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07/11/2013 | FRANCE | N°12VE00080

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 07 novembre 2013, 12VE00080


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2012, présentée pour la SAS DELPHI FRANCE HOLDING venant aux droits et obligations de la société Delphi Diesel Systems France Holding, dont le siège est situé 64, avenue de la plaine de France à Tremblay-en-France (93290), par Me A...et Me Fermine, avocats ;

La société DELPHI FRANCE HOLDING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002169 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été ass

ujettie au titre de la période du 1er janvier 2003 au 2 juin 2004 et des pénali...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2012, présentée pour la SAS DELPHI FRANCE HOLDING venant aux droits et obligations de la société Delphi Diesel Systems France Holding, dont le siège est situé 64, avenue de la plaine de France à Tremblay-en-France (93290), par Me A...et Me Fermine, avocats ;

La société DELPHI FRANCE HOLDING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002169 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2003 au 2 juin 2004 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 30 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en vertu de l'article 283 du code général des impôts le redevable de la taxe sur l'opération en litige est la société émettrice de la facture rectificative du 24 novembre 2003, à savoir la société Delphi Diesel System France (DDSF), et non la société Delphi Diesel Systems France Holding (DDSFH) ;

- l'administration n'aurait dû procéder à aucun rappel de TVA car la société Delphi Diesel Systems France Holding (DDSFH) n'a pas facturé à la société Renault un supplément de prix au sens de l'instruction du 29 juin 1995 mais a respecté la doctrine contenue dans la documentation de base 3 B-1121 à jour du 18 septembre 2000 ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code civil ;

Vu le code de commerce, notamment ses articles L. 236-16 à L. 236-22 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 66-357 du 24 juillet 1966 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,

- les observations de Me Fermine, avocat de la société DELPHI FRANCE HOLDING ;

Et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 17 octobre 2013, présentée pour la société DELPHI FRANCE HOLDING ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un contrôle dont la société Delphi Diesel Systems France Holding (DDSFH), portant le numéro SIREN n° 712 061 332 et alors dénommée SAS Delphi Diesel Systems France, avait fait l'objet au titre de la période de février 1998 à décembre 2000, le service a réclamé à cette société, par avis de mise en recouvrement du 15 octobre 2003, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 5 900 712 euros en droits, assortis d'intérêts de retard, à raison de ventes de biens d'équipement automobile réalisées auprès de la société Renault en 1999 et qui avaient été facturées à cette société en franchise de cette taxe, au motif que l'attestation prévue par l'article 275 du code général des impôts n'avait pas été présentée ; que la société DDSFH a acquitté les impositions et pénalités ainsi mises en recouvrement ; que la société Delphi Diesel Systems France (DDSF), créée le 27 décembre 2001 et portant le numéro SIREN n° 440 162 287, et qui avait bénéficié, le 28 mars 2002, de l'apport par la société DDSFH de la branche complète de l'activité dans l'exercice duquel avaient été réalisées en 1999 les ventes de biens d'équipement à la société Renault, a adressé une facture datée du 24 novembre 2003 à la société Renault, qui a payé à la société DDSF le solde à payer mentionné sur cette facture, soit 5 990 910,93 euros ; que la société DELPHI FRANCE HOLDING a absorbé la société DDSFH, avec effet rétroactif au 1er janvier 2004 ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société DELPHI FRANCE HOLDING, venant aux droits et obligations de la société DDSFH, a fait l'objet au titre de la période du 1er janvier 2003 au 2 juin 2004, l'administration fiscale a réclamé à cette société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à raison du solde à payer mentionné sur la facture adressée par la société DDSF à la société Renault ; que la société DELPHI FRANCE HOLDING, venant aux droits et obligations de la société DDSFH, relève appel du jugement du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels qui lui ont été réclamés à raison de cette facture, et à celle des pénalités correspondantes ;

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel " ; qu'aux termes de l'article 266 de ce code : " 1. La base d'imposition est constituée : a) Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 267 de ce code : " I. Sont à comprendre dans la base d'imposition : 1 ° Les impôts, taxes, droits et prélèvements de toute nature à l'exception de la taxe sur la valeur ajoutée elle-même. 2° Les frais accessoires aux livraisons de biens ou prestations de services tels que commissions, intérêts, frais d'emballage, de transport et d'assurance demandés aux clients.(...) " ; et qu'aux termes de l'article 283 du même code : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée doit être acquittée par les personnes qui réalisent les opérations imposables (...) " ;

