Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2013, présentée pour M. D...E..., demeurant au..., par Me Bouchachi, avocat ;
M. E...demande à la Cour :
1°d'annuler le jugement n°1300773 du 30 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a retiré sa carte de résident, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour en France pour une durée de deux ans ;
2°d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°d'annuler l'opposition à l'introduction en France de Mme A...C... ;
4°de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'arrêté du 3 janvier 2013 est insuffisamment motivé ; le préfet aurait dû le motiver suffisamment au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de fait puisqu'il a considéré que le demandeur avait sciemment dissimulé sa situation matrimoniale avec son épouse marocaine afin de bénéficier d'un titre de séjour avec une ressortissante française qu'il a épousée en 2000 ; qu'à la date de son mariage en 1985 au Maroc, la polygamie était largement pratiquée sur tout le territoire marocain ; il ignorait méconnaître la législation française et a fait dissoudre son mariage avec Mme B...pour faire venir en France sa première épouse et ses quatre enfants au titre du regroupement familial ; c'est à tort que le préfet lui a reproché la fraude commise qui n'était pas volontaire ;
- le préfet a commis une erreur de fait s'agissant de son intégration en France où il est arrivé en juin 1998 et a toujours travaillé, en respectant les lois de la République ; il dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée et d'un logement et a toujours payé ses impôts ;
- tant la procédure de retrait de la carte de résident que l'obligation de quitter le territoire français ainsi que l'assignation à résidence et l'interdiction de retour en France de deux ans, l'opposition à l'introduction de son épouse marocaine et de ses enfants sont illégales et injustifiées ;
- l'arrêté contesté est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de sa situation
réelle ;
- le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2014 :
- le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;
- et les observations de Me Bouchachi pour M.E... ;
1. Considérant que M.E..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1959, relève appel du jugement du 30 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2013 par lequel le préfet de la
Seine-Saint-Denis lui a retiré sa carte de résident, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour en France pour une durée de deux ans ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs retenus par le premiers juges ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être accordée : (...) / 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ;
4. Considérant en deuxième lieu, que le moyen tiré du caractère involontaire de la fraude commise du fait de sa polygamie doit être d'écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
5. Considérant, en troisième lieu, que si M. E...soutient qu'en relevant, pour lui retirer sa carte de résident, " que de tels agissements traduisent en outre son absence d'intégration " alors qu'il travaille comme cariste sous contrat à durée indéterminée depuis 1999, a toujours travaillé en France depuis son entrée en 1998 et respecté les lois de la République, qu'il dispose d'un logement et a toujours payé ses impôts, le préfet aurait commis une erreur de fait ; que, toutefois, à supposer que l'intéressé ait respecté la loi s'agissant de ses obligations fiscales, travaillé et disposé d'un logement en France, il ne peut être regardé comme ayant respecté les lois de la République en se mariant une seconde fois avec une ressortissante française pour dissoudre ce mariage afin d'introduire en France son épouse marocaine, ni manifesté sa volonté d'intégration ; que, par suite, le préfet n'a entaché sa décision d'aucune erreur de fait en relevant que la polygamie avérée de l'intéressé et la dissimulation de cette polygamie pendant dix ans sur le territoire français dans de telles conditions révélaient son absence d'intégration ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l 'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que M. E... se borne à soutenir, sans autre précision, qu'il a été porté une atteinte grave à son droit à mener une vie privée et familiale normale compte tenu de sa situation réelle ; que son mariage avec une ressortissante française était dissous par jugement du 8 décembre 2009, soit depuis plus de trois ans à la date de la décision, alors qu'aucun enfant n'était né de cette union ; que le requérant n'est entré en France, d'après ses déclarations, qu'au cours de l'année 1998 à l'âge de trente-neuf ans, alors que son épouse est marocaine et résidait au Maroc et que ses quatre enfants, dont certains mineurs à la date de l'arrêté attaqué, y résidaient également ; que si M. E...bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée depuis plus de dix ans, compte tenu de l'absence de lien familial du requérant en France, de la présence de toute sa famille au Maroc, et eu égard à la fraude commise, la décision contestée ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de M. E...;
9. Considérant, en sixième lieu, que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du retrait de son titre de séjour dirigé contre les décisions qui en découlent ne peut qu'être écarté dès lors qu'en retirant ce titre à M. E...le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune illégalité ;
10. Considérant, enfin, que M. E...demande l'annulation du refus d'introduction en France de son épouse marocaine Mme A...C... ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle décision serait en litige, dès lors qu'elle n'est pas contenue dans l'arrêté attaqué ; que, par suite, ses conclusions à ce titre ne peuvent qu'être rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction, ensemble ses conclusions tendant au versement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées, par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
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