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24/05/2018 | FRANCE | N°16VE02141

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 24 mai 2018, 16VE02141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 20 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt a refusé de leur délivrer un permis de construire un local commercial de restauration et d'annuler la délibération du 25 juin 2013 par laquelle le conseil municipal de la commune de

Saint-Brice-sous-Forêt a approuvé la modification de son plan local d'urbanisme ou, subsidiairement, en tant seulement qu'elle porte sur la création d

'un emplacement réservé sur des parcelles leur appartenant.

Par un jugement n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...C...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 20 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt a refusé de leur délivrer un permis de construire un local commercial de restauration et d'annuler la délibération du 25 juin 2013 par laquelle le conseil municipal de la commune de

Saint-Brice-sous-Forêt a approuvé la modification de son plan local d'urbanisme ou, subsidiairement, en tant seulement qu'elle porte sur la création d'un emplacement réservé sur des parcelles leur appartenant.

Par un jugement n° 1405055 du 10 mai 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2016, et un mémoire en réplique, enregistré le

30 janvier 2017, M. et MmeC..., représentés par Me Lacroix, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler le jugement ;

2° de constater l'illégalité de la délibération du 25 juin 2013 approuvant la modification du plan local d'urbanisme;

3° d'annuler l'arrêté du 20 mars 2014 par lequel le maire de la commune de

Saint-Brice-sous-Forêt a refusé de leur délivrer un permis de construire un local commercial de restauration ;

4° d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt, sous astreinte de

50 euros par jour de retard, de leur délivrer le permis de construire demandé dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire de réexaminer leur demande dans les mêmes conditions de délai ;

5° de mettre à la charge de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier, le Tribunal ayant opéré une substitution de base légale déguisée de la base légale du refus de permis, en contournant, par une prétendue erreur de plume, l'impossibilité de substituer le fondement de l'emplacement réservé entre les articles L. 123-2 et L. 123-1-5 8° du code de l'urbanisme ;

- les premiers juges ont soulevé d'office le motif de l'erreur de plume sans en informer les parties ;

- le Tribunal a insuffisamment motivé le jugement en omettant de statuer sur les moyens de légalité interne soulevés contre le refus de permis de construire ;

- le jugement est fondé sur des faits matériellement inexacts sur le contenu du rapport de présentation qui ne précise pas de besoins supplémentaires en places de stationnement ;

Sur la légalité de la délibération du 25 juin 2013 approuvant la modification du plan local d'urbanisme :

- elle est entachée d'une erreur de droit, l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme ne permettant pas de réserver un emplacement pour une aire de stationnement sur la parcelle

B 131- 132 ; le régime des servitudes prévu au c) de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme consistant à indiquer une localisation de terrains susceptibles d'être concernés par la réalisation d'équipements d'intérêt général, s'inscrit dans un rapport de compatibilité et ne fait pas obstacle, à la différence d'un emplacement réservé de l'article L. 123-1-5 du même code, à la constructibilité du terrain ; les articles R. 123-11 d) et R. 123-12 d) mentionnent distinctement les emplacements réservés et les servitudes de localisation devant figurer sur les documents graphiques ; le pouvoir d'appréciation de l'administration n'a donc pas la même portée entre servitude et emplacement réservé ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'intérêt général, de la réalité de l'intention de réaliser le projet, de la localisation et de la finalité ; ni la commune ni le rapport de présentation ne justifient des besoins de stationnement ; une aire de stationnement tend à favoriser les déplacements en voiture en s'opposant aux démarches environnementales inscrites dans le rapport de présentation ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir, la commune paralysant leur projet par une modification du plan local d'urbanisme destinée à faire échec au jugement du Tribunal de grande instance de Pontoise du 3 juin 2013 fixant une servitude de passage pour leur projet, et ce en soutien de la société BDM qui souhaite racheter leur fond et développer la zone commerciale ;

Sur la légalité du refus de permis de construire :

- la décision est insuffisamment motivée en fait ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'exception d'illégalité précédemment exposée de la délibération du 25 juin 2013 approuvant la modification du plan local d'urbanisme en tant qu'elle institue un emplacement réservé n° 27 sur la parcelle B 131-132 ;

- une servitude de localisation ne fait pas obstacle au projet ; le refus est entaché d'une erreur de droit ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir, l'arrêté ayant pour but de paralyser le projet commercial et de favoriser indirectement un intérêt étranger à l'urbanisme.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Geffroy,

- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant Me Lacroix pour M. et MmeC....

