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04/02/2014 | FRANCE | N°12VE01014

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 04 février 2014, 12VE01014


Vu la requête, enregistrée le19 mars 2012, présentée pourMme BernadetteA..., demeurant..., par MeB... ;

Mme A...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1005377 du 19 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2010 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui attribuer une aide financière destinée à réparer le préjudice moral et matériel subi par elle, en raison du décès de ses grands-parents à l'occasion des bombardements intervenus dans le nuit du 6 au 7

septembre 1944 au Havre ;

2° d'annuler cette décision ;

3° d'enjoindre au P...

Vu la requête, enregistrée le19 mars 2012, présentée pourMme BernadetteA..., demeurant..., par MeB... ;

Mme A...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1005377 du 19 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2010 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui attribuer une aide financière destinée à réparer le préjudice moral et matériel subi par elle, en raison du décès de ses grands-parents à l'occasion des bombardements intervenus dans le nuit du 6 au 7 septembre 1944 au Havre ;

2° d'annuler cette décision ;

3° d'enjoindre au Premier ministre de réexaminer sa demande d'attribution d'une aide financière destinée à réparer le préjudice moral et matériel subi en raison du décès de ses grands-parents dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Elle soutient, en premier lieu, que le Premier ministre a commis une erreur de droit car il a répondu à sa demande en se bornant à lui indiquer qu'elle ne remplissait pas les conditions prévues par le décret du 27 juillet 2004 ; que celui-ci aurait dû examiner sa demande au regard de l'ensemble des textes applicables puisqu'elle demandait l'indemnisation de ses préjudices moraux et financiers du fait du décès de ses grands-parents à l'occasion des bombardements aériens intervenus pendant la nuit du 6 septembre 1944 au Havre ; que les premiers juges devaient sanctionner cette erreur de droit ; qu'en second lieu et à titre subsidiaire ils ont eux-mêmes commis une erreur de droit en rejetant sa demande sur le terrain des dispositions du décret du 27 juillet 2004 ; que ce décret est entaché d'une discrimination illégale puisqu'il méconnaît les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention et méconnaît le principe de l'égalité de traitement ; qu'en effet ce décret, en ne prévoyant pas le cas du décès de grands-parents devenus tuteurs de leurs petits-enfants, à la suite du décès des parents de ces derniers, a manifestement introduit une différence de traitement entre deux catégories de personnes qui ne repose sur aucune justification objective et raisonnable ; que c'est à tort que le Premier ministre lui a opposé ces dispositions pour justifier le refus du bénéfice de l'aide financière sollicitée ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ;

Vu le décret n°2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième guerre mondiale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2014 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme A...relève appel du jugement du 19 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juillet 2010 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui attribuer une aide financière destinée à réparer le préjudice moral et matériel qu'elle a subi du fait du décès de ses grands-parents sous les bombardements intervenus dans la nuit du 6 au 7 septembre 1944 au Havre ;

2. Considérant, en premier lieu, que Mme A...soutient que, dans sa demande préalable d'indemnisation qu'elle a adressée au Premier ministre, elle demandait le bénéfice d'une aide financière en compensation du préjudice subi non seulement sur le terrain du décret susvisé mais sur le fondement de tout autre texte dont elle aurait pu bénéficier ; que, toutefois, Mme A...qui malgré la demande de la Cour qui lui a été adressée en cours d'instance, n'a pas produit la lettre contenant sa demande préalable n'est pas en mesure d'apporter la preuve du fondement sur lequel elle a présenté sa demande ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le Premier ministre dans la réponse qui lui a été adressée ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 susvisé : " Toute personne, dont la mère ou le père, de nationalité française ou étrangère, a été déporté, à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et a trouvé la mort en déportation, a droit à une mesure de réparation, conformément aux dispositions du présent décret, si elle était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue. Ce régime bénéficie également aux personnes, mineures de moins de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, de nationalité française ou étrangère, a, durant l'occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code. " ;

4. Considérant que, ni le principe d'égalité, ni les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, ne s'opposent à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ;

5. Considérant, d'une part, que Mme A...soutient que sa demande au Premier ministre, en tant qu'elle était fondée sur les dispositions de ce décret, tendait à la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait du décès de ses grands-parents à l'occasion des bombardements intervenus dans la nuit du 6 au 7 septembre 1944 au Havre et qu'en rejetant sa demande au motif que les dispositions ci-dessus rappelées de l'article 1er du décret susvisé ne sont pas applicables aux enfants orphelins dont les tuteurs étaient les grands-parents, le Premier ministre s'est fondé sur des dispositions qui instituent une discrimination sans rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et manifestement disproportionnée au regard des différences de situations susceptibles de la justifier ; que, toutefois, Mme A...qui selon ses dires avait été confiée à ses grands-parents ne se trouvait pas, dès lors, dans la même situation qu'un enfant devenu orphelin à la suite de la perte de ses parents dans les conditions prévues par le décret ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la différence de traitement dont elle a fait l'objet serait manifestement disproportionnée, au regard de l'objet de ce décret, et méconnaîtrait ainsi les stipulations combinées de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention en créant une discrimination dépourvue de justification objective et raisonnable à l'endroit des orphelins dont les grands-parents seraient décédés, ni davantage que le principe d'égalité aurait été méconnu ;

6. Considérant, d'autre part, et en tout état de cause, qu'il ressort des pièces du dossier que le décès des grands- parents de Mme A...n'est pas intervenu dans les conditions limitativement énumérées par les dispositions précitées mais à l'occasion d'opérations militaires qui n'ouvrent pas de droit, en tant que telles, à réparation de la part de l'Etat sur la base du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 et ne pouvaient lui ouvrir droit au bénéfice de ces dispositions ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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12VE01014 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE01014
Date de la décision : 04/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-06-06-01-02 Procédure. Jugements. Chose jugée. Chose jugée par la juridiction administrative. Existence.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : BOIARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-02-04;12ve01014 ?
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