Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner LA POSTE et l'Etat à lui verser la somme de 80 000 euros en réparation des préjudices subis en raison du blocage de sa carrière au sein de LA POSTE.
Par un jugement n° 1106621 du 19 décembre 2013, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a solidairement condamné l'Etat et LA POSTE à lui payer une somme de 9 000 euros tous intérêts confondus.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 février 2014 et le 28 août 2015, LA POSTE, représentée par Me Bellanger, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1106621 du 19 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée solidairement avec l'Etat à verser à
M. A...C...la somme de 9 000 euros tous intérêts confondus en réparation du préjudice subi du fait de son refus de prendre toute mesure de promotion interne en faveur des fonctionnaires reclassés ;
2° de rejeter la demande présentée par M. A...C...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
3° de mettre à la charge de M. A...C...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement, qui ne précise pas le motif pour lequel il est considéré que le requérant établissait des troubles dans ses conditions d'existence est insuffisamment motivé ;
- l'illégalité commise par LA POSTE doit être appréciée au regard du contexte ;
- chaque agent doit démontrer que cette illégalité l'a privé d'une perte de chance sérieuse d'être promu dans un grade lui permettant d'accéder à des fonctions supérieures ; pour cela le conseil d'Etat a dégagé trois critères ; le premier critère consiste à vérifier que l'agent satisfaisait bien aux conditions posées par les statuts particuliers ; le deuxième consiste à vérifier si la manière de servir fait l'objet d'excellentes appréciations ; le troisième consiste à vérifier la capacité de l'agent à exercer des fonctions de niveau supérieur ; dans le cas où tous les critères sont remplis le conseil d'Etat a accordé 10 000 euros au titre du préjudice de carrière bien loin des 80 000 euros demandés ; dans une affaire similaire, le conseil d'Etat a évalué le préjudice moral à 1 500 euros ; les juges peuvent indemniser le préjudice moral alors même que les agents n'ont aucun préjudice de carrière mais pas les troubles dans les conditions d'existence ;
- les éléments produits par M.C..., au titre de sa notation, de son aptitude à exercer des fonctions relevant d'un grade supérieur, sont insuffisants pour démontrer un préjudice de carrière ; il n'a pas été promu au sein d'un corps de reclassification ;
- le grade auquel il prétend qu'il aurait pu accéder est sur la même échelle indiciaire que le grade de préposé du service de la distribution et de l'acheminement ; le tribunal ne pouvait donc lui accorder aucune indemnisation au titre du préjudice de carrière.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 72-503 du 23 juin 1972 ;
- le décret n° 90-1224 du 31 décembre 1990 ;
- le décret n° 91-58 du 10 janvier 1991 ;
- le décret n° 92-935 du 7 septembre 1992 ;
- le décret n° 92-978 du 10 septembre 1992 ;
- les arrêtés des 18 janvier 1991 et 11 septembre 1992 fixant l'échelonnement indiciaire applicable au grade de conducteur de travaux de la distribution et de l'acheminement de LA POSTE ;
- les arrêtés des 11 septembre 1992, 4 juin 1998 et 30 mars 2007, fixant l'échelonnement indiciaire applicable aux grades d'agent d'exploitation de LA POSTE et d'agent d'exploitation de France Télécom ;
- les arrêtés des 11 septembre 1992, 4 juin 1998 et 30 mars 2007, fixant l'échelonnement indiciaire applicable au grade de préposé de LA POSTE ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Orio, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour LA POSTE.
1. Considérant que par sa requête enregistrée le 20 février 2014, LA POSTE se borne à contester la réalité et l'étendue du préjudice subi par M.C... ; que, par son recours incident, ce dernier demande l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a limité son indemnisation à la somme de 9 000 euros ;
Sur la régularité du jugement en litige :
2. Considérant, qu'en jugeant qu'eu égard aux fautes relevées, " consistant à priver de manière générale les fonctionnaires " reclassés " de toute possibilité de promotion interne, M. C... a subi un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence dont il sera fait une juste appréciation en les évaluant à 3 000 euros, tous intérêts confondus, " les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement ;
Sur le préjudice :
3. Considérant que pour juger que M.C..., né en 1959, entré à LA POSTE en 1975 ayant exercé en qualité de préposé à compter de 1977 avait subi un préjudice de carrière, le tribunal administratif a retenu que l'intéressé remplissait tant les conditions statutaires que les conditions d'aptitude pour accéder au grade d'agent d'exploitation distribution acheminement ; que, toutefois, l'intéressé ne conteste pas sérieusement en appel qu'une nomination à ce grade, dont l'échelonnement indiciaire est équivalent à celui des préposés n'aurait pas constitué pour lui une promotion ; que s'il soutient que l'accès à ce grade lui aurait permis d'accéder au grade de conducteur des travaux branche distribution acheminement (CDTX), il résulte de l'instruction que l'accès à ce grade ne lui était statutairement pas accessible en sa qualité de préposé ; que, par ailleurs aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à LA POSTE de prévoir de promotion du corps des préposés au grade de CDTX ; que, dès lors, il n'établit pas avoir perdu une chance sérieuse d'accéder à ce grade constitutive d'un préjudice de carrière ; que, par suite, LA POSTE est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que M. C... avait subi un préjudice de carrière indemnisable ;
4. Considérant toutefois que LA POSTE ne conteste pas avoir commis une illégalité fautive en ayant privé M. C...de toute possibilité de promotion interne ; que, eu égard à la nature et aux effets de cette faute, LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que l'intéressé n'aurait subi ni préjudice moral ni troubles dans les conditions d'existence ; que, par ailleurs, dans la mesure où l'intéressé a reçu la note E, pour excellent entre 1999 et 2005, que, sur la même période, son aptitude à exercer des fonctions différentes de même niveau ou supérieur a été évaluée comme excellente, qu'il a également obtenu la note E en 2006, 2007, 2008, 2010 et 2011, et qu'il a été promu au grade de CDTX à compter du 30 décembre 2012, c'est à tort que ce tribunal a seulement évalué son préjudice moral et ses troubles dans les conditions d'existence à la somme de 3 000 euros ; que l'indemnisation de ces préjudices pourra être portée à la somme de 4 000 euros tous intérêts compris et capitalisés ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que LA POSTE est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que M. C...avait subi un préjudice de carrière indemnisable et d'autre part, que M. C... est uniquement fondé à soutenir que c'est à tort que ce même tribunal administratif n'a indemnisé son préjudice moral et ses troubles dans les conditions d'existence qu'à la somme de 3 000 euros ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de LA POSTE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. C...une somme de 1 000 euros à verser à LA POSTE sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que LA POSTE et l'Etat sont condamnés à verser à M. C...est ramenée à 4 000 euros intérêts compris.
Article 2 : Le jugement n° 1106621 du 19 décembre 2013 du Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : M. C...versera la somme de 1 000 euros à la Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
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N° 14VE00545