Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société ISOREX a demandé au Tribunal administratif de Versailles :
1° de condamner solidairement le centre hospitalier de la Mauldre, la société Tectum et la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise à lui verser, dans le cadre de l'exécution du lot n° 5 " Vêtures de façades " d'un marché portant sur la construction d'un bâtiment neuf de 202 lits à Montfort-L'Amaury, la somme de 156 617,41 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 octobre 2010 ;
2° de mettre les dépens solidairement à la charge du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise ;
3° de mettre solidairement à la charge du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1105987 du 14 avril 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement les 14 juin 2016 et
18 octobre 2017, la société ISOREX représentée par Me Ginisty-Morin, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de condamner solidairement le centre hospitalier de la Mauldre, la société Tectum et la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise à lui verser, dans le cadre de l'exécution du lot n° 5 " vêtures de façades " d'un marché de construction de l'hôpital local de
Montfort-L'Amaury, la somme de 156 617,41 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 octobre 2010 ;
3° de mettre les dépens solidairement à la charge du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise ;
4° de mettre solidairement à la charge du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- sa demande était recevable ; la personne responsable du marché disposait d'un délai de deux mois à compter de son mémoire de réclamation du 6 octobre 2010 pour y répondre ; qu'ayant répondu le 3 décembre 2010, elle disposait de trois mois pour adresser un mémoire complémentaire, ce qu'elle a fait le 25 février 2011, ce mémoire ayant été reçu le 28 février par l'hôpital local ; la personne responsable du marché disposait alors de trois mois pour répondre à ce mémoire, ce qu'elle a fait le 28 mars 2011 ; elle disposait ensuite de six mois pour saisir la juridiction administrative ; ses mémoires de réclamations des 6 octobre 2010 et 25 février 2011 ont été adressés à l'hôpital local et à la société Tectum ; faute d'avoir été adressés par ordres de service signés par la personne morale responsable du marché, les décomptes ne respectaient pas les conditions de validité du décompte général et définitif ;
- elle justifie de travaux supplémentaires pour la somme de 12 438,40 euros, ces travaux étant indispensables à l'exécution de l'ouvrage dans les règles de l'art ; le refus du maître d'oeuvre d'accepter les approvisionnements a bouleversé l'économie du contrat, ce refus ayant entraîné un surcoût de 5 726 euros ;
- l'hôpital local s'est engagé à supprimer la pénalité forfaitaire pour levée de réserves de 15 500 euros ; il ne conteste pas le caractère injustifié de la pénalité de 29 691,52 euros au titre des VRD ; l'hôpital local ne justifie pas l'application des pénalités de retard pour un montant de 90 650 euros ; le retard ne lui est pas imputable mais provient d'une mésentente entre la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise, la société Tectum et la société EVCTB ; les pénalités représentent plus de 35 % du montant du marché de base et sont excessives ;
- les intérêts moratoires s'établissent à la somme de 932,47 euros.
------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Camenen,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- les observations de MeB..., pour la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise et celles de MeC..., substituant MeA..., pour la société Oger International.
1. Considérant que dans le cadre de la construction du nouvel hôpital local de Montfort-L'Amaury, devenu centre hospitalier de la Mauldre, la société AEPRIM, aux droits de laquelle vient désormais la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise, a été chargée, le 10 novembre 2003, d'une mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage ; que la maîtrise d'oeuvre a été confiée, le 9 juillet 2004, à un groupement solidaire composé de la société Tectum, mandataire, et de la société Oger International, chargée d'une mission d'économiste et de bureau d'études techniques ; qu'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination a été confiée à la société Etudes Vérification Coordination Travaux de Bâtiments (EVCTB) ; que la société ISOREX s'est vu confier le lot n° 5 " vêtures de façades " du marché pour un prix global et forfaitaire de 443 229,36 euros TTC ; qu'après la réception des travaux, intervenue le 26 mai 2009, l'hôpital local a adressé, le 15 décembre 2009, le décompte général du marché à la société ISOREX ; que cette dernière a indiqué contester ce décompte le 20 janvier 2010 sans toutefois préciser les motifs de cette contestation et a adressé à l'hôpital local un nouveau décompte daté du 21 janvier 2010 ; que l'hôpital local lui a retourné un nouveau décompte général le 2 avril 2010 ; que la société ISOREX a adressé un mémoire de réclamation à l'hôpital local et à la société Tectum
le 6 octobre 2010 ; que, par un courrier du 3 décembre 2010, l'hôpital local a indiqué à la société ISOREX que ses demandes au titre des travaux supplémentaires, des pénalités de retard et des intérêts moratoires ne pouvaient être acceptées mais qu'un décompte général corrigé par le maître d'oeuvre, dans lequel la pénalité de levée de réserves de 15 500 euros serait supprimée, lui serait transmis pour acceptation ; que la société ISOREX a adressé un mémoire complémentaire de réclamation à l'hôpital local par un courrier du 25 février 2011 ; qu'elle a mis en demeure cet hôpital de lui verser la somme de 60 870,03 euros par un courrier du 16 mars 2011 ; que,
