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28/05/2014 | FRANCE | N°13VE00363

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 28 mai 2014, 13VE00363


Vu la requête, enregistrée le 1er février 2013, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) LRMD dont le siège social est situé 14-16 rue Marc Bloch à Clichy (92110), par Me B...et Me Castelle, avocats du cabinet C'M'C... ;

La SAS LRMD demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1109945 en date du 17 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée mises à sa charge au titre des an

nées 2006 et 2007 ;

2° de prononcer la restitution des impositions en litige ; ...

Vu la requête, enregistrée le 1er février 2013, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) LRMD dont le siège social est situé 14-16 rue Marc Bloch à Clichy (92110), par Me B...et Me Castelle, avocats du cabinet C'M'C... ;

La SAS LRMD demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1109945 en date du 17 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée mises à sa charge au titre des années 2006 et 2007 ;

2° de prononcer la restitution des impositions en litige ;

3° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé car il se borne à reprendre l'argumentaire de l'administration sans répondre aux arguments qu'elle a développé ni justifier du caractère professionnel de son activité au regard des critères jurisprudentiels relatifs à la mise en oeuvre de moyens matériels et humains ;

- s'agissant de ses activités de détention de titre de participation : à titre liminaire, le Tribunal ne s'est pas prononcé sur cette question ; ces activités, qu'elle exerce en tant que société holding, sont de nature purement patrimoniales et ne sauraient être assujetties à la taxe professionnelle prévue à l'article 1447 du code général des impôts ; cette position a été validée par une lettre de la direction de la législation fiscale du 1er août 2005 ;

- s'agissant de ses activités de location et de sous-location d'immeubles nus : ces activités sont hors du champ d'application de la taxe professionnelle car elles constituent des activités civiles de gestion d'un patrimoine privé, et non des activités professionnelles, ce qui ressort de l'instruction 6-E-75 du 30 octobre 1975 (paragraphes 21, 26 et 27), de la doctrine BOI-IF-CFE-20-20-30-20120912 (paragraphe 1), de la réponse ministérielle du 3 août 2010 à la question écrite du député Jean Lasalle et de la jurisprudence ; la réponse ministérielle du 3 août 2010 indique même clairement que l'activité de location nue de locaux professionnels était exonérée jusqu'en 2009 de taxe professionnelle quand bien même elle était exercée par de véritables entreprises y consacrant des moyens humains et matériels importants ; c'est à tort que le Tribunal a écarté comme inopérantes l'instruction du 30 octobre 1975 et la réponse ministérielle susmentionnée alors que la première permet d'éclairer à la fois la loi et le présent litige, et la seconde explicite le champ d'application de la taxe professionnelle avant la réforme de 2010 ; par ailleurs, c'est bien parce que les activités de location et de sous-location d'immeubles étaient totalement exonérées de taxe professionnelle qu'est intervenue la loi de finances pour 2010 n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 modifiant l'article 1447 du code général des impôts et remplaçant la taxe professionnelle par la cotisation foncière des entreprises, laquelle prévoit que les activités de location et de sous-location d'immeubles nus autres que ceux qui sont à usage d'habitation sont réputées exercées à titre professionnel ; les rapports de la commission des finances présentés devant l'Assemblée nationale et le Sénat sur ce projet de loi rappellent eux aussi que les activités de location et de sous-location d'immeubles nus étaient auparavant exclues du champ d'application de la taxe professionnelle ; de même, le projet d'instruction concernant la cotisation foncière des entreprises, mis en consultation publique le 18 juin 2010 et opposable aux contribuables et à l'administration fiscale à la date du redressement en litige, précise que les redevables de la cotisation foncière des entreprises n'étaient pas redevables de la taxe professionnelle ; en l'espèce, et eu égard aux principes posés ci-avant, ses activités de location et de sous-location d'immeubles nus sont hors champ de la taxe professionnelle, quand bien même elles seraient exercées de façon régulière et auraient nécessité la mise en oeuvre de moyens matériels et humains ; ainsi, c'est à tort que le Tribunal s'est fondé sur l'existence d'importants moyens matériels et humains mis en oeuvre pour gérer ces activités pour les qualifier de professionnelles ; le Tribunal évoque en outre, à cette occasion, une convention intra-groupe de répartition des coûts dont l'administration prétend qu'elle tirerait bénéfice alors qu'aucune convention de ce type n'existe ; il appartient à l'administration d'établir l'existence d'une telle convention ; le seul caractère récurrent de ses activités de location et le montant de son chiffre d'affaires en la matière ne sont pas des critères d'assujettissement à la taxe professionnelle ;

