La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/03/2017 | FRANCE | N°16VE02774

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 23 mars 2017, 16VE02774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Seine-Saint-Denis a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision informelle de la commune de Stains d'apposer sur la façade de la mairie une banderole appelant à la libération de M. C...D....

Par un jugement n° 1601455 du 28 juin 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2016 et un mémoire en réplique enregistré le 23 décembre 2016, le préfet de la S

eine-Saint-Denis demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Seine-Saint-Denis a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision informelle de la commune de Stains d'apposer sur la façade de la mairie une banderole appelant à la libération de M. C...D....

Par un jugement n° 1601455 du 28 juin 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2016 et un mémoire en réplique enregistré le 23 décembre 2016, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3° d'enjoindre au maire de Stains de retirer la banderole appelant à la libération de M. C... D....

Le préfet de la Seine-Saint-Denis soutient que :

- le délai de recours n'était pas opposable par les premiers juges dans la mesure où la demande était dirigée contre une décision informelle du conseil municipal de Stains ;

- cette décision informelle n'a été révélée que par un procès-verbal de police du 13 janvier 2016 ;

- elle n'a fait l'objet d'aucune transmission à la préfecture et, dès lors, aucun délai n'a pu courir ;

- la décision informelle litigieuse constitue bien un acte susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux ;

- cette décision devait faire l'objet d'une délibération en bonne et due forme ;

- elle n'est justifiée par aucun intérêt public local, intervient dans le champ de la politique internationale de la France, méconnait le principe de neutralité des services publics et est susceptible de porter atteinte à l'ordre public ;

- la délibération du conseil municipal de Stains du 18 décembre 2008 nommant

M. D...citoyen d'honneur est, par voie d'exception, également illégale.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,

- et les observations de Mme B...pour le préfet de la Seine-Saint-Denis et de Me A... pour la commune de Stains.

1. Considérant que le préfet de la Seine-Saint-Denis a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision de la commune de Stains de déployer sur la façade de la mairie une banderole appelant à la libération de M C...D..., décision non formalisée mais révélée par le déploiement de ladite banderole ; que le Tribunal administratif a rejeté cette demande au motif qu'elle était tardive ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. " ; que l'article L. 2131-3 du même code dispose que " Les actes pris au nom de la commune autres que ceux mentionnés à l'article L. 2131-2 sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés./ Le représentant de l'Etat peut en demander communication à tout moment. Il ne peut les déférer au tribunal administratif, dans un délai de deux mois à compter de leur communication, que si sa demande a été présentée dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle les actes sont devenus exécutoires. " ; qu'enfin, l'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose que : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. (...) " et qu'aux termes de l'article L. 1112-1 du même code : " Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France. (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'une banderole sur laquelle est inscrit " Stains s'engage pour la paix / Libérez Marwan D.../ le Mandela palestinien " et où l'on voit cette personne menottée faisant le V de la victoire a été placée sur la façade de l'hôtel de ville de Stains dans le courant de l'année 2009 ; qu'en l'absence non contestée de délibération du conseil municipal en ce sens comme de tout autre acte administratif formalisé, la décision d'accrocher la banderole en cause doit être regardée comme ayant été prise par le maire de la commune de Stains et révélée par sa mise en place effective ; que la décision d'apposer la banderole litigieuse sur la façade de la mairie, bien qu'elle n'ait pas revêtu la forme d'un acte écrit, constitue une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

5. Considérant que le préfet de la Seine-Saint-Denis a adressé le 1er juin 2015 un courrier reçu par la commune de Stains le 5 juin 2015 indiquant que le déploiement de la banderole en cause ne répondait à aucun intérêt local et était susceptible de porter atteinte à l'ordre public ; qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires organisant une procédure particulière en la matière, ce courrier doit être regardé comme un recours gracieux dirigé contre la décision non formalisée de déployer cette banderole et manifestant la connaissance acquise à cette date par le préfet de la Seine-Saint-Denis de cette décision ; que le déféré du préfet enregistré par le greffe du Tribunal administratif de Montreuil le 23 février 2016 est intervenu après l'expiration du délai de recours contentieux ouvert contre la décision implicite de rejet opposée par le maire de Stains au recours gracieux ;

6. Mais considérant que la décision d'apposer la banderole litigieuse sur la façade de l'hôtel de ville ne saurait être regardée comme entrant dans le champ des dispositions précitées de l'article L 2121-29 du code général des collectivités territoriales dès lors qu'elle ne répond à aucun intérêt public local ; qu'elle constitue une prise de position dans une matière relevant de la politique internationale de la France dont la compétence appartient exclusivement à l'Etat, méconnait le principe de neutralité des services publics et est de nature à porter atteinte à l'ordre public ; que, par suite, la décision d'apposer la banderole litigieuse doit être regardée comme un acte nul et de nul effet ;

7. Considérant que le juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un recours dirigé contre un acte nul et de non effet est tenu d'en constater la nullité à toute époque ; que, par suite, et alors même que le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis a été introduit après l'expiration du délai de recours contentieux, il appartient à la Cour de déclarer la décision non formalisée de la commune de Stains de déployer une banderole appelant à la libération de M. C...D...nulle et de nul effet ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la

Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté son déféré ;

9. Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 911-1 d'enjoindre au maire de Stains de faire procéder au retrait de la façade de l'hôtel de ville de la banderole appelant à la libération de M. C...D... ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Stains demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1601455 du 28 juin 2016 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La décision de la commune de Stains d'apposer sur la façade de l'hôtel de ville une banderole appelant à la libération de M. C...D...est déclarée nulle et de non effet.

Article 3: Il est enjoint au maire de Stains de faire retirer de la façade de l'hôtel de ville la banderole appelant à la libération de M. C...D....

Article 4 : Les conclusions de la commune de Stains présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 16VE02774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02774
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Point de départ des délais - Circonstances diverses déterminant le point de départ des délais - Décisions implicites de rejet.

Procédure - Incidents - Intervention.


Composition du Tribunal
Président : Mme AGIER-CABANES
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : CABINET WTA-AVOCATS (R. WEYL- F. WEYL - F. WEYL - E. TAULET)

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-03-23;16ve02774 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award