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27/09/2018 | FRANCE | N°18VE01318

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 27 septembre 2018, 18VE01318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 août 2017 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire en qualité de commerçant, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de comme

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 août 2017 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire en qualité de commerçant, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de commerçant dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1706301 du 8 mars 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 avril 2018, M.A..., représentée par Me Nessah, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie séjourner en France depuis 2009 et y a fixé le centre de ses intérêts personnels et professionnels ;

- il appartenait au préfet d'examiner s'il pouvait prétendre à un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord-franco-marocain du 9 octobre 1987 ou, à titre gracieux, à une admission exceptionnelle au séjour afin d'exercer une activité salariée ;

- lors de la demande de renouvellement de son titre de séjour, il a demandé un changement de statut en se prévalant de sa nouvelle qualité de salarié ;

- en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet n'a pas tenu compte de sa qualité de cogérant, ni des perspectives d'évolution de son activité ;

- le préfet a commis une erreur de droit au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. d'Haëm a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain né le 25 septembre 1984 et qui déclare être entré en France en 2009, s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de commerçant, valable du 27 août 2014 au 26 août 2015 ; que l'intéressé ayant sollicité, le 26 février 2015, le renouvellement de son titre de séjour, le préfet des Yvelines, par un arrêté du 2 août 2017, a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que M. A...relève appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / (...) 3° Pour l'exercice d'une activité non salariée, économiquement viable et dont il tire des moyens d'existence suffisants, dans le respect de la législation en vigueur. Elle porte la mention " entrepreneur/ profession libérale " (...). " ; qu'aux termes du III de l'article R. 313-36-1 du même code : " Lorsque l'étranger sollicite le renouvellement de la carte de séjour temporaire délivrée au titre des dispositions du 3° de l'article L. 313-10, il doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-4-1, les pièces suivantes : / 1° En cas de création, tout document établissant qu'il a réalisé son projet et que les ressources qu'il en tire sont d'un niveau équivalent au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein ; / 2° En cas d'insertion ou de participation, tout document établissant que les ressources qu'il en tire sont d'un niveau équivalent au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein (...). " ;

3. Considérant que, par l'arrêté attaqué du 2 août 2017, le préfet des Yvelines a refusé de renouveler le titre de séjour en qualité de commerçant de M.A..., gérant de la Sarl " La Fontaine " ayant pour activité un commerce d'alimentation générale, aux motifs que " la viabilité économique de la société créée par [l'intéressé] n'est pas établie " et que " son activité ne lui procure pas les ressources suffisantes au moins équivalentes au salaire minimum de croissance " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que les avis d'imposition de M. A...au titre de ses revenus des années 2015 et 2016 ne mentionnent que des revenus d'un montant, respectivement, de 3 321 euros et 6 311 euros, soit des revenus très inférieurs au salaire minimum de croissance ; que si le requérant, qui est le gérant unique de la Sarl " La Fontaine " depuis le 8 mai 2015, contrairement à ce qu'il soutient pour la première fois en appel en faisant état d'une cogérance, fait valoir que l'autorité préfectorale n'a pas tenu compte, pour apprécier les ressources qu'il tire de son activité commerciale, des perspectives d'évolution de cette activité, il n'allègue pas que ces perspectives revêtiraient un caractère favorable, ni ne produit le moindre élément, notamment comptable, de nature à démontrer la réalité de telles perspectives ; que, par suite, en estimant que l'activité gérée par M. A... ne lui procurait pas des ressources suffisantes au moins équivalentes au salaire minimum de croissance, le préfet des Yvelines n'a pas commis d'erreur d'appréciation de la situation de l'intéressé au regard des dispositions précitées et a pu légalement refuser, pour ce motif, de renouveler son titre de séjour ;

5. Considérant, d'autre part, que M. A...n'établit, ni n'allègue sérieusement avoir sollicité, lors de sa demande de renouvellement de titre de séjour, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord-franco-marocain du 9 octobre 1987 susvisé ou son admission exceptionnelle au séjour, à titre gracieux, afin d'exercer une activité salariée ; qu'au demeurant, le requérant ne fournit aucune précision, ni aucun élément sur cette activité salariée qu'il aurait envisagé d'exercer ; que, par suite, l'autorité préfectorale n'était pas tenue d'examiner sa situation au regard de ces stipulations ou en vue d'une mesure de régularisation à titre gracieux ;

6. Considérant, enfin, que les différentes circonstances invoquées par le requérant, à savoir la durée de son séjour en France depuis 2009, ses qualifications professionnelles, sa parfaite intégration sur le territoire, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de commerçant en 2015 ou la durée d'examen de sa demande de renouvellement de titre de séjour, sont incidence sur la légalité du refus que lui a opposé le préfet des Yvelines au motif, notamment, que son activité commerciale ne lui procurait pas des ressources suffisantes au moins équivalentes au salaire minimum de croissance ;

7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

8. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort ni des motifs de l'arrêté attaqué, ni des autres pièces du dossier que le préfet des Yvelines n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé, au titre de sa vie privée, au regard des stipulations précitées, avant de refuser de renouveler son titre de séjour et l'obliger à quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entaché l'arrêté en litige doit, en tout état de cause, être écarté ;

9. Considérant, d'autre part, que M. A...se prévaut de la durée de son séjour en France depuis l'année 2009 ainsi que de son intégration professionnelle ; que, toutefois, à supposer même que le requérant puisse être regardé, par les documents qu'il produit, comme établissant l'ancienneté et la continuité de son séjour sur le territoire, il ne justifie pas pour autant d'une insertion professionnelle stable et ancienne en France ; qu'en particulier, ainsi qu'il a été dit au point 4, l'activité commerciale qu'il exerce depuis l'année 2014 ne lui procure pas de ressources suffisantes ; qu'au demeurant, il n'apporte aucune précision sur ses conditions d'existence depuis son entrée irrégulière sur le territoire et le début de l'exercice de cette activité, période au cours de laquelle il s'est maintenu irrégulièrement en France ; que, par ailleurs, alors même que l'un de ses frères séjourne, de manière régulière, sur le territoire, l'intéressé, qui est célibataire et sans enfant, n'établit, ni n'allègue d'ailleurs, aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, au Maroc où résident ses parents et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté en litige portant refus de renouvellement de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces mesures ont été prises ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

4

N° 18VE01318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01318
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme BONFILS
Avocat(s) : NESSAH

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-09-27;18ve01318 ?
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