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16/10/2018 | FRANCE | N°17VE00290

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 16 octobre 2018, 17VE00290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au Tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011 en droits et pénalités.

Par une ordonnance du 18 mars 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a transmis au Tribunal administratif de Mont

reuil la requête présentée par M. et Mme B...C....

Par un jugement n° 1426318 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au Tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011 en droits et pénalités.

Par une ordonnance du 18 mars 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a transmis au Tribunal administratif de Montreuil la requête présentée par M. et Mme B...C....

Par un jugement n° 1426318 du 24 novembre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé M. et MmeC..., en droits, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales afférentes auxquelles ils avaient été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011 en conséquence de la réduction de base d'un montant de 190 779,62 euros correspondant à la déduction des charges foncières à hauteur 50 % de 381 559,23 euros, et en pénalités de la majoration de 40 % pour manquement délibéré qui leur a été infligée au titre des années 2009 et 2010, et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2017, le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la Cour :

1° d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement ;

2° de rétablir partiellement M. et Mme C...au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009.

Il soutient que :

- le jugement attaqué a retenu un montant global des charges déductibles erroné ;

- une facture a été prise en compte deux fois.

Vu le jugement attaqué.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dibie, rapporteur,

- les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., pour M. et MmeC....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C...ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration fiscale a remis en cause les déficits fonciers qu'ils ont déclarés au titre des années 2009, 2010 et 2011, ainsi que l'imposition de revenus mobiliers au titre de l'année 2010. Le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a partiellement fait droit à la requête de M. et MmeC.... Ceux-ci, pour leur part, forment un appel incident.

Sur la recevabilité des conclusions d'appel incident de M. et Mme C...en tant qu'elles portent sur les impositions supplémentaires des années 2010 et 2011 :

2. Par la voie de l'appel incident, M. et Mme C...demandent la réforme du jugement attaqué en tant qu'il ne fait pas intégralement droit à leurs conclusions, ainsi que la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis. Ces conclusions incidentes portent sur les années d'imposition 2009, 2010 et 2011 alors que le recours principal du ministre porte exclusivement sur l'impôt sur le revenu de l'année 2009. Ces conclusions incidentes en tant qu'elles portent sur les années 2010 et 2011 soulèvent ainsi un litige distinct du litige principal et ne sont, dès lors, pas recevables.

Sur les conclusions d'appel principal du ministre de l'action et des comptes publics :

3. Le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES soutient que le jugement attaqué aurait retenu un montant global des charges déductibles erroné en raison de la double prise en compte d'une facture " AteliersC... " en date du 24 décembre 2009, et d'une erreur dans le total des factures retenues. Il est constant que le montant total des travaux réalisés au titre de l'année 2009, dont les époux C...justifient, notamment par la production de factures correspondant à des dépenses de travaux, s'élèvent à 140 292,68 euros toutes taxes comprises, comprenant les travaux réalisés par l'entreprise " Tous travaux du bâtiment ", à hauteur de 66 465 euros, ceux réalisés par l'entreprise Combes à hauteur de 17 184,73 euros, et les prestations réalisées par " l'atelierC... ", à hauteur de 56 642,95 euros, cette dernière ayant été prise en compte deux fois par le tribunal administratif, une fois hors taxe et une fois toutes taxes comprises. Par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à demander la réforme du jugement du 24 novembre 2016 en tant qu'il retient un montant de charges déductibles au titre de l'année 2009 supérieur à 140 292,68 euros.

Sur les conclusions d'appel incident de M. et Mme C...en tant qu'elles portent sur l'imposition supplémentaire de l'année 2009 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, le moyen tiré du défaut de motivation de la réponse aux observations des contribuables de la proposition de rectification du 7 novembre 2012 doit être écarté comme inopérant dès lors qu'il est formulé à l'appui des seules conclusions relatives à l'année 2010.

5. En second lieu, l'article 64 du livre des procédures fiscales dispose que : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. ". Il résulte de ces dispositions, ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, que lorsque l'administration invoque des faits constitutifs d'un abus de droit pour justifier un chef de rectification, le contribuable, qui n'a pu demander la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit, doit être regardé comme ayant été privé de la garantie tenant à la faculté de provoquer cette saisine si, avant la mise en recouvrement de l'imposition, l'administration omet de l'aviser expressément que le redressement a pour fondement les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.

6. M. et Mme C...font valoir que l'administration a implicitement invoqué l'abus de droit pour écarter le bail conclu avec M. A... et Mme E... sans toutefois faire application de la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. Il résulte, toutefois, de l'instruction que ce bail n'avait pas fait l'objet d'un acte notarié, n'avait pas été enregistré et n'était appuyé d'aucune pièce de nature à établir la date de sa signature. Il n'avait ainsi pas de date certaine. L'administration a pu, par suite, l'écarter sans qu'il soit nécessaire pour elle de le qualifier de fictif ou d'acte inspiré de motifs purement fiscaux. Elle n'était, dès lors, pas tenue de mettre en oeuvre la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 64 précité. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie en matière de revenus fonciers doit, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne le bien fondé des impositions :

S'agissant du montant de déduction de charges foncières retenues par les premiers juges :

7. Le moyen tiré de ce que le montant des charges déductibles retenu par les premiers juges serait en réalité erroné en leur défaveur doit également être écarté comme inopérant dès lors qu'il ne porte pas sur des factures rattachables à l'année 2009.