- en conclusion, seule son activité résiduelle de prestations de services est assujettie à la taxe professionnelle, et cette activité génère un chiffre d'affaires inférieur au seuil de 7 600 000 euros à partir duquel elle pourrait être redevable de la cotisation minimale de taxe professionnelle définie à l'article 1647 E du code général des impôts ;

..................................................................................................................57% par la SAS LRMD et à 43 % par la société Monoprix

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014 :

- le rapport de Mme Bruno-Salel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- les observations de Me Castelle, avocat, pour la société requérante, et de Mme A...pour le ministre de l'économie et des finances ;

Et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 9 avril 2014, présentée pour le ministre de l'économie et des finances ;

1. Considérant que la société par actions simplifiée (SAS) LRMD a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 à la suite de laquelle l'administration a remis en cause l'absence de prise en compte pour déterminer son chiffre d'affaires et sa valeur ajoutée, des recettes, pour un montant de 36 796 138 euros en 2006 et 37 420 710 euros en 2007, tirées de ses activités de location ou sous-location d'immeubles qu'elle avait considérées comme hors champ d'application de la taxe professionnelle et l'a rehaussée à la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années considérées ; que la SAS LRMD relève régulièrement appel du jugement du 17 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires de cotisation minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée mises à sa charge au titre des années 2006 et 2007 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que la SAS LRMD soutient qu'en se bornant à reprendre l'argumentaire de l'administration sans répondre aux arguments qu'elle a développé ni justifier du caractère professionnel de son activité au regard des critères jurisprudentiels relatifs à la mise en oeuvre de moyens matériels et humains, les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur jugement ; que, toutefois, d'une part, les premiers juges n'étaient pas tenu de répondre à tous les arguments de la société requérante et, d'autre part, il ressort de la lecture du jugement qu'ils ont fait leur propre appréciation du caractère professionnel ou privé de l'activité de location et sous-location de la société et ont ainsi justifié des motifs qu'ils retenaient pour qualifier cette activité comme entrant dans le champs de la taxe professionnelle ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté ;

3. Considérant qu'à supposer même qu'en indiquant à titre liminaire, dans son rappel des principes applicables aux activités de détention de titres de participation, que le Tribunal ne s'est pas prononcé sur cette question, la SAS LRMD aurait entendu contester la régularité du jugement pour omission à statuer sur un moyen, elle doit être regardée comme ayant renoncé à ce moyen dans ses écritures du 31 janvier 2014 dans lesquelles elle déclare que cette question n'a aucune incidence dans le présent litige ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une profession non salariée " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 1647 D : " I. A compter de 1981, tous les redevables de la taxe professionnelle sont assujettis à une cotisation minimum établie au lieu de leur principal établissement (57% par la SAS LRMD et à 43 % par la société Monoprix) " ; qu'enfin, selon l'article 1647 E du même code : " I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. (...) " ;

5. Considérant que la location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens de ces dispositions sauf dans l'hypothèse où, à travers cette location, le bailleur ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ou participe à l'exploitation du locataire ; qu'il en va de même lorsqu'un immeuble nu est donné en sous-location par une personne qui en dispose en vertu d'un contrat de crédit-bail ; que la circonstance que l'activité de location et sous-location d'immeubles nus est exercée de manière régulière et implique la mise en oeuvre de moyens matériels et intellectuels est sans incidence à cet égard ;

