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16/10/2018 | FRANCE | N°17VE00996

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 16 octobre 2018, 17VE00996


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...E...a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement no1307463 du 3 février 2017 le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 30 mars 2017 et 11 décembre 2017, M. et Mme C...A...E..., représentés par Me Coriou, avocat, d

emandent à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de les décharger des cotisations sup...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...E...a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement no1307463 du 3 février 2017 le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 30 mars 2017 et 11 décembre 2017, M. et Mme C...A...E..., représentés par Me Coriou, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de les décharger des cotisations supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités dont ces impositions ont été assorties ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4° de mettre à la charge de l'État les entiers dépens de l'instance.

M. et Mme A...E...soutiennent que :

- il n'est pas établi que M. A...E...est le bénéficiaire des revenus considérés comme distribués par la société OPTALIX, dès lors que la gestion commerciale et administrative de cette société, dont M. A...E...est le gérant, est assurée par son personnel, et que les membres de celui-ci peuvent être les bénéficiaires des sommes regardées par l'administration fiscale comme distribuées à son profit ; il n'est que très peu présent dans le magasin, et son domicile est très éloigné du siège de la société ; la société ne l'a pas désigné comme bénéficiaire des revenus distribués ; l'administration l'a seul désigné comme tel ; M. A... E...ne peut être regardé comme seul maître de l'affaire, le capital social de la société étant réparti à parts égales entre deux associés, lui et M. D...A...B... ; la détention du capital social de la société a été appréciée de manière erronée par le service ; lui et son épouse n'étant pas les seuls détenteurs du capital social de la société, ils ne peuvent être regardés comme ayant appréhendé les sommes considérées comme distribuées, dont ils ne peuvent ensemble ou séparément être les bénéficiaires ;

- le Tribunal administratif de Lyon a été saisi par la société d'une requête tendant à la décharge des impositions mises à sa charge ; la Cour ne pourra statuer que lorsque le Tribunal aura rendu sa décision sur ces impositions, et, ainsi, le montant des distributions ;

- le service avait pour obligation de demander l'identité et les coordonnées du bénéficiaire des revenus regardés comme distribués.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Méry, rapporteur,

- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...E...était le gérant de droit de la société à responsabilité limitée (SARL) OPTALIX, laquelle exploitait deux fonds de commerce situés à Lyon et Saint-Etienne, dont l'activité était la vente et la location de vidéogrammes, la vente de livres, gadgets, articles de sex-shop. Cette société, qui a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire simplifiée le 4 avril 2017, après une cessation de paiement intervenue le 31 mai 2016, a été soumise à une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juillet 2009, date de sa constitution, au 31 décembre 2010. Des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ont été notifiés à la société OPTALIX, par une proposition de rectification en date du 1er mars 2012, la reconstitution du chiffre d'affaires de celle-ci ayant abouti à l'évaluation de minorations de recettes. Parallèlement, la situation fiscale de M. et Mme A...E...a fait l'objet d'un contrôle sur pièces, à l'issue duquel le service leur a adressé une proposition de rectification en date du 10 décembre 2012 tirant les conséquences, en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, au titre des années 2009 et 2010, des rehaussements des bénéfices notifiés à la SARL au motif que M. A...E...avait bénéficié, en tant que maître de l'affaire, de revenus réputés distribués par la SARL OPTALIX. M. et Mme A... E... demandent l'annulation du jugement du 3 février 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. et Mme A...E...tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles celui-ci et son épouse ont été assujettis, à hauteur de 27 399 euros au titre de l'année 2009 et de 8 033 euros au titre de l'année 2010.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes des dispositions de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ".

3. Il résulte de ces dispositions que si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts à raison des sommes correspondantes mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier.

4. Il résulte de l'instruction que le service était en mesure d'identifier M. A... E... comme bénéficiaire des revenus regardés comme distribués par la société OPTALIX. Il suit de là que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la circonstance que le service n'a pas demandé à la société OPTALIX de désigner le bénéficiaire des distributions résultant de la rectification de son résultat est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Aux termes des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. /Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. ".

6. L'administration soutient, sans être contredite, que M. et Mme A...E...n'ont pas présenté d'observations à la suite de la proposition de rectification en date du 10 décembre 2012 qui leur a été notifiée. Ces derniers supportent dès lors la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions en litige.

En ce qui concerne l'appréhension des revenus litigieux :

7. Il résulte de l'instruction que le service, à la suite de la vérification de comptabilité de la société OPTALIX, a reconstitué le bénéfice imposable de ladite société et a mis en évidence des minorations de recettes évaluées à 65 882 euros pour l'exercice 2009 et à 38 710 euros pour l'exercice 2010, toutes taxes comprises. Le service a considéré comme revenus distribués entre les mains de M. et Mme A...E...les insuffisances de recettes mises en évidence. Les requérants, dans le cadre de la présente instance, n'apportent aucun élément factuel ou justificatif pour contester les montants des revenus distribués pour les deux années litigieuses. Ils se bornent à rappeler que les montants des minorations de recettes à l'origine des revenus considérés comme distribués ont été contestés par une requête enregistrée au Tribunal administratif de Lyon par la société OPTALIX. En tout état de cause, ce tribunal a statué le 21 juin 2016 sur ladite requête, par un jugement devenu définitif, et il a rejeté la demande de la société OPTALIX tendant à la décharge des cotisations supplémentaires en matière d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie.

8. Aux termes des dispositions de l'article 109, 1, 1° du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Et aux termes du 1er alinéa de l'article 110 du même : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. ". En cas de refus des rehaussements par les contribuables qu'elle entend imposer comme bénéficiaires des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que ceux-ci en ont effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

9. D'une part, l'administration indique, sans être contredite, que M. A... E... est le gérant de droit de la société OPTALIX et qu'il dispose seul de la signature sur les comptes bancaires de la société et de la signature sociale de celle-ci, qu'il s'occupe des achats auprès des fournisseurs et prévoit les moyens matériels et humains nécessaires à la réalisation de l'objet statutaire de la société. Si M. et Mme A...E...contestent la prise en charge de la gestion administrative et commerciale de la société par M. A... E..., ils n'étayent d'aucune preuve leurs affirmations selon lesquelles celle-ci est assurée par le personnel présent quotidiennement pour recevoir les clients et assurer les encaissements. D'autre part, M. et Mme A...E..., qui apportent la preuve, en produisant les statuts de la société OPTALIX, que le capital social de celle-ci est détenue non par le couple à 100% mais à hauteur de 50% par M. A...E...et à hauteur de 50% par un second associé, M. A...B..., ne soutiennent pas que ce dernier exerce une part des responsabilités relatives à la gestion de la société et n'apportent ainsi pas d'éléments de nature à contester que M. A...E...dispose seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, et est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire. Il s'en suit que l'administration a pu regarder M. A...E...comme ayant appréhendé les revenus distribués litigieux, en sa qualité de seul maître de l'affaire, les requérants n'apportant aucun élément pour combattre la présomption d'appréhension. Elle a pu, dès lors, imposer à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ces revenus entre les mains de M. et Mme A...E..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires en matière de contributions sociales, que M. et Mme A...E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que celles relatives au paiement des dépens de l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...A...E...est rejetée.

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N° 17VE00996


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00996
Date de la décision : 16/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Fabienne MERY
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : CORIOU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-10-16;17ve00996 ?
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