La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2015 | FRANCE | N°14VE02221

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 12 novembre 2015, 14VE02221


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, de condamner la commune de Palaiseau à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de l'illégalité des arrêtés du maire de la commune en date des 20 janvier et 9 mai 2006 procédant à une retenue de 50,5 jours sur son traitement pour absence de service fait et lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de 30 jours ainsi que du comportement fautif de la co

mmune qui l'a affecté depuis 2005 à des postes ne correspondant pas à ses...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, de condamner la commune de Palaiseau à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de l'illégalité des arrêtés du maire de la commune en date des 20 janvier et 9 mai 2006 procédant à une retenue de 50,5 jours sur son traitement pour absence de service fait et lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de 30 jours ainsi que du comportement fautif de la commune qui l'a affecté depuis 2005 à des postes ne correspondant pas à ses attributions, d'autre part, d'enjoindre au maire de la commune, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de le réintégrer dans l'emploi qu'il occupait avant son changement d'affectation intervenu le 19 septembre 2005.

Par un jugement n° 0909798 du 19 mai 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 16 juillet 2014 et le 15 octobre 2015, M.C..., représenté par Me Morandini, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner la commune de Palaiseau à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

3° d'enjoindre au maire de la commune de le réintégrer dans l'emploi qu'il occupait avant son changement d'affectation intervenu le 19 septembre 2005, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de la commune de Palaiseau le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête, qui comporte une argumentation critiquant les motifs du jugement attaqué, est recevable ;

- l'illégalité des arrêtés du maire de Palaiseau en date des 20 janvier et 9 mai 2006 est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- il a fait l'objet d'une " mise à l'écart " de la part de la commune dont le maire l'a, depuis 2005, affecté à des postes ne correspondant pas à ses attributions ou à ses compétences, affectations révélant un comportement fautif de nature à engager cette responsabilité ;

- en particulier, la décision du 16 septembre 2005 portant changement d'affectation, dont il est recevable à contester la légalité, constitue en réalité, dès lors qu'elle a eu pour effet de l'affecter sur un autre lieu de travail et a entraîné une baisse importante de ses responsabilités, une mutation d'office qui est illégale, la commission administrative paritaire n'ayant pas été préalablement consultée en application de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 ; à supposer que cette décision ne soit pas une décision de mutation, elle doit être regardée comme une décision prise pour un motif disciplinaire et qui est illégale dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la communication du dossier ; cette illégalité est constitutive d'une faute qui ouvre droit à l'indemnisation du préjudice qu'il a subi ;

- il a subi un préjudice financier dès lors que, n'ayant pas perçu l'intégralité de son traitement entre les mois de février et juillet 2006, il a été confronté durant cette période, alors qu'il devait assurer le règlement de mensualités d'un prêt immobilier et d'une pension alimentaire, à d'importantes difficultés financières et a eu recours à un prêt auprès de son père ;

- il a également subi un préjudice matériel, à hauteur de 12 320 euros, correspondant à la nécessité de suivre une psychothérapie ;

- enfin, il a subi un préjudice moral, qu'il justifie par l'attestation du 27 mars 2009, du fait de l'atteinte psychologique causée par le comportement de l'autorité municipale qui, notamment, l'a confiné sur des postes ne correspondant pas à ses attributions habituelles.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 87-1108 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 88-554 du 6 mai 1988 ;

- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Haëm,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour la commune de Palaiseau.

1. Considérant que M. C...a été recruté à compter du 11 janvier 2003 par la commune de Palaiseau, par voie de mutation, en qualité d'agent technique qualifié et affecté au service du développement urbain sur un poste d'agent instructeur des demandes d'autorisation d'urbanisme ; qu'après avoir été promu, le 18 janvier 2005, au grade d'agent technique principal, il a été affecté au service bâtiment de la commune pour y exercer les fonctions d'agent technique bâtiment à compter du 19 septembre 2005 ; que, par un arrêté du 20 janvier 2006, le maire de la commune de Palaiseau a procédé à une retenue de 50,5 jours sur le traitement de l'intéressé, pour absence de service fait, à raison d'absences entre les mois de septembre et novembre 2005, puis, par un arrêté du 9 mai 2006, lui a infligé une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de 30 jours à raison d'absences non justifiées entre les mois de

septembre 2005 et janvier 2006 ; que ces deux arrêtés ont été annulés par un jugement du Tribunal administratif de Versailles du 9 décembre 2008 ; qu'enfin, à compter du

