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10/12/2015 | FRANCE | N°13VE00490

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 10 décembre 2015, 13VE00490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DBS a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat ou la REGION ILE-DE-FRANCE à lui verser, d'une part, la somme de 46 051,06 euros, au titre des travaux supplémentaires exécutés en cours de marché par ordres de service du maître d'ouvrage, outre la somme de 3 194,67 euros au titre de la révision des prix, d'autre part, la somme de 7 687,65 euros en réparation du préjudice né de l'ajournement des travaux entre le 3 décembre 1995 et le 3 juin 1996, outre la somme d

e 461,26 euros au titre de la révision des prix, ces sommes étant assorties ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DBS a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat ou la REGION ILE-DE-FRANCE à lui verser, d'une part, la somme de 46 051,06 euros, au titre des travaux supplémentaires exécutés en cours de marché par ordres de service du maître d'ouvrage, outre la somme de 3 194,67 euros au titre de la révision des prix, d'autre part, la somme de 7 687,65 euros en réparation du préjudice né de l'ajournement des travaux entre le 3 décembre 1995 et le 3 juin 1996, outre la somme de 461,26 euros au titre de la révision des prix, ces sommes étant assorties des intérêts moratoires à compter de la date limite de paiement du décompte général définitif et, enfin, la somme de 5 640,61 euros au titre des frais de gestion du dossier d'octobre 1998 à novembre 2001.

Par un jugement n° 1006306 du 22 novembre 2012, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a mis l'Etat hors de cause et a condamné la REGION ILE-DE-FRANCE à verser à la société DBS la somme de 57 394,64 euros, assortie des intérêts au taux prévu par les stipulations du marché à compter du 25 novembre 2001 et la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 février 2013 et 6 février 2014, la REGION ILE-DE-FRANCE, représentée par le président du conseil régional, et par

Me Mauvenu, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par la société DBS devant le tribunal administratif ;

3° à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4° de mettre à la charge de la société DBS la somme de 7 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne statue pas sur les conditions de forme de la substitution prévue par la loi du 13 août 2004 ;

- les conditions de la substitution de la région à l'Etat à partir du 1er janvier 2005, en application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, ne sont pas réunies dès lors qu'aucune disposition transitoire n'a été prise par l'autorité investie du pouvoir réglementaire ; le marché étant entièrement exécuté le 3 juillet 2001, date de réception de l'ouvrage, aucun lien contractuel ne subsiste entre l'Etat et la société DBS alors que la substitution prévue par la loi du 13 août 2004 n'est applicable qu'aux contrats en cours ; elle n'est pas intervenue au cours de la passation du marché ni au cours de sa procédure d'exécution ;

- la substitution prévue par la loi du 13 août 2004 doit faire l'objet d'un avenant, qui n'est pas intervenu en l'espèce ;

- la procédure prévue aux stipulations des articles 50-11 et 50-21 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) de travaux a été méconnue ; la société DBS a transmis sa contestation du décompte général au maître d'oeuvre le 3 octobre 2001 ainsi qu'un mémoire en réclamation le 16 novembre 2001 et a entendu ainsi se placer dans le cadre de la procédure prévue par l'article 50-11 du CCAG de travaux ; elle devait faire parvenir à la personne responsable du marché un second mémoire en réclamation sur le fondement de l'article 50-21 du CCAG de travaux ; le mémoire en réclamation aurait dû être adressé au maître d'ouvrage ; par ailleurs, ce mémoire est insuffisamment motivé et ne détaille pas les chefs de réclamation ; ce mémoire n'a pas fait l'objet d'une décision implicite de rejet mais d'une décision explicite de rejet par la direction départementale de l'équipement (DDE) le 28 novembre 2003, faisant ainsi courir le délai de six mois prévu par l'article 50-23 du CCAG ; la demande introduite par la société DBS devant le tribunal administratif était irrecevable pour tardiveté ;

- la société DBS n'a, en tout état de cause, pas communiqué dans le délai prévu par l'article 13-44 un mémoire en réclamation après réception du décompte général, le mémoire du 16 novembre 2001 ayant été adressé plus de 45 jours après la notification du décompte général, le 25 septembre 2001 ;

