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28/05/2015 | FRANCE | N°13VE03109

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 28 mai 2015, 13VE03109


Vu, enregistrée le 2 octobre 2013, l'ordonnance en date du 25 septembre 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête de la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris sous le n° 13PA03602 ;

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2013 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentée pour la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH, dont le siège est situé Gut Dauerthal à Dauerthal (122

91), Allemagne, par Me Zimmermann, avocat ; la société ENERTRAG ENERGIE...

Vu, enregistrée le 2 octobre 2013, l'ordonnance en date du 25 septembre 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête de la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris sous le n° 13PA03602 ;

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2013 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentée pour la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH, dont le siège est situé Gut Dauerthal à Dauerthal (12291), Allemagne, par Me Zimmermann, avocat ; la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1203195 en date du 19 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 143 986,67 euros dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009, assorti du paiement des intérêts moratoires ;

2° de prononcer le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 9 430 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a déposé, conformément à l'article 7 de la directive 2008/9/CE du 12 février 2008 transposé à l'article 242-0 R de l'annexe II au code général des impôts, une demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée le 16 avril 2010 sur le portail électronique de l'administration allemande, qui lui a délivré une confirmation de ce dépôt ; cette obligation étant la seule qui s'imposait à elle, sa demande de remboursement doit donc être considérée comme ayant été déposée à partir du moment où elle a été reçue par le portail de l'Etat membre d'établissement ; le fait, pour l'Etat membre de remboursement, d'accuser réception de la transmission de la demande de remboursement par l'Etat de résidence est sans incidence sur la validité du dépôt ; compte tenu de l'accusé de réception fourni par l'administration allemande conformément au 2 de l'article 15 de la directive, sa demande doit, en outre, être regardée comme ayant été régulièrement introduite au sens du 1 de cet article ; il suit de là que ses conclusions dirigées contre le refus implicite opposé à cette demande étaient recevables sans que puissent lui être opposées des circonstances indépendantes de sa volonté ;

- c'est à tort que, pour considérer qu'aucune décision implicite de rejet n'était née, le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de " réception effective " de la demande par l'administration française en raison d'un motif technique ; en effet, et ainsi que l'ont établi les investigations du service sur le portail électronique français, la demande a, dans un premier temps, été transmise par le portail allemand au portail français lequel, dans un second temps, l'a retournée au portail allemand pour un motif technique ; or, pour qu'une demande puisse être retournée, il faut nécessairement qu'elle ait été préalablement transmise et reçue ; le message d'erreur, extrait des archives du système français, a notamment permis au service de déterminer que la demande de remboursement de la requérante comprenait 18 pièces jointes, qu'elle avait été déposée sur le portail allemand le 16 avril 2010 et que le pays de remboursement était la France ;

- la circonstance que cette demande n'ait pu être exploitée pour des raisons techniques est sans incidence sur le fait, établi, qu'elle avait bien été déposée et transmise ; il résulte, au surplus, des considérants des directives 2008/9/CE et 2010/66/UE qu'elles avaient pour objectifs de sécuriser les droits des entreprises et de remédier aux difficultés techniques qui leur portaient préjudice ; au demeurant, si la demande avait dû être déposée en format papier, la réalité de ce dépôt n'aurait pu être contestée au motif qu'une information aurait été manquante ou incomplète ;

- de même, la circonstance que l'administration française n'ait pas accusé réception de la demande est inopérante dès lors que l'accusé de réception est une obligation mise à la charge de l'administration dont la méconnaissance ne saurait, par suite, être opposée au contribuable ;

- l'administration française avait, en outre, la possibilité technique de traiter sa demande, comme cela résulte de l'analyse qu'elle a faite du contenu du fichier qu'elle a reçu ; elle aurait dû, en application de l'article 242-0 V de l'annexe II au code général des impôts, lui notifier la date à laquelle elle avait reçu la demande sur son portail, sans que le défaut d'exploitabilité technique ne puisse la dégager de cette obligation ; disposant des coordonnées de l'exposante, elle pouvait, de surcroît, prendre son attache ;

- dès lors que l'exposante a démontré avoir satisfait à l'ensemble des obligations qui lui incombaient en vertu de la directive et de la loi, à savoir le dépôt dans les délais de sa demande de remboursement, il appartient à l'administration française de démontrer le contraire, ce qu'elle ne fait pas en l'espèce ; il n'incombe pas à l'exposante de démontrer que sa demande a été reçue par le portail français ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008 définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l'Etat membre de remboursement, mais dans un autre Etat membre ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2015 :