6. Considérant qu'en l'espèce, il est constant que dans le cadre de la restructuration du groupe Monoprix qui a pris effet au 1er janvier 2004, les deux futures holding, la société mère Monoprix et la SAS LRMD, propriétaires et exploitantes de certains magasins du groupe Monoprix, ont absorbé par voie de fusion l'ensemble de leur filiales ayant des actifs d'exploitation de magasins (murs et/ou fonds de commerces) puis ont, simultanément, regroupé l'ensemble de leurs actifs commerciaux, à l'exception des murs, au sein de la société Monoprix Exploitation, filiale détenue à 57% par la SAS LRMD et à 43 % par la société Monoprix; qu'à l'issue de cette restructuration, la SAS LRMD, elle-même détenue à... ; que si l'administration fait valoir qu'elle loue des locaux munis des agencements fixes nécessaires aux fonctions d'un grand magasin, la société requérante établit par la production non contestée de la liste comptable de ses immobilisations que les immeubles qu'elle détient comportent seulement des accessoires immobiliers de la construction relevant de la liste indicative fixée par l'instruction 6 c 115 à jour au 15 décembre 1988, lesquels sont passibles de la taxe foncière ; qu'elle doit être par suite être regardée comme louant des immeubles nus ; qu'il résulte de l'instruction qu'elle a ainsi pour activité principale la location et, dans une moindre mesure, la sous-location en tant que crédit-preneur, des immeubles nus dont elle dispose, qu'elle donne à bail pour l'essentiel aux sociétés du groupe Monoprix, et principalement à sa filiale, la société Monoprix Exploitation ; qu'elle doit dès lors être regardée comme poursuivant, selon des modalités différentes, l'exploitation commerciale antérieure qu'elle avait avant la restructuration; que son activité de location et de sous-location en tant que crédit-preneur, qui ne peut donc être regardée comme une gestion civile et passive d'un patrimoine immobilier, présente un caractère professionnel et entre dans le champ d'application des dispositions précitées des articles 1447 et 1647 E du code général des impôts ; que l'administration pouvait, dès lors, prendre en compte le chiffre d'affaires réalisé par la SAS LRMD au titre de sa gestion immobilière pour constater qu'il dépassait le seuil de 7 600 000 euros prévu à l'article 1647 E du code général des impôts et l'assujettir à la cotisation minimale de taxe professionnelle, en intégrant les loyers dans la valeur ajoutée produite par la société pour la détermination de cette cotisation ;

7. Considérant, ainsi qu'il a été rappelé au point 3, que la SAS LRMD a renoncé, dans ses écritures du 31 janvier 2014, au moyen tiré de ce que ses activités de détention de titres de participation n'entrent pas dans la champ de la taxe professionnelle ;

8. Considérant que dès lors que les activités de la SAS LRMD ne se limitent pas à la gestion d'un patrimoine privé de caractère immobilier, elle ne peut utilement se prévaloir des paragraphes 21, 26 et 27 de l'instruction 6-E-7-75 du 30 octobre 1975, ni, dès lors qu'elle n'exerce pas une simple activité de location nue de locaux professionnels, de la réponse ministérielle faite le 3 août 2010 au député Jean Lassalle qui n'a pas pour objet de définir les activités exclues, par leur nature, du champ d'application de la taxe professionnelle ;

9. Considérant que la SAS LRMD ne peut utilement invoquer à son profit la doctrine BOI-IF-CFE-20-20-30-20120912 publiée le 12 septembre 2012, soit postérieurement aux impositions en litige, et qui concerne une autre imposition ;

10. Considérant, enfin, que la société requérante ne peut se prévaloir des dispositions de la loi de finances pour 2010 n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 qui a institué la contribution économique territoriale et des travaux préparatoires à cette loi, qui ne sont pas applicables aux impositions en cause ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS LRMD n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la SAS LRMD une somme au titre des frais exposés pour l'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS LRMD est rejetée.

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N°13VE00363


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00363
Date de la décision : 28/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Catherine BRUNO-SALEL
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-05-28;13ve00363 ?
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