Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Serfati, avocat ;
M. A...demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1305082 du 21 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis, en date du 6 mai 2013, portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
2° d'annuler ledit arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire ;
4° à défaut, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation personnelle, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
5° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle méconnaît également les stipulations des articles 1 et 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1998 ainsi que les dispositions de l'article
L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'obligation de quitter le territoire est entachée d'un défaut de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 8 avril 2014, le rapport de M. Formery, président assesseur, les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public et les observations de Me Serfati ;
1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien, né le 12 décembre 1967, relève appel du jugement du 21 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 6 mai 2013 qui a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, au motif qu'il n'avait pas été en mesure de justifier avoir obtenu un visa de long séjour, ni d'autorisation de travail, que l'intéressé ne justifiait pas de la réalité de sa résidence continue en France durant dix ans, que la décision ne portait pas une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale au regard du but poursuivi et qu'il n'établissait pas encourir de risques en cas de retour dans son pays d'origine ;
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens à l'appui de la requête :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;
3. Considérant que M. A...soutient qu'après s'être marié, le 16 février 2001 en Tunisie, sous le régime de la communauté des biens, avec une ressortissante de nationalité française, Mme C...D..., il est entré en France le 26 mai 2001, et que, depuis lors, il partage avec elle une communauté de vie ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...et Mme D...vivent ensemble à Aubervilliers, comme en atteste plusieurs éléments, notamment les quittances de loyer produites au dossier qui portent les noms du requérant et de son épouse, comme par les déclarations récentes de son épouse ; qu'il ne ressort en revanche pas des pièces du dossier que, comme l'ont estimé les premiers juges, la situation du requérant aurait changé en 2010, et qu'il ne partagerait plus depuis lors, sa vie avec MmeD..., son épouse ; qu'ainsi il apparait que M. A...vit depuis treize ans en France et qu'il y a établi une vie privée et familiale, et qu'au demeurant, son père est décédé en Tunisie en août 2013 ; que, dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet de la Seine-Saint-Denis a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, et a ainsi méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour pour contester l'obligation de quitter le territoire ne peut qu'être accueilli ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées à fin d'injonction :
6. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que la demande de M. A...visant à obtenir un titre de séjour soit réexaminée, qu'il y a lieu par la suite d'enjoindre au Préfet de l'Essonne de procéder à ce réexamen dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
7. Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er: Le jugement n° 1305082 du 21 octobre 2013 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé, ensemble l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis, en date du 6 mai 2013, portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande M. A...dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
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N° 13VE03231