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12/02/2019 | FRANCE | N°16VE03715

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 février 2019, 16VE03715


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) LES DOCKS LYONNAIS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sociales à l'impôt sur les sociétés, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010, et, à titre subsidiaire, l'absence d'imposition de la reprise d'une provision pour dépréciation d'un immeuble donné à bail au titre de l'exercice clos en 2010.

Par un jugement no 1505387 du

20 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) LES DOCKS LYONNAIS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sociales à l'impôt sur les sociétés, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010, et, à titre subsidiaire, l'absence d'imposition de la reprise d'une provision pour dépréciation d'un immeuble donné à bail au titre de l'exercice clos en 2010.

Par un jugement no 1505387 du 20 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2016, la SA LES DOCKS LYONNAIS, représentée par Me Susankova, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° à titre principal, de la décharger des impositions en litige et, à titre subsidiaire, de la décharger des impositions supplémentaires à raison de la reprise sur provision pour dépréciation d'un immeuble donné à bail ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SA LES DOCKS LYONNAIS soutient que :

- elle est restée passible de l'impôt sur les sociétés aux termes de l'article 206 du code général des impôts, et les articles 209 et 221 du code général des impôts lui étaient, dès lors, applicables ; la sortie du régime d'exonération dont elle bénéficiait ne peut être assimilée à un changement de régime fiscal et sa situation ne peut produire les mêmes effets que celle d'une cessation d'entreprise ; la société ne peut se voir réclamer un impôt alors qu'elle a subi une moins-value lors de la cession de l'immeuble, d'un montant de 1 253 585 euros et la décision des premiers juges est contraire à l'économie générale du dispositif d'exonération tel qu'il a été créé ;

- selon l'interprétation administrative de la loi fiscale, reste passible de l'impôt sur les sociétés une société bénéficiant d'un régime d'exonération en application de dispositions spéciales, telles que celles de l'article 208 C du code général des impôts ; sa situation est identique à celle d'autres sociétés, telles que celles implantées en zone franche urbaine ou les jeunes entreprises innovantes, qui, bénéficiant d'un régime d'exonération, ont la possibilité d'imputer les déficits résultant de l'activité exonérée sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés ;

- à titre subsidiaire, cette décision est également contraire au principe de neutralité des provisions, dès lors que la perte des déficits reportables aboutit in fine à l'absence de déduction en lien avec la dotation aux provisions correspondante.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Méry, rapporteur ;

- les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public,

- et les observations de Me Susankova, avocate de la SA LES DOCKS LYONNAIS.

Considérant ce qui suit :

1. La société Fontenay les 2 Gares, société civile immobilière, aux droits de laquelle est venue la société LES DOCKS LYONNAIS, a opté, avec effet au 1er janvier 2008, pour le régime d'exonération des sociétés d'investissements immobiliers cotées (SIIC) institué par l'article 11 de la loi n° 2002-1575 du 30 décembre 2002, codifié à l'article 208 C du code général des impôts. Elle est sortie de ce régime d'exonération au 1er janvier 2010, ne répondant plus à la condition posée par les dispositions de cet article pour bénéficier de ce régime d'exonération, relative à la détention de son capital. La société a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur les exercices clos en 2010, 2011 et 2012. A l'issue de ces opérations de contrôle, la société a été assujettie à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sociales sur l'impôt sur les sociétés, à hauteur d'un montant total de 3 846 738 euros, au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2010 en litige, le service ayant remis en cause l'imputation du déficit subi au titre de l'activité exonérée d'impôt sur les sociétés sur le résultat imposable. La société LES DOCKS LYONNAIS relève appel du jugement du 20 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, aux termes de l'article 206 du code général des impôts : "1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA, 239 bis AB et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues au IV de l'article 3 du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié, les sociétés coopératives et leurs unions ainsi que, sous réserve des dispositions des 6° et 6° bis du 1 de l'article 207, les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. [...] 3. Sont soumis à l'impôt sur les sociétés s'ils optent pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions prévues à l'article 239 : / [...] b. Les sociétés civiles mentionnées au 1° de l'article 8 ; (...) ". Les termes du 1° de l'article 8 du même code désignent les : " membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ; ". Et aux termes de l'article 208 C du code général des impôts : "I.-Les sociétés d'investissements immobiliers cotées s'entendent des sociétés par actions cotées sur un marché réglementé respectant les prescriptions de la directive 2004 / 39 / CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85 / 611 / CEE et 93 / 6 / CEE du Conseil et la directive 2000 / 12 / CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93 / 22 / CEE du Conseil, dont le capital social n'est pas inférieur à 15 millions d'euros, qui ont pour objet principal l'acquisition ou la construction d'immeubles en vue de la location, ou la détention directe ou indirecte de participations dans des personnes visées à l'article 8 et aux 1, 2 et 3 de l'article 206 dont l'objet social est identique. [...] II.-Les sociétés d'investissements immobiliers cotées visées au I et leurs filiales détenues, individuellement ou conjointement par plusieurs sociétés d'investissements immobiliers cotées, à 95 % au moins, directement ou indirectement, de manière continue au cours de l'exercice, soumises à l'impôt sur les sociétés et ayant un objet identique, peuvent opter pour l'exonération d'impôt sur les sociétés pour la fraction de leur bénéfice provenant de la location des immeubles (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 221 du code général des impôts : " (...) 2 En cas de dissolution, de transformation entraînant la création d'une personne morale nouvelle, d'apport en société, de fusion, de transfert du siège ou d'un établissement à l'étranger, l'impôt sur les sociétés est établi dans les conditions prévues aux 1 et 3 de l'article 201. / Il en est de même, sous réserve des dispositions de l'article 221 bis, lorsque les sociétés ou organismes mentionnés aux articles 206 à 208 quinquies, 239, 239 bis AA et 239 bis AB cessent totalement ou partiellement d'être soumis à l'impôt sur les sociétés au taux prévu au deuxième alinéa du I de l'article 219 ". Et aux termes de l'article 209 du même code : " (...) Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants. (...) ".

