Vu la requête et les mémoires de production, enregistrés respectivement le 16 décembre 2013, le 27 décembre 2013 et le 30 décembre 2013, présentés pour M. et Mme A...D..., demeurant..., par Me Sénéjean, avocat ; M. et Mme D... demandent à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1210222 en date du 17 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 16 octobre 2012 par laquelle le maire de la commune de Gournay-sur-Marne a rejeté leur demande tendant à obtenir le retrait pour fraude du permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier et à ce que soit ordonné l'arrêt des travaux entrepris, à ce qu'il soit enjoint audit maire de procéder au retrait du permis délivré à la société Montoit Immobilier et à ce qu'il soit enjoint audit maire d'ordonner l'arrêt des travaux sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision en date du 16 octobre 2012 ;
3° d'enjoindre au maire de la commune de Gournay-sur-Marne de procéder au retrait du permis délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier et de prescrire par arrêté l'arrêt des travaux entrepris par le pétitionnaire ;
4° de mettre à la charge de la commune de Gournay-sur-Marne la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier et méconnaît les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative en ce que l'analyse des conclusions et des moyens de la demande introductive d'instance et du mémoire en réplique est inexacte et insuffisante ;
- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé, du fait de l'absence de réponse à certains moyens qui avaient été soulevés ;
- le tribunal administratif a entaché le jugement attaqué d'une erreur de droit et d'une dénaturation des pièces du dossier en écartant le moyen tiré du caractère erroné du tracé de la limite séparative déclaré par le pétitionnaire ;
- le tribunal administratif a entaché le jugement attaqué d'une erreur de droit et d'une dénaturation des pièces du dossier en écartant le moyen tiré de ce que la surface du bâtiment est supérieure à celle déclarée par le pétitionnaire ; le pétitionnaire a présenté, de manière frauduleuse, le projet comme une simple extension du bâtiment existant, alors qu'il s'agit de deux constructions totalement indépendantes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :
- le rapport de M. Luben, président-rapporteur,
- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,
- et les observations de Me Sénéjean pour M. et Mme D... et de Me E...pour la commune de Gournay-sur-Marne ;
Et connaissance prise des notes en délibéré présentées le 10 juin 2014 pour la société Montoit Immobilier par MeC..., le 11 juin 2014 pour la commune de Gournay-sur-Marne par Me B...et le 16 juin 2014 pour M. et Mme D... par Me Sénéjean ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Gournay-sur-Marne :
1. Considérant, en premier lieu, que, par un jugement n° 1106724 du 28 juin 2012, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande présentée par M. D...tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 2011 du maire de la commune de Gournay-sur-Marne accordant un permis de construire à la société Montoit Immobilier sur un terrain situé 5 rue des Mimosas ; que la requête d'appel présentée par M. D...à l'encontre dudit jugement a été rejetée par un arrêt n° 12VE03203 de la Cour de céans du 10 avril 2014 au motif que la demande de première instance était irrecevable car tardive ; que l'autorité relative de la chose jugée peut être invoquée à l'encontre de toutes les personnes qui ont été parties en la même qualité dans l'instance ayant donné lieu à la décision passée en force de chose jugée, quelle qu'ait été leur situation dans cette instance ; qu'en l'espèce, le premier litige était le fait du seul M.D..., alors que M. et Mme D... sont parties dans la présente instance ; que, par suite, dès lors qu'il n'y a pas d'identité des parties entre les deux instances, la commune de Gournay-sur-Marne n'est pas fondée à invoquer l'autorité de la chose jugée ;
2. Considérant, en second lieu, que la décision litigeuse en date du 16 octobre 2012 par laquelle le maire de la commune de Gournay-sur-Marne a rejeté la demande de M. et Mme D... tendant à obtenir le retrait pour fraude du permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier a le caractère d'une décision faisant grief ; que, par suite, la requête de M. et Mme D... tendant à son annulation est recevable ;
Sur la légalité de la décision en date du 16 octobre 2012 du maire de la commune de Gournay-sur-Marne, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant qu'aux termes de l'article UG 14 du plan d'occupation des sols : " Le coefficient d'occupation des sols (COS) pour la zone UG est au maximum égal à 0,45. (...) " ;
4. Considérant que l'application du coefficient d'occupation des sols prévu par l'article UG 14 du plan d'occupation des sols pour la zone UG à la superficie du terrain d'assiette de la construction projetée de 436 mètres carrés permet la réalisation d'une surface hors oeuvre nette maximale de 196,20 mètres carrés ; qu'il ressort des pièces du dossier que le dossier joint au permis de construire litigieux indique que la surface hors oeuvre nette de la construction existante est de 75 mètres carrés et que la construction projetée a une surface hors oeuvre nette de 119,53 mètres carrés, soit un total de 194,53 mètres carrés ;
5. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse joint au dossier de demande du permis de construire délivré le 24 mars 2011, que le bâtiment existant a une emprise au sol d'un peu plus de 9 mètres de large sur 7 mètres de long, soit une emprise au sol, indiquée par le formulaire de demande du permis de construire, de 73,55 mètres carrés ; que la notice de présentation jointe au dossier de demande du permis de construire indique, s'agissant du bâtiment existant, que " toute la partie au niveau du rez-de-chaussée est destinée au stationnement des véhicules et peut accueillir 3 places. Le niveau au dessus est l'étage courant et la partie sous les combles ne comporte qu'une chambre. " ; que, dans ses mémoires, le pétitionnaire a indiqué que la surface hors oeuvre nette des combles était de 10 mètres carrés ; qu'il ressort des photographies jointes au procès-verbal de constat d'huissier produit par les requérants que les combles du bâtiment existant sont éclairées par deux larges fenêtres percées sur chacun des pignons donnant l'un sur la rue du Puits perdu et l'autre, à l'opposé, sur la rue des Mimosas ; qu'eu égard à l'inclinaison de la pente du toit comme à la hauteur des murs gouttereaux au niveau des combles, tels qu'elles apparaissent sur lesdites photographies, la surface des combles ayant une hauteur sous plafond supérieure ou égale à 1,80 mètres est nécessairement supérieure à au moins la moitié de la surface desdits combles ; qu'ainsi, même en soustrayant l'épaisseur des murs du bâtiment, la surface correspondant à la trémie de l'escalier et la superficie des combles ayant une hauteur sous plafond inférieure ou égale à 1,80 mètres, la surface hors oeuvre nette cumulée du premier étage et de l'étage de combles ne peut correspondre aux 75 mètres carrés qui ont été déclarés dans le formulaire de demande du permis de construire délivré le 24 mars 2011, mais est très sensiblement supérieure ; que, d'autre part, comme il a été dit, l'application du coefficient d'occupation des sols prévu par l'article UG 14 du plan d'occupation des sols pour la zone UG à la superficie du terrain d'assiette de la construction projetée de 436 mètres carrés permet la réalisation d'une surface hors oeuvre nette maximale de 196,20 mètres carrés, alors que les surfaces hors oeuvre nettes cumulées de la construction existante et de la construction projetée est de 194,53 mètres carrés, soit de 1,67 mètre carré inférieure à la surface hors oeuvre nette maximale autorisée ; que l'importante minoration de la surface hors oeuvre nette du bâtiment existant dans le formulaire de demande de permis de construire avait pour fin, en s'affranchissant du coefficient d'occupation des sols fixé par l'article UG 14 précité du plan d'occupation des sols, de permettre la délivrance du permis de construire du 24 mars 2011 autorisant une construction nouvelle d'une surface hors oeuvre nette de 119,53 mètres carrés, ce qui révèle ainsi l'intention frauduleuse du pétitionnaire à l'égard du service instructeur de la demande de permis ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire (...), tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire. " ;
7. Considérant que, comme il a été dit, le permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier par le maire de la commune de Gournay-sur-Marne a été obtenu à la suite d'une déclaration frauduleuse ; que, par suite, nonobstant les dispositions précitées de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme qui n'avaient pas à s'appliquer en l'espèce, le maire de commune de Gournay-sur-Marne était tenu de le retirer ; qu'il s'ensuit que la décision susvisée du maire de la commune de Gournay-sur-Marne en date du 16 octobre 2012 et le jugement susvisé du Tribunal administratif de Montreuil en date du 17 octobre 2013 doivent être annulés ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 octobre 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 16 octobre 2012 par laquelle le maire de la commune de Gournay-sur-Marne a rejeté leur demande tendant à obtenir le retrait pour fraude du permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier et à ce que soit ordonné l'arrêt des travaux entrepris, à ce qu'il soit enjoint audit maire de procéder au retrait du permis délivré à la société Montoit Immobilier et à ce qu'il soit enjoint audit maire d'ordonner l'arrêt des travaux sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
10. Considérant qu'à la suite de l'annulation de la décision attaquée, il y a lieu de prescrire au maire de la commune de Gournay-sur-Marne de procéder au retrait du permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier et d'ordonner par arrêté l'arrêt des travaux entrepris par la société Montoit Immobilier sur le fondement dudit permis de construire ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Gournay-sur-Marne et la société Montoit Immobilier doivent dès lors être rejetées ;
12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Gournay-sur-Marne le paiement à M. et Mme D... de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Montreuil en date du 17 octobre 2013, ensemble la décision susvisée du maire de la commune de Gournay-sur-Marne en date du 16 octobre 2012, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Gournay-sur-Marne de procéder au retrait du permis de construire délivré le 24 mars 2011 à la société Montoit Immobilier et d'ordonner par arrêté l'arrêt des travaux entrepris par la société Montoit Immobilier sur le fondement dudit permis de construire.
Article 3 : La commune de Gournay-sur-Marne versera à M. et Mme D... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Gournay-sur-Marne et par la société Montoit Immobilier, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
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N° 13VE03713