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10/03/2016 | FRANCE | N°15VE03078

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 10 mars 2016, 15VE03078


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situatio

n et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1501357 du 17 septembre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 13 octobre 2015 et le 8 février 2016, MmeB..., représentée par Me Karl, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pourvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

- le préfet aurait dû saisir préalablement la commission du titre de séjour, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle remplit les conditions pour l'obtention d'un titre de séjour prévues à l'article L. 313-11 du même code ;

- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet, la durée de son séjour en France, qu'elle justifie par les différents documents à caractère probant qu'elle produit, ses attaches privées et familiales sur le territoire ainsi que son intégration dans la société française constituent des considérations humanitaires et des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour ; en outre, ses activités professionnelles depuis son entrée en France ainsi que la promesse d'embauche et le contrat de travail dont elle bénéficie justifient une telle admission au regard de cet article L. 313-14 et de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;

- il appartenait au préfet de transmettre son dossier, pour avis, à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

- compte tenu de ses attaches personnelles et familiales en France et de l'absence de toute attache au Maroc, la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors que la décision portant refus de titre de séjour est elle-même entachée d'illégalité ;

- cette mesure d'éloignement a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette mesure est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

- cette décision a été prise en violation des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm,

- et les observations de Me Karl, pour MmeB....

Une note en délibéré, enregistrée le 18 février 2016, a été présentée pour MmeB....

1. Considérant que MmeB..., ressortissante marocaine née le

9 septembre 1969, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour à raison de ses liens personnels et familiaux en France ainsi qu'en qualité de salarié ; que, par un arrêté du 6 février 2015, le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme B...relève appel du jugement du 17 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée vise, notamment, l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ainsi que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle mentionne que Mme B... n'est pas titulaire d'un visa de long séjour et n'a pas produit le contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail pour exercer en France une activité professionnelle et que la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain, ne peut donc lui être accordée ; que, par ailleurs, elle relève qu'il ne ressort pas de l'examen de sa situation personnelle et familiale que l'intéressée puisse bénéficier d'une mesure de régularisation sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 ; qu'en particulier, elle précise que Mme B... n'est pas en mesure de justifier de façon probante sa présence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans, notamment pour les années 2005 à 2008, et que, de ce fait, la commission du titre de séjour n'a pas à être saisie ; qu'enfin, elle mentionne que l'intéressée est célibataire et sans charge de famille et n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, de sorte qu'elle ne peut prétendre à bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, cette décision, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments caractérisant la situation de Mme B..., comporte les considérations de droit et de fait qui fondent le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ; que, par suite, le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de cette décision au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié'' (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de

dix ans (...) " ;

4. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

5. Considérant, d'une part, qu'il suit de là que Mme B..., ressortissante marocaine, ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la décision par laquelle le préfet du