S'agissant du droit de déduire du revenu global les déficits fonciers déclarés :

8. En vertu de l'article 14 du code général des impôts: " Sous réserve des dispositions de l'article 15, sont compris dans la catégorie des revenus fonciers, lorsqu'ils ne sont pas inclus dans les bénéfices d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale, d'une exploitation agricole ou d'une profession non commerciale : 1° Les revenus des propriétés bâties, telles que maisons (...) " . Selon l'article 15 de ce code : " (...) II Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. (...) ". Le moyen tiré de ce que le pavillon de gardien de la villa Poiret doit être regardé comme un immeuble productif de revenu locatif ne peut qu'être écarté comme inopérant dès lors qu'il ne porte, en tout état de cause, pas sur l'année 2009.

9. Aux termes de l'article 156 du même code : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal (...) sous déduction : / I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) / 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes (...) ".

10. Dès lors que les intimés doivent être regardés comme s'étant réservé en 2009 la jouissance de leur bien, dont plusieurs parties sont inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, leur sont applicables les dispositions de l'article 41 E à l'annexe III du code général des impôts citées au point 2 ainsi que les dispositions de l'article 41 F de cette même annexe qui prévoient que : " I. Les charges visées à l'article 41 E comprennent tout ou partie des dépenses de réparation et d'entretien ainsi que des autres charges foncières énumérées aux a à e du 1° et au a du 2° du I de l'article 31 du code général des impôts. / Ces charges sont déductibles pour leur montant total si le public est admis à visiter l'immeuble et pour 50 % de leur montant dans le cas contraire. / II. Toutefois, les participations aux travaux de réparation ou d'entretien exécutés ou subventionnés par l'administration des affaires culturelles sont déductibles pour leur montant total. ", et les dispositions de l'article 17 ter de l'annexe IV au code général des impôts qui prévoient en outre que : " Sont réputés ouverts à la visite, au sens de l'article 41 I de l'annexe III au code général des impôts, les immeubles que le public est admis à visiter au moins : / Soit cinquante jours par an, dont vingt-cinq jours non ouvrables, au cours des mois d'avril à septembre inclus ; / Soit quarante jours pendant les mois de juillet, août et septembre. ".

11. Les époux C...font valoir que l'ensemble des charges doit être porté en déduction de leur revenu global, en application notamment des dispositions de l'article 41 F de l'annexe III au code général des impôts et non 50 % seulement comme l'a décidé le Tribunal. Toutefois, en se bornant à communiquer une attestation, établie le 20 août 2012 par M. A..., propriétaire de la villa Poiret, indiquant que la villa comme la maison de gardien sont " régulièrement visitées par le public depuis 2006 (...) et que des visites sont organisées tous les ans lors des journées du patrimoine en septembre, ainsi que des jours de semaine et des week-end tout au long de l'année, sur rendez-vous ou spontanément lorsque des visiteurs se présentent ", ainsi que le compte-rendu du conseil municipal du 29 août 2011 faisant mention des visites de la Villa organisées en septembre, à l'occasion des journées du patrimoine et de la possibilité de s'inscrire audites visites, ils ne justifient pas de visites du public organisées dans leur pavillon au cours de l'année 2009, seule année restant en litige. Par suite, c'est à bon droit que la déduction du revenu global de M. et Mme C...a été limitée à la moitié des charges admises, par application des dispositions précitées des articles 31 et 156 du code général des impôts et des articles 41 E à 41 J de l'annexe III de ce code.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a fixé à une somme supérieure à 140 292,68 euros le montant total des charges déductibles au titre de l'année 2009. M. et Mme C...ne sont ni recevables ni fondés à contester le jugement par la voie de l'appel incident. L'Etat n'étant pas la partie perdante, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge la somme de 3000 euros demandée par M. et Mme C...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les bases de l'imposition de M. et Mme C...au titre de l'année 2009 sont fixées en tenant compte d'un montant de charges foncières de 140 292,68 euros, déductibles à hauteur de 50 %.

Article 2 : L'imposition correspondant au rehaussement de la base d'imposition résultant de l'article 1er du présent dispositif est remise à la charge de M. et MmeC....

Article 3 : L'appel incident de M. et Mme C...est rejeté.

Article 4 : Le jugement n° 1426318 du 24 novembre 2016 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

2

N° 17VE00290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00290
Date de la décision : 16/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : MARSHALL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-10-16;17ve00290 ?
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