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23/01/2018 | FRANCE | N°15VE02858

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 23 janvier 2018, 15VE02858


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser, à hauteur de 710 923,80 euros, des préjudices subis après avoir été atteinte d'une sclérose en plaques dont elle impute l'origine à l'administration obligatoire, dans le cadre de son activité professionnelle, du vaccin contre l'hépatite B.

Par un jugement n° 1106546 du 6 juillet 2015, le Tribunal adm

inistratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l'indemniser, à hauteur de 710 923,80 euros, des préjudices subis après avoir été atteinte d'une sclérose en plaques dont elle impute l'origine à l'administration obligatoire, dans le cadre de son activité professionnelle, du vaccin contre l'hépatite B.

Par un jugement n° 1106546 du 6 juillet 2015, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 3 et 17 septembre 2015 et le 14 décembre 2017, MmeB..., représentée par la Selarl Coubris, Courtois et associés, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner l'ONIAM à lui payer, outre les intérêts de droit à compter de la réception de la requête introductive d'instance, les sommes de :

- 81 468 € à titre de frais divers ;

- 51 860,35 € au titre de perte de gains professionnels actuels ;

- 2 243,10 € au titre des frais de logement adapté ;

- 497 351,12 € au titre de l'assistance par tierce personne ;

- 15 050,33€ au titre de la perte de gains professionnels futurs ;

- 22 065 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

- 40 000 € au titre des souffrances endurées ;

- 5 000 € au titre du préjudice esthétique temporaire ;

- 100 000 € au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- 15 000 € au titre du préjudice d'agrément ;

- 8 000 € au titre du préjudice esthétique permanent ;

- 20 000 € au titre du préjudice sexuel ;

- 80 000 € au titre du préjudice extrapatrimonial évolutif ;

3° de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- la vaccination contre l'hépatite B qu'elle a reçue présentait un caractère obligatoire en vertu de l'article L. 3111-4 du code de la santé publique ;

- l'absence de lien de causalité certain entre la vaccination et la pathologie n'exclut pas l'indemnisation des préjudices qui en découlent si, comme en l'espèce, il existe des présomptions graves, précisent et concordantes de nature à fonder le principe d'indemnisation par l'ONIAM ; en effet, alors qu'elle ne présentait aucun problème neurologique, était en parfaite santé avant la première injection et n'avait aucun antécédent familial de sclérose en plaques, elle a développé en septembre 1997, concomitamment à la vaccination, les premiers symptômes de la maladie qui a été diagnostiquée en août 1998, soit dans un délai de 11 mois après la vaccination, délai qui n'a rien d'exceptionnel ; dans ces conditions, un lien de causalité directe entre la vaccination et sa pathologie doit être admis et il y a lieu de l'indemniser des différents préjudices qu'elle a subis en raison de sa maladie.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Besson-Ledey,

- et les conclusions de Mme Orio, rapporteur public.

1. Considérant que MmeB..., infirmière, a subi, dans le cadre de l'obligation vaccinale liée à son activité professionnelle, trois injections d'un vaccin anti-hépatite B les 3 septembre 1997, 9 octobre 1997 et 23 février 1998 ; qu'ayant développé une sclérose en plaques, diagnostiquée le 24 août 1998, elle a recherché, sur le fondement de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, la responsabilité de l'ONIAM au titre de cette affection, qu'elle impute à sa vaccination ; que ce dernier, après une expertise médicale réalisée le 16 août 2011, a rejeté sa demande le 19 septembre 2011 aux motifs que sa maladie n'était pas imputable à la vaccination ; que, par un jugement du 6 juillet 2015, dont Mme B...relève appel, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de condamnation de l'ONIAM en indemnisation des différents préjudices subis résultant de sa sclérose en plaques ;

2. Considérant qu'aux termes L. 3111-4 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention de soins ou hébergeant des personnes âgées, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la grippe. " ; qu'aux termes de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale " ;

