Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions de l'inspecteur du travail du 7 décembre 2010 et du ministre chargé du travail du
21 juin 2011 autorisant la rupture de son contrat de travail avec la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX.
Par un jugement n° 1106485 du 3 octobre 2014, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a annulé ces deux décisions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 novembre 2014, la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX, représentée par la SCP Joseph Aguera et Associés, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de rejeter la demande de première instance formulée par MmeD... ;
3° de mettre à la charge de Mme C...D...le versement de la somme de
1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX soutient que :
- elle a dû mettre en oeuvre un plan de réorganisation de sa branche " électrique culinaire " au sein de laquelle Mme D...exerçait les fonctions de chef de marché international ;
- s'agissant d'une rupture conventionnelle, aucune obligation de reclassement ne pesait sur l'employeur ;
-Il n'appartient pas à l'administration du travail de se prononcer sur la réalité du motif économique fondant cette rupture, laquelle est, en l'espèce, établie ;
- l'élaboration du plan de sauvegarde de l'emploi a respecté la procédure, la commission paritaire territoriale de l'emploi ayant été régulièrement saisie.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boret,
- les conclusions de Mme Orio, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX et de Me A...pour MmeD....
1. Considérant que la SOCIETE GROUPE MOULINEX, reprise par le GROUPE SEB en 2001, a embauché le 13 octobre 1997 Mme D..., qui y exerçait, en dernier lieu, les fonctions de chef de marché international et était protégée en sa double qualité de membre des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, et d'établissement, et de représentante syndicale au comité d'entreprise ; qu'au motif de sauvegarder sa compétitivité, la société a engagé une réorganisation de son fonctionnement en regroupant plusieurs secteurs d'activité qui s'est traduite par l'adoption d'un plan de sauvegarde de l'emploi, comprenant un plan de départs volontaires et des licenciements économiques ; que Mme D... ayant demandé le 23 juillet 2010 à pouvoir bénéficier des dispositions encourageant le départ volontaire de salariés, la société a initié une procédure de rupture du contrat de travail d'un commun accord, en la convoquant le 13 septembre 2010 à un entretien préalable qui s'est tenu le 15 septembre suivant, puis en consultant le 6 octobre 2010 le comité d'entreprise ; que le
7 octobre 2010, la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX a présenté à l'inspecteur du travail compétent une demande d'autorisation de " rupture du contrat de travail d'un commun accord pour motif économique " de MmeD..., qui a été acceptée par une décision du
7 décembre 2010 ; que saisi d'un recours hiérarchique par MmeD..., le ministre chargé du travail a confirmé la décision de l'inspecteur du travail par une décision du 21 juin 2011 ; que la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX relève appel du jugement du 3 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces deux décisions ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1237-11 du code du travail : " L'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. / La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. / Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. " ; qu'aux termes de l'article L. 1237-15 du même code : " Les salariés bénéficiant d'une protection mentionnés aux articles L. 2411-1 et
L. 2411-2 peuvent bénéficier des dispositions de la présente section. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 1237-14, la rupture conventionnelle est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail(...)" ; qu'aux termes de l'article L. 1237-16 du même code : " La présente section n'est pas applicable aux ruptures de contrats de travail résultant : (.....) 2° Des plans de sauvegarde de l'emploi dans les conditions définies par l'article L. 1233-61. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du même code : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa. " ; qu'aux termes de l'article L 1233-4 du code : " le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et de reclassement ont été réalisées et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré " ;
3. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la fusion de certains secteurs d'activité de la société requérante ayant conduit à la suppression d'emplois s'est traduite par l'adoption d'un plan de sauvegarde de l'emploi, constitué d'un plan de départs volontaires et de licenciements économiques ; que, s'agissant de la demande d'autorisation de " rupture du contrat de travail d'un commun accord pour motif économique " de MmeD..., l'inspecteur du travail puis le ministre devaient ainsi vérifier que l'employeur s'était régulièrement acquitté de ses obligations de reclassement interne de l'intéressée ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX n'a pas satisfait à son obligation de reclassement interne de MmeD... ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et du ministre portant autorisation de la rupture du contrat de travail de MmeD... ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX le versement à Mme D...de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1 : La requête de la SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE GROUPE SEB MOULINEX versera à Mme D...la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions incidentes de Mme D...est rejeté.
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N° 14VE03251