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15/05/2014 | FRANCE | N°11VE03381

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 15 mai 2014, 11VE03381


Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SAS BECTON DICKINSON FRANCE, dont le siège est sis 11 rue Aristide Bergès, Le Pont de Claix cedex (38801), par Me Clocher, avocat ;

La SAS BECTON DICKINSON FRANCE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0708215 en date du 8 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles auxque

lles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 ;

2° de pron...

Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SAS BECTON DICKINSON FRANCE, dont le siège est sis 11 rue Aristide Bergès, Le Pont de Claix cedex (38801), par Me Clocher, avocat ;

La SAS BECTON DICKINSON FRANCE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0708215 en date du 8 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 ;

2° de prononcer la décharge des suppléments d'impôts et contributions additionnelles contestés ;

Elle soutient que :

- le 5° de l'article 39-1 du code général des impôts n'impose pas de déduire les provisions remplissant les conditions de déductibilité ; la déduction fiscale d'une provision comptabilisée constitue une simple faculté qu'elle n'était pas tenue d'exercer et une provision non déduite fiscalement lors de sa comptabilisation en application de cette décision de gestion n'a pas à être taxée au moment de sa reprise ; c'est en ce sens qu'a jugé la Cour administrative d'appel de Paris dans son arrêt du 18 novembre 2010 SCI du Rond-Point n° 09PA04821 ; les premiers juges ont donc commis une erreur de droit en retenant qu'elle avait l'obligation de neutraliser les provisions comptabilisées pour déterminer le résultat d'ensemble du groupe alors même que ces provisions n'avaient pas été déduites fiscalement ;

- l'administration fiscale a méconnu les règles de prescription en procédant par une proposition de rectification du 14 septembre 2004 à un rehaussement sur la base d'une irrégularité commise au cours de l'exercice clos au 30 septembre 2000 qui était prescrit ; aucune autre règle ne lui permettait de tirer ainsi parti sur une période non prescrite d'une infraction commise en période prescrite ; le redressement au niveau du mali ne pouvait se faire qu'à condition de corriger symétriquement le bilan de l'année 2000, donc en déduisant la provision au titre de cet exercice, ce que l'administration ne pouvait pas faire en raison des règles de prescription ;

- en tout état de cause, les conditions visées par le 5° de l'article 39-1 du code général des impôts qui permettent de déduire ces provisions n'étaient pas intégralement remplies puisque l'évènement ayant justifié la constitution d'une provision, à savoir la décision de la société Laboratoire Aguettant survenue en décembre 2000 de ne pas contribuer au financement supplémentaire dont avait besoin la filiale et de mettre fin au partenariat capitalistique, est survenu postérieurement à la clôture de l'exercice le 30 septembre 2000 et n'était pas prévisible avant cette date ; à cet égard, il convient de rappeler que la comptabilisation d'une provision décidée postérieurement à la date de clôture de l'exercice et pendant la période dite d'arrêts des comptes était à l'époque possible sur le plan comptable ; les procès-verbaux des 3 et 7 juillet 2000 sur lesquels se fonde l'administration ne font à aucun moment état de l'arrêt définitif du projet industriel, ni d'une quelconque intention de constituer des provisions ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2014 :