3. Considérant qu'alors même qu'un rapport d'expertise, sans l'exclure, n'établirait pas de lien de causalité entre la vaccination et l'affection, l'ONIAM peut être tenu d'indemniser, sur le fondement de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, les conséquences dommageables d'injections vaccinales contre l'hépatite B réalisées dans le cadre d'une activité professionnelle eu égard, d'une part, au bref délai ayant séparé l'injection des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, éprouvés par l'intéressé et validés par les constatations de l'expertise médicale, et, d'autre part, à la bonne santé de la personne concernée et à l'absence, chez elle, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ; que la preuve des différentes circonstances à prendre ainsi en compte, notamment celle de la date d'apparition des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, peut être apportée par tout moyen ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise réalisée le 16 août 2011, que les premiers symptômes neurologiques de la sclérose en plaques qui affecte MmeB..., sont apparus sous la forme de troubles sensitifs ou moteurs de la main droite, puis de troubles des membres inférieurs, en 1997 ou 1998, sans autre précision de dates ou de constats médicaux à l'exception d'un compte-rendu d'hospitalisation du neurologue du centre hospitalier d'Orsay daté du 18 février 1999 faisant état de l'hospitalisation de Mme B... du 12 au 16 février 1999 dans le cadre d'une poussée de sclérose en plaques et relevant au titre de ses antécédents deux poussées de sclérose en plaques " depuis l'année 1997 ", d'un courrier du neurologue de la patiente à la Pitié-Salpêtrière daté du 9 janvier 2008 faisant remonter le début de la maladie à l'année 1997 et d'un certificat médical rédigé par le médecin du travail en janvier 2002 faisant, quant à lui, remonter la maladie à l'année 1998 ; que l'expert a précisé qu'il restait des incertitudes sur la date de début des premiers signes de la maladie et que la vaccination ayant eu lieu en septembre 1997, MmeB..., eu égard au compte rendu d'hospitalisation du 18 février 1999 qui fait état de deux poussées en 1997, aurait dû présenter deux poussées de septembre à décembre 1997 avec un décalage minimum d'un mois pour que la maladie puisse être regardée comme imputable à la vaccination ; que si Mme B... fait valoir que l'expert aurait fait une lecture erronée du compte rendu du 18 février 1999, lequel aurait entendu préciser qu'elle avait présenté deux poussées entre 1997 et 1999 et non dans la seule année 1997, l'imprécision sur la date d'apparition des premiers symptômes de sa maladie n'est pour autant pas levée, alors que les documents médicaux produits sont imprécis et mentionnent l'année de début de la maladie autant en 1997 qu'en 1998 ; qu'en outre, la requérante n'a produit aucune pièce antérieure à 1999 permettant d'établir de façon certaine la date précise d'apparition de ses troubles neurologiques en 1997 ni même n'a donné de date et de descriptions précises et circonstanciées quant à l'apparition de ces premiers symptômes en 1997 ; que, par suite, il n'est pas démontré que les premiers symptômes de la sclérose en plaques affectant Mme B...seraient intervenus en 1997 dans les trois premiers mois qui ont suivi la première injection du vaccin ; que, toutefois, il ressort des mêmes pièces du dossier que le diagnostic de la maladie a été posé le 24 août 1998, soit 6 mois après la dernière injection ; que l'expert ne s'est pas prononcé sur l'existence d'un lien de causalité direct entre la vaccination et la pathologie présentée par l'intéressée au regard de ce délai ; que l'état du dossier ne permet pas à la Cour d'apprécier si un lien de casualité peut en l'espèce être retenu en présence d'un tel délai ; que, dès lors, il y a lieu, avant de statuer sur la requête d'ordonner une expertise sur ce point ;

DÉCIDE :

Article 1er : Avant de statuer sur la requête de Mme B...il sera procédé, par un expert désigné par le Président de la Cour, à une expertise médicale.

Article 2 : L'expert aura pour mission :

1. de convoquer les parties, de prendre connaissance de l'ensemble du dossier et de préciser les conditions dans lesquelles Mme B...a été vaccinée contre l'hépatite B ;

2. de dire si, dans le dernier état des connaissances médicales en la matière, la survenue d'une sclérose en plaques chez MmeB..., sans antécédents connus à cette pathologie, peut être regardée comme imputable à la vaccination contre le virus de l'hépatite B ;

3. de se prononcer à ce propos sur l'existence, ou non, d'un tel lien de causalité en l'espèce, compte-tenu en particulier, de l'écoulement d'un délai de six mois entre l'une des injections du vaccin et l'apparition de la maladie ;

4. enfin, de décrire l'étendue des préjudices subis par l'intéressée et de chiffrer les différents chefs de préjudice.

Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative, communiquera le rapport d'expertise aux parties et le déposera au greffe de la Cour dans un délai de trois mois suivant la prestation de serment.

Article 4 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

2

N° 15VE02858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02858
Date de la décision : 23/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-03 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Service des vaccinations.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : SCP UGGC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-01-23;15ve02858 ?
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