4. Si la société requérante soutient que la société Fontenay les 2 gares, aux droits de laquelle elle est venue, est restée passible de l'impôt sur les sociétés, au sens de l'article 206 du code général des impôts, pendant la période d'exonération de cet impôt, après son option pour le régime prévu par les dispositions de l'article 208 C du code général des impôts citées au point précédent, une SIIC qui a opté pour le régime d'exonération des bénéfices ne peut être regardée comme étant demeurée assujettie à l'impôt sur les sociétés. Les déficits constatés au cours de la période pendant laquelle elle était placée sous le régime de l'exonération sont dès lors insusceptibles de venir augmenter le déficit reportable sur des résultats futurs placés hors du champ de l'exonération prévue par ces dispositions. La société requérante ne peut pas plus se prévaloir de ce que la loi ne prévoit pas la perte du droit au report des déficits lors de la sortie du régime d'exonération des SIIC, cette perte du droit au report des déficits ne résultant pas de la sortie du régime exonératoire des SIIC, mais du fait que la charge que constitue le déficit dont le report est demandé est né pendant l'application de ce régime. Enfin, si la SA LES DOCKS LYONNAIS fait valoir qu'elle a subi en réalité une moins-value lors de la cession de l'immeuble, et que ce point est contraire à l'économie générale du dispositif d'exonération tel qu'il a été créé, cette circonstance n'est en tout état de cause pas le résultat de la mise en oeuvre du régime d'exonération, mais n'est en réalité que la conséquence de la perte du bénéfice de ce régime, perte qui est imputable à la société, et ne saurait être opposée à l'administration.

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. La société requérante, qui, au demeurant, n'invoque pas l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ne peut utilement se prévaloir des termes du Bulletin officiel des impôts, BOI-IS-FUS-10-20-20-20150304, point 10, BOI-IS-BASE-60-10-20-10-20120912, point 10, BOI-ENR-AVS-10-10-20-2016-0406, point 170 et BOI-RFPI-TDC-20-10-20121008, point 50, BOI-BIC-CHAMP-80-10-20-40, point 100 et BOI-BIC-CHAMP-80-20-20-20, point 90, qui sont relatifs à des régimes distincts d'exonération de l'impôt sur les sociétés.

Sur le bien-fondé de l'imposition de la reprise sur provision :

6. Il résulte de ce qui a été exposé au point 4 que la société requérante n'est pas fondée, au soutien de sa demande, à se prévaloir de principes qui ne trouvent à s'appliquer que dans le cadre d'un même régime fiscal, notamment relatifs à l'équilibre entre la déductibilité d'une dotation aux provisions et l'imposition pratiquée en matière de reprise. Elle n'apporte pas la preuve, par les éléments qu'elle invoque, du non-respect des règles applicables en matière de reprise sur provision, alors que la reprise en cause constate l'augmentation de la valeur de l'immeuble détenu et que l'article 208 C du code général des impôts ne prévoit aucune disposition relative aux provisions constituées antérieurement à la sortie du régime d'exonération.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société LES DOCKS LYONNAIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société anonyme LES DOCKS LYONNAIS est rejetée.

2

N° 16VE03715


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03715
Date de la décision : 12/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Provisions.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Fabienne MERY
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-02-12;16ve03715 ?
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