- le rapport de Mme Bruno-Salel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que la SAS BECTON DICKINSON France, qui fabrique du matériel médical destiné aux professionnels du secteur de la santé, a créé le 10 février 1999 avec la société Laboratoire Aguettant une filiale commune pour la production et la commercialisation de seringues pré-remplies dites " seringues flush ", la société Becton Dickinson Aguettant, dont elle détenait 95% et la société Laboratoire Aguettant 5% ; que la même année, les deux sociétés ont constitué un groupe fiscal relevant du régime d'imposition institué par les dispositions des articles 223 A et suivants du code général des impôts dont la SAS BECTON DICKINSON FRANCE était la mère ; qu'à la suite de l'échec du projet de commercialisation de ces seringues, la SAS BECTON DICKINSON FRANCE a inscrit dans ses écritures comptables de l'exercice clos au 30 septembre 2000 une provision pour dépréciation des titres de la société Becton Dickinson Aguettant à hauteur du montant total de sa valeur d'acquisition, soit 1.882.745 euros, ainsi qu'une provision pour risque de non recouvrement de la créance en compte courant qu'elle détenait sur cette société à hauteur de 763.769 euros ; que la SAS BECTON DICKINSON FRANCE n'a pas déduit ces deux provisions de son résultat fiscal et en conséquence ne les a pas transmises à l'intégration pour neutralisation au niveau du résultat d'ensemble ; qu'en revanche, la filiale Becton Dickinson Aguettant a transmis une perte de 2 016 942 euros au résultat de l'intégration ; qu'après avoir racheté le 22 décembre 2000 la quote-part de 5% détenue par la société Laboratoire Aguettant dans la société Becton Dickinson Aguettant, la SAS BECTON DICKINSON FRANCE a fusionné avec cette dernière avec effet rétroactif au 1er octobre 2000, mettant fin ainsi à l'intégration fiscale constituée auparavant ; qu'à l'occasion de cette fusion, il a été constaté un mali de fusion de 3 296 175 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2001, que la SAS BECTON DICKINSON FRANCE a déduit de son résultat fiscal ; qu'elle n'a cependant pas réintégré dans ce résultat la reprise des deux provisions susmentionnées, qui étaient devenues sans objet ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE, l'administration a remis en cause cette décision au motif qu'elle contrevenait à la fois aux dispositions du 5° de l'article 39-1 du code général des impôts et aux règles de l'intégration issues des articles 223 B et D du même code, et elle a en conséquence réduit le mali de fusion déductible du montant de ces deux reprises de provision ; que la SAS BECTON DICKINSON FRANCE relève régulièrement appel du jugement en date du 8 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2001 en raison de cette rectification ;

2. Considérant en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) / Les provisions qui, en tout ou en partie, (...) deviennent sans objet au cours d'un exercice ultérieur sont rapportées aux résultats dudit exercice. (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement, jusqu'à l'expiration du délai de déclaration, porter en provisions et déduire des bénéfices imposables les sommes correspondant aux pertes ou charges qu'elle ne supportera qu'ultérieurement, à la condition notamment qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux événements en cours à la date de clôture de l'exercice ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 223 B du même code, dans sa rédaction alors en vigueur :" Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun (...) / Il est majoré du montant des dotations complémentaires aux provisions constituées par une société après son entrée dans le groupe, à raison des créances qu'elle détient sur d'autres sociétés du groupe ou des risques qu'elle encourt du fait de telles sociétés. (...). " ; qu'aux termes de l'article 223 D du code précité dans sa rédaction applicable au litige : " (...) Le montant des dotations complémentaires aux provisions constituées par une société après son entrée dans le groupe à raison des participations détenues dans d'autres sociétés du groupe est ajouté à la plus-value nette à long terme d'ensemble ou déduit de la moins-value nette à long terme d'ensemble. (...). " et que l'article 38 quater de l'annexe III à ce code prévoit que : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt. " ;