- le rapport de Mme Moulin-Zys, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant que, le 16 avril 2010, la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH, société de droit allemand ayant son siège à Dauertal, a, en vertu de l'article 242-0 R de l'annexe II au code général des impôts, déposé, sur le portail électronique de l'administration fiscale allemande, une demande de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 143 986,67 euros ayant grevé le coût des biens et services acquis ou obtenus en France au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2009 ; qu'elle fait appel du jugement du 19 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté, comme irrecevables, ses conclusions tendant au remboursement de cette taxe au motif que, comme le faisait valoir le service en défense, aucun rejet implicite de cette demande n'avait pu naître de son silence faute que ladite demande ait été effectivement reçue par l'administration fiscale française ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts :

" (...) V. Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations (...) " ; qu'aux termes de l'article 242-0 N de

l'annexe II au code général des impôts : " Un assujetti non établi en France peut obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens qui lui ont été livrés ou les services qui lui ont été fournis en France par d'autres assujettis ou ayant grevé l'importation de biens en France (...) " ; qu'aux termes de l'article 242-0 R de la même annexe : " I. Pour bénéficier du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, l'assujetti non établi en France doit adresser au service des impôts une demande de remboursement souscrite par voie électronique au moyen du portail mis à sa disposition par l'Etat de l'Union européenne où il est établi (...) " ; qu'aux termes de l'article 242-0 V de cette annexe : " I. Le service des impôts notifie dans les meilleurs délais au requérant, par voie électronique, la date à laquelle la demande a été reçue. II. Sous réserve des dispositions de l'article 242-0 X, le service des impôts notifie au requérant sa décision d'accepter ou de rejeter la demande de remboursement dans un délai de quatre mois à compter de sa réception " ; qu'enfin, aux termes de l'article 242-0 Z de ladite annexe : " (...) En l'absence de décision du service des impôts dans le délai imparti, le requérant peut saisir de sa réclamation le tribunal administratif compétent dès son expiration. " ;

3. Considérant qu'il est constant, et ainsi qu'il a été dit, que, le 16 avril 2010, la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH a déposé une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible sur le portail électronique allemand qui en a accusé réception par l'émission d'une confirmation d'expédition ; que, si le service fait valoir que cette demande n'est pas parvenue à l'administration française, il ressort cependant de ses propres investigations et, plus particulièrement, du message d'erreur adressé par le portail français au portail allemand le 28 avril 2010, que cette demande a été rejetée par le portail électronique de l'administration française pour un motif technique ; qu'il en résulte, d'une part, que la demande de la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH a bien été adressée par le portail allemand au portail français sans que, par suite, l'administration puisse utilement se prévaloir de la circonstance que la requérante ne produit pas la confirmation de cette expédition qui aurait dû lui être délivrée par l'administration allemande ; qu'il en résulte, d'autre part, que cette demande doit être regardée comme étant bien parvenue à l'administration française alors même que, compte tenu d'erreurs de codage faisant obstacle à son traitement, elle n'aurait pu être importée dans le système informatique de l'administration fiscale aux fins d'être examinée par le service compétent et que l'administration n'en a pas accusé réception comme le prévoit l'article 242-0 V précité de l'annexe II au code général des impôts ; que, dans ces conditions, alors qu'il est constant qu'aucune décision expresse, ni même, au demeurant, aucune information, n'a été adressée à la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH, la demande de celle-ci doit être regardée comme ayant fait l'objet d'un rejet implicite sans que puisse y faire obstacle la double circonstance, invoquée par l'administration, que la société requérante n'aurait pas effectué les diligences minimales dans le suivi de sa demande de remboursement et qu'il aurait incombé au portail de l'administration allemande d'informer la société du rejet technique de cette demande par le portail français ; qu'il suit de là que la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté comme irrecevable la demande dont elle l'avait saisi ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH devant le tribunal administratif ;

5. Considérant que le ministre chargé du budget ne fait valoir aucun motif de forme ou de fond susceptible de justifier, en tout ou en partie, le rejet de la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible d'un montant de 143 986,67 euros présentée par la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH, dans le délai applicable, au titre de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2009 ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requérante tendant au remboursement de ladite somme ; qu'en revanche, les conclusions de l'intéressée tendant au paiement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, qui sont, en application de l'article R. 208-1 du même livre " payés d'office en même temps que les sommes remboursées au contribuable par le comptable chargé du recouvrement des impôts ", sont irrecevables ainsi que le fait valoir le ministre, en l'absence d'un litige né et actuel entre le comptable et la société requérante au sujet de ces intérêts ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1203195 du Tribunal administratif de Montreuil en date du 19 juillet 2013 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH le remboursement d'un montant de 143 986,67 euros correspondant au crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible dont elle disposait à l'expiration de l'année 2009.

Article 3 : L'Etat versera à la société ENERTRAG ENERGIEDIENST GMBH une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 13VE03109 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE03109
Date de la décision : 28/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Remboursements de TVA.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Marie-Cécile MOULIN-ZYS
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SELAS MARCCUS PARTNERS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-05-28;13ve03109 ?
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