Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 16 mai 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'unité territoriale de la Seine-Saint-Denis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France (DIRECCTE) a autorisé son licenciement pour inaptitude au poste de travail et impossibilité de reclassement.
Par un jugement n° 1406590 du 1er juin 2015, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2015, M.B..., représenté par Me Durand, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler la décision du 16 mai 2014 de l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'unité territoriale de la Seine-Saint-Denis de la DIRECCTE ;
3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à l'occasion de l'enquête contradictoire, des pièces ont été évoquées sans lui être remises : il s'agit des courriers échangés entre la médecine du travail et son employeur la société Central Télécom les 13 et 18 décembre 2013 ; c'est donc à tort que le tribunal administratif a considéré le contraire et affirmé qu'il n'établissait pas avoir été privé de la possibilité de présenter des observations écrites ou orales ;
- l'obligation de reclassement pesant sur l'employeur n'a pas été respectée : aucun élément objectif ne démontre une recherche réelle de reclassement, notamment par un aménagement de son poste ; l'entreprise ne produit pas son registre unique du personnel permettant de s'assurer du nombre et de la qualité de ses salariés ; sa réintégration aurait été possible dès le départ de l'ancien président, auteur de l'agression ; enfin la procédure de reclassement aurait dû être ré-initiée au stade de la seconde procédure de licenciement dès lors que celle qui avait été effectuée dans le cadre de la première demande, rejetée par l'inspection du travail et non contestée, était caduque ;
- il existe un lien entre son licenciement et son mandat syndical et par suite, la décision du 16 mai 2014 autorisant son licenciement a été prise en violation de l'article R. 2421-7 du code du travail.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Moulin-Zys,
- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,
- et les observations de M.B....
1. Considérant que M. B...relève appel du jugement du 1er juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 mai 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la 6ème section de l'unité territoriale de la Seine-Saint-Denis de la DIRECCTE, après enquête contradictoire eu égard à sa qualité de salarié protégé, a autorisé son licenciement pour inaptitude au poste de travail et impossibilité de reclassement ;
Sur le respect de la procédure :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat. (...) " ; que le caractère contradictoire de cette enquête, implique seulement, en ce qui concerne les éléments recueillis au cours de l'enquête, que l'inspecteur mette à même tant l'employeur que le salarié de prendre connaissance de l'ensemble des éléments déterminants qu'il a pu recueillir ;
3. Considérant que M. B...fait valoir que des courriers échangés les 13 et 18 décembre 2013, dans le cadre de l'enquête contradictoire, entre la médecine du travail et son employeur la société Central Télécom et relatifs à son inaptitude professionnelle, ont été évoqués sans lui être remis ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, que M. B...avait connaissance de son inaptitude à la poursuite d'une activité professionnelle au sein de l'entreprise Central Télécom et qu'il disposait d'ailleurs des deux avis d'inaptitude en date des 5 et 19 novembre 2013 ; qu'enfin la teneur des deux courriers des 13 et 18 décembre 2013 est reprise dans le courrier du 2 avril 2014 qui lui a été adressé, ce qui le mettait en capacité d'en demander communication avant la décision litigieuse portant autorisation de licenciement prise le 16 mai 2014, ce qu'il n'établit pas avoir fait ;
Sur le fond :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. (...) /L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. " ; que selon l'article L. 1226-12 du même code : " Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. / L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. (...) " ;
5. Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé ; que la circonstance que l'avis du médecin du travail, auquel il incombe de se prononcer sur l'aptitude du salarié à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ou à exercer d'autres tâches existantes, déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel, le cas échéant, celle-ci appartient, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations des postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
6. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'après une première visite médicale le 6 novembre 2013 et une visite dans les locaux de l'entreprise le 7 novembre 2013, le médecin du travail a déclaré M. B... inapte à son poste de travail ; qu'après la seconde visite médicale du 19 novembre 2013, il a rendu un avis définitif d' " inaptitude à la poursuite d'une activité professionnelle au sein de l'entreprise Central Télécom ", réitéré par courrier du
18 décembre 2013 adressé à l'employeur ; qu'une première demande d'autorisation de licenciement de M. B..., faite par courrier du 4 février 2014, a été rejetée par l'inspection du travail le 21 mars 2014 pour vice de procédure ; que, préalablement à la seconde demande d'autorisation de licenciement du 24 avril 2014, un courrier du président de la société, adressé au requérant le 2 avril 2014 détaille les étapes constitutives de la recherche de son reclassement et l'impossibilité qui en résulte ; que ce courrier du 2 avril 2014 mentionne qu'il a été rédigé après consultation des délégués du personnel, que le reclassement est impossible en raison de la nature des préconisations de l'inspecteur du travail et de la structure de l'entreprise, de petite taille et qui n'appartient pas à un groupe, que par ailleurs, exceptés les trois postes d'agents commerciaux, dont un occupé par l'intéressé lui-même, il n'existe que deux postes de télévendeurs, un poste de préparateur de commandes et quatre postes administratifs, tous occupés en CDI ; que le requérant, qui ne conteste pas ces éléments, n'établit pas que l'entreprise aurait manqué à son obligation de recherche de reclassement en se bornant à soutenir que le registre des entrées et sorties n'aurait pas été produit ; que le moyen tiré de la violation de l'obligation de reclassement, doit être écarté ;
7. Considérant que M. B...fait enfin valoir l'existence d'un lien entre son licenciement et l'exercice de son mandat syndical ; que s'il ressort des pièces du dossier que M. B... a vu sa santé se dégrader à la suite à son agression à l'arme blanche subie le
20 juin 2013 par le président de la société, il ressort toutefois de l'examen de sa plainte, qu'il y fait état de menaces physiques exercées par son président à la suite d'un différend à caractère strictement professionnel, sans lien avec ses fonctions représentatives des salariés ; par ailleurs, si le requérant fait également valoir que, dès son élection en qualité de délégué du personnel titulaire, il a subi des mesures de rétorsion le contraignant notamment, deux semaines après son élection, à déposer une main courante pour entrave à son mandat, il ressort de l'examen de cette main courante la mention d'un conflit entre l'intéressé et son employeur au sujet de sa rémunération et de ses objectifs fixés avant son élection ; que la circonstance qu'il n'ait pas été convoqué à la réunion des délégués du personnel du 19 décembre 2013 relative à l'examen de la question de son reclassement ne révèle pas à elle seule, la liaison du licenciement avec ses fonctions représentatives ; qu'enfin si M. B...produit un extrait d'une lettre de l'inspecteur du travail du 21 décembre 2012, demandant la mise à disposition d'un local et faisant état de problèmes dans l'exercice de son mandat, le caractère lacunaire de ce document et, l'absence de production de la réponse de l'entreprise, ne sont pas de nature à lui conférer une valeur probante concernant le moyen susanalysé ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'existence d'un lien entre le licenciement de M. B...et l'exercice de son mandat syndical, doit être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que par suite, ses conclusions doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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N° 15VE02319