Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C...épouse B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions en date du 26 avril 2017 par lesquelles le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1704432 du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 février 2018 et 30 mars 2018, Mme C...épouseB..., représentée par Me Gacon, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement.
2° d'annuler les décisions attaquées ;
3° d'enjoindre au préfet, si la décision de refus de séjour est annulée sur un motif de fond, de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou, si la décision de refus de séjour est annulée sur un motif de forme, de procéder au réexamen de sa demande, ainsi que de lui enjoindre, si la décision portant obligation de quitter le territoire est annulée, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour ; ces injonctions seront assorties d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du trentième jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, Me Gacon, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La requérante soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- il est motivé de façon erronée ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ; elle méconnait le 11° de l'article L. 313-11 et l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ; elle est insuffisamment motivée et elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bruno-Salel a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme C...épouseB..., ressortissante de la République démocratique du Congo née le 5 septembre 1980, demande l'annulation du jugement du 9 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Essonne du 26 avril 2017 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;
Sur l'irrégularité du jugement attaqué :
2. Considérant que la requérante soutient que les premiers juges ont motivé leur jugement de façon erronée en affirmant que le défaut de prise en charge médicale de sa fille ne devrait pas entrainer de conséquence d'une exceptionnelle gravité et que le traitement approprié est disponible en République démocratique du Congo ; que, toutefois, la circonstance que ce serait à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce motif pour écarter le moyen tiré de la violation du 11° de l'article L. 313-11 et l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relève du fond et non d'un défaut de motivation ; que, par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité de ce chef ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, la décision attaquée vise les dispositions applicables et indique, en s'appropriant les termes de l'avis défavorable émis le 7 juillet 2016 par le médecin de l'agence régionale de santé, que si l'état de santé de la fille de la requérante nécessite une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'ainsi, et eu égard à son obligation de respecter le secret médical, le préfet de l'Essonne a suffisamment motivé sa décision ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11 " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code, dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...). " ;
5. Considérant que le préfet a refusé de délivrer à la requérante un titre de séjour au motif que, ainsi qu'il ressort de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 7 juillet 2016, le défaut de prise en charge médicale de sa fille ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement approprié est disponible en République démocratique du Congo ; que pour contester cet avis, la requérante produit des certificats médicaux selon lesquels sa fille Séphora souffre d'un syndrome de Goldenhar associant une surdité profonde, des problèmes ophtalmologiques et une anomalie vertébrale qui nécessite un suivi pluri-disciplinaire, et notamment une prise en charge dans le cadre d'un projet de communication visio-gestuelle ; que, toutefois, aucun de ces certificats ne comportent aucune appréciation sur les conséquences éventuelles d'un défaut de prise en charge médicale ; qu'ils ne sont dès lors pas susceptibles de contredire l'avis du médecin de l'agence régionale de santé selon lequel l'absence de pris en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, et sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la possibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans le pays d'origine, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni, en tout état de cause, celles du 11° de l'article L. 313-11 du même code ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
7. Considérant que si la requérante soutient qu'elle réside en France depuis le mois de septembre 2013 avec son mari et sa fille Séphora, née en 2011, dont l'état de santé très dégradé requiert un suivi médical en France, il ressort des pièces du dossier que son mari d'origine congolaise est également en situation irrégulière sur le territoire français et que si sa fille Séphora fait l'objet d'un suivi médical pluridisciplinaire en France, il n'est pas établit, ainsi qu'il a été dit au point 5, que l'absence d'un tel suivi serait susceptible d'entraîner des conséquence d'une exceptionnelle gravité ; que la requérante, qui ne justifie par ailleurs d'aucune intégration particulière sur le territoire français, n'établit pas que la cellule familiale ne pourrait se recomposer hors de France ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet de l'Essonne n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs de fait, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant que le présent arrêt rejetant ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement serait illégale du fait de l'illégalité de ce refus de titre de séjour ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
9. Considérant que si la décision vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et rappelle que Mme C...épouse B...a formé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 25 août 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 13 novembre 2014, elle ne comporte aucune appréciation sur la situation de l'intéressée au regard de ces stipulations ; qu'elle est ainsi insuffisamment motivée et doit être annulée ;
10. Considérant qu'il résulte de toute ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...épouse B...est seulement fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 avril 2017 par laquelle le préfet de l'Essonne a fixé le pays de renvoi ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
11. Considérant que la requérante n'a formé aucune conclusion aux fins d'injonction et d'astreinte en cas d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ; que le présent arrêt, qui rejette les autres conclusions de requête de Mme C...épouseB..., n'implique aucune mesure d'exécution à prendre sur le fondement des articles L. 911-1, L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme C...épouse B...doivent être rejetées ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a en tout état de cause pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme C...épouse B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 26 avril 2017 par laquelle le préfet de l'Essonne a fixé le pays de renvoi de Mme C...épouse B...est annulée.
Article 2 : Le jugement n° 1704432 du Tribunal administratif de Versailles du 9 octobre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...épouse B...est rejeté.
10
2
N° 18VE00405
6