La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/02/2018 | FRANCE | N°17VE02975

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 06 février 2018, 17VE02975


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 21 juillet 2017, M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de l'admettre au séjour et d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou " étudiant " dans un délai de deux mois ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai.

Par une ordonnance n° 1706681 du 25 juillet 2017, le premier vice

-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette requête pour irrecevab...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 21 juillet 2017, M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de l'admettre au séjour et d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou " étudiant " dans un délai de deux mois ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai.

Par une ordonnance n° 1706681 du 25 juillet 2017, le premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette requête pour irrecevabilité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 septembre 2017, M.A..., représenté par Me Sadoun, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour du 7 janvier 2016 ;

3° d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou " étudiant " dans un délai de deux mois ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil était recevable ;

- la décision litigieuse n'est pas motivée ; il n'a pas été répondu à sa demande de communication des motifs de cette décision comme le prévoit l'article 5 de la loi du

11 juillet 1979 devenu article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il était fondé, compte tenu de son intégration et de son parcours de formation en cours, à demander la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions des articles

L. 313-11 7° ou L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant sur le fondement de l'article L. 313-7 du même code ;

- la décision litigieuse a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne, rapporteur,

- et les observations de Me Sadoun, pour M.A....

1. Considérant que M. A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de l'admettre au séjour et d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour

" vie privée et familiale " ou " étudiant " dans un délai de deux mois ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ; que, par l'ordonnance attaquée, le premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté pour tardiveté le recours de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. A...relève appel de cette ordonnance ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet. " ; qu'aux termes de l'article L. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 112-6 dudit code : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 112-5 : " " L'accusé de réception prévu par l'article L. 112-3 comporte les mentions suivantes : 1° La date de réception de la demande et la date à laquelle, à défaut d'une décision expresse, celle-ci sera réputée acceptée ou rejetée ; 2° La désignation, l'adresse postale et, le cas échéant, électronique, ainsi que le numéro de téléphone du service chargé du dossier ; 3° Le cas échéant, les informations mentionnées à l'article L. 114-5, dans les conditions prévus par cet article. / Il indique si la demande est susceptible de donner lieu à une décision implicite de rejet ou à une décision implicite d'acceptation. Dans le premier cas, l'accusé de réception mentionne les délais et les voies de recours à l'encontre de la décision. (...) " ;

3. Considérant que M. A...a déposé le 7 janvier 2016 une demande de titre de séjour auprès de la préfecture de la Seine-Saint-Denis ; que l'attestation de dépôt de dossier qui lui a été délivrée à cette occasion précisait qu' " en l'absence de décision implicite dans le délai de quatre mois à partir du dépôt du dossier, votre demande doit être considérée comme rejetée. Vous disposez alors d'un délai de deux mois pour former un recours devant la juridiction administrative compétente, un recours gracieux auprès de préfet et/ou un recours hiérarchique auprès du ministre de l'intérieur ", et indiquait à l'intéressé qu'il pouvait se renseigner sur le suivi de sa demande, par courriel uniquement, à une adresse qui lui était précisée, en indiquant son nom, son prénom, sa date de naissance et éventuellement son numéro d'étranger ; que, par application de l'article R. 311-12 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision implicite de rejet est née le 7 mai 2016, quatre mois après le dépôt par M. A... en préfecture de sa demande de titre de séjour ;

4. Considérant toutefois que le 10 mai 2016, soit à une date à laquelle ce délai de quatre mois était expiré, il a été délivré à l'intéressé, par courriel, en réponse à une demande de sa part formée le 30 mars 2016 portant sur l'état de l'instruction de son dossier, l'information que cette instruction était toujours en cours et qu'une réponse lui serait envoyée uniquement par courrier à l'adresse qu'il avait communiquée au service ; que si cette information restait sans incidence sur l'existence et l'entrée en vigueur, trois jours auparavant, de la décision implicite de rejet de la demande de titre de séjour de M.A..., elle laissait penser à celui-ci que sa demande donnerait lieu de la part de l'autorité compétente à une décision expresse, qui lui serait communiquée ultérieurement par courrier ; que ce n'est que le 10 mars 2017, en réponse à un courriel par lequel, le 14 février 2017, M. A...se renseignait à nouveau sur l'état de l'instruction de sa demande auprès des services préfectoraux, qu'il a été informé que cette demande avait fait l'objet d'un refus implicite, à une date qui n'était toutefois pas précisée ; que le caractère contradictoire des informations ainsi données fait obstacle à ce que le délai de recours contentieux de deux mois à compter de la décision implicite du 7 mai 2016 soit opposable au requérant, auquel aucune nouvelle information sur l'existence de délais n'a été apportée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête comme irrecevable, par application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Sur la légalité de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis :

7. Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions qui refusent la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour doivent être motivées ; qu'aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de communication des motifs dans le délai d'un mois, la décision implicite se trouve entachée d'illégalité ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que l'autorité administrative s'est abstenue de faire droit, dans le délai d'un mois qui lui était imparti par les dispositions précitées, à la demande de communication des motifs présentée par le conseil de M. A...le 4 mai 2017 ; que, dès lors, la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet de la Seine-Saint-Denis sur la demande de titre formulée par M. A...est entachée d'illégalité par défaut de motivation, et doit être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique seulement que la demande de titre de séjour de M. A...soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Seine- Saint- Denis de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros que demande M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1706681 du 25 juillet 2017 du premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil est annulée.

Article 2 : La décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de titre de séjour présentée le 7 janvier 2016 par M. A...est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande de titre de séjour de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 800 euros à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

4

N°17VE02975


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02975
Date de la décision : 06/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SADOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-02-06;17ve02975 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award