Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 6 mars 2015 par lequel le PREFET DU CHER a décidé son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1501354 du 9 mars 2015, le Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du PREFET DU CHER.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 avril 2015, le PREFET DU CHER demande à la Cour d'annuler ce jugement.
Le PREFET DU CHER soutient que :
- il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que la méconnaissance du droit d'être entendu n'affecte la régularité de la décision de l'administration que lorsque les observations de l'intéressé auraient pu avoir une influence sur la décision finale.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pilven a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B...A..., ressortissant marocain, né le 22 mars 1993, entré en France en juin 2009 selon ses déclarations, à l'âge de 16 ans, a été confié aux services d'aide sociale à l'enfance de la Seine-et-Marne de décembre 2009 à juin 2011 ; qu'il a demandé à bénéficier d'un titre de séjour auprès de la préfecture de la Dordogne afin de poursuivre une formation en menuiserie aluminium ; que, toutefois, le préfet de la Dordogne a pris un arrêté le 12 mai 2014 portant rejet de sa demande et obligation de quitter le territoire français ; que n'ayant pas quitté le territoire français, et ayant fait l'objet d'un contrôle de police le 5 février au soir, il a été placé en garde à vue en raison de la commission d'infractions mineures et auditionné par les services de police le 6 février 2015 ; que, devant son refus de partir pour le Maroc, il a été placé en centre de rétention et a contesté cette décision qui a été annulée par jugement du 9 mars 2015 du Tribunal administratif de Versailles ; que le PREFET DU CHER forme appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ;
3. Considérant que ces dispositions, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; que la directive du 16 décembre 2008 encadre de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, sans toutefois préciser si et dans quelles conditions doit être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;
4. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour ; qu'il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement ;
5. Considérant que le tribunal administratif ne pouvait retenir que le PREFET DU CHER avait méconnu le droit de M. A...à être entendu au motif que ce dernier n'avait pas été informé par l'administration qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure de placement en rétention et qu'il n'avait pas été invité à présenter des observations préalablement à l'édiction de cette mesure dès lors qu'il n'est pas contesté que M. A...a été entendu lors de sa garde à vue par les services de police le 6 février 2015 au cours de laquelle il a été, notamment, questionné sur son droit au titre du séjour ; qu'il a, à cette occasion, pu donner ses observations en soutenant d'ailleurs être bénéficiaire d'un titre de séjour alors qu'il ne pouvait ignorer qu'une décision portant refus de titre et obligation de quitter le territoire français lui avait été notifiée par le préfet de la Dordogne le 6 juin 2014 ; que, par ailleurs, si M. A...a soutenu devant le juge de première instance que le préfet aurait dû prendre en compte la circonstance que depuis l'édiction de la mesure portant obligation de quitter le territoire français, sa situation avait évolué et qu'il était désormais inscrit en seconde professionnelle " maintenance de matériels option parcs et jardins ", il ressort du procès verbal de police susmentionné qu'il a communiqué ces éléments lors de sa garde à vue ; qu'ainsi, le droit à être entendu préalablement à l'adoption de la mesure de rétention contestée n'a pas été méconnu ; qu'il s'ensuit que le PREFET DU CHER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a, pour ce motif, annulé son jugement ;
6. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif ;
7. Considérant que l'arrêté contesté a été signé par M. Rosay, secrétaire général de la préfecture du Cher, qui bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DU CHER, en date du 24 février 2015, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Cher le 25 février 2015, à l'effet de signer, tous arrêtés, circulaires, rapports et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département du Cher ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant que la décision de placement en rétention vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relative aux mesures de rétention, l'arrêté du préfet de la Dordogne du 12 mai 2014 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et l'arrêté du 6 février 2015 du PREFET DU CHER, portant assignation à résidence de l'intéressé ; que la décision préfectorale précise que l'intéressé a été interpellé le 5 février 2015 pour outrage, violence et refus de se soumettre, et qu'il a fait obstacle à son éloignement prévu pour le Maroc par un vol programmé le 6 mars 2015 ; qu'elle retient par ailleurs que M. A...s'est soustrait à un mesure d'éloignement et ne présente plus les garanties suffisantes pour une assignation à résidence ; que, par suite, le moyen tiré d'une insuffisante motivation de la décision attaquée doit être écarté ;
9. Considérant qu'en prenant l'arrêté de placement en rétention en litige, le PREFET DU CHER a procédé à l'abrogation implicite de la décision d'assignation à résidence prise le 6 février 2015, modifiée le 20 février 2015 ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 551-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut ainsi qu'être écarté ;
10. Considérant que M. A...soutient que la mesure de placement en rétention n'était pas justifiée dès lors qu'il avait respecté les obligations de pointage relatives à son assignation à résidence, n'avait pas porté atteinte à l'ordre public, qu'il vivait en France depuis six ans auprès de sa mère et de son beau père et qu'il était inscrit dans une seconde professionnelle au lycée Jean Guéhenno ; que, toutefois, en fondant sa décision sur la circonstance que l'intéressé s'était soustrait à une mesure d'éloignement en refusant de prendre un vol programmé le 6 mars 2015 en vue de l'exécution de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français, le PREFET DU CHER n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
11. Considérant que la circonstance que l'abrogation implicite des arrêtés d'assignation à résidence pris à l'encontre de M. A...n'aurait pas été justifiée est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de placement en rétention, seul en litige ; que le moyen tiré du caractère illégal de ces décisions d'abrogation doit ainsi être écarté comme inopérant ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU CHER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 6 mars 2015 ; que le jugement du 9 mars 2015 du Tribunal administratif de Versailles doit dès lors être annulé ; que, par ailleurs, la demande présentée en première instance par M.A..., tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mars 2015 par lequel le PREFET DU CHER a décidé son placement en rétention administrative, doit être rejetée ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles du 9 mars 2015 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M.A..., tendant à l'annulation de l'arrêté par lequel le PREFET DU CHER a décidé son placement en rétention administrative, est rejetée.
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N° 15VE01261