Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2012, présentée pour M. et Mme B...A..., demeurant..., par Me Charpentier-Stollof, avocat ;
M. et Mme A...demandent à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 0808781 en date du 5 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, des contributions sociales et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;
2° qu'il leur soit restitué les sommes qu'ils ont dû verser au Trésor public, ainsi que les sommes qu'ils ont engagées pour faire réaliser un constat d'huissier ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
- il n'était pas possible d'émettre un avis de mise en recouvrement des cotisations supplémentaires dues au titre de l'impôt sur le revenu en l'absence d'avis rendu préalablement par la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaire sur le litige concernant les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société Le Méditerranéen ;
- les sommes retenues pour calculer l'impôt sur le revenu sont directement liées aux sommes déterminées par le service vérificateur pour la société Le Méditerranéen, pour lesquelles la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaire est compétente ;
Sur les pénalités :
- la pénalité de 40% appliquée aux sommes redressées ne peut pas concerner à la fois les sommes redressées au titre de l'impôt sur le revenu et les sommes dues au titre de l'impôt sur les sociétés, la société Le Méditerranéen ayant une personnalité morale distincte des contribuables physiques ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 17 juin 2014 :
- le rapport de M. Formery, président assesseur,
- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., pour M. et Mme A...;
1. Considérant que l'EURL le Méditerranéen, dont M. A... est le gérant et qui exploite une activité de restauration rapide à Vanves, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration, après avoir écarté la comptabilité de la société et reconstitué son chiffre d'affaires des exercices clos en 2003 et 2004, a procédé à des rehaussements de ses bénéfices pour ces deux années ; que, consécutivement, l'administration, ayant considéré M. A...comme maître de l'affaire en sa qualité de gérant et de seul associé de la société, a procédé aux rehaussements du revenu imposable à l'impôt sur le revenu de M. et Mme A..., au titre de ces deux années, à raison de revenus considérés comme distribués par cette société sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts ; M. et Mme A...relèvent appel du jugement n° 0808781 en date du 5 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, des contributions sociales et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 et de les décharger de ces impositions et pénalités ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L 59 A, du livre des procédures fiscales, " La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du même code ; 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. " ;
3. Considérant que M. et Mme A...soutiennent que l'avis de mise en recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ne pouvait être émis à leur encontre tant que la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaire, dont la saisine avait été demandée par les requérants par un courrier du 29 novembre 2006, ne s'était pas prononcée sur la procédure de rectification des revenus de l'EURL Le Méditerranéen et sur la proposition de rectification ; que la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaire a rendu son avis le 26 février 2008 ; qu'eu égard au principe de l'indépendance des procédures, les décisions rendues à l'égard de la société n'étant pas opposables à un dirigeant pour le règlement de sa situation personnelle, cet avis ne l'était pas davantage ; qu'au demeurant, la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaire n'est pas compétente pour connaître des contestations portant sur des revenus de capitaux mobiliers, en l'espèce constitués par les revenus distribués perçus par les requérants ; qu'ainsi, le fait que l'administration ait mis en recouvrement les impositions contestées par M.et Mme A...le 31 décembre 2007, soit avant l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, est sans incidence sur la régularité de la procédure ; que la circonstance que l'administration a ultérieurement tenu compte de cet avis pour dégrever partiellement les impositions à la charge de M. et Mme A...est également sans incidence sur la régularité de la procédure ;
Sur le bien fondé des impositions :
4. Considérant que les requérants contestent le bien fondé des impositions supplémentaires mises à leur charge qui grèvent leurs revenus réputés distribués et qui sont imposés comme des revenus de capitaux mobiliers ;
5. Considérant que M. et Mme A...soutiennent que la procédure de vérification concernant l'EURL Le Méditerranéen a été irrégulière ; que, cependant, cette procédure est indépendante de la procédure de rectification portant sur les revenus de capitaux mobiliers ; qu'il suit de là qu'en tant qu'ils portent sur la vérification de comptabilité relative aux exercices clos les 31 décembre 2006 et 2007, les moyens de M. et Mme A...selon lesquels la procédure d'établissement des suppléments d'impôt sur les sociétés assignés à l'EURL Le MEDITERRANEEN aurait été irrégulière sont inopérants au regard des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales assignés au requérant ;
6. Considérant que la Cour administrative d'appel de Versailles, par un arrêt rendu ce jour sous le n° 12VE02075, a estimé que la méthode appliquée par l'administration pour reconstituer les recettes tirées de la vente sur place de l'EURL Le Méditerranéen n'était pas satisfaisante, en ce qu'elle a appliquée un taux de 10% de perte de poids des frites congelées à la cuisson et que ce taux n'était pas suffisamment étayé ; qu'elle a jugé, en conséquence, que les impositions supplémentaires mises à la charge de l'EURL avaient un caractère exagéré ; qu'il en est résulté une réduction des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés et du chiffre d'affaire taxable à la valeur ajoutée d'un montant de 5 780 euros ;
7. Considérant, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts, " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; que l'article 110 du même code dispose que " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) " ;
8. Considérant que M. A...ne conteste pas avoir été le seul maître de l'affaire durant la période ayant fait l'objet de la vérification de comptabilité, soit du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ; que l'administration pouvait, dès lors, à bon droit, le regarder comme ayant appréhendé les recettes omises révélées par la reconstitution de la comptabilité de l'EURL ; que le supplément de recettes omises par l'EURL le Méditerranéen doit être regardé comme un revenu réputé distribué à M.A..., en sa qualité de gérant et d'unique associé de l'EURL, en vertu de l'article L. 109-1 2° du code général des impôts ; qu'en conséquence de l'invalidation de la méthode de reconstitution concernant la vente sur place, il y a lieu de prononcer la réduction dans les mêmes proportions des revenus distribués à M. et Mme A...et, par voie de conséquence, des revenus de capitaux mobiliers imposés à l'impôt sur le revenu ; que cette réduction doit être fixée à 3 010 euros, correspondant au supplément de recettes non retenus pour 2003 auxquels s'ajoutent la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 590 euros, et à 2 770 euros pour 2004 auxquels s'ajoutent la taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 549 euros ;
Sur les pénalités :
9. Considérant, qu'en vertu du 1 de l'article L. 1729 du code général des impôts, " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat. " ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'administration pouvait regarder à bon droit M. A...comme ayant appréhendé les recettes omises révélées par la reconstitution de comptabilité de l'EURL le Méditerranéen ; que, par conséquent, M.A..., qui a délibérément manqué à ses obligations déclaratives dans le cadre de la gestion de l'EURL le Méditerranéen, et a cherché à éluder l'impôt dû sur les bénéfices de cette entreprise, ne peut être regardé que comme ayant fait preuve du même manquement délibéré concernant ses revenus distribués ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme établissant la volonté du contribuable d'éluder une partie des impositions dont il était redevable ; que l'indépendance des procédures ne fait pas obstacle à ce qu'une même pénalité soit mise à la charge de personnes différentes, ici l'EURL le Méditerranéen en tant que personne morale et M. et Mme A...en tant que personnes physiques ; que, cependant, il y a lieu de prononcer la décharge des pénalités correspondantes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dont M. et Mme A...sont déchargés en conséquence de la réduction de la base imposable au titre des revenus de capitaux mobiliers ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La base imposable à l'impôt sur le revenu au titre des années 2003 et 2004 est réduite, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, d'une somme de 6 913 euros.
Article 2 : M. et MmeA... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 et des pénalités correspondantes, correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er.
Article 3 : L'État versera une somme de 1 000 euros à M. et MmeA..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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