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

3. Considérant, en premier lieu, que la société DELPHI FRANCE HOLDING soutient que les rappels de taxe sur la valeur réclamés à la société DDSFH au titre de l'année 1999 seraient relatifs à des ventes consenties à la société Renault non pas par la société DDSFH, ainsi que le soutient l'administration fiscale, mais par la société TRW FR qui avait apporté à la société DDSFH, au cours de l'année 1999, la branche complète de l'activité dans l'exercice duquel ont été réalisées les ventes de biens d'équipement à la société Renault ; que, cependant, il résulte de l'instruction que la société DDSFH n'a pas contesté, dans les observations qu'elle a présentées le 14 janvier 2003 sur la proposition de rectification du 17 décembre 2002, afférente aux rappels de 5 900 712 euros relatifs aux ventes réalisées en 1999, les termes de ce document selon lesquels ces rappels sont afférents à des ventes réalisées au cours de la période du 1er février 1999 au 31 décembre 1999 par cette société, alors dénommée " Delphi Diesel Systems France ", et qu'elle a acquitté les impositions et pénalités correspondantes, ainsi qu'il a été dit ; que l'allégation de la société requérante selon laquelle les ventes en cause auraient été réalisées en 1999 par la société TWR n'est étayée par aucun élément probant, la seule circonstance, mentionnée dans la proposition de rectification du 18 décembre 2006 adressée à la requérante, que la société TRW a, en vertu d'une clause de garantie de passif annexée au contrat de cession de la branche d'activité, accordé à la société DDSFH une avance d'un montant correspondant aux droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de l'année 1999, qui lui a été restituée en 2004, et a remboursé à la société DDSFH " les autres redressements restés définitivement " à la charge de DDSFH, ne permettant pas de tenir pour établi que la société TWR aurait été l'auteur desdites ventes ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que les ventes de biens d'équipements à la société Renault, intervenues en 1999 et ayant fondé les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement le 15 octobre 2003, ont été réalisées par la société DDSFH ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la facture du 24 novembre 2003 adressée par la société DDSF à la société Renault indique qu'elle concerne la " facturation avec TVA du CA 1999 (...) en dépassement des ventes en franchise de TVA ", porte sur un montant de 34 546 109,62 euros et mentionne un avoir de 28 645 198,69 euros ainsi qu'un solde à payer de 5 990 910,93 euros ; que le montant de 34 546 109,62 euros est égal à celui dont la facturation en franchise de taxe sur la valeur ajoutée en 1999 avait été remise en cause par le service, le montant de 28 645 198,69 euros est égal au prix stipulé en 1999 diminué du montant de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente, qui avait été retenu par l'administration fiscale comme assiette des rappels fondés sur ladite facture en application de la jurisprudence issue de la décision du Conseil d'Etat du 14 décembre 1979 " Comité de propagande de la banane ", et le solde à payer de 5 990 910,93 euros est égal au montant de la taxe sur la valeur ajoutée ainsi calculée sur le prix réputé toutes taxes comprises de 34 546 109,62 euros facturé en 1999 ; que, par ailleurs, il ressort des termes non sérieusement contestés de la réclamation préalable en date du 6 juillet 2009, adressée à l'administration fiscale par la société requérante, que la facture du 24 novembre 2003 a été adressée à la société Renault pour " réclamer le montant de la TVA redressée au niveau de la société apporteuse DDSFH " et que " Renault a acquitté cette facture à la société DDSF et celle-ci a pu alors rembourser la société DDSFH in fine " ; que, dans ces conditions, en l'absence de tout élément probant contraire apporté par la société requérante et alors, d'ailleurs, qu'il résulte de l'instruction qu'à la date d'émission de la facture du 24 novembre 2003 la société DDSFH contrôlait la société DSFF, ladite facture doit être regardée comme ayant eu pour objet et pour effet de faire supporter à la société Renault un supplément du prix des biens vendus en 1999 par la société DDSFH, d'un montant correspondant à celui des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à la société DDSFH par avis de recouvrement du 15 octobre 2003, et de permettre le reversement de ce supplément de prix, par la société DDSF, à la société DDSFH ; que la société requérante n'est pas fondée à contester la qualification de supplément de prix, dont se prévaut le ministre pour justifier du bien-fondé de l'imposition en cause, au motif que la facture du 24 novembre 2003 a été émise non pas par la société DDSFH mais par la société DDSF, dès lors qu'il résulte des éléments énoncés ci-dessus qu'en émettant cette facture et en assurant le reversement à la société DDSFH de la somme acquittée par la société Renault, la société DDSF doit être regardée comme ayant agi pour le compte de la société DDSFH, qui était son unique actionnaire et lui avait apporté en 2002 la branche d'activité à laquelle se rapportent les ventes réalisées en 1999 ; que la société requérante ne peut utilement se prévaloir du § 15 de la documentation administrative de base 3 B 1123 du 18 septembre 2000 qui précise les critères de la distinction entre un intermédiaire agissant en son nom propre, au sens du V de l'article 256 du code général des impôts, et un intermédiaire agissant au nom d'autrui, pour soutenir que la société DDSF ne saurait être regardée comme ayant agi pour le compte de la société DDSFH, dès lors que la société DDSF ne s'est pas entremise " dans une livraison de biens ou une prestation de services ", au sens du V dudit article 256, mais seulement dans une relation avec la société Renault au terme de laquelle cette société a accepté de payer un supplément de prix à raison des livraisons de biens réalisées en 1999 ;

