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20/05/2014 | FRANCE | N°12VE02541

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 20 mai 2014, 12VE02541


Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2012, présentée pour l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE, dont le siège est au 40 rue Gabriel Crié à Malakoff Cedex (92247), par le cabinet Coudray, avocat ;

L'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement nos 0904434-1000777 du 10 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser la somme de 4 000 euros à M. C...G...,

4 000 euros à Mme B...G...et 2 000 euros à M. E...G...;

2° de rejeter la demande présentée par M. C.

..G..., Mme B...G...et

M. E...G...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

I...

Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2012, présentée pour l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE, dont le siège est au 40 rue Gabriel Crié à Malakoff Cedex (92247), par le cabinet Coudray, avocat ;

L'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement nos 0904434-1000777 du 10 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser la somme de 4 000 euros à M. C...G...,

4 000 euros à Mme B...G...et 2 000 euros à M. E...G...;

2° de rejeter la demande présentée par M. C...G..., Mme B...G...et

M. E...G...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que les premiers juges ont jugé l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE responsable des dommages causés aux consorts G...en notant que les protagonistes, M. F...G...et M.D..., auraient eu une première altercation au cours de laquelle les personnels d'encadrement seraient intervenus et fait état, par ailleurs, d'une surveillance distante de ces personnels ; que ces motifs ne sont pas corroborés par les multiples témoignages produits et que, notamment, les personnels ne sont pas intervenus à la suite d'une première altercation ; que si un échange est intervenu rien ne laissait présager la soudaineté de l'agression et ne justifiait une surveillance particulière ; qu'en outre il est inexact que M. D...aurait été agressif envers ses camarades car le seul incident au cours duquel il a manifesté son agressivité est celui dans lequel, dans un état d'excitation manifeste, il a quitté les rangs et déversé sa colère sur une voiture ; que M. G...connaissait le profil de ses anciens camarades pour beaucoup exclus et désocialisés, en révolte contre la société et que c'était la mission de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE de les réinsérer ; que les seuls éléments connus par l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE ne permettaient pas de prévoir une agression de l'ampleur de celle qui s'est déroulée ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du service national ;

Vu le code de la défense ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2014 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE demande à la Cour d'annuler le jugement du 10 mai 2012 du Tribunal administratif de Versailles, en tant qu'il a jugé que la responsabilité de l'établissement était engagée, a fait droit à la demande des époux G...et de leur fils, E...G..., tendant à la réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait du traumatisme crânien dont leur autre fils, NicolasG..., volontaire d'insertion dans l'établissement de Montlhéry, a été victime en raison de l'agression commise sur lui par un autre volontaire, le 26 janvier 2005 ; que par la voie de l'appel incident, M. et Mme G...et leurs fils Nicolas et E...demandent à la Cour d'annuler ce jugement en tant, d'une part, qu'il a rejeté leur demande concernant M. F...G..., et en tant, d'autre part, qu'il a limité l'indemnisation du préjudice moral des parents et du frère de la victime à la somme de 4 000 euros, pour chacun des parents de NicolasG..., et à la somme de 2 000 euros pour E...G..., sommes qui doivent être portées, selon eux, à 6 000 euros pour chacun et qu'il a rejeté leur demande d'indemnisation du préjudice économique, pour lequel ils demandent 2 500 euros, sommes à parfaire après expertise ;

Sur l'appel principal de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3414-1 du code de la défense : " L'établissement public d'insertion de la défense est un établissement public de l'Etat placé sous la tutelle du ministre de la défense et du ministre chargé de l'emploi. Il a pour objet l'insertion sociale et professionnelle des jeunes sans diplômes ou sans titres professionnels ou en voie de marginalisation sociale. L'établissement public d'insertion de la défense : 1° Organise des formations dispensées dans des institutions et par un encadrement s'inspirant du modèle militaire ; 2° Accueille et héberge des jeunes dans le cadre de ces formations ; (...)" ; qu'aux termes de l'article L.130-1 du code du service national : " Il est créé un contrat de droit public intitulé : "contrat de volontariat pour l'insertion", qui permet de recevoir une formation générale et professionnelle dispensée par l'établissement public d'insertion de la défense. Peut faire acte de candidature, en vue de souscrire ce contrat avec l'établissement public d'insertion de la défense, toute personne de dix-huit à vingt et un ans révolus, ayant sa résidence habituelle en métropole, dont il apparaît, notamment à l'issue de la journée d'appel de préparation à la défense, qu'elle rencontre des difficultés particulières d'insertion sociale et professionnelle. Cette formation est délivrée dans les centres de formation gérés et administrés par l'établissement public d'insertion de la défense, dont le régime est l'internat " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 26 janvier 2005 à 13h30 M. F...G..., jeune volontaire pour l'insertion de dix-neuf ans en formation dans l'établissement public d'insertion de la défense de Montlhéry, a été agressé au réfectoire par un autre volontaire âgé de vingt ans, M. A...D..., qui lui a brisé une carafe d'eau sur la tête ; qu'il est constant que les personnels d'encadrement présents n'ont pas réagi avec suffisamment de célérité pour prévenir cette agression alors qu'ils avaient assisté sans intervenir à un autre incident quelques minutes auparavant, au cours duquel M. D...avait insulté M. G...après que ce dernier l'eut involontairement bousculé, avant de s'excuser, et que M. D...s'était déjà signalé à de nombreuses reprises par son comportement indiscipliné, asocial et violent, vis-à-vis notamment d'autres jeunes volontaires, sans faire l'objet pour autant d'une surveillance particulière et de sanctions suffisamment dissuasives ; que ce défaut de contrôle et de surveillance constitue ainsi, dans les circonstances de l'espèce, une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE ; qu'il en résulte que les conclusions de la requête de ce dernier tendant à s'exonérer de la faute commise doivent être rejetées ;

