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13/06/2018 | FRANCE | N°17VE02560

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 13 juin 2018, 17VE02560


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions en date du 30 novembre 2016 par lesquelles le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700395 du 26 juin 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2017, M.A..., représenté par

Me Nunes, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement.

2° d'annuler les décisions a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler les décisions en date du 30 novembre 2016 par lesquelles le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700395 du 26 juin 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2017, M.A..., représenté par Me Nunes, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement.

2° d'annuler les décisions attaquées ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " salarié " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, Me Nunes, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. A...soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens tirés de l'exception d'illégalité de la décision du 21 juillet 2016 par laquelle la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) a rejeté la demande d'autorisation de travail qui lui avait été présentée par son employeur ;

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur réponse aux moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour et de l'exception d'illégalité de la décision de refus d'autorisation de travail prise par la DIRRECTE le 21 juillet 2016 ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en droit ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation et a commis une erreur de fait quant à la qualification de l'emploi qu'il occupe ;

- le préfet l'a privé de son droit d'être entendu tel que prévu par l'article 41 et le paragraphe 51 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle a ainsi également méconnu le caractère contradictoire de la procédure ;

- les décisions attaquées sont illégales du fait de l'illégalité de la décision de refus d'autorisation de travail prise par la DIRRECTE le 21 juillet 2016 ; la DIRRECTE a fondé son refus au regard de la profession de décorateur alors que l'emploi qu'il occupe correspond au métier de marchandiseur ;

- le préfet a commis une erreur de droit en se fondant, pour lui refuser un titre de séjour portant la mention " salarié ", sur l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que seuls lui sont applicables les articles 3 de l'accord franco-tunisien et 2.3.3. du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 ; il ne saurait être procédé à une substitution de base légale entre l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de l'accord franco-tunisien dès lors que le préfet ne dispose pas du même pouvoir d'appréciation, la situation de l'emploi ne lui étant pas opposable en tant que tunisien ;

- le préfet a commis une erreur de droit en ne procédant pas à l'examen des caractéristiques de l'emploi qu'il occupe, de sa qualification, de son expérience et de ses diplômes, ni de l'existence éventuelle de difficultés de recrutement dans le métier et la zone géographique concernés ;

- le préfet a également commis une erreur de droit en lui opposant la situation de l'emploi alors que le métier de marchandiseur qu'il exerce fait parti des métiers figurant dans l'annexe I du protocole du 28 avril 2008 pour lesquels l'article 2.3.3. du protocole prévoit que la situation de l'emploi ne peut pas être opposée ;

- le refus de séjour méconnait le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sur sa situation.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bruno-Salel a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré présentée pour M. A...a été enregistrée le 28 mai 2018.

1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien né le 4 septembre 1983, qui déclare être entré en France le 31 août 2010 sous couvert d'un visa de long séjour pour suivre des études, a obtenu un titre de séjour portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelé jusqu'au 6 mars 2016 ; qu'il a sollicité en vain, le 11 mars 2016, le changement de son statut pour obtenir un titre de séjour portant la mention " salarié " ; qu'il demande l'annulation du jugement du 26 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de le préfet de l'Essonne du 30 novembre 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative " Les jugements sont motivés " ;

3. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué, notamment de ses points 2 et 7, que, contrairement à ce que soutient le requérant, les juges de première instance ont répondu de manière suffisante aux moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour et de l'exception d'illégalité " de la décision de refus d'autorisation de travail prise le 21 juillet 2016 " par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) qui n'est en réalité que la confirmation sur recours gracieux de la décision prise par cet organisme le 13 juin 2016 ; que, dans ces conditions, ce jugement n'est pas entaché d'irrégularité de ce chef ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges, qui ont visé le moyen selon lequel l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité dès lors que la DIRRECTE a entaché son avis d'une erreur manifeste d'appréciation, y ont implicitement mais nécessairement répondu au point 7 en jugeant que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de l'avis de la DIRRECTE devait être écarté ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'exception d'illégalité " de la décision du 21 juillet 2016 " par laquelle la DIRRECTE a rejeté la demande d'autorisation de travail qui lui avait été présentée ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

En ce qui concerne le défaut de motivation en droit :

5. Considérant que la décision de refus de titre de séjour vise l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 et cite l'alinéa 1 de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet a fait application ; qu'elle est ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, suffisamment motivée en droit ; que les circonstances tirées de ce que le préfet aurait dû viser le protocole franco-tunisien du 28 avril 2008 au motif qu'il régirait exclusivement sa situation et que les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui seraient pas applicables, qui ont trait au fond du litige, sont sans incidence sur le caractère suffisamment motivé de cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;

En ce qui concerne le défaut d'examen particulier et l'erreur de fait :

6. Considérant qu'il ressort de la décision de refus de titre de séjour attaquée que le préfet, qui mentionne en particulier la demande de changement de statut présentée par M. A..., l'avis émis le 13 juin 2016 par la DIRRECTE sur la demande d'autorisation de formée par la société Auchan pour un poste de décorateur ainsi que les différents éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressé au regard des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions législatives et réglementaires qu'il a appliquées, a procédé à un examen particulier de la situation de M.A... ; que si ce dernier soutient que c'est à tort que le préfet a considéré qu'il était décorateur alors qu'il exerce le métier de marchandiseur figurant sur la liste des métiers ouverts aux ressortissants tunisiens sans considération de la situation de l'emploi, il ressort des pièces du dossier que l'entreprise Auchan a déposé une demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat de travail avec un salarié étranger pour un emploi de décorateur ; que le poste proposé par l'offre d'emploi confiée à l'agence Pôle emploi est intitulé décorateur/décorateur graphiste ; qu'il ne ressort pas de la description par la société Auchan du poste de décorateur graphiste produite, au demeurant non datée, que ce poste correspondrait, comme le soutient le requérant, à un poste de marchandiseur ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur de fait sur le métier qu'il exerce et n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