12 février 2009, l'intéressé a été affecté sur un poste de chargé de mission du patrimoine bâti auprès des services techniques de la commune ; qu'estimant avoir subi des préjudices en raison de l'illégalité des arrêtés du maire de Palaiseau en date des 20 janvier et 9 mai 2006 ainsi que du comportement fautif de la commune qui l'aurait affecté, depuis 2005, à des postes ne correspondant pas à ses compétences, M. C...a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant, d'une part, à la condamnation de la commune de Palaiseau à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation de ces préjudices, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au maire de la commune, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de le réintégrer dans l'emploi qu'il occupait avant son changement d'affectation intervenu le

19 septembre 2005 ; qu'il fait appel du jugement du 19 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

En ce qui concerne la responsabilité de la commune :

2. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés du maire de la commune de Palaiseau en date des 20 janvier et 9 mai 2006 ont été annulés par un jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 9 décembre 2008, devenu définitif, aux motifs, d'une part, que la matérialité d'une partie des absences reprochées à l'intéressé n'était pas établie et, d'autre part, que le caractère fautif des faits dont la matérialité était établie ne ressortait pas des pièces du dossier ; que, dès lors, M. C...est fondé à soutenir que l'illégalité de ces deux arrêtés constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune, pour autant qu'elle ait été à l'origine d'un préjudice direct et certain ;

3. Considérant, en second lieu, que M. C...soutient qu'à la suite d'un " litige " avec le maire de la commune de Palaiseau concernant la délivrance à sa compagne, le 3 février 2005, d'un permis de construire, il a fait l'objet d'une " mise à l'écart " par l'autorité communale qui l'a affecté, à partir du mois de septembre 2005, à des postes ne correspondant pas à ses compétences ; que le requérant soutient également que la décision du maire en date du 16 septembre 2005 l'affectant au service bâtiment de la commune pour y exercer les fonctions d'agent technique bâtiment constitue en réalité une mutation d'office illégale dès lors qu'elle n'a pas été soumise à l'avis de la commission administrative paritaire, ou doit être regardée comme une sanction disciplinaire illégale dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la communication du dossier ;

4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que M. C...et sa compagne ont signé, le 20 décembre 2004, une promesse de vente en vue de l'achat d'un terrain sis à Palaiseau et de la construction d'un pavillon ; qu'en défense, la commune de Palaiseau fait valoir que l'intéressé a utilisé à des fins personnelles, pour cette acquisition, des informations obtenues dans le cadre de ses fonctions d'agent instructeur des demandes d'autorisation d'urbanisme, au sein du service du développement urbain, et usé de son influence auprès d'un collègue de son service et d'interlocuteurs habituels de la commune pour obtenir la délivrance d'un permis de construire, au bénéfice de sa compagne, dans un délai très bref, soit en quelques jours, autorisation comportant des inexactitudes à l'avantage du pétitionnaire, notamment une sous-estimation de la surface hors oeuvre nette ; qu'alerté par des riverains et après une enquête interne, le maire de la commune a demandé à M. C...et à sa compagne de solliciter le retrait du permis de construire ainsi délivré, ce que cette dernière a fait le 24 mars 2005 ; qu'en se bornant à indiquer, sans aucune autre précision, que la délivrance de cette autorisation aurait été le prétexte pour des associations locales de défense de l'environnement de poursuivre un conflit avec la commune, le requérant ne conteste pas sérieusement les affirmations de la commune concernant les conditions de délivrance de cette autorisation ; que, par suite, la décision du maire de la commune en date du 16 septembre 2005 d'affecter M. C... au service bâtiment de la commune pour y exercer les fonctions d'agent technique bâtiment, qui découlait notamment du trouble généré au sein du service en charge de l'instruction des permis de construire par les conditions de délivrance de cette autorisation, était justifiée par l'intérêt du service et n'a pas revêtu un caractère disciplinaire ; que, dans ces conditions, si le requérant soutient que cette décision de mutation qui aurait notamment entraîné une baisse de ses responsabilités, est illégale, faute d'avoir été précédée, en application de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, de la consultation de la commission administrative paritaire, un tel vice de procédure ne saurait, en tout état de cause, être regardé comme ayant causé à M. C...un préjudice indemnisable dès lors que la décision d'affectation était légalement justifiée dans l'intérêt du service ;

5. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte également de l'instruction que les fonctions d'agent technique bâtiment, confiées à M. C...à compter du 19 septembre 2005, et celles de chargé de mission du patrimoine bâti auprès des services techniques, qui lui ont été confiées à compter du 12 février 2009, correspondent à celles qui peuvent être exercées par un adjoint technique territorial principal et sont, au demeurant, en adéquation avec la formation et l'expérience professionnelles de l'intéressé ; qu'en outre, ces deux affectations, décidées en septembre 2005 et février 2009, ne peuvent être regardées comme révélatrices d'une " mise à l'écart " alors qu'il résulte de l'instruction que l'intéressé a exercé les fonctions qui lui ont été confiées en 2005, puis en 2009, et s'est, au demeurant, même vu confier de nouvelles fonctions en 2012 en qualité de référent de la gestion locative et du référencement patrimonial et a bénéficié d'avancements d'échelon, avant d'être promu en 2013 au grade d'adjoint technique territorial de 1ère classe ; que, par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que les décisions prises à son encontre, en septembre 2005 et février 2009, révèleraient un comportement fautif de la commune ;

En ce qui concerne les préjudices allégués :

6. Considérant, d'une part, que, pour justifier du préjudice financier dont il se prévaut et résultant de l'illégalité des arrêtés du maire de la commune de Palaiseau en date des 20 janvier et 9 mai 2006, M. C...soutient que, n'ayant pu percevoir l'intégralité de son traitement entre les mois de février et juillet 2006, situation qui n'a été régularisée que plusieurs années après, il a été confronté, durant cette période au cours de laquelle il devait régler des mensualités d'un prêt immobilier ainsi qu'une pension alimentaire, à d'importantes difficultés financières et a eu recours à un prêt auprès de son père ; que, toutefois, alors qu'il est constant que la commune a reversé à l'intéressé, dès le mois de mars 2009, les rémunérations qui lui étaient dues, à la suite du jugement du Tribunal administratif de Versailles du 9 décembre 2008, le requérant ne produit aucune précision, ni aucune pièce justificative permettant d'établir la réalité et l'étendue du préjudice financier dont il demande réparation et, en particulier, n'établit pas, ni n'allègue d'ailleurs, avoir été exposé à des frais financiers à raison de la diminution de son traitement durant la période considérée ;

7. Considérant, d'autre part, que si M. C...invoque, dans le dernier état de ses écritures, un préjudice matériel à hauteur de 12 320 euros, correspondant à la nécessité de suivre une psychothérapie auprès d'un psychologue clinicien, il ne résulte pas de l'instruction que ce préjudice matériel soit en lien direct avec la faute de l'administration communale constituée par l'illégalité des arrêtés du maire de la commune de Palaiseau en date des 20 janvier et

9 mai 2006 ;

8. Considérant, enfin, que M. C...se prévaut également d'un préjudice moral du fait de l'atteinte psychologique causée par le comportement de l'autorité municipale qui, notamment, l'aurait confiné sur des postes ne correspondant pas à ses attributions habituelles ; qu'à l'appui de ses allégations, il produit un certificat du 27 mars 2009

d'un psychologue-psychothérapeute attestant le suivre régulièrement depuis le mois de novembre 2005 et attribuant son état psychique à l'attitude de sa hiérarchie qui l'a " désavoué " ; que, toutefois, alors qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 ci-dessus que M. C...est seulement fondé à demander réparation des préjudices résultant de l'illégalité des arrêtés du maire de la commune de Palaiseau en date des 20 janvier et 9 mai 2006, il ne résulte pas de l'instruction, notamment du certificat susmentionné du 27 mars 2009, que le préjudice moral invoqué, à le supposer établi, soit en lien direct avec la faute de l'administration communale constituée par l'illégalité de ces deux arrêtés ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Palaiseau, que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que M. C...demande à la Cour d'enjoindre au maire de la commune de Palaiseau, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de le réintégrer dans les fonctions qu'il occupait avant son changement d'affectation intervenu le 19 septembre 2005 ; que, toutefois, en dehors des cas expressément prévus par des dispositions législatives particulières, notamment par les articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, qui sont inapplicables en l'espèce, il n'appartient pas à la juridiction administrative d'adresser des injonctions à l'administration ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la commune défenderesse et tirée de l'irrecevabilité des conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. C...doit être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Palaiseau, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. C...une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Palaiseau sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : M. C...versera à la commune de Palaiseau une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Palaiseau tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

''

''

''

''

2

N° 14VE02221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02221
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-11-12;14ve02221 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award