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04/10/2018 | FRANCE | N°17VE01711

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 04 octobre 2018, 17VE01711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation des décisions implicites de rejet nées du silence gardé par l'administration sur ses demandes des 23 juin et 5 octobre 2015 tendant, d'une part, à l'abrogation de l'arrêté de péril du 10 février 2010 et à l'édiction d'un nouvel arrêté de péril à l'encontre de la propriété de M. et Mme B...sise 57 rue de Poissy à Villennes-sur-Seine et d'autre part, à l'édiction d'un arrêté sur le fondement des pouvoirs de police du maire d

e Villennes-sur-Seine à l'encontre de la même propriété.

Par un jugement n° 1506531...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation des décisions implicites de rejet nées du silence gardé par l'administration sur ses demandes des 23 juin et 5 octobre 2015 tendant, d'une part, à l'abrogation de l'arrêté de péril du 10 février 2010 et à l'édiction d'un nouvel arrêté de péril à l'encontre de la propriété de M. et Mme B...sise 57 rue de Poissy à Villennes-sur-Seine et d'autre part, à l'édiction d'un arrêté sur le fondement des pouvoirs de police du maire de Villennes-sur-Seine à l'encontre de la même propriété.

Par un jugement n° 1506531 du 30 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 mai 2017, MmeA..., représentée par

Me Rocher-Thomas, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler les décisions implicites de rejet de ses demandes des 23 juin et 5 octobre 2015 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A...soutient que :

- l'arrêté du 10 février 2010 doit être abrogé en raison de circonstances nouvelles de fait, liées aux conclusions du rapport d'expertise judiciaire concluant à la propriété exclusive de la falaise à M. et MmeB... ;

- il est entaché d'une erreur de droit ;

- l'existence d'une procédure judiciaire devant le Tribunal de grande instance de Versailles ne fait pas obstacle à l'abrogation de l'arrêté ;

- eu égard au caractère urgent et nécessaire des travaux à réaliser, l'autorité du pouvoir de police est tenue de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ce danger.

..........................................................................................................

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Tronel,

- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,

- les observations de Me Rocher-Thomas, représentant MmeA...,

- et les observations de MeD..., représentant la commune de Villennes-sur-Seine.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...est propriétaire d'une maison d'habitation à Villennes-sur-Seine, se trouvant en surplomb de la propriété de M. et Mme B...dont elle est séparée par une falaise. Par arrêté du 10 février 2010, après avoir constaté que cette falaise présentait des risques d'effondrement, le maire a demandé dans son article 1er à M. et Mme B...de prendre immédiatement toutes les mesures conservatoires pour garantir la sécurité du jardin exposé au risque d'effondrement et d'interdire le passage dans cette zone. Il a, dans son article 2, demandé à Mme A...de saisir le Tribunal de grande instance de Versailles aux fins de désigner un expert et de réaliser " les mesures conservatoires d'urgence " prescrites pour conforter la falaise. A la suite du rapport déposé le 27 février 2015 par l'expert désigné par le Tribunal de grande instance de Versailles, Mme A...a demandé au maire de Villennes-sur-Seine, le 23 juin 2015, d'abroger son arrêté du 10 février 2010 en tant qu'il met à sa charge les travaux rendus nécessaires par l'état de la falaise. Le 5 octobre 2015, elle lui a demandé de prendre un arrêté prescrivant des travaux de mise en sécurité du site. Ses demandes ont été implicitement rejetées.

Par un jugement du 30 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mme A...tendant à l'annulation de ces décisions implicites de rejet. Mme A...relève appel de ce jugement.

Sur le refus implicite du maire de Villennes-sur-Seine d'abroger l'arrêté du 10 février 2010 en tant qu'il met à la charge de Mme A...les travaux de confortement de la falaise :

2. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les (...) les éboulements de terre ou de rochers (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-4 du même code : " En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. / Il informe d'urgence le représentant de l'Etat dans le département et lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites ". Une mesure de police n'est légale que si elle est nécessaire au regard de la situation de fait existant à la date à laquelle elle a été prise, éclairée au besoin par des éléments d'information connus ultérieurement. Toutefois, lorsqu'il ressort d'éléments sérieux portés à sa connaissance qu'il existe un danger à la fois grave ou imminent exigeant une intervention urgente qui ne peut être différée, l'autorité de police ne commet pas d'illégalité en prenant les mesures qui paraissent nécessaires au vu des informations dont elle dispose à la date de sa décision. La circonstance que ces mesures se révèlent ensuite inutiles est sans incidence sur leur légalité mais entraîne l'obligation de les abroger ou de les adapter.