5. Considérant, dès lors, que, le supplément de prix payé par la société Renault sur le fondement de la facture du 24 novembre 2003, et dont le montant a été reversé à la société DDSFH, était imposable comme tel à la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées des articles 266 et 267 du code général des impôts, lesquelles reprennent les dispositions de l'article 2, point 1 et celles de l'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive européenne 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ; que la taxe n'ayant pas été facturée de manière distincte, c'est à bon droit que l'administration a retenu comme assiette de la taxe sur la valeur ajoutée le prix convenu entre les parties, diminué de la taxe exigible sur l'opération ;

6. Considérant, en troisième lieu, et en tout état de cause que la société DELPHI FRANCE HOLDING ne met pas le juge en mesure d'apprécier le bien-fondé du moyen tiré de ce qu'en qualifiant la somme de 5 990 910,93 euros de complément du prix des biens vendus en 1999 par la société DDSFH à la société Renault, l'administration fiscale priverait cette dernière du droit à répétition de l'indu en méconnaissance des dispositions de l'article 1235 du code civil ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que la facture du 24 novembre 2003 qui a pour objet et pour effet de faire supporter à la société Renault, à raison des ventes intervenues en 1999, un supplément de prix de 5 990 910,93 euros, égal au montant de la taxe sur la valeur ajoutée calculée sur le prix réputé toutes taxes comprises de 34 546 109,62 euros facturé en 1999 n' entre pas dans les prévisions de la doctrine invoquée par la société requérante contenue dans la documentation n° 3 B 1121 qui expose les modalités selon lesquelles une facture rectificative peut être émise dans l'objet de permettre au client, sans acquitter de supplément de prix, de déduire la taxe omise sur la facture initiale et figurant sur la facture rectificative ;

Sur le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée :

8. Considérant que c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé, pour l'application des dispositions précitées de l'article 283 du code général des impôts, que la société DDSHF demeurait la redevable légale d'une taxe dont le fait générateur avait été la réalisation d'opérations effectuées par elle au cours de l'année 1999, quand bien même elle avait, ultérieurement, fait à sa filiale la société DDSF un apport partiel d'actif qui, soumis aux dispositions de la loi sur les sociétés commerciales régissant les scissions, emportait transmission à cette dernière de tous ses droits, biens et obligations se rattachant à la branche d'activité objet de l'apport dès lors qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la société DDSF doit être regardée comme ayant agi pour le compte de la société DDSFH en émettant cette facture et en assurant le reversement à la société DDSFH du supplément de prix acquitté par la société Renault ;

9. Considérant, par suite, que c'est à bon droit que l'avis de mise en recouvrement du rappel de taxe sur la valeur ajoutée litigieux a été émis, le 15 juin 2009, au nom de la société DELPHI FRANCE HOLDING venant aux droits et obligations de la société DDSFH ; que la société requérante ne peut utilement faire valoir dans le cadre du présent contentieux d'assiette le moyen, qui relève d'un contentieux du recouvrement, tiré de ce qu'il résulte des dispositions de l'article L. 236-20 du code de commerce que l'administration ne peut poursuivre à l'encontre de la société apporteuse le recouvrement d'une créance détenue sur elle par le Trésor à raison d'un fait générateur antérieur à l'apport ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société DELPHI FRANCE HOLDING n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de décharge des impositions et pénalités litigieuses ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente à la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE DELPHI FRANCE HOLDING est rejetée.

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N° 12VE00080 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00080
Date de la décision : 07/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Redevable de la taxe.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : C/M/S/ BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-11-07;12ve00080 ?
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