Sur l'appel incident des consortsG... :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 130-4 du code du service national : " I. - Le volontaire pour l'insertion bénéficie pour lui-même et ses ayants droit des prestations en nature de l'assurance maladie, maternité et invalidité du régime général de sécurité sociale. La couverture de ces risques est assurée moyennant le versement de cotisations forfaitaires à la charge de l'établissement public d'insertion de la défense et dont le montant est fixé par décret. II. - Il relève, en cas de maladie ou d'accident survenu par le fait ou à l'occasion du service au titre du volontariat pour l'insertion, des dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale " ; qu'aux termes de l'article L. 412-8 du livre IV du code de la sécurité sociale relatif aux accidents du travail : " Outre les personnes mentionnées à l'article L. 412-2, bénéficient également des dispositions du présent livre, sous réserve des prescriptions spéciales du décret en Conseil d'Etat : (...) 15°) Les volontaires pour l'insertion mentionnés à l'article L. 130-4 du code du service national " ; qu'aux termes de l'article L. 451-1 de ce code : " Sous réserve des dispositions prévues aux articles L.452-1 à L. 452-5, L. 454-1, L. 455-1, L. 455-1, L. 455-1-1 et L. 455-2, aucune action en réparation des accidents et maladies mentionnés par le présent livre ne peut être exercée conformément au droit commun, par la victime ou ses ayants droit " ; qu'il résulte de ces dispositions que les tribunaux des affaires de la sécurité sociale et les cours d'appel sont seuls compétents pour connaître des litiges intervenus à l'occasion du contentieux de la sécurité sociale, en application de l'article L. 142-2 du même code, et notamment en cas d'accident survenu par le fait ou à l'occasion du service aux bénéficiaires du contrat de droit public de volontariat pour l'insertion, régis par l'article L. 130-1 du code du service national cité au point 2 et par l'article L. 130-4 du même code précité ; qu'il en résulte que, comme l'a jugé le tribunal administratif, dès lors qu'il est constant que M. G...et M. D...étaient titulaires d'un contrat de volontariat pour l'insertion, et alors même qu'il ne s'agirait pas d'un contrat de travail, la demande des consorts G...dont les premiers juges ont été saisis a été adressée à une juridiction incompétente pour en connaître, en tant que cette demande porte sur l'indemnisation des préjudices subis par M. G...du fait de son agression ; que le juge administratif conserve, en revanche, sa compétence de droit commun pour connaître des préjudices causés aux parents et au frère de la victime, du fait des agissements fautifs de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE ;

En ce qui concerne le préjudice subi par les parents et le frère de M.G... :

5. Considérant que le " préjudice moral " dont l'indemnisation est seule demandée doit être entendu comme celui résultant tant des troubles dans les conditions d'existence que de la douleur morale ; que le montant alloué au titre de ces préjudices peut être porté à la somme de 6 000 euros pour chacun des deux parents compte tenu de l'incapacité permanente partielle (IPP) consécutive à l'agression dont M. G...a été victime, qui est désormais fixée à 80 % et de l'aide, non contestée, apportée à leur enfant par les parents pour sa rééducation et sa réadaptation et à 4 000 euros pour le frère de M.G..., sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée ; qu'en revanche il n'y a pas lieu, en l'absence de précision, de leur accorder une somme au titre des frais exposés par eux pour les transports dès lors que la réalité de ce préjudice économique n'est ni établie, ni précisément chiffrée ; que les frais médicaux qu'ils demandent également, sans autre précision, ne peuvent être davantage pris en compte alors qu'ils seraient, au surplus, relatifs à la situation personnelle de M.G... ;

En en ce qui concerne le préjudice subi par la victime M.G... :

6. Considérant, ainsi qu'il vient d'être rappelé, qu'il résulte des dispositions législatives précitées que les juridictions administratives ne sont pas compétentes pour juger des litiges relatifs aux accidents survenus aux volontaires sous contrat par le fait ou à l'occasion du service au titre du volontariat pour l'insertion ; qu'est inopérante à cet égard la circonstance dont les consorts G...se prévalent, tirée de ce que la cour d'appel d'Aix-en-Provence aurait rendu un jugement dans une affaire similaire qui serait favorable à M. G...ou que ce dernier, dont l'agresseur a été toutefois condamné à verser une somme d'argent par le juge pénal, qui est pris en charge par la sécurité sociale et dispose d'une voie de droit devant les tribunaux de la sécurité sociale, ne disposerait pas d'une indemnisation suffisante des conséquences de son agression ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que la Cour se déclare compétente ne peuvent qu'être rejetées ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'appel incident des consorts G...en portant à 6 000 euros, pour chacun des parents, et à 4 000 euros, pour M. E...G..., l'indemnisation qui leur a été accordée par le tribunal, de réformer, en ce sens, le jugement attaqué et de rejeter le surplus de leurs conclusions ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par les consorts G...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'INSERTION DE LA DEFENSE est rejetée.

Article 2 : Les sommes accordées respectivement à M. C...G...et à Mme B...G...sont portées, pour chacun d'entre eux, à 6 000 euros et la somme accordée à M. E...G...est portée à 4 000 euros.

Article 3 : Le jugement susvisé est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'appel incident de M. C...G...et Mme B...G...et de leurs fils MM. E...et F...G...est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. C...G..., Mme B...G...et M. E...G...la somme globale de 3 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

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N° 12VE02541 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02541
Date de la décision : 20/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : PREZIOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-05-20;12ve02541 ?
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