouvrage ne pouvait, à cet égard, être engagée en l'absence de toute faute de sa part ;

- la société Sicra Île-de-France ne démontre pas la réalité du préjudice subi au titre des travaux supplémentaires effectués sur le bassin sportif ; à le supposer établi, la responsabilité de l'exposant ne saurait être encourue pour une faute directement imputable à la maîtrise d'oeuvre et à la société Forage et Fondations, comme le reconnaît la société Sicra Île-de-France ;

- si la Cour devait le condamner pour les désordres en cause, l'exposant est en droit de demander la condamnation de la société Heaven Climber Fondations Spéciales - HC Fondations Spéciales, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, de la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, et de la société BTP Consultants à le garantir intégralement de toute condamnation.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Camenen,

- les conclusions de M. Ablard, rapporteur public,

- les observations de Me Mauvenu, pour le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE et celles de MeA..., pour la société Sicra Île-de-France.

1. En vue de l'extension et de la réhabilitation de la piscine intercommunale Alex Jany située dans la commune de Chevreuse, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE a confié à un groupement conjoint comprenant, notamment, la société Japac, mandataire, et la société BET Sicre, par un acte d'engagement du 6 mars 2000, une mission de maîtrise d'oeuvre, à la société BTP Consultants, par une convention du 31 août 2000, une mission de contrôle technique, à la société Forage et Fondations, par un acte d'engagement du 3 août 2004, la réalisation des travaux du lot n° 1 " fondations spéciales ", consistant en la réalisation des pieux de fondation de la piscine, et à la société Sicra Île-de-France, par un acte d'engagement du même jour, la réalisation des travaux du lot n° 2 " démolitions - terrassements - fondations - gros oeuvres ". Des désordres ayant été constatés dans l'implantation des pieux réalisée par la société Forage et Fondations et occasionné un retard dans l'exécution des lots, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE a demandé, le 23 septembre 2005, au juge des référés du Tribunal administratif de Versailles de prescrire une expertise aux fins, notamment, de déterminer l'origine de ces malfaçons et les coûts supplémentaires qu'elles avaient engendrés. Le rapport de l'expert, désigné par une ordonnance du 17 novembre 2005, a été déposé au greffe du tribunal administratif le 9 novembre 2006. Les travaux réalisés par la société Sicra Île-de-France ont fait l'objet d'une réception sans réserve par une décision du 23 avril 2008, avec effet au 25 mars 2008. La société Sicra Île-de-France a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant, dans le dernier état de ses écritures, à la condamnation du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE à lui verser, avec les intérêts au taux conventionnel et la capitalisation de ces intérêts, d'une part, la somme de 42 467,66 euros HT, correspondant aux retenues, qu'elle estimait injustifiées, opérées dans le décompte général au titre de travaux de reprise pour remédier à des malfaçons qui lui seraient imputables et de travaux qu'elle n'aurait pas exécutés, d'autre part, la somme de 634 007,85 euros TTC en réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait du non-respect des délais prévisionnels du lot n° 1 et des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine et, enfin, la somme de 156 000 euros TTC, au titre de travaux supplémentaires réalisés sur le bassin sportif de la piscine. A titre subsidiaire, elle a demandé au tribunal administratif de condamner in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, la société BET Sicre et la société BTP Consultants à lui verser la somme de 634 007,85 euros TTC, assortie des intérêts au taux conventionnel et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice résultant du non-respect des délais prévisionnels du lot n° 1 et des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine. Par un jugement du 26 juin 2014, le Tribunal administratif de Versailles, faisant partiellement droit à la demande de la société Sicra Île-de-France, a, d'une part, condamné le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE à lui verser la somme de 42 467,66 euros HT, assortie de la taxe à valeur ajoutée applicable à la date du jugement et des intérêts à taux conventionnel à compter du 26 septembre 2008, au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général, d'autre part, condamné la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, à lui verser la somme de 17 812,66 euros HT, assortie de la taxe à la valeur ajoutée applicable à la date du jugement, au titre de frais de géomètre et de travaux de reprise des pieux résultant de leurs non-conformités, enfin, condamné in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, la société Octant Architecture et la société BTP Consultants à lui verser la somme de 131 700 euros HT, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à la date du jugement, en réparation des autres frais exposés à raison des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine. Le tribunal administratif a également mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 17 903,52 euros TTC, à la charge définitive in solidum du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, de la société Octant Architecture et de la société BTP Consultants. Le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 42 467,66 euros HT et a mis à sa charge les frais d'expertise in solidum avec les sociétés Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, Octant Architecture et BTP Consultants. Par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, la société Sicra Île-de-France demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures, de réformer ce jugement en condamnant in solidum le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE et la société Octant Architecture à lui verser les sommes de 76 373,30 euros HT, au titre du préjudice lié au non-respect du délai d'exécution des travaux du lot n° 1, de 453 733,60 euros HT au titre du préjudice lié à la non-conformité des pieux, de 8 371 euros HT au titre de la révision du prix des travaux, de 130 685,58 euros HT au titre des travaux de reprise du bassin sportif et de 42 467,66 euros HT au titre des retenues injustifiées. Par la voie de l'appel provoqué, la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par la SCP BTSG², ès-qualité de liquidateur, la société Octant Architecture et la société BTP Consultants demandent à la Cour de réformer ce jugement en les déchargeant des condamnations prononcées à leur encontre. La société Octant Architecture et la société BTP Consultants demandent en outre, à titre subsidiaire, que la société BET Sicre soit condamnée à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre.