par un courrier du 28 mars 2011, l'hôpital local a informé la société ISOREX qu'un ordre de paiement de 55 951,52 euros TTC était transmis ce jour à la Trésorerie et lui a adressé copie d'un nouveau décompte général ; qu'à la suite d'un courrier de la société ISOREX du 17 mai 2011, l'hôpital local lui a renvoyé le 24 mai 2011 un décompte général corrigé faisant apparaître une révision de prix de 38 773,75 euros HT ; que, par une demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Versailles le 27 septembre 2011, la société ISOREX a sollicité la condamnation solidaire de l'hôpital local et de la société Tectum à lui verser la somme de 156 617,41 euros, outre les intérêts ; qu'elle a étendu sa demande de condamnation solidaire à la société
Crédit Agricole Immobilier Entreprise par son mémoire enregistré le 7 avril 2015 ; que, par le jugement attaqué du 14 avril 2016 dont elle relève appel, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que le centre hospitalier de la Mauldre, la société Tectum, la société Oger et la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise concluent au rejet de la requête et forment, à titre subsidiaire, des conclusions d'appel en garantie ;
Sur les conclusions indemnitaires de la société ISOREX :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 13-42 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux) dans sa rédaction applicable au présent marché : " Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service (...) " ; qu'aux termes de l'article 13-44 du même cahier : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de (...) de quarante-cinq jours, dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. / Si la signature du décompte général est refusée ou donnée sans réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre (...). Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. / Si les réserves sont partielles l'entrepreneur est lié par son acceptation implicite des éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portent pas " ; qu'enfin, aux termes de son article 13-45 : " Dans le cas où l'entrepreneur n'a pas renvoyé au maître d'oeuvre le décompte général signé dans le délai de trente jours ou de quarante-cinq jours, fixé au 44 du présent article, ou encore, dans le cas où, l'ayant renvoyé dans ce délai, il n'a pas motivé son refus ou n'a pas exposé en détail les motifs de ses réserves en précisant le montant de ses réclamations, ce décompte général est réputé être accepté par lui ; il devient le décompte général et définitif du marché " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'envoi à la société ISOREX par la directrice de l'hôpital local, de deux lettres recommandées, les 28 mars 2011 et
24 mai 2011, auxquelles étaient jointes les derniers décomptes généraux rectifiés signés par le mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre, la société ISOREX n'a adressé à ce dernier aucun mémoire de réclamation précisant, conformément aux dispositions précitées de l'article 13-44 du CCAG Travaux, les motifs de son refus de signature ou ses réserves, ainsi que le montant des sommes dont elle revendiquait le paiement, et fournissant les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'avaient pas fait l'objet d'un règlement définitif ; que la société ISOREX indique elle-même avoir reçu, le 1er avril 2011, le décompte général joint à la lettre du
28 mars 2011 et ne conteste pas avoir reçu le décompte général joint à la lettre du 24 mai 2011 qu'elle a d'ailleurs elle-même produit en première instance ; que, faute d'avoir contesté le dernier décompte général rectifié préalablement à la saisine du tribunal administratif, celui-ci est devenu le décompte général et définitif du marché ; que la demande présentée par la société ISOREX tendant à la contestation de ce décompte était, par suite, irrecevable, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ce décompte ne lui a pas été notifié sous la forme d'ordre de service ; que, de même, le mémoire de réclamation de la société ISOREX adressé antérieurement, le 6 octobre 2010, au maître d'ouvrage et au maître d'oeuvre est sans incidence sur cette irrecevabilité, alors au surplus qu'il a lui-même été remis plus de quarante-cinq jours après la notification du précédent décompte général joint à la lettre du maître d'ouvrage du
2 avril 2010 reçue le 9 avril 2010 ; que, dès lors, le décompte général du marché étant devenu définitif, la société ISOREX n'était pas recevable à le remettre en cause et à solliciter le paiement de diverses sommes qu'elle estimait lui être dues au titre du marché dont il s'agit ;
4. Considérant, en second lieu, qu'à supposer même que la société ISOREX ait entendu rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise au titre des travaux supplémentaires du marché et des pénalités qui lui ont été appliquées, elle ne justifie cependant pas de fautes qu'ils auraient commises, notamment en ce qui concerne les refus d'approvisionnement dont elle aurait fait l'objet ou l'origine des retards à l'origine des pénalités litigieuses ; qu'ainsi, les conclusions tendant à la condamnation solidaires de la société Tectum et de la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise doivent être rejetées ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que la société ISOREX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que, par suite, les conclusions présentées à titre subsidiaire par le centre hospitalier de la Mauldre, la société Tectum, la société Oger et la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise doivent être rejetées ;
Sur les frais de l'instance :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum et de la société Crédit Immobilier Entreprise, qui ne sont pas partie perdante, le versement à la société ISOREX d'une quelconque somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société ISOREX le versement au centre hospitalier de la Mauldre, à la société Tectum et à la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise, de la somme de 1 000 euros chacun à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société ISOREX est rejetée.
Article 2 : La société ISOREX versera au centre hospitalier de la Mauldre, à la société Tectum et à la société Crédit Agricole Immobilier Entreprise, la somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions du centre hospitalier de la Mauldre, de la société Tectum, de la société Crédit Agricole Immobilier Promotion et de la société Oger International est rejeté.
3
N° 16VE01815