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21/06/2016 | FRANCE | N°14VE03678

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 21 juin 2016, 14VE03678


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LTJ DIFFUSION a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, et la décharge des pénalités pour manquement délibéré.

Par un jugement n° 1301887 du 6 novembre 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés le 29

décembre 2014, le

10 septembre 2015 et le 31 mai 2016, la SAS LTJ DIFFUSION, représentée par Me Guillot, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LTJ DIFFUSION a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, et la décharge des pénalités pour manquement délibéré.

Par un jugement n° 1301887 du 6 novembre 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés le 29 décembre 2014, le

10 septembre 2015 et le 31 mai 2016, la SAS LTJ DIFFUSION, représentée par Me Guillot, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, et la décharge de la pénalité pour manquement délibéré à laquelle elle a été assujettie ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SAS LTJ DIFFUSION soutient que :

- en appliquant par erreur le régime des intermédiaires dits transparents aux ventes effectuées par l'intermédiaire de ses commissionnaires affiliés, qui ont la qualité d'intermédiaires opaques, la SAS LTJ Diffusion a déclaré à tort un excédent de chiffre d'affaires taxable à la taxe sur la valeur ajoutée, et il est demandé la compensation de cet excédent de taxe sur la valeur ajoutée collectée avec les rappels mis à sa charge : en effet les commissionnaires affiliés agissent en leur nom propre mais pour le compte de la société LTJ Diffusion, qui encaisse les recettes sans que les clients en soient informés, et dès lors les commissionnaires affiliés sont réputés avoir acquis personnellement les biens du commettant, en application du régime prévu par le V de l'article 256 du code général des impôts ; le ministre ne conteste ni l'authenticité des tickets de caisse, qui constituent un échantillon représentatif des tickets délivrés par l'ensemble des boutiques à l'enseigne " Arthur ", ni le fait que ces tickets ne permettaient pas aux clients de savoir que les commissionnaires affiliés agissaient pour le compte de son commettant ;

- la base taxable doit donc être réduite du montant de la commission de 40 % des commissionnaires affiliés : l'excès de taxe sur la valeur ajoutée déclarée s'élève à un montant de 212 501,80 euros au titre de l'année 2007 et 192 205,52 euros au titre de l'année 2008 ;

- la compensation est demandée sur le fondement de l'article L. 205 du livre des procédures fiscales et concerne un même impôt ;

- la demande de compensation, présentée par le ministre en défense, n'est pas justifiée au regard des dispositions légales et n'est pas chiffrée, dès lors que le ministre n'a précisé ni la période d'imposition ni détaillé la composition de son montant, et si la Cour était amenée à faire droit à cette demande de l'administration, il conviendrait d'annuler les rappels afférents aux commissions versées aux commettants dans la mesure où il s'agissait de livraisons de biens intervenues avant le 31 décembre 2008, et non plus de prestations de services ;

- la pénalité pour manquement délibéré est insuffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, et le service n'apporte pas la preuve qui lui incombe que ses inexactitudes déclaratives correspondent à une volonté d'éluder l'impôt.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nicolet,

- les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public.

1 Considérant que la société LTJ DIFFUSION, qui exerce l'activité de création, de fabrication et de commercialisation d'articles textiles diffusés sous la marque Arthur, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle lui ont été notamment réclamés des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, assortis de majorations pour manquement délibéré ; qu'elle relève appel du jugement du 6 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, et, d'autre part, à la décharge des majorations pour manquement délibéré qui lui ont été infligées ;

Sur les conclusions tendant à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir partielle opposée par le ministre :

2 Considérant qu'aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande." ; qu'aux termes de l'article L. 205 du même code : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition. " ; qu'aux termes de l'article R* 194-1 du même livre : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. " ;

3 Considérant que la société LTJ DIFFUSION, qui ne conteste pas les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui sont réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, demande à bénéficier d'une compensation, sur le fondement de l'article L. 205 du livre des procédures fiscales, avec un excédent allégué de taxe collectée par elle sur la même période ; qu'en application des dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article R* 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve incombe à la société requérante, qui sollicite la rectification des bases d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée indiquées dans les déclarations qu'elle a souscrites ;