En ce qui concerne le droit d'être entendu et le caractère contradictoire de la procédure :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. 2. Ce droit comporte notamment : le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre " et qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de cette charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ; que, M.A..., en sollicitant son changement de statut, n'ignorait pas la nature des décisions susceptibles d'être prises à son encontre en cas de rejet de sa demande ; qu'il lui appartenait, en conséquence, de produire, lors de la présentation de sa demande d'admission au séjour ou au cours de l'instruction de celle-ci, tous les éléments susceptibles de venir à son soutien ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est même pas allégué, que M. A...aurait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il aurait été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la décision contestée de refus de titre de séjour ; qu'ainsi, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance de son droit à être entendu, au sens du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé aux articles 41 et 51 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et reconnus par l'article 6 du Traité sur l'Union européenne, ni à se plaindre d'un défaut de procédure contradictoire ;

En ce qui concerne les erreurs de droit et la substitution de base légale :

8. Considérant que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; qu'aux termes de l'article 2.3.3 du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 : " Le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'Accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " ; qu'aux termes des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié " (...) " ;

9. Considérant qu'ainsi que l'a jugé le tribunal, le préfet de l'Essonne ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour rejeter la demande de M. A...dès lors que cet article est inapplicable aux ressortissants tunisiens dont les conditions de séjour et de travail sont régies de manière exclusive par l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; que, toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

10. Considérant que la décision attaquée prise à tort sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 précité, se fonde notamment sur le fait que la situation de l'emploi pour le métier de décorateur ne permettait pas d'envisager favorablement la demande du requérant ; que la liste des métiers ouverts aux ressortissants tunisiens sans que leur soit opposable la situation de l'emploi, qui figure en annexe 1 au protocole du 28 avril 2008 complétant l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, ne comprend pas la profession de décorateur ; qu'ainsi, le préfet disposait du même pouvoir d'appréciation dans l'application des textes en cause et aurait pris la même décision en examinant la demande de M. A...sur le seul fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 ; que les moyens tirés de l'erreur de droit au regard du texte appliqué et de l'impossibilité de procéder à une substitution de base légale doivent, par suite, être écartés ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet, qui a procédé à l'examen des caractéristiques de l'emploi qu'occupe M. A...et a pris en compte les éléments relatifs à la situation de l'emploi communiqués par les services de la main d'oeuvre, lui a opposé, pour rejeter sa demande de titre de séjour, les circonstances que le métier dont il se prévalait n'était pas caractérisé par de fortes tensions sur le marché du travail et que l'entreprise qui s'engageait à l'employer ne justifiait pas avoir cherché à pourvoir cet emploi par des demandeurs d'emplois disponibles sur le marché du travail ; que ce faisant, le préfet n'était pas tenu de se prononcer sur sa qualification, son expérience et ses diplômes ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité des décisions par lesquelles la DIRRECTE a refusé de délivrer à M. A...une autorisation de travail :

12. Considérant que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, qui soumet la délivrance aux tunisiens d'un titre de séjour portant la mention salarié à la présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, renvoie ainsi pour son application, à défaut de stipulations spécifiques prévues dans cet accord, aux dispositions de l'article R. 5221-11 du code du travail selon lequel : " La demande d'autorisation de travail (...) est faite par l'employeur (...) " et de l'article R. 5221-20 du même code qui prévoient que : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule/ (...) " ;

13. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, la demande d'autorisation de travail formée par le magasin Auchan du Kremlin Bicêtre portait sur l'embauche d'un étranger pour un emploi de décorateur, lequel ne figure pas sur la liste des métiers figurant à l'annexe 1 du protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposable et M. A...n'établit pas qu'il exerce en réalité le métier de décorateur graphiste qui correspond au métier de marchandiseur qui figure dans cette annexe ; que, par suite, sa demande relevait de l'article 3 de l'accord franco-tunisien et non de l'article 2.3.3 du protocole susvisé et la situation de l'emploi lui était opposable ; qu'il résulte des termes de la décision du 13 juin 2016 par laquelle la DIRRECTE a refusé de délivrer à la société Auchan une autorisation de travail, confirmée sur recours gracieux le 21 juillet 2016, que le métier de graphiste correspond au ROME F1102 et que les indicateurs de tensions sur le marché du travail signalent qu'en Ile-de-France, ce métier n'est pas caractérisé par de fortes tensions sur le marché du travail, dès lors qu'il a été enregistré 7 189 demandeurs d'emploi pour 724 offres d'emploi déposées sur les listes de Pôle Emploi, en Ile-de-France, au cours du premier trimestre 2016 ; que le requérant n'est ainsi en tout état de cause pas fondé à soutenir que la " décision du 21 juillet 2016 " est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et l'erreur manifeste d'appréciation :

14. Considérant, d'une part, que M.A..., dont la situation est régie par l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne lui sont pas applicables ;

15. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

16. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. A..., qui déclare être entré en France le 31 août 2010, à l'âge de 27 ans, y a poursuivi des études, il est célibataire et sans charge de famille ; qu'il ne justifie d'aucune attache personnelle ou familiale en France et n'établit, ni même n'allègue, en être dépourvu dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, et même si le sérieux de l'intéressé ne fait pas de doute, le préfet de l'Essonne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a pris la décision attaquée et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ; pour les mêmes motifs de fait, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction, d'astreinte, et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être également rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02560
Date de la décision : 13/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : NUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-06-13;17ve02560 ?
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