La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2016 | FRANCE | N°15VE02065

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 29 septembre 2016, 15VE02065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 13 septembre 2010 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui verser une indemnité correspondant au montant de la prime liée à l'exercice des fonctions de chef de bureau dont il estime avoir été irrégulièrement privé ainsi qu'une indemnité de 15 000 euros en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi du fait du défaut de nomination en qualité

de chef de bureau, d'autre part, de condamner le département de la Seine-Saint-De...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 13 septembre 2010 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui verser une indemnité correspondant au montant de la prime liée à l'exercice des fonctions de chef de bureau dont il estime avoir été irrégulièrement privé ainsi qu'une indemnité de 15 000 euros en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau, d'autre part, de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser les indemnités litigieuses, assorties des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement n° 1010082 du 8 décembre 2011, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 12VE04201 du 23 janvier 2014, la Cour administrative d'appel de Versailles, après avoir fait droit aux conclusions de M. A...tendant à l'annulation de ce jugement, a évoqué et rejeté ses demandes présentées en première instance.

Par une décision n° 376669 du 19 juin 2015, le Conseil d'Etat a, à la demande de M. A..., annulé l'article 2 de l'arrêt du 23 janvier 2014 de la Cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et trois mémoires, enregistrés sous le n° 12VE04201 respectivement les 17 février 2012, 16 mai 2012, 20 décembre 2013 et 10 janvier 2014, puis, après cassation et renvoi, par trois mémoires et un mémoire récapitulatif, enregistrés sous le n° 15VE02065 respectivement les 26 mai 2016, 31 mai 2016, 3 juin 2016 et 7 juillet 2016, M.A..., représenté par la SCP Delaporte, Briard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1010082 du Tribunal administratif de Montreuil du 8 décembre 2011 en tant qu'il a omis de statuer sur ses conclusions à fin d'indemnité au titre du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau ;

2° d'évoquer et de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau ;

3° de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué, qui a omis de statuer sur ses conclusions indemnitaires au titre de son préjudice de carrière, est irrégulier ;

- la responsabilité du département de la Seine-Saint-Denis est engagée à son égard à raison de l'illégalité du refus de le nommer sur un poste de chef de bureau ; en effet, d'une part, le refus de création du poste de chef de bureau, dans le cadre de nombreuses réorganisations de la direction de l'aménagement et du développement, n'a jamais été précédé, entre 1995 et 2008, d'une consultation du comité technique paritaire, contrairement aux exigences de l'article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et des articles 32 et 33 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans leur rédaction alors en vigueur ; d'autre part, le département lui a confié depuis 1995 une fonction d'encadrement sans le nommer officiellement, aucun arrêté n'ayant été pris en ce sens, alors qu'au regard de la délibération du 17 décembre 2002, la structure qu'il encadre ne peut être qu'un bureau ;

- il a présenté toutes les qualités professionnelles requises pour être nommé chef de bureau, fonction qu'il a assumées de fait ;

- depuis 1996, il a régulièrement demandé, mais en vain, la régularisation de sa situation ; en particulier, par courrier du 26 janvier 2011, il a sollicité sa nomination en tant que chef de bureau auprès du président du conseil général, à qui il appartenait de transmettre cette demande au service compétent ; ainsi, en refusant illégalement de régulariser sa situation depuis le 6 septembre 1995, le département a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- son préjudice de carrière s'étant aggravé depuis sa demande préalable, il est en droit de solliciter une réévaluation du montant de l'indemnité demandée, à hauteur de 25 000 euros ;

- s'il avait été normalement nommé chef de bureau, il aurait dû être promu au grade d'ingénieur en chef dès qu'il a atteint, le 3 septembre 2009, le 5ème échelon du grade d'ingénieur principal et bénéficier, depuis cette date, d'avancements d'échelon à la durée minimale ; ainsi, son préjudice de carrière en termes de perte de traitement doit être évalué à la somme de 9 820,87 euros ;

