Vu l'ordonnance en date du 13 décembre 2012, enregistrée le 18 décembre 2012 au greffe de la Cour, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. B...A..., demeurant ... par la SCP d'avocats Yves Richard ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 17 février et 16 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A... ; M. A... demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1010082 en date du 8 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 13 septembre 2010 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui verser la prime liée à l'exercice de ses fonctions en qualité de chef de bureau et, d'autre part, à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3° de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser l'indemnité mensuelle de chef de bureau à compter du 6 septembre 1995 ainsi que la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice de carrière, augmentée des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés à compter du 22 juillet 2010 ;
4° de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a soulevé d'office un moyen sans en avoir préalablement informé les parties en violation de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- en ne tenant pas compte des fonctions réellement exercées pour déterminer s'il était ou non éligible au bénéfice de la prime en cause, le tribunal a commis une erreur de droit ;
- il exerçait de fait les fonctions de chef de bureau le rendant éligible au bénéfice de la prime ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la délibération du conseil général de la Seine-Saint-Denis n° 2002-XII-02/2 du
17 décembre 2002 relative au régime indemnitaire lié aux sujétions des agents départementaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 :
- le rapport de M. Bigard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour M.A... ;
Connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 10 janvier 2014, présentée pour M.A..., par MeC... ;
1. Considérant que M. A..., ingénieur principal territorial affecté au conseil général de la Seine-Saint-Denis, occupe depuis le 6 septembre 1995 le poste de responsable de l'atelier géomatique à la direction de l'aménagement et du développement ; qu'il a sollicité, le
22 juillet 2010, le bénéfice de la prime liée à l'exercice de la responsabilité de chef de bureau instituée par la délibération susvisée du 17 décembre 2002 du conseil général ainsi que l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait que cette prime ne lui a jamais été versée ; que, par une décision en date du 13 septembre 2010, le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande ; que le requérant relève appel du jugement en date du 8 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 13 septembre 2010 et, d'autre part, à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l' instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le département de la Seine-Saint-Denis n'avait pas soulevé, à l'appui de ses conclusions tendant au rejet de la demande de M. A..., le moyen tiré de ce que l'intéressé, qui n'appartenait à aucun des cadres d'emploi énumérés à l'article 2 de la délibération susvisée du 17 décembre 2002, ne pouvait dès lors prétendre au bénéfice de la prime de bureau instituée par cette délibération ; qu'en se fondant sur ce motif pour rejeter la demande de M. A... sans avoir, avant la séance de jugement, informé les parties de son intention de le soulever d'office, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'irrégularité invoqués par le requérant ;
4. Considérant qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 13 septembre 2010 :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le département de la Seine-Saint-Denis ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la délibération susvisée du
17 décembre 2002 du conseil général de la Seine-Saint-Denis : " M. le président du conseil général [est autorisé] à attribuer aux fonctionnaires appartenant aux cadres d'emplois cités en article 2 (...) une indemnité lorsqu'ils supportent les sujétions énoncées aux articles 3 à 8 de la présente délibération (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 de cette délibération : " (...) l'attribution des indemnités de sujétions citées çà l'article 1 concerne les agents fonctionnaires et non-titulaires relevant des cadres d'emplois suivants (...) : attaché territorial, / rédacteur territorial, / adjoint administratif territorial, / agent administratif territorial, / conseiller socio-éducatif territorial, / assistant socio-éducatif territorial, / agent social, / aide médico-technique territorial, / bibliothécaire territorial, / attaché territorial de conservation du patrimoine, / assistant territorial qualifié de conservation du patrimoine et des bibliothèques, / assistant territorial de conservation du patrimoine et des bibliothèques, / agent territorial qualifié du patrimoine, / agent territorial du patrimoine, /éducateur des activités physiques et sportives territorial, / aide-opérateur des activités physiques et sportives territorial, /animateur territorial, /adjoint d'animation territorial, / agent d'animation territorial, / administrateur territorial. " ;
6. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;
7. Considérant que pour établir que la décision attaquée était légale, le département de la Seine-Saint-Denis invoque, dans son mémoire en défense devant la Cour communiqué à M. A..., le motif tiré de ce que l'intéressé, qui n'appartenait à aucun des cadres d'emploi énumérés à l'article 2 précité de la délibération du 17 décembre 2002, n'entrait pas dans le champ d'application de ce texte ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... est titulaire du grade d'ingénieur principal ; que ce cadre d'emploi ne relevant effectivement d'aucun de ceux qui sont énumérés audit article, le président du conseil général du département de la Seine-Saint-Denis était dès lors tenu de refuser à M. A...le bénéfice de la prime qu'il sollicitait ; que, dans ces conditions, il y a lieu de procéder à la substitution de motifs demandée qui ne prive le requérant d'aucune garantie procédurale ; que, par suite, les conclusions de celui-ci tendant à l'annulation de la décision du 13 septembre 2010 ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
8. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive de la décision du 13 septembre 2010, M. A... ne peut prétendre à la réparation des préjudices que lui aurait causé cette décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour mette à la charge du département de la Seine-Saint-Denis, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme que le département de la Seine-Saint-Denis demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil en date du 8 décembre 2011 est annulé.
Article 2 : La demande présentée pour M. A... devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par le département de la Seine-Saint-Denis tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
''
''
''
''
N° 12VE04201 2