Sur l'appel principal du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE et l'appel incident de la société Sicra Île-de-France :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du point 16 du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré par le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE de ce que le mandat de paiement en date du 13 octobre 2008 d'une somme de 71 651,81 euros à la société Sicra Île-de-France au titre du solde de son marché constituait une décision " explicite " de rejet de son mémoire de réclamation du 26 septembre 2008 contestant le décompte général du marché notifié le 4 septembre précédent, le tribunal administratif a estimé qu'" un tel règlement ne saurait constituer une décision notifiée à l'entrepreneur refusant ses autres demandes " au sens des stipulations de l'article 50.31 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux). Ainsi et compte tenu de l'argumentation invoquée en première instance par le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, qui s'est borné à faire valoir qu'un tel mandat ou règlement constituait ou révélait une décision " expresse " de refus des chefs de réclamation de la société Sicra Île-de-France, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision. Par suite, le moyen tiré par le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE de ce que le jugement entrepris serait insuffisamment motivé sur ce point ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

3. Selon l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction applicable au présent litige, l'entrepreneur dispose d'un délai fixé selon le cas à trente ou quarante-cinq jours à compter de la notification du décompte général par le maître de l'ouvrage pour faire valoir, dans un mémoire de réclamation, ses éventuelles réserves, le règlement du différend intervenant alors selon les modalités précisées à l'article 50. L'article 50, auquel il est ainsi renvoyé, stipule que : " 50.11. Si un différend survient entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, l'entrepreneur remet au maître d'oeuvre, aux fins de transmission à la personne responsable du marché, un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses réclamations. / 50.12. Après que ce mémoire a été transmis par le maître d'oeuvre, avec son avis, à la personne responsable du marché, celle-ci notifie ou fait notifier à l'entrepreneur sa proposition pour le règlement du différend, dans un délai de deux mois à compter de la date de réception par le maître d'oeuvre du mémoire de réclamation. L'absence de proposition dans ce délai équivaut à un rejet de la demande de l'entrepreneur. / 50.21. Lorsque l'entrepreneur n'accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l'expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission au maître de l'ouvrage, un mémoire complémentaire développant les raison de son refus. / 50.22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. / 50.23. La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage (...). 50.31. Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception, par la personne responsable du marché, de la lettre ou du mémoire de l'entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur, ou si celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. Il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché. / 50.32. Si, dans un délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable (...) ".