1. Considérant que M. C...a sollicité le 31 octobre 2013 la délivrance d'un permis de construire un local commercial sur deux parcelles lui appartenant sur le territoire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt ; que cette demande a été rejetée par un arrêté du

20 mars 2014 fondé sur l'incompatibilité du projet avec l'emplacement réservé n° 27 pour une aire de stationnement du plan local d'urbanisme approuvé par délibération du conseil municipal de Saint-Brice-sous-Forêt du 25 juin 2013 ; que les époux C...relèvent régulièrement appel du jugement du 10 mai 2016 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 20 mars 2014 ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 151-41 de ce code : " Dans les zones urbaines ou à urbaniser, le plan local d'urbanisme peut instituer des servitudes consistant : (...) c) A indiquer la localisation prévue et les caractéristiques des voies et ouvrages publics, ainsi que les installations d'intérêt général et les espaces verts à créer ou à modifier, en délimitant les terrains qui peuvent être concernés par ces équipements ; (...) " ; que par la délibération du 25 juin 2013 la commune a décidé de " repérer " aux documents graphiques du règlement, au titre de l'article L. 123-2 précité, un " emplacement réservé " d'une superficie de 1 312 m² sur les parcelles B 121-131-132 destiné à une aire de stationnement au bénéfice de la commune ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la création de cette servitude se situe sur la zone d'activités de la Chapelle Saint-Nicolas accueillant, outre quelques habitations dont celle des requérants, des grandes surfaces commerciales et de restauration ; que si la commune fait valoir que cette aire se justifie pour les automobilistes " particulièrement nombreux qui sont potentiellement susceptibles de stationner aux abords de l'espace commercial concerné ", il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme, que les objectifs d'aménagement des entrées de ville et de gestion de développement durable communale, ont mis en avant le caractère peu qualitatif de cette entrée de ville et le manque de circulations dites douces sans aucun constat d'une insuffisance de stationnements, ni aucune nécessité de les renforcer à proximité de cette zone d'activités ; que le rapport de présentation rappelant en outre au chapitre de la zone d'activités de la

Chapelle Saint-Nicolas que " les surfaces commerciales sont bordées de larges aires de stationnement ", dès lors, la création de cet emplacement réservé est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme prévoyant l'emplacement réservé n° 27 est fondé ;

4. Considérant que l'unique motif du refus, tiré de l'incompatibilité du projet de construction avec l'emplacement réservé n° 27, étant entaché d'illégalité, l'arrêté du 20 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt a refusé de délivrer un permis de construire à M. C...doit être annulé ; que pour l'application de l'article

L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen ne paraît susceptible, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2014 ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que M. et Mme C...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande d'annulation.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol (...) a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation (...) confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à l'intervention de la décision annulée, sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. " ; que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; que l'article L. 911-2 du même code dispose que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant, d'une part, que l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt en date du 20 mars 2014 refusant de délivrer à M. C...le permis de construire qu'il sollicitait implique seulement que la commune procède à une nouvelle instruction de la demande de permis de construire présentée par M.C... ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu de prononcer une astreinte ;

8. Considérant, d'autre part, que les conclusions aux fins d'injonction des requérants doivent être regardées comme confirmant la demande initiale de permis de construire ; que, par suite, la condition posée par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme imposant que la demande ou la déclaration soit confirmée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire doit être regardée comme remplie lorsque la juridiction enjoint à l'autorité administrative de réexaminer la demande présentée par le requérant ; que, dans un tel cas, l'autorité administrative compétente doit, sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que le pétitionnaire ne dépose pas une demande d'autorisation portant sur un nouveau projet, réexaminer la demande initiale sur le fondement des dispositions d'urbanisme applicables à la date de la décision annulée, en application de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ;

Sur les frais liés au litige :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt, qui a, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme C...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Brice-sous-Forêt sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1405055 du 10 mai 2016 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise et l'arrêté du 20 mars 2014 du maire de la commune de Saint-Brice-sous-Forêt sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de Saint-Brice-sous-Forêt de procéder à une nouvelle instruction de la demande de M. et Mme C...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Saint-Brice-sous-Forêt versera la somme de 2 000 euros à

M. et Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. et Mme C...est rejeté.

N° 16VE02141 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02141
Date de la décision : 24/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Effets des annulations.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : MINIER MAUGENDRE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-05-24;16ve02141 ?
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