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18/09/2014 | FRANCE | N°14VE01334

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 18 septembre 2014, 14VE01334


Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 6 mai 2014 et le 20 mai 2014, présentés pour Mme A...C..., demeurant..., par Me Boiardi, avocat ;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203262 du 1er juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2012 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé

le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfecto...

Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 6 mai 2014 et le 20 mai 2014, présentés pour Mme A...C..., demeurant..., par Me Boiardi, avocat ;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203262 du 1er juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2012 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, d'enjoindre au préfet des Yvelines de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Boiardi en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, sa demande de titre de séjour devait être examinée non pas sur le fondement des stipulations de l'article 5 de la convention

franco-centrafricaine du 26 septembre 1994, qui ne régit que les conditions de l'entrée sur le territoire français des ressortissants centrafricains, mais sur celui des dispositions de l'article

L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, le cas échéant, de l'article L. 313-14 du même code ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet des Yvelines a commis une erreur de droit en examinant sa demande de changement de statut au regard des seules stipulations de la convention centrafricaine, en méconnaissance du champ d'application de cette convention ;

- le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles L. 5221-2, L. 5221-5 et L. 5221-9 du code du travail, qui ne font pas obstacle à ce qu'un étranger déjà présent sur le territoire français muni d'une carte de séjour " étudiant " sollicite un changement de statut afin d'exercer une activité salariée ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français prive la décision fixant le pays de destination de base légale ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République centrafricaine relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Bangui le 26 septembre 1994, approuvée par la loi n° 95-1309 du 21 décembre 1995 et publiée par un décret n° 96-1071 du 9 décembre 1996 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,

- et les observations de Me Boiardi, pour MmeC... ;

1. Considérant que MmeC..., née le 19 août 1976, de nationalité centrafricaine, a été titulaire d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " valable du 20 octobre 2006 au 19 octobre 2007, renouvelé jusqu'au 19 octobre 2009, délivré en vue de l'exercice de l'activité de jeune fille au pair ; que, le 23 mars 2009 elle a présenté une demande tendant soit au renouvellement de ce titre, soit à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que par un arrêté du 25 avril 2012, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement ; que Mme C...relève appel du jugement en date du 1er juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que, pour rejeter la demande de titre de séjour qui lui était présentée par la requérante, le préfet des Yvelines s'est fondé sur l'appréciation selon laquelle la demande, en tant qu'elle tendait au changement de statut de l'intéressée, constituerait un " détournement de l'objet initial du visa ", et sur celle selon laquelle la requérante n'entrerait dans aucun cas d'attribution d'un titre de plein droit en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la convention franco-centrafricaine ;

3. Considérant, d'une part, que ni les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 5 de la convention franco-centrafricaine du 26 septembre 1994 susvisée relative à la circulation et au séjour des personnes ne font obstacle à ce qu'un ressortissant centrafricain titulaire d'un visa " Etudiant " présente une demande de titre de séjour en qualité de salarié ; que, par suite, le premier motif retenu par le préfet, tiré du " détournement de l'objet initial du visa " n'est pas de nature à justifier légalement le refus de délivrance de titre de séjour en litige ;

4. Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 5 de la convention

franco-centrafricaine du 26 septembre 1994 susvisée relative à la circulation et au séjour des personnes, un ressortissant de Centrafrique doit, pour être admis sur le territoire français en vue d'y exercer une activité professionnelle salariée, justifier notamment de la possession d'un contrat de travail visé par le ministère du travail conformément à la législation française, et qu'en vertu de l'article 10 de la même convention, les ressortissants centrafricains doivent, pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, posséder un titre de séjour délivré conformément à la législation française ; que, par suite, ces stipulations ont expressément réservé l'application de la législation nationale relative à l'accès au travail et se combinent en conséquence avec les dispositions du code du travail, notamment celles de l'article R. 313-15 de ce code qui prévoient que, pour l'application du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " salarié " doit notamment, présenter un contrat de travail conclu pour une durée égale ou supérieure à douze mois avec un employeur établi en France, conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail et revêtu du visa de ses services ;

5. Considérant que le préfet des Yvelines, en se bornant à relever, par le second motif du rejet de la demande, que la requérante n'entrerait dans aucun cas d'attribution d'un titre de plein droit en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la convention franco-centrafricaine, ne peut être regardé comme ayant examiné ladite demande tendant à la délivrance de séjour en qualité de salariée qui lui était présentée par la requérante sur le fondement des dispositions des articles L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles L. 5221-2, L. 5221-5 et L. 5221-9 du code du travail ;

6. Considérant qu'il suit de là que Mme C...est fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2012 du préfet des Yvelines ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

9. Considérant que, si le présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Yvelines réexamine la situation de MmeC..., il n'implique pas en revanche, eu égard à son motif, que le préfet délivre l'un des titres sollicité par la requérante ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de procéder au réexamen de la situation de Mme C...et de statuer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Boiardi, avocat de MmeC..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Boiardi de la somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1203262 du Tribunal administratif de Versailles en date du 1er juillet 2013 et l'arrêté du préfet des Yvelines du 25 avril 2012 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de la situation de Mme C... et de statuer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Boiardi, avocat de MmeC..., une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

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N° 14VE01334


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01334
Date de la décision : 18/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : BOIARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-09-18;14ve01334 ?
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