4. Considérant que l'administration fait valoir, en se fondant notamment sur les procès-verbaux des conseils d'administration du 3 juillet 2000 de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE et du 7 juillet 2000 de la société Becton Dickinson Aguettant, qu'à la suite des difficultés apparues dans la commercialisation des " seringues flush ", en raison notamment de leurs effets indésirables sur les jeunes enfants, la société Becton Dickinson Aguettant a décidé d'arrêter la production de ces seringues, de procéder au rappel de tous les produits commercialisés et de lancer une étude concernant le développement d'une nouvelle résine plastique, ce qui ne pouvait qu'avoir, selon le procès-verbal du conseil d'administration, des conséquences importantes sur sa situation financière ; que la société Laboratoire Aguettant a pour sa part manifesté sa volonté de renoncer définitivement à la distribution du produit en France ; que les pertes de la société Becton Dickinson Aguettant, qui s'élevaient à 6 494 000 francs au titre de l'exercice 1999, 11 780 000 francs au titre de l'exercice 2000, financées par la SAS BECTON DICKINSON FRANCE par des avances en compte-courant, et s'établissaient sur l'exercice 2001 à 9 653 000 francs, nécessitaient une recapitalisation de l'ordre de 40 à 50 millions de francs sur laquelle l'actionnaire principal, la SAS BECTON DICKINSON FRANCE, n'a pas voulu se prononcer eu égard aux montants en cause et aux incertitudes liées aux délais de mise au point et de validation de la nouvelle résine et dans l'attente des conclusions du groupe de travail missionné pour examiner la pérennité du projet qui devaient lui être remises le 30 septembre 2000 ; que ces événements, que ne contredit pas la société requérante, qui se borne à affirmer que le souhait de la société Laboratoire Aguettant était uniquement de se désengager du marché français au profit de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE et que le projet industriel commun n'était pas remis en cause, sans produire cependant les conclusions du groupe de travail susmentionné, rendaient probables la dépréciation des titres de la société Becton Dickinson Aguettant et la perte de la créance que la société requérante détenait sur cette dernière à la clôture de l'exercice 2000 ; qu'à cet égard, la société requérante ne peut se prévaloir de ce que les provisions en litige n'avaient été décidées qu'après la clôture de cet exercice comme l'autorisait alors la réglementation comptable dès lors qu'il n'est pas contesté que les dites provisions ont été constatées à cette clôture ; que les provisions en litige remplissaient ainsi les conditions prévues par les dispositions susrappelées du 5° de l'article 39-1 du code général des impôts ; que, par suite, la SAS BECTON DICKINSON FRANCE était tenue de déduire de son résultat fiscal au titre de cet exercice les provisions en litige, puis de les transmettre à l'intégration en vertu des articles 223 B et 223 du code général des impôts pour qu'elles soient neutralisées au niveau du résultat d'ensemble du groupe au titre de l'exercice 2000, auquel la perte de la société Becton Dickinson Aguettant avait été rapportée ; que si cette décision de gestion irrégulière prise par la SAS BECTON DICKINSON FRANCE n'aurait eu, en tout état de cause, aucune incidence fiscale sur ce résultat dans le cadre de l'intégration en raison de cette neutralisation, tel n'était plus le cas après la fusion intervenue lors de l'exercice 2001 entre la SAS BECTON DICKINSON FRANCE et la société Becton Dickinson Aguettant, qui a mis fin à l'intégration constituée entre ces sociétés et rendu sans objet les provisions en litige ; qu'en ne réintégrant pas à son résultat fiscal au titre de cet exercice les reprises de provision correspondantes, la SAS BECTON DICKINSON FRANCE a en effet procédé à une déduction des pertes de la société Becton Dickinson Aguettant qui faisait double emploi avec celle dont l'administration soutient sans être contestée qu'elle avait été prise en compte dans le mali de fusion que la société requérante a déduit également de son résultat fiscal au titre du même exercice ; que c'est par suite en méconnaissance des dispositions tant du 5° de l'article 39-1 du code général des impôts que de ses articles 223 C et D que la société requérante, en les déduisant de son résultat fiscal, n'a pas déneutralisé les reprises de provision à la clôture de l'exercice 2001 au motif qu'elle n'avait pas déduit les provisions correspondantes au sein de l'intégration ; que l'administration était dès lors fondée à mettre à la charge de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE les impositions supplémentaires résultant de la réintégration de ces reprises de provision au titre de cet exercice ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due " ; qu'à la date de début des opérations de la vérification de comptabilité, le 1er mars 2004, l'exercice clos en 2001, au titre duquel les suppléments d'imposition en litige ont été mis en recouvrement, n'était pas, contrairement à ce qui est soutenu, atteint par la prescription instituée par les dispositions précitées de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ; que le vérificateur n'a pas méconnu ces dispositions en se fondant sur l'absence de déduction des deux provisions du résultat fiscal de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE et de neutralisation au niveau du résultat d'ensemble du groupe dans le bilan de clôture de l'exercice prescrit le 30 septembre 2000, dès lors qu'aucun redressement n'a été effectué au titre de ce dernier ; que par ailleurs, ainsi qu'il a été rappelé, la décision irrégulière prise par la SAS BECTON DICKINSON FRANCE de ne pas déduire extra-comptablement les provisions en litige n'a pas eu d'effet autre sur le résultat fiscal de l'ensemble du groupe que si ces provisions avaient été déduites puis neutralisées ; que la société requérante ne peut dès lors soutenir que la rectification opérée sur la reprise des provisions au titre de l'exercice 2001 nécessiterait symétriquement, de la part de l'administration, une déduction du résultat fiscal des provisions dotées sur l'exercice 2000 qui serait impossible du fait qu'il est prescrit ;

6. Considérant, en dernier lieu, que la SAS BECTON DICKINSON FRANCE, qui n'invoque pas le bénéfice de la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne peut utilement se prévaloir du compte-rendu de la réunion du 31 janvier 1994 du comité fiscal de la mission administrative et de l'instruction administrative 4 E-3-98 pour contester les impositions litigieuses ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS BECTON DICKINSON FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui contrairement à ce qu'elle soutient, n'est pas fondé à titre principal sur les dispositions du code général des impôts relatives à l'intégration, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS BECTON DICKINSON FRANCE est rejetée.

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