- en outre, il a également subi des préjudices en termes de mobilité et d'autorité ; ainsi, son préjudice moral doit être évalué à la somme de 10 000 euros ;

- enfin, il a subi des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence, préjudice qui doit être évalué à la somme de 10 000 euros.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-565 du 30 mai 1985 ;

- le décret n° 90-126 du 9 février 1990 ;

- la délibération du conseil général de la Seine-Saint-Denis n° 2002-XII-02/2 du 17 décembre 2002 relative au régime indemnitaire lié aux sujétions des agents départementaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- et les observations de M.A....

1. Considérant que, par lettre du 22 juillet 2010, M.A..., ingénieur principal affecté au service de l'urbanisme, des transports et de l'habitat de la direction de l'aménagement et du développement du conseil général de la Seine-Saint-Denis et exerçant les fonctions de responsable de l'atelier géomatique, a demandé au président du conseil général que lui soient versées, d'une part, une indemnité réparant le préjudice lié au défaut de versement depuis le 6 septembre 1995 de l'indemnité, instituée par la délibération du 17 décembre 2002 susvisée du conseil général, compensant les sujétions d'encadrement liées à l'exercice des fonctions de chef de bureau, et, d'autre part, une indemnité de 15 000 euros réparant le préjudice de carrière qu'il estime avoir subi, résultant du retard d'avancement au grade d'ingénieur en chef lié à l'absence de nomination en qualité de chef de bureau ; que sa demande indemnitaire a été rejetée par un courrier du 13 septembre 2010 du directeur général des services du département ; que, par un jugement du 8 décembre 2011, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté les demandes de M. A...tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2010 et au versement des indemnités litigieuses ; que, par un arrêt du 23 janvier 2014, la Cour administrative d'appel de Versailles, après avoir fait droit à la demande de l'intéressé tendant à l'annulation du jugement du 8 décembre 2011 du Tribunal administratif de Montreuil, a rejeté ses demandes présentées en première instance ; que, par une décision du 19 juin 2015, le Conseil d'Etat a, à la demande de M. A..., annulé l'article 2 de cet arrêt en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la Cour ;

Sur les conclusions de M. A...à fin d'annulation du jugement du 8 décembre 2011 :

2. Considérant que, par l'arrêt du 23 janvier 2014, qui n'a pas été infirmé sur ce point par la décision du Conseil d'Etat du 19 juin 2015, la Cour de céans a fait droit à la demande de M. A...tendant à l'annulation, pour irrégularité, du jugement du Tribunal administratif de Montreuil en date du 8 décembre 2011 ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de ce jugement présentées par M. A...après l'arrêt du 23 janvier 2014 sont sans objet ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions de M. A...à fin d'indemnité restant en litige :

En ce qui concerne la responsabilité :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a été recruté par le conseil général de la Seine-Saint-Denis, à compter du 1er juillet 1990, en qualité d'agent vacataire, puis d'agent contractuel, afin d'assurer l'informatisation de la cartographie et de mettre en place le système d'information géographique (SIG) de la direction de l'aménagement et du développement ; qu'à partir de 1994, l'intéressé s'est vu confier des fonctions d'encadrement, notamment par l'affectation, en 1995, de quatre dessinateurs sous son autorité, afin d'assurer la gestion de ce système d'information géographique ; qu'après que, en 1996, la structure gérée par M. A...a été fusionnée avec une autre structure, le système d'information géographique et topographique (SIGT), sous la dénomination de système d'information géographique départemental (SIGD), l'intéressé assurant l'encadrement en binôme de cette nouvelle entité, la structure initiale a retrouvé son autonomie en 1997 sous la dénomination d'atelier géomatique (aGéo), M. A...en étant le responsable, sous l'autorité directe du chef du service de l'urbanisme, des transports et de l'habitat de la direction de l'aménagement et du développement, et encadrant jusqu'à neuf agents ; qu'enfin, en 2010, l'atelier géomatique (aGéo) géré par M. A... a été transformé en bureau, sous la dénomination de bureau de la géomatique (bGéo), bureau qui a été mutualisé, à compter de l'année 2012, entre deux directions ;