Val-d'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, les dispositions précitées de l'article L. 313-14 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre, si un étranger peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ; qu'il suit de là que Mme B... ne peut davantage utilement se prévaloir des orientations générales définies par le ministre de l'intérieur dans la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, d'autre part, que Mme B..., qui déclare être entrée en France le 10 août 2003, se prévaut de la durée de son séjour en France depuis cette date et soutient que ses deux frères, l'un de nationalité française, l'autre titulaire d'une carte de résident, sa soeur, titulaire également d'une carte de résident, et ses deux oncles résident en France et qu'elle n'a plus aucune attache dans son pays d'origine, ses parents étant décédés respectivement en 2002 et 2011 ; qu'elle soutient également que, depuis son entrée en France, elle a travaillé auprès de personnes âgées, invalides ou malades ou de familles en qualité notamment de femme de ménage, cuisinière, aide ménagère ou personne de confiance ; qu'elle fait enfin valoir qu'elle a acquis une maison, sise à Argenteuil, et qu'elle ne peut retourner au Maroc où elle se retrouverait isolée ; que, toutefois, les différents documents que la requérante produit afin de justifier sa résidence habituelle en France, notamment pour les années 2005 à 2008, ne permettent pas d'établir l'ancienneté et la continuité de son séjour sur le territoire ; qu'en effet, l'intéressée ne produit, pour lesdites années, que quelques courriers, ordonnances médicales et factures d'achat, deux documents, non datés, relatifs à une demande d'aide médicale de l'État, un codicille à un testament olographe établi en sa faveur en 2006, un avis d'imposition pour l'année 2008 ainsi que des attestations de proches établies en 2009 et 2015, documents épars, ne couvrant que très partiellement les années en cause et qui, par leur faible nombre, leur nature ou leur caractère insuffisamment probant, ne sont pas de nature à établir sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans ; qu'en tout état de cause, la circonstance que Mme B... résiderait habituellement en France depuis le 10 août 2003, soit depuis plus de onze ans à la date de l'arrêté attaqué, ne saurait justifier, à elle seule, une mesure de régularisation ; que, par ailleurs, la requérante n'établit pas, par les pièces qu'elle fournit, notamment des attestations établies en 2009 ou ses relevés bancaires pour les années suivantes, qu'elle aurait exercé depuis son entrée en France, notamment entre 2004 et 2010 auprès d'une personne âgée, puis par la suite auprès de différents employeurs, des activités d'aide à domicile ou à la personne ; qu'en particulier, elle ne fournit aucune précision suffisante ni aucun élément probant quant au travail qu'elle effectuerait auprès de plusieurs familles qui seraient, selon ses dires, disposer à l'embaucher dans le cas d'une régularisation de sa situation au regard du séjour ; qu'à cet égard, l'intéressée se borne à produire, outre une promesse d'embauche établie le 1er septembre 2013 par un particulier pour trois heures de ménage par semaine, une promesse d'embauche, en qualité de femme de ménage, établie le 26 septembre 2013 par un établissement hôtelier et, en dernier lieu, une attestation du 1er octobre 2015, concernant une embauche sous contrat à durée indéterminée, qui est donc postérieure à la décision attaquée et, par suite, sans influence sur sa légalité ; qu'enfin, Mme B... est célibataire et sans charge de famille ; qu'au demeurant, elle n'établit pas la régularité du séjour en France de son frère Abdelmajid, dont il ressort des pièces du dossier qu'il est titulaire d'un titre de séjour espagnol ; qu'elle ne justifie pas davantage être dépourvue de toute attache personnelle ou familiale dans son pays d'origine où elle a résidé au moins jusqu'à l'âge de trente-trois ans, de sorte qu'elle y dispose d'attaches, notamment personnelles, au moins aussi fortes qu'en France ; qu'ainsi, en estimant qu'en l'absence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels, la situation personnelle et familiale de la requérante ne justifiait pas son admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte de séjour " vie privée et familiale ", le préfet du Val-d'Oise n'a pas commis d'erreur de droit ou d'erreur manifeste dans son appréciation de cette situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, enfin, que, contrairement à ce que soutient Mme B..., le préfet du Val-d'Oise n'était pas tenu, préalablement à l'édiction de sa décision lui refusant un titre de séjour en qualité de salarié, de saisir pour avis les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; que, par ailleurs, si Mme B... se prévaut de différentes activités qu'elle aurait exercées dans le secteur de l'aide à la personne depuis son entrée sur le territoire et soutient qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail, elle ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable et ancienne en France ; qu'en outre, elle se borne à produire deux promesses d'embauche en qualité de femme de ménage, sans fournir la moindre précision sur le ou les employeurs qui seraient susceptibles de l'embaucher, ainsi qu'une attestation pour une embauche sous contrat à durée indéterminée, postérieure à la décision attaquée ; que, dans ces conditions et eu égard à ce qui a été dit au point 6, en estimant que la situation personnelle et professionnelle de la requérante ne justifiait pas une mesure de régularisation en qualité de salarié, le préfet du Val-d'Oise n'a pas davantage, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, commis d'erreur de droit ou d'erreur manifeste dans son appréciation de cette situation ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

9. Considérant que Mme B... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois d'août 2003 ainsi que de la présence sur le territoire de sa fratrie et de deux oncles et soutient qu'elle y justifie d'attaches personnelles et familiales fortes, qu'elle y est bien insérée socialement et professionnellement et qu'elle bénéfice d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit aux points 6 et 7 ci-dessus, la requérante ne justifie pas de l'ancienneté et de la continuité de son séjour en France ; qu'en outre, elle ne justifie pas davantage d'une insertion sociale et professionnelle ancienne et stable sur le territoire français ; qu'enfin, Mme B..., qui est célibataire et sans charge de famille en France, n'établit aucune circonstance qui l'empêcherait de poursuivre sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine où elle a résidé au moins jusqu'à l'âge de trente-trois ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions irrégulières du séjour en France de Mme B..., la décision attaquée portant refus de titre de séjour ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation par le préfet de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la commission du titre de séjour : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ;

11. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de tous ceux qui s'en prévalent ; qu'ainsi, dès lors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 9 que Mme B... n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-d'Oise n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant, d'une part, que, Mme B... n'établissant pas que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait entaché d'illégalité, elle n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ce refus à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant, d'autre part, que, pour les mêmes motifs exposés au point 9, la mesure d'éloignement ne peut être regardée comme ayant porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ou comme étant entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. Considérant, d'une part, que cette décision mentionne les éléments de droit et de fait qui la motivent ; que, par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'elle est entachée d'une motivation insuffisante au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

15. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que cet article 3 stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

16. Considérant que si Mme B... soutient qu'elle n'a plus aucune attache familiale au Maroc et que son isolement dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements inhumains ou dégradants, il n'est pas établi, ainsi qu'il a été dit au point 6, que l'intéressée serait dépourvue de toute attache dans son pays ou qu'elle serait dans l'impossibilité de s'y réinsérer ; que, par suite, en décidant que l'intéressée pourrait être reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité, le préfet n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

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N° 15VE03078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE03078
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : KARL

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-03-10;15ve03078 ?
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