La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2013 | FRANCE | N°13VE00411

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 18 juillet 2013, 13VE00411


Vu la décision n° 338684 du 26 décembre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la SA BNP PARIBAS, a, d'une part, annulé l'arrêt n° 08PA03824 du 29 janvier 2010 par lequel la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0304610 du 20 mai 2008 du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exerc

ices clos en 1995 et 1996, et a, d'autre part, renvoyé l'affaire à l...

Vu la décision n° 338684 du 26 décembre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la SA BNP PARIBAS, a, d'une part, annulé l'arrêt n° 08PA03824 du 29 janvier 2010 par lequel la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0304610 du 20 mai 2008 du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996, et a, d'autre part, renvoyé l'affaire à la Cour, où elle a été enregistrée sous le n° 13VE00411 ;

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008 sous le n° 08PA03824, présentée pour la SA BNP PARIBAS, venant aux droits de la SA Paribas, dont le siège est 16 boulevard des Italiens à Paris (75009), par Me Pons, avocat ;

La SA BNP PARIBAS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0304610 en date du 20 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996 à raison des bénéfices réalisés par la société Pasta Investment Ltd, établie à Hong Kong, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2° de prononcer la décharge, à titre principal, de l'ensemble des impositions et pénalités contestées ou, à titre subsidiaire, de la contribution additionnelle prévue à l'article 235 ter ZA du code général des impôts ainsi que des pénalités correspondantes ;

Elle soutient :

- que l'article 209 B ne s'applique pas aux filiales créées et détenues par une succursale ; que tel est le cas de la société Pasta Investment Ltd, créée et détenue par la succursale hongkongaise de la SA Paribas ;

- que les dispositions du II de l'article 209 B du code général des impôts sont applicables à l'espèce, tant dans leur principe général fixé dans la première phrase, que dans l'exemple qui en est donné dans la seconde ; que, pour combattre l'application du I de l'article 209 B du code général des impôts, les dispositions du II permettent aux sociétés d'établir les motivations qui ont abouti à l'implantation de la structure étrangère et de démontrer que l'objectif principal n'était pas d'échapper à l'impôt français mais de développer leurs opérations ; qu'ainsi, une société dont l'objectif principal est de développer une activité qu'elle ne pourrait pas réaliser en France démontre bien que l'effet principal recherché lors de l'établissement de la structure étrangère n'est pas fiscal ; qu'en l'espèce, la société Pasta Investment Ltd exerçait une activité bancaire effective de gestion des devises locales qui étaient utilisées par les entités du groupe Paribas établies dans la zone asiatique, activité pour laquelle elle a déployé les moyens humains et matériels mis à sa disposition par la succursale de la société Paribas ; qu'une telle activité était difficile depuis l'Europe ; que le service a une interprétation restrictive de la notion d'activité locale ; que, par suite, cette implantation à Hong Kong n'a pas eu pour effet de permettre la localisation de bénéfices dans un Etat ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié ; que les dispositions du II de l'article 209 B interdisaient donc d'imposer la SA Paribas sur sa quote-part de détention indirecte dans les résultats de la société Pasta Investment Ltd ;

- que son assujettissement à la contribution additionnelle prévue à l'article 235 ter ZA du code général des impôts méconnaît les dispositions de l'article 209 B, cette contribution ne devant en effet être assise que sur ses résultats propres et non sur ceux d'une société étrangère ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2013 :

- le rapport de M. Coudert, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- et les observations de Me Pons, pour la SA BNP PARIBAS ;