4 Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. /II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. (...) / V.L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien (...), est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, (...). " ; qu'aux termes du 1 de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : / a) Pour les livraisons de biens, (...), par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur(...) en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, (...) ; / b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : / Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le chiffre d'affaires imposable de la société qui donne mandat à une entreprise d'assurer la commercialisation de ses produits mais ne lui en transfère, à aucun moment, la propriété, est constitué par le montant total du produit des ventes, sans qu'il y ait lieu d'en retrancher la commission versée à l'intermédiaire en rémunération de ses services, dès lors que ce commissionnaire a alors agi au nom et pour le compte de son commettant ; qu'il n'en va différemment que si le commissionnaire a agi en son nom propre mais pour le compte de son commettant et a ainsi la qualité d'intermédiaire mentionné au V de l'article 256 du code général des impôts ; que cet intermédiaire est alors réputé avoir personnellement acquis et livré les produits dont il assure la commercialisation ;

5 Considérant que la société LTJ DIFFUSION soutient qu'elle commercialise ses produits en recourant, pour partie, à un réseau d'entreprises commissionnaires, qui ont signé avec elle un contrat de " commissionnaire affilié ", et que, s'agissant des ventes réalisées par l'intermédiaire de ces commissionnaires, elle aurait déclaré à tort la totalité du prix de vente comme base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, et qu'il y aurait lieu de déduire de ces recettes le montant des commissions prélevées par ces intermédiaires, dès lors qu'ils ont agi en leur nom propre mais pour le compte de la société LTJ DIFFUSION, et qu'ils ont ainsi la qualité d'intermédiaire mentionné au V de l'article 256 du code général des impôts ; que le contrat-type, produit par la société LTJ DIFFUSION et le contrat conclu avec un commissionnaire produit par le ministre mentionnent, d'une part, que le commissionnaire reçoit en dépôt les produits qui demeurent... ; que si la société LTJ DIFFUSION allègue, sans d'ailleurs l'établir, que contrairement aux stipulations des contrats conclus avec les commissionnaires, les chèques des clients étaient en pratique libellés à l'ordre de la marque Arthur et non de la société requérante, cette circonstance est, par elle-même, insuffisante pour établir que ces intermédiaires agissaient en leur nom propre ; que la production de quelques tickets de caisse provenant de boutiques à l'enseigne Arthur est également insuffisante à cet égard ; qu'ainsi la société LTJ DIFFUSION n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les commissionnaires avaient la qualité d'intermédiaire mentionné au V de l'article 256 du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à la décharge de la pénalité pour manquement délibéré :

6 Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. /Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. " ;

7 Considérant que la proposition de rectification du 29 juillet 2010 rappelle les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, et fonde la pénalité sur un double motif, tiré, d'une part, du non-respect des règles d'exigibilité en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur des factures à établir, correspondant à des marchandises livrées, clairement exposées à l'occasion d'une précédente vérification de comptabilité, le montant de la taxe collectée à déclarer étant systématiquement minoré tout au long de l'exercice, et d'autre part, de l'exercice de droits à déduction fictifs, pratiqués à quatre reprises et pour des montants importants, les sommes déduites se rapportant à une dette de taxe professionnelle due au titre d'années antérieures ainsi qu'à des pénalités de taxe sur la valeur ajoutée, ces sommes étant récupérées au travers d'écritures comptables fantaisistes, telles que la comptabilisation de pénalités ou de montants de taxe professionnelle en taxe sur la valeur ajoutée déductible ; que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que cette motivation en droit et en fait serait insuffisante au regard des prescriptions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ; que le moyen tiré du défaut de motivation de la pénalité pour manquement délibéré doit par suite être écarté ;

8 Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;

9 Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives ; que, pour établir ce manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt ; que, pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ;

10 Considérant que les faits relevés par le service dans la proposition de rectification du 29 juillet 2010, mentionnés au point 7, établissent la méconnaissance des obligations déclaratives ainsi que l'intention d'éluder l'impôt de la société LTJ Diffusion ; que la société ne produit aucune argumentation de nature à contester la matérialité de ces agissements ; qu'ainsi l'administration apporte la preuve qui lui incombe du manquement délibéré de la société

LTJ DIFFUSION ;

11 Considérant que, sur le terrain de la doctrine, l'instruction invoquée du 19 février 2007 13 N- 1-07 n° 83 n'ajoute rien à la loi fiscale ;

12 Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société LTJ DIFFUSION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société LTJ Diffusion est rejetée.

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N° 14VE03678


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03678
Date de la décision : 21/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Philippe NICOLET
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : GUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-06-21;14ve03678 ?
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