4. Considérant qu'à l'appui de sa demande indemnitaire et dans le dernier état de ses écritures, M. A...soutient qu'en tant que responsable, depuis 1995, du SIG, puis du SIGD et de l'aGéo et, enfin, du bGéo, il a, de fait, exercé et assumé les missions et les responsabilités d'un chef de bureau, pour lesquelles il présente toutes les qualités professionnelles requises, mais que l'autorité départementale a toujours refusé illégalement de le nommer sur un poste de chef de bureau ; qu'à ce titre, il fait valoir qu'entre 1995 et 2008, les différentes réorganisations de la direction de l'aménagement et du développement, ainsi que le refus de création d'un poste de chef de bureau de la géomatique n'ont jamais été précédés d'une consultation du comité technique paritaire, contrairement aux exigences de la législation et de la réglementation alors en vigueur, seul un organigramme mentionnant l'existence de l'atelier géomatique (aGéo) ayant été soumis en 2009 à ce comité ; qu'il fait valoir également que l'autorité départementale lui a confié depuis 1995 une fonction d'encadrement sans le nommer officiellement chef de bureau alors qu'en particulier, au regard des dispositions de l'article 3 de la délibération du conseil général de la Seine-Saint-Denis en date du 17 décembre 2002 susvisée, la structure qu'il encadre ne peut être qu'un bureau ; qu'il fait enfin valoir que, depuis 1996, il a régulièrement demandé, mais en vain, la régularisation de sa situation et qu'en particulier, par courrier du 26 janvier 2011, alors que la structure dont il avait la charge avait officiellement été, en 2010, érigée en bureau, il a sollicité sa nomination en tant que chef de bureau auprès du président du conseil général mais que cette demande n'a eu aucune suite ; que M. A... soutient qu'en refusant ainsi illégalement de régulariser sa situation depuis le 6 septembre 1995, le département a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, par ailleurs, le requérant soutient que l'absence de nomination en tant que chef de bureau l'a privé, en 2009 et alors qu'il avait atteint le 5ème échelon du grade d'ingénieur principal, de la possibilité d'être nommé au grade d'ingénieur en chef de classe normale alors que le conseil général de la Seine-Saint-Denis avait décidé d'ouvrir cette possibilité d'avancement aux ingénieurs principaux remplissant les conditions statutaires et affectés au minimum sur un poste de chef de bureau ;

Quant à la période courant de 1995 à 2009 :

