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23/06/2015 | FRANCE | N°15VE00731

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 23 juin 2015, 15VE00731


Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2015, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Apaydin, avocat ;

Mme B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1407916 du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination

;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision par laquelle le préfet lui...

Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2015, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Apaydin, avocat ;

Mme B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1407916 du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision par laquelle le préfet lui a notifié une obligation de quitter le territoire ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour temporaire et à titre subsidiaire lui enjoindre de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour et de celle l'obligeant à quitter le territoire français :

- les décisions attaquées sont entachées d'incompétence ;

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet ne s'est pas livré à un examen particulier de sa situation ; en l'espèce Mme B... n'a pas été convoquée à la préfecture pour un entretien et le préfet a rejeté d'office sa demande de titre sans procéder à un examen attentif de sa demande et sans motiver la décision de rejet ;

- le refus de séjour est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle s'est en effet mariée dans la Seine-Saint-Denis le 21 octobre 2011 et a deux enfants nés sur le territoire français ; ses enfants sont nés en 2010 à Bondy et en 2014 à Stains ; si elle venait à quitter le territoire français elle devrait quitter son époux et ses deux enfants dont l'aîné est scolarisé à l'école maternelle ;

- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;

- la décision méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car dès lors que sa vie privée et familiale est en France si elle venait à quitter le territoire français elle devrait se séparer de son époux et de ses enfants ; en outre elle a séjourné en France depuis 2008 ce dont elle apporte la preuve ; elle est bien intégrée et parle la langue ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

- le préfet a porté atteinte aux stipulations de la convention de New York relatives aux droits de l'enfant car les enfants pourraient être séparés de leurs parents ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- d'origine kurde et de confession alévie, elle a demandé le statut de réfugié politique et sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ;

- en Turquie elle risquerait d'être exposée à des traitements inhumains et dégradants, en effet la décision attaquée viole l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 juin 2015, le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante turque née le 1er janvier 1983, demande l'annulation du jugement du 5 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 23 juillet 2014 par lesquelles le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que si, en appel, elle se borne à demander à la Cour d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision par laquelle le préfet lui a notifié une obligation de quitter le territoire, elle doit être regardée comme demandant également l'annulation de la décision de refus de séjour et de la décision fixant le pays de destination compte-tenu des moyens qu'elle développe à leur encontre ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme B...soutient, sans autre précision, que ces décisions sont entachées d'incompétence ; qu'il y a lieu, sur ce point, d'adopter la motivation circonstanciée qui lui a été opposée par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de séjour comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

4. Considérant en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait refusé de se livrer à un examen particulier de la situation de la requérante ; que si Mme B... soutient qu'elle aurait dû être convoquée à la préfecture pour un entretien, aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers n'oblige le préfet à convoquer à la préfecture, pour un entretien, l'étranger qui demande un titre de séjour ; qu'en outre, la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 n'est pas applicable aux décisions statuant sur une demande ; qu'ainsi MmeB..., à supposer qu'elle ait entendu se prévaloir de ces dispositions, ne peut utilement les invoquer à l'encontre de la décision rejetant sa demande de titre de séjour pour soutenir qu'elle serait irrégulière faute d'avoir été précédée d'une procédure contradictoire ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que Mme B...n'établit pas, comme elle l'allègue, sa présence continue en France depuis 2008 ni sa particulière intégration ; que son époux et ses deux enfants, nés en 2010 et 2014 en France, qui sont encore très jeunes, étant de nationalité turque, aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans son pays d'origine, où se trouve encore sa mère, alors même qu'elle aurait, comme elle le soutient des membres de sa fratrie en France en situation régulière ou de nationalité française ; que, dans ces conditions, les décisions contestées n'ont pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'elles n'ont ainsi pas méconnu ces stipulations ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; que Mme B...ne soutient pas qu'elle aurait séjourné plus de dix ans en France et n'établit l'existence d'aucune circonstance de nature à établir que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires, l'intéressée pouvant retourner dans son pays d'origine avec sa famille, et ne faisant prévaloir aucun motif exceptionnel ;

7. Considérant, en sixième lieu, qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché ces décisions d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ces mesures sur la situation personnelle de Mme B... ;

8. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations que l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances particulières s'opposeraient à ce que Mme B...et son époux retournent en Turquie avec leurs deux enfants ; que, par suite, ces décisions qui n'impliquent pas la séparation des enfants d'avec leurs parents n'ont pas méconnu les stipulations du § 1 de l'article 3 précité ;

9. Considérant, enfin, que la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui n'est pas applicable à sa situation ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

11. Considérant que Mme B...invoque la méconnaissance des stipulations précitées mais ne produit toutefois aucun document à l'appui de ses affirmations selon lesquelles elle serait menacée dans son pays d'origine au motif qu'elle serait d'origine kurde et de confession alévie ; qu'en outre, elle n'établit pas que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction, ensemble ses conclusions tendant au versement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

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N° 15VE00731 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00731
Date de la décision : 23/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : APAYDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-06-23;15ve00731 ?
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