La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/07/2016 | FRANCE | N°16VE01205

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 juillet 2016, 16VE01205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions en date du 09 décembre 2015 par lesquelles le préfet du

Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dans lequel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 1600198 du 21 mars 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la

Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2016, MmeA..., représentée par Me Aucher-Fagbemi, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions en date du 09 décembre 2015 par lesquelles le préfet du

Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dans lequel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 1600198 du 21 mars 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2016, MmeA..., représentée par Me Aucher-Fagbemi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler les décisions attaquées ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A...soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen soulevé d'une motivation insuffisante de la décision attaquée ;

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, et sa motivation est en partie erronée ;

- elle méconnaît les articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Nicolet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante camerounaise née le 5 avril 1974, demande l'annulation du jugement en date du 21 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du

Val-d'Oise du 09 décembre 2015 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays dans lequel elle pourra être reconduite ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que lorsque Mme A...reproche aux premiers juges, dans leur réponse au moyen tiré d'une insuffisante motivation de l'arrêté préfectoral, d'avoir confirmé la nécessité d'être titulaire d'un visa de long séjour et retenu le caractère frauduleux de l'attestation de concordance d'identités produite lors de sa demande de titre de séjour, elle conteste en réalité le bien-fondé de l'appréciation portée par le Tribunal sur les motifs énoncés par le préfet ; que ces moyens se rattachent au bien-fondé du jugement, et non à sa régularité ;

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, aujourd'hui codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi, aujourd'hui codifié à l'article L. 211-5 du code précité :

" La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;

4. Considérant que le refus de séjour attaqué mentionne, notamment, que Mme A... ne peut obtenir son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle ne justifie pas d'un visa long séjour en qualité de salarié, ni d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail, pour exercer le métier d'assistante qualité ; qu'il indique que l'intéressée ne peut davantage être regardée comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels lui permettant de prétendre à une admission exceptionnelle au séjour en vertu de l'article L. 313-14 du même code ; que l'attestation de concordance, produite avec des fiches de paie établies par l'entreprise Auchan, au nom d'Essakou Mary Carmen, s'est révélée, après vérification, être un faux document, la photo de l'intéressée ne correspondant pas à celle du dossier détenu par le magasin Auchan ; qu'il ajoute également qu'elle ne peut bénéficier des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'intéressée est célibataire, sans charge de famille, et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'ainsi, alors que le caractère suffisant de la motivation d'une décision administrative s'apprécie indépendamment du bien-fondé des motifs retenus par son auteur, cette décision, quand bien même elle comporterait des motifs erronés, mentionne les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention

franco-camerounaise visée ci-dessus : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux Etats sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la présente Convention. " ; qu'aux termes de l'article 1er de cette même convention : " (...) les nationaux camerounais désireux de se rendre sur le territoire français doivent être en possession d'un passeport en cours de validité, revêtu du visa requis par l'Etat d'accueil (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 : " Pour un séjour de plus de trois mois, les nationaux français, (...) et les nationaux camerounais (...). / Ils doivent, à l'entrée sur le territoire de l' Etat d'accueil, être munis d'un visa de long séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 : " Les nationaux de chacun des Etats contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle salariée doivent, en outre, pour être admis sur le territoire de cet État, justifier de la possession : / (...) 2° D'un contrat de travail visé par le ministère chargé du travail dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'accueil " et qu'aux termes de son article 11 : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les nationaux camerounais doivent posséder un titre de séjour (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'Etat d'accueil " ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations que la convention franco-camerounaise renvoie à la législation nationale pour la délivrance des titres de séjour ; qu'ainsi, les ressortissants camerounais souhaitant exercer une activité salariée en France doivent solliciter un titre de séjour en application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) ; Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ;

7. Considérant que Mme A...a sollicité un titre de séjour portant la mention " salarié ", dans sa demande en date du 16 juin 2015 auprès des services préfectoraux du

Val-d'Oise ; qu'il résulte des textes précités que, contrairement à ce qu'elle soutient, il lui appartenait de joindre à sa demande, un visa de long séjour et un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; qu'il est constant que la requérante n' a pas été en mesure de présenter ces deux documents ; que, par suite, le préfet du Val-d'Oise était fondé, pour ce motif, à rejeter sa demande de carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313 11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

9. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle réside en France depuis plus de cinq ans, qu'elle dispose d'une promesse d'embauche pour l'exercice du métier d'assistante qualité, lequel connaît des difficultés de recrutement, et qu'elle justifie d'une expérience professionnelle ;

10. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, et alors qu'un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que, par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

11. Considérant, d'une part, que l'article 27 de la loi du 16 juin 2011 a supprimé la condition relative à l'exercice d'une activité dans un métier connaissant des difficultés ; qu'ainsi, la requérante ne saurait utilement invoquer, pour demander l'annulation de la décision portant rejet de sa demande de délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la liste des métiers caractérisés par des difficultés de recrutement annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ;

12. Considérant, d'autre part, que Mme A...n'établit pas résider en France depuis plus de cinq ans et ne justifie pas exercer une activité professionnelle ; que la requérante ne justifie pas de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 précité ; que, par suite, le préfet du Val-d'Oise a pu refuser l'admission exceptionnelle au séjour de

Mme A...en qualité de salariée, et au titre de la vie privée et familiale, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

14. Considérant que la requérante ne justifie pas de la durée de sa résidence habituelle en France, et que, célibataire et sans charge de famille en France, elle n'établit ni même n'allègue être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécue au moins jusqu'à l'âge de trente-cinq ans ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Val-d'Oise aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise, et ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de la requérante ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

''

''

''

''

6

3

N° 16VE01205

6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01205
Date de la décision : 19/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Philippe NICOLET
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : AUCHER-FAGBEMI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-07-19;16ve01205 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award