4. Les stipulations précitées des articles 50-11 et 50-12 concernent le règlement de différends survenus entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur, et ne s'appliquent, dès lors, pas au différend qui survient dans l'établissement du décompte général qui constitue un différend entre l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Le renvoi à l'article 50 auquel procède l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales doit ainsi s'entendre comme concernant les dispositions des articles 50.22 et 50.23, applicables lorsque le différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, sans que les dispositions de l'article 50.21, qui ne visent que les réclamations préalablement transmises au maître d'oeuvre, puissent s'appliquer. Dans le cas d'un différend survenu lors de la procédure d'établissement du décompte général, le mémoire de réclamation mentionné à l'article 50.22 est nécessairement celui mentionné à l'article 13.44 précité. En conséquence, les stipulations de l'article 50.22 n'ont pas pour objet, dans le cadre de l'établissement de ce décompte général, d'imposer à l'entrepreneur, qui a déjà adressé un mémoire en réclamation au maître d'oeuvre en application des stipulations précitées de l'article 13.44, à charge pour celui-ci de le transmettre au maître de l'ouvrage, d'adresser un nouveau mémoire de réclamation à la personne responsable du marché.

5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que, le 4 septembre 2008, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE a notifié à la société Sicra Île-de-France le décompte général du marché avec un solde en sa faveur d'un montant de 71 651,81 euros TTC mais comportant des retenues, pour un montant total de 42 467,66 euros HT, au titre de travaux de reprise et de travaux non exécutés. La société Sicra Île-de-France a signé, le 25 septembre 2008, ce décompte général avec réserves et présenté, par un courrier du 26 septembre 2008 adressé au maître d'oeuvre, copie ayant été reçue par le maître de l'ouvrage le 28 septembre suivant, un mémoire contestant ce décompte et réclamant, notamment, le versement de la somme de 42 467,66 euros HT au titre des retenues qu'elle estimait injustifiées. Ce différend, survenu ainsi dans l'établissement du décompte général, constitue un différend entre l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Par suite, le mémoire de réclamation de la société Sicra Île-de-France du 26 septembre 2008 est nécessairement celui mentionné à l'article 13-44 précité et les stipulations précitées des articles 50.22, 50.31 et 50.32 trouvent seules à s'appliquer.

6. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, ni le mandat de paiement du 13 octobre 2008 portant sur la somme de 71 651,81 euros au titre du solde du décompte général à verser à la société Sicra Île-de-France, ni d'ailleurs le versement effectif de cette somme le 28 octobre suivant, ne sauraient constituer ou révéler une décision explicite notifiée à cette société rejetant son mémoire de réclamation du 26 septembre 2008. Par suite, ce mémoire de réclamation devant être regardé comme ayant été implicitement rejeté, à l'issue du délai de trois mois prévu par l'article 50.31 précité, la société Sicra Île-de-France pouvait saisir, sans condition de délai, le tribunal administratif et porter devant lui, comme elle l'a fait, sa réclamation relative aux retenues d'un montant total de 42 467,66 euros HT.

7. Il résulte de ce qui précède que le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE n'est pas fondé à soutenir que les conclusions de la demande présentée par la société Sicra Île-de-France devant le tribunal administratif tendant à sa condamnation à lui verser la somme de 42 467,66 euros HT au titre des retenues figurant dans le décompte général étaient tardives et donc irrecevables.

8. En outre, le tribunal n'ayant fait droit qu'à ces seules conclusions, le syndicat requérant ne peut utilement faire valoir, à l'appui de son appel, que les conclusions de la société tendant à sa condamnation à lui verser les sommes de 530 106,90 euros HT et de 128 248,85 euros HT seraient irrecevables faute pour la société d'avoir présenté le mémoire complémentaire prévu par l'article 50.21 précité du CCAG. Ces moyens doivent en conséquence être rejetés comme inopérants.