- en adressant un mémoire en réclamation avant la date de réception des travaux, la société DBS a méconnu les stipulations de l'article 13-32 du CCAG de travaux et a entaché d'irrecevabilité sa demande présentée au titre du décompte ;

- en ce qui concerne les travaux supplémentaires ayant fait l'objet d'ordres de services, l'avis favorable donné par la DDE devant le comité consultatif national de règlements amiables des litiges relatifs aux marchés publics ne l'engage en aucune façon ;

- en ce qui concerne l'ajournement des travaux, cette décision a été prise dans l'intérêt des titulaires des autres lots et en raison d'un évènement imprévu et extérieur ;

- la région appelle l'Etat en garantie en raison des fautes commises par la DDE qui a commis des négligences dans le traitement de ce dossier et fait prendre du retard au règlement de ce litige ; la région n'a pas pu intervenir en qualité de partie au contrat et donner son avis sur les travaux en cours ou intervenir lors du comité consultatif.

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- les observations de Me Mauvenu, pour la REGION ILE-DE-FRANCE et celles de Me A...pour la société DBS.

1. Considérant que, par un marché passé le 23 mai 1995, le ministre de l'éducation nationale a confié à la société DBS la réalisation du lot n° 10, relatif à des travaux de cloisons, dans le cadre de la restructuration du lycée de Sèvres pour un montant de 476 196 francs HT, la direction départementale de l'équipement des Hauts-de-Seine (DDE) étant par ailleurs chargée d'une mission de conducteur d'opération ; que, par ordre de service du 2 janvier 1996, la DDE a décidé de l'ajournement des travaux, qui avaient débuté le 12 juin 1995, en raison de la résiliation du marché de gros oeuvre puis a décidé, par ordre de service du 3 juin 1996, la reprise de ces travaux ; que, par ordre de service du 13 août 1997, le maître d'ouvrage a décidé que les délais d'exécution des travaux étaient prolongés de 10 mois et 16 jours sans que les titulaires ne puissent prétendre à une indemnisation ; que, par lettre du 19 août 1998, la DDE a proposé un avenant modifiant le montant du marché et intégrant la prolongation du délai contractuel, qui a fait l'objet d'une demande indemnitaire de la part de la société DBS, laquelle a été rejetée par une lettre de la DDE du 5 janvier 2001 ; qu'après que la réception des travaux a été prononcée sans réserve le 3 juillet 2001, la DDE a notifié, le 19 septembre 2001, le décompte général qui a fait l'objet d'une contestation par la société DBS le 3 octobre 2001 puis le 16 novembre 2001, portant sur des travaux supplémentaires, la révision des prix et un préjudice lié à l'ajournement des travaux ; que le comité consultatif national du règlement amiable des litiges relatif aux marchés publics, saisi le 21 septembre 2007 par la société DBS, a émis, le 31 mars 2009, un avis favorable au paiement d'une somme de 46 051,06 euros TTC au titre des travaux supplémentaires, d'une somme de 3 194,67 euros au titre de la révision des prix et d'une somme de 7 687,65 euros TTC au titre de l'ajournement des travaux ; que le directeur de la DDE ayant informé la société DBS, par lettre du 6 août 2009, que l'Etat n'était plus en charge du règlement de ce litige, ladite société a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat ou la REGION ILE-DE-FRANCE à lui verser les sommes qu'elle estimait lui être dues dans le cadre du règlement du marché ; que, par jugement du 22 novembre 2012, le tribunal administratif a mis l'Etat hors de cause et a condamné la REGION ILE-DE-FRANCE à verser à la société DBS la somme de 57 394,64 euros, avec intérêts au taux du marché ; que la REGION ILE-DE-FRANCE demande à la Cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de la société DBS et subsidiairement de condamner de l'Etat à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ; que la société DBS conclut au rejet de la requête et demande que la somme complémentaire de 5 640,61 euros TTC lui soit versée par la région au titre des frais de gestion du dossier du mois d'octobre 1998 au mois de novembre 2001 ou que l'Etat soit condamné à lui verser la somme totale de 63 035,25 euros TTC ;