3. Il ressort du rapport d'expertise du 27 février 2015 que le plan de site reconstitué par le sapiteur à partir d'un plan de morcellement de 1942 inclut la falaise dans la propriété de M. et Mme B...et que ceux-ci n'ont apporté aucun élément de nature à remettre en cause ces documents. Ainsi, à la date à laquelle Mme A...a demandé l'abrogation de l'article 2 de l'arrêté du 10 février 2010 mettant à sa charge les travaux de confortement de la falaise, le maire de Villennes-sur-Seine avait connaissance de nouveaux éléments figurant dans le rapport d'expertise et laissant à penser que la falaise n'appartenait pas à MmeA.... Dans ces conditions, en l'absence d'autres éléments contraires en sa possession et sans qu'il y ait lieu d'attendre que le juge judiciaire se soit prononcé sur la propriété de cette falaise, le maire était tenu d'abroger l'article 2 de son arrêté du 10 février 2010 imposant à Mme A...de réaliser toutes mesures conservatoires pour sécuriser la falaise.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen dirigé contre ce refus implicite, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite du maire de Villennes-sur-Seine d'abroger l'article 2 de l'arrêté du 10 février 2010.

Sur le refus implicite du maire de Villennes-sur-Seine de prendre un arrêté prescrivant les travaux de sécurisation de la falaise :

5. Mme A...soutient qu'eu égard au risque d'éboulement de la falaise, le maire de Villennes-sur-Seine était tenu, sans attendre l'issue des procédures devant le juge judiciaire, de prescrire des travaux de sécurisation du site.

6. L'exécution des mesures de sûreté sur des propriétés privées peut être ordonnée par le maire sur le fondement des pouvoirs que lui confère l'article 2212-4 du code général des collectivités territoriales en cas d'existence d'un danger grave persistant.

7. Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise que la falaise d'une hauteur de quinze mètres environ séparant les propriétés de Mme A...et de M. et Mme B... résulte de l'arrêt, en 1889, d'une carrière d'extraction de moellons de construction en calcaire. Des éboulements se sont produits en 2010 ayant conduit à l'édiction d'un arrêté de péril et à la mise en place de mesures de protection. Un nouvel éboulement a eu lieu en février 2013 dans l'angle constitué par la sente du Val Saint-Pierre. Ce même rapport relève que la poursuite des éboulements crée des vides menaçant la stabilité de la falaise. Il précise en outre que la falaise est constituée de bancs de calcaire présentant d'importantes fracturations, susceptibles, sous l'effet des conditions atmosphériques de se désolidariser et de chuter. Le rapport indique enfin qu'il " est urgent de sécuriser les lieux " et que " si les propriétaires des deux pavillons entendent pouvoir continuer à occuper les lieux, il est absolument nécessaire de les sécuriser ".

8. Il résulte de ce qui précède que le danger lié à l'effondrement de la falaise présentait, à la date à laquelle Mme A...a demandé au maire de Villennes-sur-Seine de prendre des mesures de protection, un caractère grave au sens des dispositions précitées de l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales. Le maire était dès lors tenu de faire usage des pouvoirs qu'il tient de cet article pour prendre toutes mesures de nature à mettre fin au danger. Par suite, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du rejet implicite de sa demande du 5 octobre 2015.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Villennes-sur-Seine une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeA..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de

Villennes-sur-Seine demande à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 30 mars 2017 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La décision implicite de rejet de la demande d'abrogation de l'article 2 de l'arrêté du 10 février 2010 est annulée.

Article 3 : La décision implicite de la demande de Mme A...du 5 octobre 2015 est annulée.

Article 4 : La commune de Villennes-sur-Seine versera à Mme A...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Villennes-sur-Seine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 17VE01711


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01711
Date de la décision : 04/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Étendue des pouvoirs de police.

Police - Police générale - Sécurité publique - Police des lieux dangereux.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT ERIC ROCHER-THOMAS (ERT)

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-10-04;17ve01711 ?
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