En ce qui concerne le bien-fondé des retenues figurant dans le décompte général :

9. Le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE soutient que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que les retenues opérées dans le décompte général, pour un montant de 41 675,82 euros HT, soit 42 467,66 euros HT après actualisation, n'étaient pas justifiées. Il fait valoir que ces retenues correspondent, d'une part, au coût de travaux de reprise, pour un montant de 17 421,50 euros HT, pour des désordres affectant les ouvrages réalisés par la société Sicra Île-de-France ainsi que le coût des travaux de réfection, pour un montant de 800 euros HT, de la porte du local " MNS ", d'autre part, au coût de travaux, pour un montant de 18 628 euros HT, prévus dans le marché, mais qui n'ont pas été réalisés par cette société, enfin, à une retenue provisoire, pour un montant de 175,32 euros HT, opérée par le maître d'oeuvre sur le certificat de paiement n°19.

10. En premier lieu, il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE a dû faire réaliser des travaux de reprise pour certaines malfaçons constatées sur les ouvrages réalisés par la société Sicra Île-de-France et qui sont imputables à cette dernière, à savoir des défauts de planéité affectant les parois Est et Ouest, les parois Nord et Sud du bassin et le fond du bassin sportif ainsi qu'un défaut de dimensionnement affectant la porte du local " MNS ". A cet égard, pour justifier du bien-fondé de ces retenues, le Sivom produit en appel un certain nombre de documents, notamment différents courriers du maître d'oeuvre, du maître de l'ouvrage ou de l'entreprise titulaire du lot " carrelages ", un relevé d'un géomètre-expert du 14 juin 2007, un constat dressé le 24 juillet 2007 par un huissier de justice, un constat effectué le même jour par le maître d'oeuvre, un compte-rendu de chantier du 25 septembre 2007 ainsi que des ordres de service, avenant, devis et factures, qui sont de nature à établir la réalité de ces malfaçons, leur imputabilité à la société Sicra Île-de-France et le montant des travaux de reprise, soit 9 925 euros HT pour la reprise de la planéité des parois Est et Ouest du bassin sportif, 2 435 euros HT pour la reprise de la planéité des parois Nord et Sud du bassin, 9 712,50 euros HT pour la recharge en mortier du fond du bassin et 800 euros HT pour les frais de redimensionnement de la porte du local " MNS ". Si la société Sicra Île-de-France fait valoir que le relevé du géomètre-expert du 14 juin 2007 ou le constat dressé le 24 juillet 2007 par un huissier de justice n'ont pas été effectués de manière contradictoire, elle n'apporte aucun élément susceptible de remettre en cause le résultat de ces différents constats ou de nature à démontrer que les malfaçons en cause ne lui seraient pas imputables. En particulier, si elle fait valoir que les malfaçons affectant les parois Est et Ouest du bassin sportif résulteraient des ordres contradictoires qu'elle aurait reçus quant à la longueur de ce bassin, elle ne fournit aucun élément de nature à établir le bien-fondé de cette assertion. Il suit de là que le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les retenues en cause étaient injustifiées.

11. En deuxième lieu, en se bornant à produire une facture de la société Somma du 24 juin 2007, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE ne démontre pas, en revanche, que la société Sicra Île-de-France n'aurait pas réalisé certains travaux prévus au marché et qui ont fait l'objet de retenues dans le décompte général pour un montant total de 18 628 euros HT, soit 6 870 euros HT pour un " mur doublage avec isolation (30 m2) ", 8 138 euros HT pour la " reprise des réservations en pavé de verre " et 3 620 euros HT pour une " maçonnerie en parpaing enduit ". A cet égard, alors que la société Sicra Île-de-France fait valoir qu'elle a réalisé les travaux du lot dont elle était titulaire et qu'au demeurant, les montants précités dont fait état le Sivom ne correspondent pas, pour partie, à ceux figurant sur la facture de la société Somma, aucun autre élément n'est fourni par le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE quant au bien-fondé de ces retenues. Il suit de là qu'en tout état de cause, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les retenues en cause étaient injustifiées.

12. Enfin, le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE n'apporte aucune précision, ni aucun élément quant au bien-fondé de la " retenue provisoire devis n° 21 ", pour un montant de 175,32 euros HT, opérée, par le maître d'oeuvre, sur le certificat de paiement n° 19 et mentionné dans le décompte général. Il suit de là qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que cette retenue n'était pas justifiée.

13. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser à la société Sicra Île-de-France, au titre de retenues injustifiées, une somme supérieure à 18 803,32 euros HT, soit 19 160,58 euros HT après actualisation et, d'autre part, que les conclusions de la société Sicra Île-de-France tendant à la condamnation du Sivom à lui verser la somme de 42 467,66 euros HT à ce titre doivent, en tout état de cause, être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions d'appel incident de la société Sicra Île-de-France relatives aux travaux supplémentaires et au préjudice résultant d'un retard dans les travaux du lot n° 1 et des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine :

14. En premier lieu, la société Sicra Île-de-France n'établit pas l'existence, lors de l'exécution de ses travaux, d'ordres de service ou de demandes contradictoires, relatifs aux dimensions de la structure béton du bassin sportif, qui l'auraient conduite à exécuter des travaux supplémentaires non prévus au marché. Au surplus, la faute qu'aurait commise à ce titre le maître d'oeuvre, soit la société Japac, ne saurait être, en tout état de cause, de nature à engager la responsabilité du maître de l'ouvrage vis-à-vis de la société Sicra Île-de-France. Par suite, les conclusions d'appel incident de cette dernière, relatives à des travaux supplémentaires et dirigées contre le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, ne peuvent qu'être rejetées.

15. En second lieu, les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en oeuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

16. La société Sicra Île-de-France n'établit pas, ni n'allègue sérieusement l'existence de fautes qu'aurait commises le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, maître de l'ouvrage, qui seraient à l'origine du préjudice résultant d'un retard dans la réalisation des travaux du lot n° 1 et des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine et dont elle demande réparation. En particulier, alors qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise du 9 novembre 2006 que le maître de l'ouvrage a mis en oeuvre, dès le constat des désordres affectant l'implantation des pieux de fondation de la piscine, les moyens nécessaires afin de remédier à ces malfaçons et à leurs conséquences dommageables, notamment en mandatant un géomètre-expert, puis en sollicitant une expertise judiciaire, la société Sicra Île-de-France, qui se borne à faire état de manquements et d'insuffisances du Sivom dans la conception et le suivi de son projet, n'apporte aucune précision, ni aucun élément de nature à démontrer l'existence d'une faute du maître de l'ouvrage à l'origine du préjudice qu'elle invoque. Par suite, ses conclusions d'appel incident, relatives au préjudice résultant d'un retard dans la réalisation des travaux du lot n° 1 et des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine et dirigées contre le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, doivent également être rejetées.

En ce qui concerne les dépens de première instance :

17. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ".

18. Par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 17 903,52 euros TTC, à la charge in solidum du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, de la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, et de la société BTP Consultants.

19. Toutefois, d'une part, ces opérations d'expertise n'ont porté que sur les désordres affectant l'implantation des pieux de fondation de la piscine réalisée par la société Forage et Fondations et leurs conséquences sur l'organisation du chantier. D'autre part, il résulte de ce qui précède, ainsi, d'ailleurs, que le tribunal administratif l'a considéré, que la responsabilité du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, maître d'ouvrage, n'est pas engagée dans la survenance de ces désordres ou la désorganisation du chantier qui en a résulté et ne doit être condamné qu'au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général, soit pour un chef de demande de la société Sicra Île-de-France n'ayant pas relevé de ces opérations d'expertise. Par suite, compte tenu des circonstances particulières de l'affaire, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE tout ou partie de ces frais d'expertise. Le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a mis à sa charge les frais d'expertise in solidum avec les sociétés Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, Octant Architecture et BTP Consultants.

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE :

20. Le présent arrêt ne prononçant aucune condamnation à l'encontre du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, ses conclusions tendant à la condamnation in solidum de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, de la société Octant Architecture, de la société BET Sicre et de la société BTP Consultants à le garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

Sur les conclusions d'appel provoqué formées par la société Sicra Île-de-France à l'encontre de la société Octant Architecture :

21. En premier lieu, les conclusions d'appel provoqué formées par la société Sicra Île-de-France à l'encontre de la société Octant Architecture, s'agissant des retenues opérées dans le décompte général du marché et du paiement de travaux supplémentaires, sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables. Elles doivent, dès lors, être rejetées.