Sur l'appel de la REGION ILE-DE-FRANCE :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de travaux : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de trente jours, si le marché a un délai d'exécution inférieur ou égal à six mois. Il est de quarante-cinq jours dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. Si les réserves sont partielles, l'entrepreneur est lié par son acceptation implicite des éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portent pas. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que la direction départementale de l'équipement des Hauts-de-Seine, personne responsable du marché, a notifié le 25 septembre 2001 à la société DBS le décompte général ; que, si cette société a contesté ce décompte par un courrier du 3 octobre 2001, elle s'est toutefois bornée par ce courrier, d'une part, à demander le paiement de la somme de 373 458,45 francs en renvoyant à son précédent courrier du 5 octobre 1998 par lequel elle avait adressé le projet de décompte final, et, d'autre part, à annoncer qu'elle transmettrait, dans les délais impartis, le mémoire en réclamation ; qu'ainsi, ce courrier du 3 octobre 2001, qui ne comportait pas les justifications nécessaires des sommes dont le paiement était demandé, ne peut être regardé comme un mémoire en réclamation au sens des stipulations précitées de l'article 13.44 du CCAG ; que, le 16 novembre 2011, la société DBS a adressé au maître d'oeuvre et à la personne responsable du marché un second courrier portant la mention " mémoire en réclamation en application des dispositions de l'article 13.44 du CCAG applicable aux marchés de travaux ", réclamant cette fois la somme totale de 486 350,01 francs ; que, si ce mémoire en réclamation, comportait, au sens de l'article 13-44 susmentionné, le détail des sommes dues et justifiait, en raison de travaux supplémentaires ou de prolongations de délais à la suite d'un ajournement de chantier, les sommes demandées, il n'a été notifié que le 21 novembre 2001, soit plus de quarante cinq jours après la notification du décompte général, le 25 septembre 2001 ; que, dès lors, la réclamation formée par la société DBS a été tardivement formée et était, par suite, irrecevable ; que le décompte général notifié le 25 septembre 2001 doit ainsi être regardé comme définitif ; qu'il suit de là que la REGION ILE-DE-FRANCE est fondée à soutenir que la société DBS n'était pas recevable à remettre en cause ce décompte et à lui demander le paiement des diverses sommes qu'elle estimait lui être dues au titre du marché dont il s'agit ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la REGION ILE-DE-FRANCE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée à verser la somme de 57 394,64 euros à la société DBS, ainsi que la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions de la société DBS :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions incidentes de la société DBS tendant à l'augmentation de la somme que la REGION ILE-DE -FRANCE a été condamnée à lui verser doivent être rejetées ;

6. Considérant, en second lieu, que les conclusions de la société DBS dirigée à l'encontre de l'Etat aux fins de paiement des sommes susmentionnées doivent être regardées comme un appel provoqué ; qu'il y a lieu de les rejeter par adoption des motifs mentionnés au point 2 du jugement attaqué, la région se trouvant substituée à l'Etat dans ses droits et obligations en vertu des dispositions des articles L. 214-7, L. 214-8 et L. 213-6 du code de l'éducation ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que la REGION ILE-DE-FRANCE et l'Etat n'étant pas les parties perdantes dans la présente instance, la société DBS n'est pas fondée à demander qu'une somme soit mise à leur charge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société DBS, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros à verser à la REGION ILE-DE-FRANCE ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 1006306 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise du 22 novembre 2012 sont annulés.

Article 2 : La demande de la société DBS présentée devant le tribunal administratif tendant à la condamnation de la REGION ILE-DE-FRANCE est rejetée.

Article 3 : La société DBS versera une somme de 1 000 euros à la REGION ILE-DE-FRANCE en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société DBS dirigées contre l'Etat, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus des conclusions de la REGION ILE-DE-FRANCE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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N° 13VE00490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00490
Date de la décision : 10/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés. Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : SUR et MAUVENU ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-10;13ve00490 ?
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