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15/03/2018 | FRANCE | N°16VE00591

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 15 mars 2018, 16VE00591


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser la somme de 26 079,62 euros au titre des rappels de traitements qu'elle estime lui être dus pour les années scolaires 2008-2009, 2009-2010, 2010-2011 et 2011-2012, augmentés d'une majoration de 10% pour la part correspondant à la rémunération des heures supplémentaires.

Par un jugement n° 1206515 en date du 10 décembre 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 17 févrie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser la somme de 26 079,62 euros au titre des rappels de traitements qu'elle estime lui être dus pour les années scolaires 2008-2009, 2009-2010, 2010-2011 et 2011-2012, augmentés d'une majoration de 10% pour la part correspondant à la rémunération des heures supplémentaires.

Par un jugement n° 1206515 en date du 10 décembre 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 17 février 2016 et le 22 juin 2017, MmeB..., représentée par Me Colmant, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 26 079,62 euros au titre des rappels de traitements qu'elle estime lui être dus pour les années scolaires 2008-2009, 2009-2010, 2010-2011 et 2011-2012, augmentés d'une majoration de 10% pour la part correspondant à la rémunération des heures supplémentaires ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué, qui ne vise ni n'analyse avec une précision suffisante les conclusions et moyens des parties, est insuffisamment motivé et notamment quant à la réponse au moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ;

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en lui faisant supporter la charge de la preuve et en ne faisant pas usage des pouvoirs qu'il tire du caractère inquisitorial de la procédure administrative contentieuse ;

- il a commis une erreur de droit en écartant le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement ;

- elle est fondée à demander la somme de 26 079,62 euros correspondant à la rémunération des heures supplémentaires qu'elle a effectuées dès lors que, s'agissant des années scolaires 2008-2009, 2009-2010 et 2011-2012, son obligation réglementaire de service aurait dû être fixée à huit heures et celle de l'année scolaire 2010-2011 à neuf heures ;

- la différence de traitement entre professeurs enseignant en classe préparatoire n'est pas justifiée par une différence objective ; contrairement à ce que soutient le ministre, l'enseignement des langues vivantes nécessite une préparation des cours et un temps de correction des copies aussi importants que l'enseignement des mathématiques.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 50-580 du 25 mai 1950 ;

- le décret n° 50-581 du 25 mai 1950 ;

- le décret n° 72-580 du 4 juillet 1972 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Van Muylder,

- et les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public.

1. Considérant que, par un courrier du 6 juillet 2012, MmeB..., professeur agrégé d'anglais, qui exerce au lycée Jean-Baptiste Corot à Savigny-sur-Orge (Essonne) l'ensemble de son service en classes préparatoires économiques et commerciales aux grandes écoles, a demandé, en vain, au recteur de l'académie de Versailles le versement de rappels de traitement et d'heures supplémentaires au titre de la période du 1er septembre 2008 au 30 avril 2012 en faisant valoir que ses obligations réglementaires de service auraient dû être fixées à 8 ou 9 heures en application du décret n° 50-581 du 25 mai 1950 et non à 15 heures ; qu'elle relève appel du jugement en date du 10 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 26 079,62 euros au titre de ces rappels de traitements, augmentés d'une majoration de 10% pour la part correspondant à la rémunération des heures supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué, notamment de son point 4, que le tribunal administratif a indiqué que Mme B...n'établissait pas que " tous les enseignants assurant la totalité de leur service en classes préparatoires aux grandes écoles exerceraient leurs fonctions dans les mêmes conditions et seraient soumis aux mêmes sujétions, quelle que soit la discipline enseignée et la classe concernée " et qu'elle ne justifiait pas " eu égard aux spécificités propres à chaque classe préparatoire aux grandes écoles, notamment à leur programme respectif, à leur équilibre disciplinaire propre et aux concours auxquels elles préparent " que les dispositions des articles 6 et 7 du décret du 25 mai 1950, en réservant aux seuls professeurs enseignant une discipline étroitement corrélée à l'objectif de formation assigné à chaque type de classe préparatoire aux grandes écoles, des obligations réglementaires de service inférieures à celles exigées des autres enseignants en classes préparatoires, méconnaissaient le principe d'égalité de traitement entre les membres du corps des professeurs agrégés ; qu'ainsi, le jugement, qui par ailleurs vise et analyse l'ensemble des conclusions et moyens de MmeB..., est suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen tiré par Mme B... de ce que le jugement entrepris serait insuffisamment motivé ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient MmeB..., les premiers juges n'ont pas méconnu leur office en ne faisant pas usage de leur pouvoir d'instruction avant d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ;

4. Considérant, enfin, que si Mme B...soutient que le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreurs de droit, ce moyen qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal, est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