22. En deuxième lieu, s'agissant du non-respect dommageable des délais prévisionnels du lot n° 1 que la société Sicra Île-de-France invoque et qu'elle évalue à un retard de quatre semaines et à hauteur de la somme de 76 373,30 euros HT, elle ne fournit aucune précision, ni aucun élément de nature à démontrer la réalité même de ce retard dommageable, ni, en tout état de cause, que ce retard serait imputable à une faute commise par la société Japac, mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, aux droits et obligations desquelles vient la société Octant Architecture. Par suite, ses conclusions d'appel provoqué formées à ce titre à l'encontre de la société Octant Architecture doivent être rejetées.

23. Enfin, s'agissant des non-conformités de l'implantation des pieux de fondation de la piscine, le tribunal administratif a condamné in solidum la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales représentée par Me C...B..., ès-qualité de liquidateur, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, et la société BTP Consultants à verser à la société Sicra Île-de-France la somme de 131 700 euros HT estimée par l'expert. La société Sicra Île-de-France, en se bornant à invoquer un retard de treize semaines induit par l'erreur dans l'implantation des pieux commise par la société Forage et Fondations et non un retard de huit semaines retenu par l'expert et à contester la méthode d'évaluation par ce dernier de son préjudice constitué par les coûts d'immobilisation de son personnel et de son matériel, ne fournit aucune précision, ni aucun élément de nature à démontrer qu'il aurait été fait une estimation sous-évaluée de son préjudice. Par suite, ses conclusions d'appel provoqué tendant à la condamnation de la société Octant Architecture à lui verser la somme de 453 733,60 euros HT en réparation de ce préjudice doivent être rejetées.

Sur les conclusions d'appel provoqué présentées par les sociétés Octant Architecture et BTP Consultants :

24. En premier lieu, il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise du 9 novembre 2006 que la société Japac, mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, architecte, économiste, architecte d'opération et titulaire d'une mission d'ordonnancement-pilotage-coordination, a commis une faute dans l'exécution de ses missions, à l'origine de la mauvaise implantation des pieux de fondation de la piscine et de la désorganisation du chantier qui en a résulté, d'une part, en ne s'assurant pas de la qualité du contrôle interne de l'entreprise, attributaire du lot n° 1, quant à la bonne implantation des pieux et en ne surveillant pas, lors de la réalisation de ce lot, l'exécution du chantier et, en particulier, cette bonne implantation, d'autre part, en s'abstenant de prendre les mesures nécessaires afin de remédier aux désordres constatés. En outre, il résulte également de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise que la société BTP Consultants s'est vu confier une mission de contrôle technique, lors de la conception et de l'exécution des travaux, incluant une mission relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements dissociables et indissociables. Eu égard à la technicité et aux difficultés inhérentes à l'implantation de pieux de fondation, la contribution à la prévention des différents aléas techniques de la société BTP Consultants, qui n'a émis aucune remarque sur les moyens mis en oeuvre par les intervenants pour s'assurer et vérifier la bonne implantation des pieux, ne peut être regardée comme ayant été correctement effectuée. Par suite, ni la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, ni la société BTP Consultants ne sont fondées à demander à être mises hors de cause. Pour les mêmes motifs, elles ne sont pas davantage fondées à demander à être garanties à plus de 60 % par la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC Fondations spéciales.

