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29/03/2018 | FRANCE | N°15VE03914

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 mars 2018, 15VE03914


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa remise aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507293 du 9 novembre 2015, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a annulé ces arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistré

e le 21 décembre 2015 et un mémoire enregistré le 31 mai 2017, le préfet de l'Essonne demande à la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa remise aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1507293 du 9 novembre 2015, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a annulé ces arrêtés.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2015 et un mémoire enregistré le 31 mai 2017, le préfet de l'Essonne demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande de M.B....

Le préfet de l'Essonne soutient que :

- l'arrêté a été pris par une autorité ayant reçu délégation du préfet ;

- l'arrêté est motivé en fait et en droit ;

- M. B...n'a fait aucune observation quant à son retour en Italie qui est membre de l'Union européenne et partie à la convention de Genève ou à son état de santé ;

- il n'a développé aucune vie privée et familiale sur le territoire français ;

- n'ayant pas de titre d'identité ou de voyage en cours de validité, c'est à bon droit qu'il a été placé en rétention ;

- l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'a pas été méconnu ;

- c'est à tort que le premier juge a retenu le moyen tiré de l'absence de communication des informations prévues par l'article 18 du règlement de l'Union européenne du 11 décembre 2000.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Colrat été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le préfet de l'Essonne relève appel du jugement en date du 9 novembre 2015 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a annulé ses arrêtés en date du 6 novembre 2015 par lesquels il a décidé la remise aux autorités italiennes de M.B..., de nationalité ivoirienne, en vue de l'examen de sa demande d'asile et a placé ce dernier en rétention administrative ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 29 du règlement n° 603/2013 du

26 juin 2013 : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'État membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend: a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant; b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n° 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les États membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; c) des destinataires des données; d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées; e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées (...) " ;

3. Considérant qu'à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 18, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000, aujourd'hui reprises à l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun ; que le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection ; qu'il s'en suit que la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles l'Etat français remet l'intéressé aux autorités compétentes pour examiner sa demande ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté comme inopérant ; que, par suite, le préfet de l'Essonne est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué du Tribunal administratif de Versailles a retenu le moyen tiré de l'absence de remise des informations visées par les dispositions de l'article 18 du règlement du 11 décembre 2000 reprises à l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 pour annuler les arrêtés litigieux et à demander l'annulation du jugement attaqué ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

5. Considérant que MmeC..., directrice à la préfecture de l'Essonne, bénéficiait d'une délégation pour signer la décision litigieuse par arrêté du préfet de l'Essonne en date du 1er juin 2015 régulièrement publié ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

6. Considérant que les arrêtés litigieux, qui visent les textes appliqués et précisent les circonstances de fait et de droit qui les fondent et permettent à l'intéressé d'en critiquer utilement le bien-fondé, remplissent les exigences du code des relations entre le public et l'administration relatives à la motivation des actes administratifs ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation des arrêtés litigieux doit, dès lors, être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions des livres V et VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et particulièrement des articles L. 742-1 à L. 742-6 et R. 742-1 à R. 742-4 dudit code concernant les décisions de transfert d'un étranger aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne responsable de l'examen de sa demande d'asile, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger son éloignement du territoire français ; que, dès lors, les dispositions des articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration, qui reprennent les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de transfert aux autorités de l'Etat responsable de la demande d'asile ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le requérant a bénéficié d'un entretien le 6 juillet 2015 au cours duquel lui ont été remises les brochures " A " et " B " dans une langue qu'il comprenait ainsi qu'il en a attesté par une mention manuscrite portée sur les exemplaires desdites brochures ;

8. Considérant que M. B...n'apporte aucune précision ni aucun élément de nature à établir que l'entretien dont il a bénéficié à la préfecture de l'Essonne n'aurait pas été mené dans des conditions conformes aux prescriptions de l'article 5 du règlement n° 604/2013, s'agissant en particulier de son caractère confidentiel ;

9. Considérant que M. B...qui était, à la date de la décision litigieuse sans domicile personnel et avait produit des attestations d'hébergement indiquant des adresses différentes, ne démontre pas qu'il aurait présenté des garanties de représentation suffisantes justifiant que l'arrêté de transfert aux autorités italiennes aurait dû lui laisser un délai de départ volontaire ;

10. Considérant qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. " ;

11. Considérant que M. B...soutient être atteint de problèmes de santé liés au port d'une prothèse oculaire et qu'il n'aurait pu bénéficier lors de son séjour en Italie de soins appropriés à son état ; que, toutefois, il n'apporte aucune justification à l'appui de ses allégations, au demeurant imprécises ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés attaqués aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées ou des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Versailles doit être rejetée que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1507293 du 9 novembre 2015 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal Administratif de Versailles ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administratives sont rejetées.

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N° 15VE03914


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03914
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : SIMOND

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-29;15ve03914 ?
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