Au fond :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 mai 1950 portant règlement d'administration publique pour la fixation des maximums de service des directeurs et professeurs d'écoles normales primaires : " Les professeurs d'écoles normales sont tenus de fournir sans rémunération supplémentaire, dans l'ensemble de l'année scolaire, les maximums de service hebdomadaire suivants : Enseignements littéraires, scientifiques et pédagogiques. Agrégés : 15 heures (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 du décret du 25 mai 1950 portant règlement d'administration publique pour la fixation des maximums de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d'enseignement du second degré : " 1° Le maximum de service des professeurs de mathématiques, de sciences physiques et de sciences naturelles qui donnent tout leur enseignement dans les classes de mathématiques spéciales, de mathématiques supérieures, dans les autres classes préparatoires aux grandes écoles dont la liste est fixée par décision ministérielle, est arrêté ainsi qu'il suit : Classes de mathématiques spéciales et classes préparatoires à l'Ecole normale supérieure (sciences expérimentales) : / Classes ayant un effectif de plus de 35 élèves : 8 heures ; / Classes ayant un effectif de 20 à 35 élèves : 9 heures ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 du même décret dans sa rédaction applicable : " 1° Le maximum de service des professeurs de philosophie, lettres, histoire et géographie ou langues vivantes qui donnent tout leur enseignement dans la classe de première supérieure, dans celle de lettres supérieures, dans les classes préparatoires aux Ecoles normales supérieures (section des lettres), à l'Ecole nationale de la France d'outre-mer, à l'Ecole nationale des chartes, est fixé ainsi qu'il suit : Classes de Première supérieure : Classes ayant un effectif de plus de 35 élèves : 8 heures ; Classes ayant un effectif de 20 à 35 élèves : 9 heures ; (...) 2° Le maximum de service des professeurs qui n'assurent dans la classe de première supérieure ou dans celle de lettres supérieures qu'une partie de leur service est fixé conformément aux articles 1er et 4 du présent décret. Toutefois, chaque heure d'enseignement faite soit en première supérieure, soit en lettres supérieures est comptée pour une heure et demie, sous réserve : a) Que dans le décompte des heures faites dans lesdites classes, les heures consacrées au même enseignement dans deux divisions ou sections d'une même classe ne soient comptées qu'une fois ; b) Que le maximum de service effectif du professeur ne devienne pas, de ce fait, inférieur à celui prévu au 1° ci-dessus pour un professeur donnant tout son enseignement dans lesdites classes. La même règle est applicable aux professeurs de philosophie, lettres, histoire et géographie ou langues vivantes qui enseignent dans les classes visées à l'article 6 ci-dessus, sous réserve que le maximum de service de ces professeurs ne soit en aucun cas inférieur à celui figurant au tableau qui suit : ( ...) Classes de mathématiques supérieures et classes préparatoires aux grandes écoles non désignées ci-dessus : Classes ayant un effectif de plus de 35 élèves : 11 heures ; Classes ayant un effectif de 20 à 35 élèves : 12 heures ; Classes ayant un effectif de moins de 20 élèves : 13 heures. (...)" ;

6. Considérant, en premier lieu, que Mme B..., professeur agrégé qui enseigne l'anglais en classe préparatoire économique et commerciale, ne peut utilement se prévaloir ni des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 25 mai 1950 qui s'appliquent au service des professeurs de mathématiques, de sciences physiques et de sciences naturelles, ni de celles du 1° de l'article 7 qui s'appliquent au service des professeurs enseignant dans des classes préparatoires littéraires ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire traite de manière différente des agents appartenant à un même corps si cette différence de traitement est justifiée par les conditions d'exercice des fonctions, par les nécessités ou l'intérêt général du service et si elle n'est pas manifestement disproportionnée au regard des objectifs susceptibles de la justifier ;

8. Considérant que les professeurs des matières dominantes des classes préparatoires, compte tenu des objectifs de préparation des élèves aux concours très sélectifs des grandes écoles et à l'enjeu de ces matières dans ces cursus, n'exercent pas leurs fonctions dans les mêmes conditions que les professeurs des autres matières enseignées dans ces mêmes classes préparatoires ; que la réduction de leurs obligations réglementaires de service est ainsi justifiée par les contraintes liées au programme et à l'objectif assigné à ces classes préparatoires ; que les différences relatives à la détermination des obligations de service réglementaires entre les professeurs enseignant les matières dominantes en classes préparatoires, qui peuvent varier entre 8 heures et 13 heures hebdomadaires selon la classe enseignée et l'effectif des élèves, et celles des autres professeurs agrégés, qui peuvent varier entre 11 heures et 13 heures, ne sont pas manifestement disproportionnées et sont en rapport avec les objectifs qui les fondent ; que, par suite, le pouvoir réglementaire n'a pas méconnu le principe d'égalité entre agents d'un même corps ; que Mme B...n'est, dès lors, pas fondée à se prévaloir de la différence de traitement pour justifier sa demande d'indemnisation ;

9. Considérant, enfin, que Mme B...ne peut utilement se prévaloir de la circulaire n° 2004-056 du 29 mars 2004 relative aux obligations de service des professeurs de classe préparatoire aux grandes écoles, de surcroît abrogée par la circulaire n° 2007-080 du 6 avril 2007, qui ne saurait légalement déroger aux dispositions règlementaires du décret précité

du 25 mai 1950, ni de celle du 9 décembre 2015, au demeurant postérieure à la période en litige ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

2

N° 16VE00591


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00591
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Égalité devant le service public - Égalité de traitement des agents publics.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Statuts spéciaux - Enseignants (voir : Enseignement et recherche).


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Céline VAN MUYLDER
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : COLMANT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-15;16ve00591 ?
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