25. En deuxième lieu, alors même que le rapport d'expertise du 9 novembre 2006 ne retient pas une part de responsabilité dans la survenance des désordres à l'encontre de la société BET Sicre, il résulte de l'instruction et il ne saurait être sérieusement contesté que cette société, chargée également de la direction de l'exécution des travaux du lot n° 1 " fondations spéciales " et qui a d'ailleurs dans un premier temps, à la suite de la transmission par la société Forage et Fondations des recollements des pieux implantés, considéré à tort que cette implantation était conforme, a également commis une faute dans l'exécution de ses missions, à l'origine de la mauvaise implantation des pieux de fondation de la piscine et de la désorganisation du chantier qui en a résulté, en ne s'assurant pas de la qualité du contrôle interne de l'entreprise, attributaire du lot n° 1, quant à la bonne implantation des pieux et en ne surveillant pas, lors de la réalisation de ce lot, l'exécution du chantier. Par suite, la société Octant Architecture, venant aux droits et obligations de la société Japac, et la société BTP Consultants sont fondées à soutenir que la société BET Sicre est également responsable des désordres en cause. Il y a donc lieu de condamner la société BET Sicre à garantir la société Octant Architecture à hauteur de 15 %. En revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions d'appel en garantie de la société BTP Consultants, dont la part de responsabilité n'a été fixée qu'à hauteur de 10 %.

26. Enfin, il résulte de ce qui précède que, d'une part, la société Octant Architecture est fondée, s'agissant des frais d'expertise, à demander être garantie à hauteur de 60 % par la société Heaven Climber Fondations Spéciales - HC Fondations Spéciales et de 15 % par la société BET Sicre. D'autre part, la société BTP Consultants, s'agissant des mêmes frais, est fondée à demander être garantie à hauteur de 60 % par la société Heaven Climber Fondations Spéciales - HC Fondations Spéciales.

Sur les conclusions d'appel provoqué de la SCP BTSG² :

27. La circonstance que la société Sicra Île-de-France n'a pas produit de créances à la procédure collective de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC Fondations spéciales, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif, s'agissant des créances qui, par leur nature, relèvent de sa compétence, comme en l'espèce s'agissant des sommes dues par la société Forage et Fondations à la société Sicra Île-de-France au titre d'un dommage causé lors de la réalisation d'un marché public de travaux, examine si l'entreprise demanderesse, la société Sicra Île-de-France, a droit à indemnisation, fixe le montant des sommes qui lui sont dues à ce titre et prononce la condamnation de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC Fondations spéciales, venant aux droits et obligations de la société Forage et Fondations, à verser une indemnité, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur le recouvrement de ces créances. Il suit de là que la SCP BTSG², agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Heaven Climber Fondations spéciales - HC fondations spéciales, n'est pas fondée à soutenir qu'en prononçant une condamnation à son encontre, bien qu'elle fût en état de liquidation judiciaire, le Tribunal administratif de Versailles aurait méconnu les dispositions des articles L. 622-7 et L. 622-21 du code de commerce.

Sur les frais liés à l'instance :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement des sommes que les sociétés Sicra Île-de-France, Octant Architecture, BTP Consultants, BET Sicre et BTSG² demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Sicra Île-de-France une somme de 2 000 euros à verser au SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE sur le fondement des mêmes dispositions. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les mêmes circonstances, de mettre à la charge des sociétés Sicra Île-de-France, Octant Architecture, BTP Consultants le versement des sommes que les sociétés BET Sicre, BTSG² et Sicra Île-de-France demandent sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE a été condamné à verser à la société Sicra Île-de-France par l'article 1er du jugement n° 0905647 du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 juin 2014, au titre de retenues injustifiées figurant dans le décompte général du marché en litige, est ramenée à la somme de 19 160,58 euros HT.

Article 2 : Le SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE est déchargé de la condamnation prononcée à son encontre par l'article 7 du jugement n° 0905647 du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 juin 2014.

Article 3 : La société BET Sicre est condamnée à garantir la société Octant Architecture à hauteur de 15 % des condamnations prononcées à son encontre par les articles 3 et 7 du jugement n° 0905647 du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 juin 2014.

Article 4 : La société Heaven Climber Fondations Spéciales - HC Fondations Spéciales est condamnée à garantir la société Octant Architecture et la société BTP Consultants de la charge des frais d'expertise à hauteur de 60 %.

Article 5 : Le jugement n° 0905647 du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 juin 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : La société Sicra Île-de-France versera au SIVOM DE LA RÉGION DE CHEVREUSE la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

2

N° 14VE02750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02750
Date de la décision : 14/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés. Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: M. ABLARD
Avocat(s) : SUR et MAUVENU ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-03-14;14ve02750 ?
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