5. Considérant, en premier lieu, que la seule circonstance que les différentes modifications intervenues, entre 1988 et 2008, dans l'organisation et le fonctionnement de la direction de l'aménagement et du développement et, en particulier, la création d'un service de la cartographie informatisée, dénommée en 1997 " atelier géomatique " (aGéo), n'auraient jamais été soumises pour avis au comité technique paritaire, contrairement aux dispositions, alors applicables, de l'article 33 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et du décret du 30 mai 1985 susvisé relatif aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, ne saurait être considérée comme la cause directe et certaine du préjudice dont se prévaut le requérant ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, aucun texte n'imposait à l'autorité départementale, dans l'exercice de son pouvoir d'organisation des services placés sous son autorité, d'ériger le service de cartographie informatisée, créé d'abord sous l'appellation de système d'information géographique (SIG), puis d'atelier géomatique (aGéo), en " bureau " et de conférer à son responsable, M.A..., la qualité de " chef de bureau " ; qu'à cet égard, le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la délibération du 17 décembre 2002 susvisée et, notamment, de celles de son article 3, portant définition de " chef de bureau ", ces dispositions, au demeurant non applicables avant leur entrée en vigueur, n'ayant pas vocation à régir l'organisation des services du conseil général, mais définissant le régime indemnitaire lié aux sujétions de certains agents du département ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en n'érigeant pas, entre 1995 et 2009, le service de cartographie, dont il a été le responsable, en " bureau " et en ne lui conférant pas la qualité de " chef de bureau ", l'autorité départementale aurait commis une faute de nature à engager la responsabilité du département ; qu'enfin, M. A...ne saurait sérieusement soutenir que l'administration départementale aurait méconnu, en ce qui le concerne, l'obligation, qui lui incombe, de placer ses agents dans une situation régulière en leur donnant une affectation correspondant à leur grade alors qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que les fonctions de responsable de l'atelier géomatique, confiées à l'intéressé à la suite de sa réussite au concours et de sa titularisation, à compter du 24 juin 1996, au grade d'ingénieur subdivisionnaire, correspondent à un emploi qu'il a vocation à occuper à raison de son grade ; qu'au surplus et ainsi qu'il le reconnaît lui-même, M. A... a, par la suite, bénéficié, par des avancements réguliers d'échelon et de grade, d'un déroulement de carrière normal, et a, par ailleurs, bénéficié également d'un régime de rémunération et d'indemnités favorable, notamment par l'attribution, à compter du 1er août 2006, d'une nouvelle bonification indiciaire à raison de ses fonctions d'encadrement ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 23 du décret du 6 février 1990 susvisé portant statut particulier du cadre d'emplois des ingénieurs territoriaux, alors applicable : " Peuvent être nommés ingénieurs en chef de classe normale, après inscription sur un tableau d'avancement : / 1° Après un examen professionnel sur titres avec épreuves organisé par le Centre national de la fonction publique territoriale, les ingénieurs et les ingénieurs principaux qui justifient, au plus tard au 31 décembre de l'année au titre de laquelle est établi le tableau d'avancement, de douze ans de services effectifs accomplis en position d'activité dans le cadre d'emplois ou en position de détachement hors du cadre d'emplois ; / 2° Les ingénieurs principaux qui atteignent au moins le 5e échelon ou le 5e échelon provisoire de leur grade au plus tard au 1er janvier de l'année au titre de laquelle est établi le tableau d'avancement. "

8. Considérant, d'une part, que les dispositions précitées ne créent aucun droit à l'avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale au profit des personnes remplissant les conditions qu'elles énumèrent ; que, d'autre part, il résulte de l'instruction que M. A...n'a atteint, par un arrêté du 29 septembre 2009, le 5ème échelon de son grade d'ingénieur principal qu'à compter du 3 septembre 2009 ; que, par suite et en tout état de cause, il ne saurait soutenir qu'il pouvait prétendre, au titre de l'année 2009, à un avancement de grade en vertu des dispositions précitées du 2° de l'article 23 du décret du 6 février 1990 susvisé ; qu'au surplus, s'il est vrai que le conseil général de la Seine-Saint-Denis avait décidé d'ouvrir la possibilité d'avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale aux ingénieurs principaux remplissant les conditions statutaires et affectés au minimum sur un poste de chef de bureau, il résulte de ce qui a été dit au point 6 qu'aucun texte n'imposait à l'autorité départementale, entre 1995 et 2009, d'ériger le service dont M. A...a été le responsable, d'abord sous l'appellation de système d'information géographique (SIG), puis d'atelier géomatique (aGéo), en " bureau " et de conférer à l'intéressé la qualité de " chef de bureau " ; que, par suite, il ne résulte pas de l'instruction que M. A...aurait été privé d'une chance sérieuse d'obtenir, en 2009, un avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale et aurait ainsi subi, comme il le prétend, un préjudice de carrière ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à rechercher la responsabilité du département de la Seine-Saint-Denis pour la période courant de 1995 à 2009 ;

Quant à la période à compter de l'année 2010 :

10. Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, l'atelier géomatique (aGéo), géré par M. A..., a été transformé en bureau, sous la dénomination de bureau de la géomatique (bGéo), la création de ce bureau ayant été soumise au comité technique paritaire compétent du 2 juillet 2010 ; qu'en outre, il résulte de l'instruction qu'à la suite de la création de ce bureau, M. A...a été invité à formuler une demande expresse d'affectation sur le poste de chef de bureau ainsi créé ; que, contrairement à ce que soutient en défense le département de la Seine-Saint-Denis, M. A...a, par un courrier du 26 janvier 2011 adressé au président du conseil général, réceptionné le 28 janvier suivant, formulé expressément une telle demande ; qu'enfin, le département de la Seine-Saint-Denis ne fait valoir, en défense, aucun élément de nature à expliquer l'absence de nomination de l'intéressé, depuis 2011, sur ce poste de chef de bureau alors que M.A..., dont les qualités professionnelles sont par ailleurs reconnues, continue depuis lors d'exercer et d'assumer les missions et les responsabilités afférentes à ce poste ; qu'une telle abstention de la part de l'autorité départementale, en l'absence de tout élément d'explication, revêt un caractère fautif et est, par suite, de nature à engager la responsabilité du département ;

11. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que le défaut de nomination en qualité de chef de bureau, à compter de 2011, de M. A...a fait perdre à celui-ci une chance sérieuse d'obtenir, à compter de la même année, un avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale, le conseil général de la Seine-Saint-Denis ayant décidé, ainsi qu'il a été dit au point 8, d'ouvrir la possibilité d'avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale aux ingénieurs principaux remplissant les conditions statutaires et affectés au minimum sur un poste de chef de bureau ; qu'au demeurant, la commission administrative paritaire du centre interdépartemental de gestion de la petite couronne de la région Île-de-France a émis, le 16 novembre 2011, un avis favorable à l'avancement de l'intéressé au grade d'ingénieur en chef de classe normale, avancement dont il n'a pu bénéficier faute d'avoir la qualité de chef de bureau ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à demander la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il a ainsi subi du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau à compter de l'année 2011 ;

En ce qui concerne le préjudice :

13. Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, M. A...demande la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser une somme globale de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau et fait état, en particulier, d'un préjudice financier en termes de pertes de traitement, évalué à 9 820,87 euros, d'un préjudice moral, estimé à 10 000 euros, et de troubles de toute nature dans ses conditions d'existence, préjudice évalué également à 10 000 euros ;

14. Considérant, en premier lieu, que si le requérant invoque des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence, du fait de ce défaut de nomination en qualité de chef de bureau, il n'apporte aucune précision ni aucun élément de nature à établir la réalité même de ce préjudice ;

15. Considérant, en second lieu, que, compte tenu, d'une part, de la perte de chance sérieuse de l'intéressé, à raison de ce défaut de nomination en qualité de chef de bureau, d'obtenir, à compter l'année 2011, un avancement au grade d'ingénieur en chef de classe normale et, par suite, le traitement afférent à ce grade, d'autre part, du préjudice moral qu'il a subi du fait de cette absence de nomination et de cette perte de chance sérieuse, il sera fait une juste appréciation de ces deux préjudices subis par M. A...en les évaluant à la somme globale de 10 000 euros ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à demander la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du défaut de nomination en qualité de chef de bureau ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le département de la Seine-Saint-Denis demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis une somme de 2 000 euros à verser à M. A...sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A...tendant à l'annulation du jugement n° 1010082 du Tribunal administratif de Montreuil en date du 8 décembre 2011.

Article 2 : Le département de la Seine-Saint-Denis est condamné à verser à M. A...la somme de 10 000 euros.

Article 3 : Le département de la Seine-Saint-Denis versera à M. A...une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A...et les conclusions du département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

''

''

''

''

2

N° 15VE02065


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02065
Date de la décision : 29/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Avancement - Avancement de grade - Tableaux d'avancement.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : SCP PEIGNOT - GARREAU - BAUER-VIOLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-09-29;15ve02065 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award