1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, la SA Paribas a été assujettie, au titre des exercices clos en 1995 et 1996, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle sur cet impôt, à raison de l'inclusion dans son bénéfice taxable, en application des dispositions de l'article 209 B du code général des impôts, des bénéfices réalisés par la société Pasta Investment Ltd, établie à Hong Kong ; que la SA BNP PARIBAS, venant aux droits et obligations de la SA Paribas, relève régulièrement appel du jugement du 20 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires en litige, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 209 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Lorsqu'une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés détient directement ou indirectement 25 % au moins des actions ou parts d'une société établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens mentionné à l'article 238 A, cette entreprise est soumise à l'impôt sur les sociétés sur les résultats bénéficiaires de la société étrangère dans la proportion des droits sociaux qu'elle y détient. / Ces bénéfices font l'objet d'une imposition séparée. Ils sont réputés acquis le premier jour du mois qui suit la clôture de l'exercice de la société étrangère et sont déterminés selon les règles fixées par le présent code. / L'impôt acquitté localement par la société étrangère est imputable dans la proportion mentionnée au premier alinéa sur l'impôt établi en France à condition d'être comparable à l'impôt sur les sociétés. / (...) II. Les dispositions du I ne s'appliquent pas si l'entreprise établit que les opérations de la société étrangère n'ont pas principalement pour effet de permettre la localisation de bénéfices dans un Etat ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié. Cette condition est réputée remplie notamment : / - lorsque la société étrangère a principalement une activité industrielle ou commerciale effective ; / - et qu'elle réalise ses opérations de façon prépondérante sur le marché local. (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 238 A du même code : " (...) les personnes sont regardées comme soumises à un régime fiscal privilégié dans l'Etat ou le territoire considéré si elles n'y sont pas imposables ou si elles y sont assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus notablement moins élevés qu'en France " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par leurs travaux préparatoires, que le législateur a entendu dissuader les entreprises passibles en France de l'impôt sur les sociétés de localiser, pour des raisons principalement fiscales, une partie de leurs bénéfices, au travers de filiales, créées par elles ou par une de leurs filiales dans des pays ou territoires à régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A du même code ; qu'à cette fin, le premier alinéa du I de l'article 209 B du code général des impôts prévoit, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige, que dans le cas où une entreprise passible en France de l'impôt sur les sociétés détient, directement ou indirectement, au moins 25 % des actions ou parts d'une société implantée dans un Etat ou territoire à régime fiscal privilégié, elle est normalement soumise à l'impôt sur les sociétés sur les bénéfices de cette société, à proportion des droits qu'elle y détient ; qu'il n'en va autrement, de manière dérogatoire, que si l'entreprise démontre, ainsi que le prévoit le premier alinéa du II de l'article 209 B, que l'implantation de la filiale, détenue directement ou indirectement, dans un pays à régime fiscal privilégié n'a pas, pour la société mère, principalement pour objet d'échapper à l'impôt français ; que si une telle situation peut être présumée, c'est à la double condition, prévue aux deuxième et troisième alinéas du II de l'article 209 B, qu'il soit démontré, d'une part, que la société étrangère exerce à titre principal une activité industrielle ou commerciale effective, et, d'autre part, que les opérations qu'elle réalise dans le cadre de cette activité sont effectuées de manière prépondérante sur le marché local, cette dernière notion devant, en tant qu'elle autorise une dérogation à la règle de droit commun, être interprétée strictement ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Paribas détenait 100 % du capital de la société Pasta Investment Ltd, créée et gérée par sa succursale hongkongaise ; que l'administration fiscale fait valoir, sans être sérieusement contredite, que la société Pasta Investment Ltd n'a supporté aucun impôt sur les bénéfices réalisés au titre des années 1994 et 1995 ; qu'ainsi, l'administration établit le caractère privilégié du régime fiscal de Hong Kong au sens de l'article 238 A précité du code général des impôts ; que, dès lors, la SA Paribas entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du I de l'article 209 B du même code à raison des bénéfices réalisés par la société Pasta Investment Ltd ;

5. Considérant, toutefois, que la SA BNP PARIBAS indique, sans être sérieusement contredite, que la société Pasta Investment Ltd exerçait une activité de gestion des devises asiatiques détenues par des entités du groupe Paribas et, à ce titre, intervenait sur le marché japonais ; que la requérante soutient que cette activité ne pouvait être réalisée depuis la France compte tenu, d'une part, des contraintes du décalage horaire au regard de la nécessité d'intervenir en temps réel sur le marché obligataire japonais et, d'autre part, du recours à un personnel implanté localement en raison de sa meilleure connaissance des marchés et des interlocuteurs de la zone asiatique ; que la société soutient également que le choix de l'implantation de cette filiale à Hong Kong s'explique par la nécessité de recourir au personnel de la succursale de Paribas qui y était d'ores et déjà établie, la société Pasta Investment Ltd n'ayant pas d'effectifs propres ; que si le ministre fait valoir qu'il ne serait pas prouvé que les clients de la société Pasta Investment Ltd n'étaient pas des résidents français, que les fonds collectés ne provenaient pas de France et que la requérante n'aurait pas présenté d'éléments relatifs à la nature et à l'objet des placements, cette argumentation apparaît, compte tenu de l'activité de la société Pasta Investment Ltd et des explications avancées par la SA BNP PARIBAS, sans incidence sur l'appréciation des finalités poursuivies par la SA Paribas en implantant sa filiale à Hong Kong ; qu'il résulte de ce qui précède que la SA BNP PARIBAS apporte la preuve qui lui incombe que les opérations de la société Pasta Investment Ltd n'avaient pas, pour la SA Paribas, principalement pour objet d'échapper à l'impôt français ; qu'il suit de là que l'administration a fait une inexacte application des dispositions de l'article 209 B du code général des impôts en assujettissant la SA Paribas à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle sur cet impôt au titre des exercices clos en 1995 et 1996, à raison des bénéfices réalisés par la société Pasta Investment Ltd ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la SA BNP PARIBAS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0304610 du 20 mai 2008 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La SA BNP PARIBAS est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle sur cet impôt auxquelles la SA Paribas a été assujettie au titre des exercices clos en 1995 et 1996, à raison des bénéfices réalisés par la société Pasta Investment Ltd.

''

''

''

''

2

N° 13VE00411


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00411
Date de la décision : 18/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Personnes morales et bénéfices imposables.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : PONS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-07-18;13ve00411 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award